Chapitre 5: Portrait végétal

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Chapitre 5: Portrait végétal
La position géographique du bassin favorise la diversité des espèces végétales, le territoire étant compris dans la partie
sud du Québec. Plusieurs espèces atteignent aussi la limite nord de leur distribution (Groison, 2000). Par contre, les
activités humaines ont bouleversé de nombreux habitats, amenant la précarité de certaines espèces et favorisant
l’introduction d’espèces non indigènes. La section qui suit décrit non seulement les caractéristiques floristiques et
forestières du territoire, mais elle traite aussi de la présence d’espèces vulnérables ou menacées et d’espèces
nuisibles, ainsi que des sites naturels d’intérêt écologique.
5.1 Les districts écologiques
Le Québec est divisé en diverses sections par le ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MRNF). Ce
système hiérarchique comportant 11 niveaux est représenté par des unités stables du paysage québécois, réparties en
fonction du climat, de la végétation ou de la géomorphologie. Ces divisions permettent aux usagers du système de
gérer le territoire afin d’aménager les ressources naturelles de façon optimale. Il est
Le bassin versant est
composé de
28 districts écologiques
par exemple possible d’utiliser le système du MRNF pour choisir les essences
MRNF, 2003
éléments nutritifs). Ce système peut aussi servir à déterminer le meilleur
d’arbres les mieux adaptées au climat et aux conditions locales du sol (drainage,
emplacement d’une infrastructure (route, sentier, bâtiment) en tenant compte de la géologie de surface et de la
répartition des écosystèmes sur le territoire. Les districts écologiques sont le dernier niveau du système. Les limites des
districts écologiques sont principalement définies par la nature des dépôts géologiques de surface (figure 13).
Finalement, le district écologique est le niveau de classification qui convient le mieux à la caractérisation du bassin
versant (tableau 9) (Groison, 2000).
5.2 Les écosystèmes forestiers
Deux grands domaines écologiques sont présents sur le bassin versant :
l’érablière à caryer cordiforme et l’érablière à tilleul (tableau 9). Les
domaines écologiques comprennent différentes essences forestières,
compte tenu des conditions climatologiques et des caractéristiques des
sols. Les associations possibles sont présentées au tableau 10. Ainsi, les
hauts de pente représentent des sites secs (xériques), sur lesquels se
développent des chênaies, des prucheraies et des pinèdes. Dans les sites
Prucheraies
(Patrice Lefebvre, COGEBY, 2006)
légèrement humides (mésiques), les érables croissent en association avec
d’autres espèces végétales. Enfin, les tourbières, frênaies ainsi que les érablières argentées colonisent les sites très
humides (hydriques) et les plaines de débordement (Groison, 2000).
38
FIGURE 13 DISTRICTS ÉCOLOGIQUES DU BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE YAMASKA
39
TABLEAU 9 NOM DES NIVEAUX HIÉRARCHIQUES DU MRNF ASSOCIÉS AU BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE YAMASKA
Niveau hiérarchique
Unité correspondant au bassin versant
Zone de végétation
Forêt tempérée nordique
Sous-zone de végétation
Forêt tempérée nordique et décidue
Domaine bioclimatique
Érablière à caryer cordiforme et érablière à tilleul
Sous-domaine bioclimatique
Érablière à caryer cordiforme et érablière à tilleul de l’est
Région écologique
Plaine du bas Outaouais et de l’archipel de Montréal ; Coteaux de l’Estrie ; Plaine du
Saint-Laurent
Sous-région écologique
Plaine du bas Outaouais et de l’archipel de Montréal ; Coteaux de l’Estrie ; Plaine du
Saint-Laurent
Paysage
5 sur le territoire du bassin
District écologique
28 sur le territoire du bassin
MNRF, 2003
L’érablière à tilleul est un milieu forestier des plus diversifiés. Il comprend en effet 41 essences forestières, dont l’érable
à sucre (Acer saccharum), l’érable rouge (A. rubrum), la pruche (Tsuga canadensis), le sapin (Abies balsamea),
l’épinette rouge (Picea rubens), le peuplier faux-tremble (Populus tremuloides), le bouleau blanc (Betula papyrifera) et le
bouleau gris (B. populifolia). C’est dans ce type de peuplement qu’on retrouve certaines espèces végétales rares, leur
aire de répartition arrivant à sa limite nord.
