transplantation dentaire comme solution prothetique d`attente en

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TRANSPLANTATION DENTAIRE COMME
SOLUTION PROTHETIQUE D’ATTENTE EN AFRIQUE
P. KOUAME, D. AMANTCHI, K. SOUAGA
INTRODUCTION
L’autotransplantation ou autogreffe ou transplantation
autogène, est le transfert d’une dent d’une alvéole à
une autre fraîchement préparée ou aménagée chez le
même individu.
Selon BAUDET-POMMEL et coll. (1988) et ALHIMDANI (1986) (6), c’est une intervention qui nous
permet de substituer à une dent irrécupérable ou
absente, un dent du même sujet, sans avoir recours
aux solutions prothétiques.
Les transplantations d’organe dentaires ne sont que
rarement envisagées malgré l’élégance de cette méthode de remplacement dentaire.
En Afrique, les solutions prothétiques (prothèse fixée)
sont assez coûteuses et souvent hors de portée des
populations, l’autotransplantation permet non seulement d’éliminer une dent en malposition à même
d’induire des complications infectieuses mais aussi de
remplacer avantageusement une dent détruite.
ne et mettre la dent en sous-occlusion mais aussi pour
espérer une néovascularisation.
L’immobilisation de la dent était obtenue après sa mise
en place dans l’alvéole. Nous avons néanmoins mis
deux points de composite en mesial avec la 14 et en
distal avec la 16 pour assurer une meilleure fixité de la
dent transplantée.
La prescription médicale est classique (antibiotique,
anti-inflammatoire et bain de bouche).
Le composite est déposé deux semaines plus tard et la
cicatrisation gingivale est bonne.
Des radios rétroalvéolaires mensuelles sont demandées. Les tests de vitalité confirment trois ans après la
vitalité de la dent transplantée. Le parodonte est sain
avec une organisation tissulaire et osseuse homogène
autour de l’organe transplanté.
Le coût du traitement a été de 10.000 FCFA (FF 100).
Une prothèse résine une dent aurait coûtée FCFA
30.000 (FF 300)
Un bridge trois éléments FCFA 750.000 (7500).
L’implantologie FCFA 1 250 000 FCFA (FF 12500).
OBSERVATIONS
Cas clinique n°2
Cas clinique n°1
Mlle X, 25 ans , étudiante en médecine, consulte dans
le service de chirurgie buccale du centre de traitement
odonto-stomatologique, CHU Cocody (Côte d’Ivoire)
pour un inconfort lié à la présence en linguoposition de
la première prémolaire inférieure droite (44).
A l’examen clinique, on note une bonne hygiène
buccale, des soins conservateurs sur la 16, 15, 26, 38,
46, 47 et l’absence de la 17, 36, 37 et 48 ; la 44 en
version linguale est en dehors du plan d’occlusion et
gêne considérablement la langue.
La 15 est à l’état de racine.
Nous avons réalisé dans une même séance l’avulsion
de la 15 et son remplacement par la 44 ; l’autotransplantation a permis d’éliminer la 44 en malposition.
Au cours de l’intervention, nous n’avons pas eu besoin
d’aménager l’alvéole de la 15, la racine de celle-ci étant
plus grosse que la 44, nous avons simplement sectionné l’apex de la 44 afin de réduire la longueur de la raci*Service de chirurgie buccale CHU Côte d’Ivoire - BP 612 Abidjan 22.
Il concerne l’autotransplantation d’une canine permanente incluse à la place de la canine de lait chez un
homme de trente ans venu consulter pour une prothèse adjointe partielle résine de remplacement des 21, 22
absentes.
La persistance de la 63 nous a amené à faire des
investigations radiographiques qui nous ont permis de
découvrir une 23 incluse (remise en place par autotransplantation à la place de la 63). Deux ans plus tard,
la dent est toujours fonctionnelle sur l’arcade et ne
présente pas des signes de nécrose pulpaire.
Cas clinique n°3
Le troisième cas concerne la transplantation d’une dent
de sagesse inférieure enclavée en position oblique
mésiale en lieu et place de la deuxième molaire présentant un gros délabrement occlusal avec une atteinte
de la furcation et une lésion apicale chez un étudiant
de 26 ans.
Dans ce cas, la troisième molaire présentait une anato-
Odonto-Stomatologie Tropicale
Transplantation dentaire…
mie défavorable (racine en forme de bouchon de
champagne).
Nous avons néanmoins autotransplanté la 38 à la place de la 37 afin de garder temporairement un pouvoir
masticatoire acceptable à gauche. Deux ans après
l’intervention, le patient ne se plaint pas et a une bonne
mastication bilatérale.
Même si la plupart des auteurs affirment que le pronostic est moins bon pour les éléments dentaires avec la
racine complètement formée que pour les germes dentaires, il est souhaitable d’envisager l’autotransplantation même avec des racines complètement formées
ou des dents mâtures en malposition ou incluses.
Les résultats partiels obtenus sont très encourageants
et montrent que les dents sont bien intégrées chez le
négro-africain peut être à cause de son anatomie
osseuse assez favorable.
Dans notre démarche thérapeutique, nous rechercherons toujours la restitution “ad integrum” et il est souhaitable que la revascularisation pulpaire puisse se
faire, et qu’un ligament parodontal sain se mette en
place. A défaut, la consolidation de l’organe transplanté
se fera sous forme d’ankylose.
