Le vaccin de la rougeole pour traiter le mésothéliome ?

72 | La Lettre du Pneumologue Vol. XVI - n° 2 - mars-avril 2013
ONCO-PNEUMOLOGIE
Le vaccin de la rougeole
pour traiter le mésothéliome ?
Measles virus vaccine to cure mesothelioma?
M. Grégoire*, N. Boisgerault*, J.B. Guillerme*, J.F. Fonteneau*
L
e mésothéliome pleural malin (MPM), ou
cancer primitif de la plèvre, est un cancer très
agressif au pronostic globalement défavorable.
Son facteur étiologique principal est une exposition
antérieure à l’amiante. Dans la majorité des cas, son
diagnostic est posé à un stade avancé de la maladie.
La médiane de survie des patients est généralement
inférieure à 1 an, avec une survie globale à 5 ans infé-
rieure à 5 %. On recense entre 800 et 1 000 cas de
MPM par an en France, avec une incidence d’environ
16 cas par million d’habitants et par an (1). Une
latence longue (30 à 40 ans) entre l’exposition à
l’amiante et l’apparition de la maladie est caracté-
ristique de ce cancer et laisse prévoir en France un
pic d’incidence du MPM vers les années 2020 (2).
Les moyens thérapeutiques du MPM sont encore
limités (3, 4). Une chimiothérapie de première ligne
(cisplatine-pémétrexed) ne permet qu’une augmen-
tation d’environ 3 mois de la survie médiane (5). La
radiothérapie, la chirurgie ou les traitements multi-
modaux ne sont pas validés à ce jour dans le MPM,
c’est pourquoi de nouveaux schémas thérapeutiques,
telle l’immunothérapie, seule ou combinée aux
traitements usuels, sont à explorer (6). Ainsi, des
stratégies visant à stimuler le système immunitaire
dans le but d’induire un rejet de la tumeur semblent
représenter une alternative ou un complément théra-
peutique favorable.
Chimiothérapie et activation
de la réponse immunitaire
Plusieurs études de thérapie des cancers sont
actuellement développées, fondées sur une notion
nouvelle de l’implication de la réponse immunitaire
après un traitement par chimiothérapie et/ou radio-
thérapie (7). Ainsi, certains agents de chimiothérapie,
en particulier certaines anthracyclines (8), ont été
décrits comme induisant une immunoréaction spéci-
fique, en plus de l’induction d’une mort cellulaire,
généralement par apoptose. Cette immunoréac-
tion anticancéreuse présente alors un intérêt tout
particulier pour l’élimination de cellules tumorales
résiduelles (résistantes à la chimiothérapie) ou pour
maintenir en état de dormance des micrométastases
éventuelles. Cette activation de la réponse immuni-
taire est liée à l’implication de cellules présentatrices
d’antigènes, en l’occurrence les cellules dendritiques
(DC), dont le rôle est d’activer une réponse immu-
nitaire dirigée contre les cellules cancéreuses. En
effet, ces DC ont pour particularité de présenter les
antigènes associés aux tumeurs, de manière à activer
une réponse antitumorale spécifique (lymphocytes T
cytotoxiques CD8+). Ces antigènes tumoraux sont
apportés par les cellules cancéreuses elles-mêmes,
mortes par nécrose ou apoptose, faisant suite aux
différents traitements par certaines chimiothérapies
ou par une radiothérapie (9).
Toutefois, cette acquisition d’antigènes tumoraux
par les DC ne serait pas suffisante pour activer les
réponses lymphocytaires. Les cellules cancéreuses
doivent, en plus, libérer des signaux de danger
(Damage-Associated Molecular Patterns [DAMP])
lors de leur mort cellulaire (figure 1), signaux qui
vont activer les DC. Plusieurs DAMP ont été iden-
tifiés, comme le High-Mobility Group protein B-1
(HMGB1), l’interleukine 1β (IL-1β), les protéines de
choc thermique HSP70 et gp96, mais aussi la calréti-
culine exprimée à la surface des cellules en apoptose.
A contrario, une apoptose des cellules tumorales
sans production de DAMP conduit plutôt les DC à
induire des phénomènes de tolérance à l’antigène.
Il semble donc intéressant de développer des trai-
tements qui favorisent une mort immunogène des
cellules cancéreuses caractérisée par la libération
* Inserm, unité 892, Nantes ; CNRS,
6299, Nantes ; université de Nantes.
