Conseil
d’Évaluation
des Technologies
de la Santé
du Québec
Rapport présenté au
Ministre de la Recherche, de la Science
et de la Technologie du Québec
Conseil d’évaluation des
technologies de la santé
du Québec
Rapport –Juin 1999 LE DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL
(CETS 99-2 RF)
Toute information sur ce rapport ou sur tout autre rapport produit par le Conseil d'évaluation des techno-
logies de la santé peut être obtenue en communiquant avec la permanence de l’organisme :
Conseil d’évaluation des technologies de la santé
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Dépôt légal - Bibliothèque nationale du Québec, 1999
- Bibliothèque nationale du Canada
ISBN 2-550-34595-9
Comment citer ce document :
Conseil d’évaluation des technologies de la santé du Québec. Le dépistage du cancer colorectal. (CETS
99-2 RF) Montréal: CETS, 1999, xx-146 p.
Conseil d’évaluation des
technologies de la santé
du Québec
LE MANDAT
Promouvoir et supporter l’évaluation des technologies de
la santé, en diffuser les résultats et favoriser leur utilisation
dans les décisions de tous les intervenants impliqués dans
la diffusion de ces technologies.
Conseiller le ministre sur les questions concernant
l’introduction, la diffusion et l’utilisation des technologies
de la santé et, à cette fin, fournir des avis fondés sur
l’évaluation de leur efficacité, sécurité, coût, leurs impacts
sur le système de santé ainsi que leurs implications écono-
miques, éthiques et sociales.
LES MEMBRES DU CONSEIL
Renaldo N. Battista, MD
Épidémiologiste
Roger Jacob
Ingénieur biomédical
Denise Leclerc
Pharmacienne
Jean-Marie Moutquin, MD
Gynéco-obstétricien
Suzanne Nootens
Juriste
Guy Rocher
Sociologue
Le Conseil est normalement formé de douze membres et est donc
en attente de nomination de six nouveaux membres par le Conseil
des ministres du Gouvernement du Québec.
DIRECTEUR
Jean-Marie R. Lance
LE DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL
Le cancer colorectal figure parmi les principales causes de
mortalité par cancer tant au Québec que dans d’autres pays
industrialisés. Dans le cadre de ses travaux, le Comité
consultatif sur le cancer du Québec a reconnu en 1997
l’importance de cette problématique. S’il ne pouvait alaors
recommander le dépistage systématique du cancer colorec-
tal, le Comité recommandait toutefois que le Conseil
d’évaluation des technologies de la santé procède à un
examen approfondi de l’efficacité et de l’efficience de cette
intervention.
Le présent rapport rappelle l’épidémiologie et la carcino-
genèse du cancer colorectal avant de faire le point sur les
preuves de l’efficacité de différentes stratégies de dépistage
tant des lésions précancéreuses que des lésions malignes
encore précoces. Il détaille différentes modélisations visant
à estimer le rapport coût-efficacité de diverses stratégies de
dépistage et brosse le tableau du cancer colorectal au Qué-
bec.
En conclusion, le Conseil est d’avis qu’un programme de
dépistage du cancer colorectal permettrait de réduire de
façon significative la mortalité due à ce cancer. Compte
tenu des preuves existantes, un tel programme viserait les
personnes asymptomatiques de 50 à 79 ans et s’articulerait
sur un dépistage bisannuel basé sur la détection du sang
fécal occulte. Un seul résultat positif entraînerait une invi-
tation à une entrevue et à un examen médical suivis d’une
coloscopie diagnostique et, le cas échéant, thérapeutique.
Le choix de la modalité primaire de dépistage reste préli-
minaire puisque des recherches en cours explorent le re-
cours immédiat à la coloscopie ou au lavement baryté en
double contraste.
Toutefois, autant la mise sur pied du programme proposé
que l’exploration d’autres stratégies de dépistage devraient
être assujetties à diverses conditions préalables, dont la
mise sur pied d’études de faisabilité et d’essais pilotes pour
valider les paramètres opérationnels québécois. La
conduite de ces études exigera aussi plus de soutien à la
recherche.