TABLEAU 10 TYPE DE PEUPLEMENTS FORESTIERS DES DOMAINES BIOCLIMATIQUES DE L’ÉRABLIÈRE À CARYER ET À TILLEUL
Type de drainage du sol
Peuplement forestier
Xérique
Chênaie
Pinède et prucheraie
Mésique
Érablière à tilleul et à chêne rouge
Érablière à tilleul
Érablière à bouleau jaune
Érablière à tilleul et à hêtre
Érablière à caryer
Hydrique
Prucheraie
Tourbière
Érablière rouge
Rives, marécage
Érablière argentée
Frênaie noire à orme d’Amérique
Chênaie bicolore et communauté de micocouliers
ADAPTÉ DE : ORDRE DES INGÉNIEURS FORESTIERS, 1996
40
Quant au domaine de l’érablière à caryer cordiforme, qui est présent dans le bassin versant, il ne couvre que 0,6 % du
territoire québécois. Ce domaine écologique possède toutefois la flore la plus diversifiée du Québec, soit 49 espèces
arborescentes, dont plusieurs lui sont exclusives. Le caryer ovale (Caryer ovata) et le caryer cordiforme (C. cordiformis),
le micocoulier (Celtis occidentalis), le chêne blanc (Quercus alba), le chêne bicolore (Q. bicolor), l’érable noir (A.
saccharum nigrum) et le pin rigide (Pinus rigida) font notamment partie de ce domaine. La plupart de ces essences
sont d’ailleurs considérées comme rares au Québec (Groison, 2000).
5.3 La déforestation
La déforestation est un phénomène réel dans le bassin versant de la Yamaska, malgré le fait que 34% du territoire du
bassin versant est occupé par la forêt. (MAPAQ, 2004). Dans le contexte de développement urbain et agricole, les
forêts de la région ont presque entièrement été exploitées de façon intensive depuis les débuts de la colonisation. Ainsi,
les boisés restants se trouvent sur les sites les moins propices à l’agriculture ou au développement. Les érablières ont
été exploitées pour la production acéricole et pour le bois de chauffage, alors que les autres peuplements ont été
convertis en pâturages ou en terres agricoles. Les boisés résiduels ont
Taux de superficie forestière (2004)
aussi fait l’objet de coupes répétées. Ces perturbations ont modifié la
Rouville : 16 %
Les Maskoutains : 17 %
La Haute-Yamaska : 55%
composition des peuplements forestiers et les forêts de notre territoire
GéoMont, 2005
sont majoritairement très jeunes. La forêt du bassin versant est presque
entièrement constituée de petites propriétés privées. Les lots forestiers
sont sporadiques et de petite superficie. La dynamique écologique des peuplements forestiers ne joue plus qu’un rôle
mineur dans leur évolution et ce sont les facteurs anthropiques qui influencent la présence et la composition des
espèces végétales (Groison, 2000).
Dans le bassin versant, en 2004, les MRC Le Haut-Richelieu, Les Maskoutains et Rouville avaient les plus faibles taux
de superficie forestière (Tableau 11). Ces MRC figurent également aux premiers rangs au niveau des pertes de
superficie forestière. La figure 14 démontre bien les pertes des superficies forestières entre 1999 et 2004. En totalité,
2
les pertes forestières entre 1999 et 2004 sont estimées à 4 713 hectares, donc 47 km . C’est 1% du territoire du
bassin versant de la Yamaska qui a été déboisé en 5 ans.
Il est aussi possible de remarquer que plusieurs sites déboisés concordent avec l’emplacement de milieux humides
(figure 12). Les municipalités de l’Ange Gardien et de Sainte-Cécile-de-Milton, entre autres, sont touchése par ce
phénomène. Nous sommes donc à même de constater que les milieux humides du bassin versant de la Yamaska
sont extrêmement vulnérables et continuent à disparaître graduellement, de petites superficies à la fois. Il est donc
extrêmement important de conserver les derniers espaces survivants.