La Lettre du Pneumologue Vol. XVI - n° 2 - mars-avril 2013 | 73
Points forts
de ces DAMP. Une autre catégorie de signaux molé-
culaires capables d’activer les fonctions de présen-
tation d’antigènes des DC est également connue :
les signaux moléculaires associés aux pathogènes
(Pathogen Associated Molecular Patterns [PAMP])
[10]. En effet, lors d’une infection par des bactéries,
des virus ou des parasites, les PAMP qui accom-
pagnent l’infection activent particulièrement les
DC, par l’intermédiaire de récepteurs spécifi ques,
notamment les Toll-Like Receptors (TLR). Différentes
molécules de danger, d’origine exogène, peuvent ainsi
être produites et/ou libérées pendant l’infection et
après la mort des cellules tumorales infectées. Ce
contexte immunogène, associé à la libération ou
à la présentation d’antigènes tumoraux, participe-
rait alors à la promotion de la réponse immunitaire
spécifi que.
Mésothéliome
et immunothérapie
Bien que le MPM ne soit pas reconnu comme un
cancer “immunogène”, comme peut l’être par
exemple le mélanome, plusieurs travaux rapportent
des réponses immunitaires humorales et cellulaires
associées au mésothéliome. Ainsi, des preuves
existent de la mise en place d’une réponse immu-
nitaire dirigée contre le MPM, puisqu’une réponse par
expression d’anticorps a été mise en évidence chez
certains patients (11), dont le pronostic a semblé
plutôt favorable. De même, une corrélation entre
un pronostic favorable du MPM et une infi ltration
lymphocytaire importante de la tumeur a été établie
et un cas de régression spontanée associée à une
infi ltration par des lymphocytes a été décrit (12).
»
La virothérapie antitumorale propose une approche thérapeutique prometteuse puisqu’elle permet
de cibler les cellules tumorales sans atteindre les cellules saines et d’induire une activation du système
immunitaire qui pourrait compléter son efficacité cytotoxique.
»
Le vaccin contre la rougeole, utilisé depuis plus de 60 ans sans avoir montré d’effets délétères ni de
modifications génomiques, se prête principalement aux tumeurs localisées, comme peuvent l’être les
cancers de l’ovaire ou le mésothéliome.
»
Les stratégies sont immédiatement applicables pour le mésothéliome pleural malin, et un essai vient
d’être engagé à la Mayo Clinic.
»
Le mésothéliome reste généralement limité à la cavité pleurale (et/ou péritonéale), ce qui en fait, comme
le cancer de l’ovaire, une cible thérapeutique parfaitement adaptée à ce type d’approche par virothérapie.
Mots-clés
Virothérapie
Mésothéliome
Vaccin contre
la rougeole
Thérapie ciblée
Highlights
»
The measles vaccine
propose promising thera-
peutic approaches because
of the specifi c cytotoxicity to
tumor cells without reaching
the healthy ones, and the acti-
vation of the immune system,
which could complete its effi -
ciency.
»
The measles vaccine, used
for more than 60 years without
having shown neither toxic
effects nor genomic modifi ca-
tions, is ideal for intracavity
vaccines to reach localized
tumor cells, as the ovarian
cancer or the mesothelioma.
»
The strategies are immedi-
ately applicable, as demon-
strated by the clinical trials
engaged at the Mayo Clinic
Institute.
»
Mesothelioma remains
limited to the pleural (and/or
peritoneal) cavity that makes it,
as the ovarian cancer, a thera-
peutic target well adapted to
measles virotherapy.
Keywords
Virotherapy
Mesothelioma
Measles vaccine
Targeted therapy
Figure 1. Libéra-
tion des signaux de
danger endogènes
(DAMP) lors de la
mort cellulaire.
Les DAMP poten-
tiels sont retenus
à l’intérieur des
cellules vivantes
et des corps apop-
totiques. Lors de la
nécrose ou d’autres
types de mort
cellulaire impli-
quant une perte de
l’intégrité membra-
naire, ces facteurs
sont libérés dans
l’environnement
et interviennent
alors dans l’activa-
tion des cellules de
l’immunité innée.
En cas d’apoptose
à caractère immu-
nogène, certains de
ces DAMP seraient
ainsi libérés dans
le milieu extra-
cellulaire et
permettraient
l’activation de la
réponse immuni-
taire.
Cellule vivante
Apoptose
Rétention
des DAMP
Ignorance
Réponse tolérogène
Activation
des cellules
immunitaites
Libération
des DAMP
Signaux de danger
intracellulaires
Mort cellulaire
Apoptose
immunogène
Nécrose
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ONCO-PNEUMOLOGIE Le vaccin de la rougeole pour traiter le mésothéliome?