En diffusant cet avis, le CETS souhaite apporter le meilleur
éclairage possible aux décideurs concernés par cette pro-
blématique à différents niveaux du réseau de la santé et
des services sociaux du Québec.
Renaldo N. Battista
Président
LE DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL i
Résumé
RÉSUMÉ
Introduction
Le cancer colorectal figure parmi les principales
causes de mortalité par cancer dans les pays in-
dustrialisés. Le Québec n’échappe pas à cette
tendance générale. Dans le cadre des travaux du
Comité consultatif sur le cancer, mis sur pied par
le ministère de la Santé et des Services sociaux
du Québec pour examiner toute la problématique
du cancer et les moyens de le contrer, le cancer
colorectal a bien sûr fait l’objet d’une attention
particulière en raison de son importance. Dans
son rapport de 1997, le Comité ne pouvait re-
commander, pour l’immédiat, le développement
d’activités de dépistage systématique en raison
notamment de l’absence de données probantes.
Toutefois, il recommandait que le Conseil
d’évaluation des technologies de la santé du
Québec procède à un examen approfondi de
l’efficacité et de l’efficience du dépistage du
cancer colorectal quant à la réduction de la mor-
talité qu’il provoque.
Comme le Conseil avait déjà amorcé certains
travaux sur l’efficacité comparative de différen-
tes techniques diagnostiques des lésions colorec-
tales et décidé d’élargir cette problématique à
leur impact même sur la prévention de la morta-
lité, il a pu prendre en charge dans les meilleurs
délais, cette requête du Comité consultatif sur le
cancer. Le présent rapport fait le point sur les
preuves de l’efficacité de différentes stratégies
pour identifier et traiter tant les lésions précancé-
reuses que les lésions malignes encore précoces.
Il appuie son examen sur une revue approfondie
et critique de la littérature, en donnant au préala-
ble des informations de base sur l’épidémiologie
et la carcinogenèse du cancer colorectal. Une
attention particulière est aussi apportée aux dif-
férents efforts de modélisation pour déterminer
tant l’efficacité que le rapport coût-efficacité de
diverses stratégies de dépistage. Enfin, après
avoir décrit la situation du cancer colorectal au
Québec et exploré différents scénarios, le docu-
ment formule des conclusions et des recomman-
dations.
Le présent rapport se concentre spécifiquement
sur le cancer chez les personnes asymptomati-
ques à risque moyen, puisqu’il est supposé que
les personnes dont le risque est plus élevé (fac-
teurs familiaux et génétiques) sont déjà prises en
charge par d’autres mécanismes. Toutefois, dans
le cadre de travaux généraux sur le transfert des
résultats de recherche en génétique humaine à la
pratique clinique, le Conseil a déjà décidé de
préparer un rapport sur la pertinence d’introduire
un dépistage fondé sur la susceptibilité génétique
au cancer colorectal.
Le cancer colorectal
Au Québec en 1998, les nouveaux cas de cancer
colorectal ont été estimés à 4 200, soit 2 200 cas
chez les hommes et 2 000 chez les femmes. Le
cancer colorectal occupe le troisième rang de
l’incidence des cancers, chez les hommes après
les cancers du poumon et de la prostate, et chez
les femmes, après les cancers du sein et du pou-
mon. Le taux comparatif d’incidence (pour
100 000 personnes) du cancer colorectal est plus
élevé chez les hommes (62) que chez les femmes
(41). L’incidence du cancer du côlon est plus
élevée que celle du cancer du rectum d’environ
1,6 fois chez les hommes et d’environ 2,3 chez
les femmes.
Les décès par cancer colorectal ont été estimés à
1 990 au Québec en 1998: 1 000 chez les hom-
mes et 990 chez les femmes. Par ces nombres, le
cancer colorectal se classe au deuxième rang de
la mortalité chez les hommes, au même rang que
le cancer de la prostate, après le cancer du pou-
mon. Il se classe au troisième rang chez les fem-
mes, après les cancers du sein et du poumon. Le
taux comparatif de mortalité (pour 100 000 per-
LE DÉPISTAGE DU CANCER COLORECTAL ii
Résumé
sonnes) est plus élevé chez les hommes (30) que
chez les femmes (19).