De nombreux cas cliniques ont été ainsi expérimentés
notamment les germes ou les dents de sagesse inférieures, enclavées ou incluses en lieu et place d’une
dent de six ans ou de douze ans délabrées ou à l’état
de racine.
Mais aussi des canines permanentes incluses en lieu
et place des canines temporaires.
DISCUSSION
Est-ce un échec ?
Si rien n’avait été fait, l’espace aurait persisté entraînant un déséquilibre occlusal et le germe /ou la dent
incluse ou enclavée aurait entraîné des complications
carieuses ou infectieuses dans son voisinage.
Si la rhyzalyse survient et entraîne la perte de la dent
transplantée cinq ou dix ans plus tard, c’est pourtant un
bénéfice pour le patient car l’échéance de la prothèse a
été repoussée d’autant.
Pour les auteurs, la fixité du transplant et son utilisation
normale par le patient constitue le succès de l’intervention ils comparent avec CUESTAS CARNERO (4)
l’intérêt fonctionnel de la transplantation de la troisième
molaire inférieure à la place de la première molaire,
comme une restitution d’un membre perdu.
Combien de fois n’avons-nous pas été confronté à
cette situation ?
Que se soient :
. des germes surnuméraires avec des dents permanentes délabrées,
. des canines de dent de sagesse donnant des signes
de rétention alors que la dent de six ans est irrécupérable,
. des agénésies des deux prémolaires à gauche avec
présence des prémolaires à droite.,
. des agénésies de plusieurs éléments dentaires dans
le même cadran.
L’autotransplantation utilisée sur des cas cliniques
comme solution prothétiques d’attente ou définitive ou
mieux comme une prothèse naturelle a permis d’éliminer une dent en malposition susceptible d’induire des
complications infectieuses dans son voisinage mais
aussi de remplacer avantageusement une dent détruite
sans préjudice financier pour le patient.
CONCLUSION
La transplantation réalisée au bon moment donne de
très bons résultats.
Il est intéressant chez nos petits patients présentant de
gros délabrements dentaires (dents de six ans notamment ou dent de douze ans) de penser à faire une
radiographie panoramique et une téléradiographie de
profil pour apprécier le germe de la dent de sage :
. dans sa maturation,
. dans son évolution,
. dans son orientation,
. dans sa localisation.
L’extraction précoce de la dent de six ans permet la
mésialisation de la dent de douze ans et la mise en
place correcte de la dent de sagesse ; à défaut on peut
proposer l’autotransplantation lorsque la dent de six
ans ne peut être conservée et que la dent de douze
ans est mâture (fermeture apicale). On élimine une
dent de sagesse en malposition, on remplace avanta-
Les moyens assez limités des patients nous font écarter la solution de la prothèse fixée pourtant bien indiquée dans la plupart des cas et les solutions orthodontiques jugées trop coûteuses et trop longues pour les
adultes. Il est fréquent de voir des prothèses adjointes
partielles en résine remplaçant une molaire ou une prémolaire (avec l’inconfort lié à la prothèse résine). Et
pourtant une germe d’une dent de sagesse ou d’une
prémolaire surnuméraire toute prête aurait pu servir.
Ne serait-ce que pour maintenir l’espace, ou mieux,
remplacer définitivement la dent extraite ou à extraire
et repousser l’échéance de la prothèse adjointe (étant
entendu que la prothèse conjointe est hors de la possibilité financière de nos populations).
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geusement une dent détruite et on évite des conséquences de la perte précoce d’une dent de six ans sur
le plan occlusal, orthodontique et parodontologique.
Chez l’adulte, lorsque la rhizagénèse est achevée, les
transplants donnent de moins bons résultats mais des
résultats tout de même ; il faut donc réaliser l’autotransplantation à visée prothétique. La dent pourra être
éventuellement dévitalisée à J+8 ou J+15 pour éviter
les conséquences de la nécrose pulpaire, si une néovascularisation n’est pas obtenue.
Photo n°1 : Transplantation : cas clinique n°1
Photo n°2 : Transplantation : cas clinique n°2
Photo n°3 : Transplantation : cas clinique n°3
RESUME
Devant les cas de destruction précoce des premières molaires permanentes et la fréquence des rétentions
des dents de sagesse chez le négro africain et devant la fréquence des prémolaires surnuméraires à extraire
pour favoriser l’évolution des canines permanentes, les auteurs proposent de tenter la réimplantation des
dents extraites lorsque leur anatomie le permet pour fermer les édentements des patients.
Les cas cliniques présentés dans ce travail permettent de faire reculer l’échéance de la prothèse.
Mots-clés : Autotransplantation, greffes dentaires, prothèse naturelle.
SUMMARY
Dental graft as an alternative of prothesis use in Africa
In cases of early destruction of first permanent molars and retention of third molars in black Africans. And
increased frequency of extra premolars and their extraction with a view to favour permanent canine
development.
The authors attempt the reimplantation of the extracted teeth when anatomically feasible.
The clinical cases presented in this work indicate a possibility of avoiding use of protheses by adopting the
above procedures.
Key-words : Autotransplantation, dental graft, natural prothesis.
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