C’est pourquoi, suite à nos travaux réalisés in vitro,
une stratégie thérapeutique avait été proposée dès
le début des années 2000, afin de traiter le MPM par
une vaccination fondée sur l’injection de DC auto-
logues activées et chargées en cellules cancéreuses
mortes par apoptose, et exprimant les signaux de
danger (13). Cette immunothérapie antitumorale
associée à un traitement par chimiothérapie déve-
loppée pour le mésothéliome a donné des résultats
encourageants dans une étude clinique de phase I,
réalisée par une équipe hollandaise (14). Une suite à
cette première étude est actuellement proposée par
l’équipe de Joachim Aerts à Rotterdam (voir www.
clinicaltrials.gov avec mots-clés : mesothelioma
et dendritic, étude NCT 00280982). Les résultats
cliniques renforcent l’intérêt de mettre en place des
stratégies impliquant une chimiothérapie associée
à la vaccination.
Ainsi, les nouvelles stratégies fondées sur les
modalités d’induction particulière de mort immu-
nogène des cellules tumorales deviennent une
réelle opportunité dans le traitement de cancers
résistants aux thérapies usuelles, comme l’est le
mésothéliome (15).
La virothérapie antitumorale
La virothérapie antitumorale apparaît depuis peu
comme une alternative crédible aux thérapies
conventionnelles. Des observations datant des
années 1950 avaient pourtant déjà montré que
certains virus présentaient des propriétés onco-
lytiques, c’est-à-dire une capacité à détruire les
cellules tumorales de façon spécifique. Mais c’est à
la suite de l’amélioration des connaissances sur la
biologie des virus et des progrès majeurs concernant
la production des vecteurs viraux pour la thérapie
génique que l’utilisation de virus en thérapie anti-
tumorale a pu être envisagée sérieusement (16).
L’utilisation de virus réplicatifs comme traitement
antitumoral repose sur l’observation que certains
virus infectent et tuent par apoptose de façon plus
spécifique les cellules tumorales. À l’inverse, les
cellules normales non transformées demeurent,
elles, peu sensibles, voire totalement résistantes
à l’infection par ces “virus oncolytiques”. Ces virus
exploitent en fait des aberrations cellulaires appa-
raissant lors de la transformation tumorale. Les
virus oncolytiques sont soit des virus présentant
une capacité naturelle à se répliquer préférentiel-
lement dans les cellules tumorales parce qu’ils ont
été adaptés à la culture sur ce type de cellules, soit
des virus modifiés génétiquement pour disposer de
cette propriété.
De nombreux virus présentent des propriétés onco-
lytiques (16). Très souvent, ces virus sont capables
de cibler plus spécifiquement les cellules tumorales
de façon naturelle, c’est-à-dire sans nécessiter de
modifications complexes. L’activité oncolytique
du Newcastle Disease Virus (NDV) a été démon-
trée contre plusieurs types de tumeurs humaines
(tableau). Le Vesicular Stomatitis Virus (VSV) est
un virus enveloppé à ARN, largement étudié pour
son potentiel oncolytique contre différents types de
tumeurs. Lactivité oncolytique des réovirus, virus à
ARN double brin segmenté, a été démontrée contre
de nombreux types de cancers, dont les cancers
du sein, les lymphomes et les cancers ovariens ou
colorectaux. D’autres virus à ARN présentent un
potentiel oncolytique intéressant. C’est par exemple
le cas de souches atténuées du virus des oreillons, de
certains poliovirus ou du virus de la rougeole dont
les propriétés antitumorales spécifiques semblent
comparables à celles des autres virus à ARN décrits
ci-dessus.
Le vaccin contre la rougeole,
une réelle opportunité dans
la virothérapie antitumorale
Le virus de la rougeole (Measles Virus [MV]) est un
virus enveloppé de la famille des Paramyxovirus, genre
Morbillivirus. Son génome est constitué d’un ARN
simple brin négatif non segmenté contenu dans une
capside de forme hélicoïdale. L’isolation de la souche
Edmonston en 1954 a permis de dériver 2 souches
Tableau. Exemples de vaccins viraux utilisés en traitements antitumoraux.
