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vi Préface
Il s’étonnait de souffrir autant. Profondément éloignée des
catégories chrétiennes de la rédemption et de la grâce, étrangère
à la notion même de liberté et de pardon, sa vision du monde
en acquérait quelque chose de mécanique et d’impitoyable. [. . . ]
La nuit [il]rêvait d’espaces abstraits, recouverts de neige.
M. Houellebecq (1998). Les particules élémentaires.
L’optimisation numérique a ceci d’amusant que toute personne ayant une forma-
tion minimale en calcul scientifique et s’initiant à la discipline s’estime rapidement
suffisamment compétente pour introduire de nouveaux algorithmes ! Il faut dire que le
problème qui se pose en optimisation numérique différentiable sans contrainte renvoie
à une image familière, celle où il s’agit de descendre au plus bas dans une vallée, et
y trouver un chemin semble bien être à la portée de tous. Prendre en compte des
contraintes d’inégalité ne paraît guère plus difficile puisque cela revient à restreindre
la descente à un enclos à la frontière bien définie. Il n’est donc pas rare de rencontrer
des ingénieurs ou des chercheurs bricolant de « nouveaux » algorithmes aux propriétés
incertaines, à la convergence aléatoire, au temps de calcul démesuré, mais qui satis-
font pleinement leurs auteurs, . . . , jusqu’au jour où ceux-ci se rendent compte que le
problème n’est peut-être pas si simple, que leur algorithme a bien quelques faiblesses
rédhibitoires et qu’il serait sage de consulter un spécialiste. Il est donc sans doute
utile de rappeler ici, qu’il existe en effet une petite communauté de chercheurs dont
c’est le métier d’étudier et d’améliorer l’algorithmique en optimisation, ayant leurs
revues spécialisées, leurs vedettes, leurs maîtres vénérés et ne manquant pas leurs
conférences internationales régulières. Il reste probablement beaucoup d’algorithmes
à découvrir en optimisation et certainement beaucoup doivent être mieux compris,
rendus plus efficaces ou adaptés à des situations nouvelles ou particulières. Ceci est
d’autant plus vrai qu’aucun algorithme n’est entièrement satisfaisant, entraînant des
déceptions que l’on cherche naturellement à adoucir par de nouveaux remèdes, ou
mieux, par une nouvelle interprétation des algorithmes et de leur fondement permet-
tant leur amélioration. L’exploration du champ des possibles est donc souhaitable,
pourvu que ceci ne conduise pas à raviver de vieilles recettes périmées. La partie
numérique de cet ouvrage rend compte des principales solutions que les numériciens
ont apportées à quelques problèmes classiques de l’optimisation différentiable. Les
impasses et les écueils à éviter y sont aussi décrits. Nous espérons ainsi être utiles à
ceux qui se sentent une âme d’algorithmicien.
Si un objectif important de cet ouvrage est l’algorithmique en optimisation dif-
férentiable, le chemin pour y arriver pourra paraître long à certains. Les méthodes
numériques efficaces reposent en effet sur une bonne compréhension de la structure
et des propriétés des problèmes d’optimisation qu’elles cherchent à résoudre ; c’est
une raison suffisante pour étudier ces derniers. Par ailleurs, même si la démonstration
de la convergence d’un algorithme ne doit pas être la motivation première lors de sa
conception, les algorithmes ne sont vraiment acceptés que si l’on parvient à en décrire
les propriétés de convergence globale et locale, voire de complexité. Les numériciens
y consacrent une grande partie de leurs efforts. Ces différents aspects requièrent le
développement d’une théorie solide, ce qui explique la première partie du sous-titre
de cet ouvrage.