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C’est en étudiant le mouvement intrinsèque sur la voûte céleste de Sirius et de Procyon
que le mathématicien Frierich Bessel a compris que quelque chose devait perturber les deux
astres dans leur déplacement : en 1844, il arrive à la conclusion que les étoiles principales des
constellations des deux Chiens doivent chacune posséder un compagnon invisible
suffisamment massif (de l’ordre d’une masse solaire). Il faudra attendre le 21 janvier 1862,
après la mise en service de la grande lunette de la famille Clark à Boston, pour découvrir le
compagnon de Sirius qui, dix mille fois plus faible que son étoile principale, sera donc
considéré comme une étoile naine. En 1914, Walter Adams obtient des informations sur la
couleur et donc la température de Sirius B ; les résultats sont étonnants et vont à l’encontre de
toutes les prédictions : on s’attendait à une naine rouge, et Sirius B est blanc, et donc très
chaud ! Seule une taille extrêmement petite peut expliquer une si faible luminosité : on vient
de découvrir le premier exemple de naine blanche, un des ces astres étonnants, cadavres
stellaires dont la densité peut atteindre mille fois celle du platine ! Eddington dira « [avec
Sirius B], nous avons une étoile de masse égale à celle du Soleil et de rayon beaucoup plus
petit que celui de la planète Uranus ! ». Une nouvelle astrophysique, épaulée par la jeune
Mécanique quantique, est sur le point de naître … Toute une épopée !
Avec une magnitude de 8,6, le Chiot est particulièrement brillant, et devrait en
principe être accessible à n’importe quel petit instrument ! Malheureusement, son observation
est singulièrement compliquée par l’extraordinaire luminosité de Sirius… La séparation entre
Sirius A et Sirius B est de l’ordre de 24 Unités Astronomiques – 24 fois la distance Soleil-
Terre. Dans notre ciel, les deux étoiles ne sont distantes que de 3 à 11,5 secondes d’arc. La
période orbitale du Chiot est d’une cinquantaine d’années.
Si certains amateurs affirment avoir (difficilement) résolu le couple avec un instrument
de 200 à 254 mm de diamètre, il faut plutôt tabler sur un instrument de plus de 400 mm pour
pouvoir réaliser l’exploit. Notez que la distance angulaire entre les deux composantes de
Sirius est passée par sa valeur minimale en 1995 et que, depuis, les conditions s’améliorent
lentement. La séparation actuelle est toutefois encore inférieure à cinq secondes d’arc.
Tout comme Sirius, Procyon possède également un compagnon, et c’est aussi une
naine blanche ! Sa très faible luminosité (15 000 fois plus petite que celle de Procyon) et sa
proximité de l’étoile principale la rendent aussi impossible à observer avec des instruments
d’amateur. En fait, elle n’a été découverte qu’à la fin du XIXe siècle à l’oculaire de la seconde
plus grande lunette du monde, celle de l’observatoire Lick en Californie.
4. Quelques étoiles doubles
Le Grand Chien est riche en belles étoiles doubles observables à l’aide de très petits
instruments (lunettes de 50 à 80 mm de diamètre). La plus brillante est l’étoile
τ
(30 Canis
Majoris). La composante principale, de couleur jaune, est de magnitude 4,4, et elle est
accompagnée d’une étoile plus faible de magnitude 10,5 et plutôt bleutée (séparation de
8,2’’). Ce système multiple se trouve en fait au cœur de l’amas NGC 2362.