Virus Principaux cancers ciblés Références
ADN
Adénovirus Tumeurs solides
Pesonen et al., Mol Pharm
2011;8(1):12-28
Herpès (HSV) Gioblastome, mélanome,
hépatocarcinome
Campadelli-Fiume et al. Rev
Med Virol 2011;21(4):213-26
Vaccine Tumeurs solides
Guse et al. Expert Opin Biol
Ther 2011;11(5):595-608
ARN
Rougeole Myélome multiple, carcinome
ovarien, mésothéliome
Galanis. Clin Pharmacol Ther
2010;88(5):620-5
Vesicular Stomatitis
Virus
(VSV)
Hépatocarcinome, mélanome
Barber. Oncogene
2005;24(52):7710-9
Réovirus Gliome, cancer ORL, autres
tumeurs solides
Kelly et al. Expert Opin Biol
Ther 2009;9(7):817-30
Newcastle Disease
Virus
(NDV)
Cancers métastatiques,
gliobastome
Lechet et al. Expert Rev
Vaccines 2010;9(11):1275-302
La Lettre du Pneumologue Vol. XVI - n° 2 - mars-avril 2013 | 75
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atténuées du MV : Edmonston A et Edmonston B.
Par la suite, d’autres souches plus atténuées ont pu
être dérivées de ces virus, dont la souche Schwarz/
Moraten. La souche Schwarz présente de nombreux
avantages qui justifient son usage dans le cadre de la
vaccination de jeunes enfants. Elle induit notamment
des réponses immunitaires cellulaires et humorales
à long terme et présente une stabilité génétique
importante, puisqu’aucune réversion vers une forme
pathogène n’a jamais été observée (17).
La souche sauvage du MV utilise comme récepteur
d’entrée la Signaling Lymphocyte-Activation Mole-
cule (SLAM), aussi appelée CD150. CD150/SLAM
est exprimée par les thymocytes immatures, mais
principalement par certaines cellules immunitaires
activées telles que les DC, les monocytes/macro-
phages et certaines populations de lymphocytes T et
B. La souche sauvage du MV présente un tropisme
particulier pour ces cellules dans lesquelles il proli-
fère activement. Ces cellules seraient par ailleurs
impliquées dans la propagation du virus dans
l’organisme. Les souches atténuées de Schwarz,
dérivées de la souche Edmonston, utilisent quant
à elles 2 récepteurs d’entrée distincts et présentent
donc un tropisme différent de la souche sauvage.
Ces souches ont faiblement conservé la capacité de
cibler la molécule CD150/SLAM ; elles sont surtout
capables d’utiliser la molécule CD46 comme récep-
teur principal d’entrée dans les cellules. C’est cette
propriété particulière qui pourrait être exploitée en
virothérapie antitumorale.
La molécule CD46 est connue pour protéger les
cellules des attaques par le complément en parti-
cipant à l’inactivation des composants C3b et C4b
grâce à ses 4 domaines CCP (Complement Control
Protein repeat). Dans de nombreux types de cancer,
et notamment le MPM, on observe une surex-
pression du CD46 à la surface des cellules cancé-
reuses, probablement due à la pression de sélection
qu’exercent les attaques par le complément du
patient. La sur expression de CD46 par certaines
cellules tumorales les rend plus susceptibles à
l’infection par les souches vaccinales atténuées
du vaccin rougeole que les cellules saines. Ainsi,
de nombreuses études précliniques ont montré
que les souches atténuées du MV capables de
cibler CD46 présentent effectivement une forte
spécificité envers une grande variété de cellules
tumorales humaines, alors que les cellules saines
issues des mêmes tissus restent, elles, peu ou non
sensibles à l’infection. L’activité oncolytique du
MV a été démontrée in vitro et dans des modèles
de xénogreffe de cellules tumorales humaines
chez des souris immunodéficientes contre des
cellules de lymphome, de myélome multiple,
de glioblastome multiforme, de carcinomes de
l’ovaire et du sein ou de cancer de la prostate.
Notre équipe, en collaboration avec celle du Dr F.
Tanguy, de l’Institut Pasteur, Paris, a montré que
cette approche pourrait être développée pour le
MPM, puisque de nombreuses lignées cellulaires
de mésothéliome surexpriment la molécule CD46
et sont donc sensibles à l’infection par la souche
Schwarz (travaux en cours). Les cellules mésothé-
liales normales de la plèvre ne sont pas sensibles à
l’infection par le virus atténué, car elles expriment
faiblement la molécule CD46.
Le mésothéliome
et la virothérapie antitumorale
par le vaccin contre la rougeole
L’influence du système immunitaire sur l’efficacité
ou sur l’échec de la virothérapie antitumorale est
parfois controversée (16). En effet, l’impact négatif
de l’immunité antivirale sur l’activité antitumorale
des virus oncolytiques a été noté dans plusieurs
études. Les anticorps ou les cellules phagocytaires,
principalement les macrophages, sont notamment
capables d’inhiber de façon importante à la fois la
propagation de ces virus dans l’organisme mais
aussi leurs capacités à infecter les cellules tumo-
rales. À l’inverse, de nombreux travaux, dont les
nôtres (18), ont montré que le système immunitaire
pouvait aussi agir en synergie avec les virus oncoly-
tiques, les effets antitumoraux étant plus importants
sur les animaux immunocompétents (19).