D’après son ratio de 0,47 pour le nombre de dé-
cès au nombre de nouveaux cas, le cancer colo-
rectal présente un pronostic passable. Il se dis-
tingue autant du pronostic favorable des cancers
de la prostate (ratio de 0,25) et du sein (ratio de
0,34) que du pronostic sombre des cancers du
poumon dont le ratio se chiffre à 0,81.
Au chapitre des années potentielles de vie per-
dues à cause du cancer, le cancer colorectal se
place au troisième rang avec près de 10 %. Il est
précédé par les cancers du poumon et du sein et
devance le cancer de la prostate qui occupe le
sixième rang.
Pour l’ensemble des cas de cancer colorectal, la
survie relative passe d’environ 72 % après 1 an à
environ 52 % à 5 ans. La survie est fortement
reliée aux stades des lésions malignes au mo-
ment du traitement. Aux stades précoces, lorsque
les lésions sont bien circonscrites, la survie est
d’environ 90 % à 5 ans; elle est inférieure à 5 %
pour les cas de stades tardifs, lorsque les métas-
tases sont disséminées.
Les personnes atteintes de cancer colorectal de-
meurent très souvent asymptomatiques durant les
premiers stades de la maladie. Il s’ensuit que les
cibles du dépistage sont les personnes dont les
cancers sont encore aux premiers stades alors
que la survie est la plus élevée.
Les facteurs de risque d’être atteint d’un cancer
colorectal sont multiples: individuels, familiaux
et génétiques. Les maladies inflammatoires de
l’intestin, la polypose adénomateuse familiale, le
syndrome du cancer colorectal héréditaire non
polyposique et les antécédents familiaux consti-
tuent des risques élevés et expliqueraient entre
10 et 30 % des nouveaux cas chaque année.
Entre 70 et 90 % des cancers colorectaux sur-
viennent chez les personnes asymptomatiques de
50 ans et plus, sans autre risque identifiable que
l’âge. Ces personnes sont considérées à risque
moyen et font l’objet des dépistages décrits dans
le présent document. Le dépistage génétique sera
traité dans un document ultérieur.
Les coûts annuels des hospitalisations pour can-
cer au Québec en 1994-1995 peuvent servir de
comparateur pour les dépenses imputables aux
principaux cancers. Le cancer colorectal se situe
au deuxième rang avec 45,8 millions de dollars
précédé par le cancer du poumon à 59,8 millions
et suivi par le cancer du sein avec 27,1 millions,
les lymphomes avec 25,3 millions et le cancer de
la prostate avec 17,8 millions.
Dans un autre ordre d’idée, en comparant les
cancers les plus importants après le cancer du
poumon en termes d’incidence et de mortalité,
on note que les subventions obtenues au Québec
entre 1994 et 1998 pour la recherche sur le can-
cer du sein se chiffraient à 15,8 millions de dol-
lars, sur le cancer de la prostate à 6,8 millions et
sur le cancer de l’intestin à 4,6 millions, totali-
sant 27,2 millions (Conseil de la Recherche Mé-
dicale et Fonds de la Recherche en Santé du
Québec). Après répartition de ces subventions
par nouveau cas de cancer estimé en 1998, si la
recherche sur les cancers de l’intestin recevait
1,00 $, la recherche sur le cancer de la prostate
s’élevait à environ 1,70 $ et celle sur le sein, à
environ 3,38 $.
Efficacité des traitements
Le traitement à visée curative du cancer colorec-
tal est principalement chirurgical. L’exérèse des
tumeurs sera la seule intervention pour les tu-
meurs de stades précoces (classification TNM):
stades I et II des cancers du côlon et stades I des
cancers du rectum. Dans les cas plus avancés,
chimiothérapie et radiothérapie peuvent
s’ajouter: chimiothérapie pour les cancers du
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