{2012-JT-R58} Anthropologie cognitive et anthropotechnologie, Laboreal, Dec. 2012.
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- (4) située dynamiquement dans un monde où existent d’autres acteurs : ce monde et ces
autres acteurs participent à cette activité pour autant qu’ils sont pertinents pour l’organisation
interne de l’acteur considéré (voir plus haut).
- (5) à la fois individuelle et collective : cette participation d’autres acteurs à la situation
dynamique d’un acteur fait que l’activité individuelle est en fait individuelle-sociale, ou
encore individuelle-collective, et que l’activité collective est en fait sociale-individuelle, ou
encore constamment collectivisée et décollectivisée ;
- (6) techniquement constituée : le monde partagé par l’acteur considéré et d’autres acteurs
étant techniquement constitué, il en est de même de l’activité de cet acteur ;
- (7) cultivée : l’activité est située culturellement, c’est-à-dire non séparable d’une culture.
L’anthropologie culturelle montre en effet que si l’ensemble de l’humanité partage beaucoup
de choses, la différence culturelle affecte intimement chaque individu ;
- (8) vécue : une notion de conscience est nécessaire pour rendre compte de l’activité
humaine, celle de conscience préréflexive : la possibilité, pour l’acteur de désigner, mimer,
raconter et commenter son activité à un certain niveau, moyennant la réunion de conditions
favorables, accompagne à tout instant cette même activité et constitue une propriété
émergente du couplage structurel.
Ce qui différencie d’abord le programme de recherche ‘cours d’action’ d’autres
programmes de recherche en anthropologie cognitive, qui constituent avec lui un espace de
recherche sur l’activité humaine dans ses situations naturelles, donc culturelles,
d’exercice, ce sont les caractéristiques (2) et (8), qui conditionnent la possibilité de construire
des données valables sur l’activité humaine. En effet, la caractéristique (2), qui constitue
l’essentiel du paradigme cognitif de l’enaction, implique qu’un observateur extérieur est
incapable de construire des données sur ce qui est pertinent pour l’organisation interne à un
instant donné de l’acteur considéré, alors qu’inversement, la caractéristique (8) ouvre la
possibilité pour cet observateur extérieur – il faudrait alors parler plutôt d’observateur-
interlocuteur – de mettre l’acteur en condition de construire de telles données. D’où un
observatoire qui combine, selon les possibilités offertes par les situations étudiées et selon
l’empan temporel de l’étude, l’observation et l’enregistrement du comportement et le recueil
de verbalisations de la part des acteurs provoquées par les observateurs-interlocuteurs
(simultanées, légèrement différées, interruptives, en autoconfrontation, en remise en situation
par les traces), moyennant l’établissement, préalable et renouvelé constamment, de conditions
matérielles et temporelles, éthiques et socio-politiques de coopération des acteurs à l’étude de
leur activité. À l’exception de ces points (2) et (8), ces différents points sont partagés par