Les travaux actuels visent donc à définir l’impact
réel du système immunitaire sur l’efficacité de la
virothérapie antitumorale afin d’améliorer son
développement en tant que stratégie thérapeutique
alternative. Différents mécanismes de l’immunité
participent à l’inhibition de l’activité des virus onco-
lytiques, notamment dans les cas où ces virus sont
injectés de façon systémique in vivo (figure 2, p. 76).
C’est pourquoi le traitement du mésothéliome par le
vaccin contre la rougeole présente un intérêt certain.
En effet, la cavité pleurale, lieu de développement de
la tumeur au niveau de la plèvre et de l’accumulation
des cellules cancéreuses dans le liquide pleural, peut
être un lieu d’injection du vaccin. À ce niveau, les
cellules cancéreuses sont en contact direct avec le
virus atténué, ce dernier serait donc partiellement et
temporairement protégé des anticorps neutralisants
ou de la réponse immunitaire antivirale.
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ONCO-PNEUMOLOGIE Le vaccin de la rougeole pour traiter le mésothéliome?
Par ailleurs, l’infection virale des cellules tumorales
pourrait modifier favorablement le microenvironne-
ment tumoral (ici, la cavité pleurale) et, ainsi favo-
riser l’induction d’une réponse immunitaire dirigée
contre les antigènes tumoraux. En effet, notre équipe
a montré que l’infection des cellules tumorales de
MPM provoquait une apoptose immunogène (18).
L’infection virale et l’induction de la mort cellulaire
sont également associées à la libération de DAMP et
de PAMP. Des travaux sur les virus influenza, le virus
de l’immunodéficience humaine 1 ou les adénovirus
(ADV) ont, par exemple, montré que ces virus provo-
quaient la libération de la molécule HMGB1 par les
cellules infectées. Dans le cadre des virus oncoly-
tiques, quelques études ont par ailleurs démontré
que l’infection spécifique de cellules tumorales
induisait la libération de HMGB1 et était souvent
associée à l’activation d’une réponse immunitaire
antitumorale. En effet, différentes molécules de
danger (DAMP) sont ainsi produites et/ou libé-
rées pendant l’infection virale et après la mort des
cellules tumorales infectées, ce qui active les DC
et les lymphocytes T spécifiques d’antigènes asso-
ciés à la tumeur (18). Nous venons de caractériser
certains de ces DAMP exprimés par les cellules de
mésothéliome infectées, par exemple les protéines
de choc thermique (HSP70), la calréticuline, HMGB1
et IL-1β (N. Boisgerault et al., travaux en cours). De
plus, nous venons d’observer que l’ARN simple brin
du virus présent dans les cellules tumorales infectées
constitue un PAMP qui va renforcer l’activation d’une
population particulière de DC en se liant au TLR 7.
Ce TLR 7 est porté par un type bien particulier de
DC, les DC plasmacytoïdes (pDC), et sa stimulation
conduit à l’activation et à la maturation des pDC
(20). Ces pDC sont spécialisées dans les réponses
immunitaires antivirales et produisent en réponse
aux DAMP viraux de très grandes quantités d’inter-
férons de type I (α, β et ω). Chez la souris, l’injection
de DAMP ligands de TLR 7 et 8 dans des tumeurs
provoquent de fortes réponses immunitaires antitu-
morales, ce qui conduit à penser que le recrutement
Figure 2. Neutralisation des virus oncolytiques au sein de l’organisme. L’injection systémique de virus oncolytiques se heurte à l’absorption des parti-
cules virales par les cellules hépatiques et à leur neutralisation dans la circulation sanguine par le complément, la phagocytose et les anticorps (en cas
de préimmunité due à la vaccination ou à une immunisation préalable). Au sein du microenvironnement tumoral, la propagation des virus est bloquée
par les composants de la matrice extracellulaire et la production de cytokines antivirales par les cellules immunitaires infiltrées (révisé d’après Parato
KA, Senger D, Forsyth PA, Bell JC. Nat Rev Cancer 2005;5(12):965-76).
Injection
systémique
Absorption
par le foie
Circulation Microenvironnement tumoral
Anticorps neutralisants Leucocytes
infiltrés Pression interstitielle
Complément
Internalisation
Matrice
extracellulaire
Cytokines
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