41
TABLEAU 11 PERTES DE SUPERFICIES FORESTIÈRES DES MRC DE LA MONTÉRÉGIE DU BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE
YAMASKA
MRC
Superficie
forestière en
2004 (ha)
Taux de superficie
forestière en 2004
(%)
Perte de superficie
forestière 19992004 (ha)
Perte de superficie
forestière totale
1999-2004
(%)
Acton
26 112
45
796
3
Perte de superficie
forestière dans le
bassin versant 19992004 (ha)
796
Le Bas-Richelieu
12 285
19,5
524
4
435
Brome-Missisquoi
91 460
58
1 166
1,5
585
La Haute-Yamaska
41 718
54,5
1 014
2,5
1 014
Haut-Richelieu
11 489
11,5
737
6
113
Les Maskoutains
21 925
17
1 436
6
Rouville
7 920,6
16
538
6,5
1293
461
La Vallée-du-Richelieu
11 126
18,5
245
2
18
GÉOMONT, 2005
TABLEAU 12 TAUX DE PERTE DE SUPERFICIE FORESTIÈRE À L’INTÉRIEUR DU ZONAGE AGRICOLE
MRC
Taux de perte (%)
Acton
100
Le Bas-Richelieu
78
Brome-Missisquoi
94
Le Haut-Richelieu
94
La Haute-Yamaska
89
Les Maskoutains
99,5
Rouville
95
GÉOMONT, 2005
42
FIGURE 14 PERTES DE SUPERFICIES FORESTIÈRES ENTRE 1999 ET 2004 DANS LE BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE YAMASKA
4 713 hectares
43
5.4 Les espèces floristiques menacées ou vulnérables
La banque de données de la Direction de la conservation et du patrimoine écologique du Québec signale 375 plantes
vasculaires ayant le statut d’espèces menacées ou vulnérables, au Québec. Le bassin versant comporte 62
espèces végétales menacées ou vulnérables et 187
mentions d’occurrence (CDPNQ, 2005). Parmi les plus
rares, mentionnons l’ail des bois (allium tricoccum),
désigné espèce vulnérable ainsi que le ginseng à cinq
folioles (Panax quinquefolius) et le phégoptère à
hexagones (Phegopteris hexagonoptera), tous deux
désignés espèces menacées. Cependant, à des fins de
préservation l’emplacement de ces espèces doit demeurer
confidentiel.
Espèces menacées ou vulnérables
Ce terme regroupe les espèces menacées ou
vulnérables désignées et susceptibles d’être ainsi
désignées selon la Loi sur les espèces menacées ou
vulnérables (LEMV).
Espèce vulnérable : toute espèce dont la survie est
précaire, même si sa disparition n'est pas
appréhendée.
Espèce menacée : toute espèce dont la disparition est
appréhendée.
CDPNQ, 2005
5.5 Les espèces floristiques nuisibles
Quelques espèces nuisibles ont la capacité de coloniser rapidement les cours d’eau du
bassin versant. Le myriophylle à épi (Myriophyllum exalbescens) en est un bon exemple.
D’autres espèces floristiques, comme la salicaire pourpre (Lythrum salicaria), la châtaigne
d’eau (Trapa natrans) et le phragmite (Phragmites communis) ont été introduites sur le
territoire. Pour la plupart des espèces nuisibles, c’est l’intense activité humaine qui est
responsable de leur introduction dans le bassin versant. Certaines introductions sont aussi
dues à l’aménagement horticole et au manque de connaissances des espèces non
indigènes. Sans prédateurs naturels présents sur le territoire, les espèces nouvellement
Phragmite
implantées peuvent rapidement augmenter leurs effectifs et entrer en compétition avec les
(Denis Chabot © Le Québec
en images CCDMD)
espèces indigènes. Enfin, pour les espèces à statut précaire, l’impact est encore plus
grand.
5.6 Les sites naturels d’intérêt écologique
Le territoire comporte quelques espaces voués à la conservation des espèces floristiques et fauniques, et aux
écosystèmes exceptionnels. Selon un inventaire réalisé par l’Union québécoise pour la conservation de la nature
(UQCN) et le Fond mondial pour la nature (WWF), le bassin comprend huit sites naturels d’intérêt (Tableau 13, Figure
15). De ceux-ci, seul le parc de la Yamaska possède un statut légal de protection excluant toute forme d’exploitation
forestière, minière et énergétique, ce qui n’est pas le cas pour les sept autres. Pour le site bénéficiant d’un statut légal, la
44
protection des habitats est prioritaire et il est sous la responsabilité du gouvernement provincial. Les autres sites
d’intérêt comportent un potentiel pour la conservation des ressources biologiques tout en alliant des fonctions de site
récréotouristique (Groison, 2000).
TABLEAU 13 SITES PROTÉGÉS DU BASSIN VERSANT DE LA RIVIÈRE YAMASKA
Catégorie
Nom du site
Superficie (ha)
CONS
Lac Brome
-
SIE
Boisé de la crête de Saint-Dominique
-
SIE
Mont Yamaska
1500
SIE
Marais du lac Boivin
290
SIE
Centre écologique de Farnham
24
PROT
Parc national de la Yamaska
1289
SIE
Baie Lavallière
1400
SIE
Mont Sutton
8000
-
Parc écologique du Mont Shefford
40
-
Le Boisé des 12 de Saint-Hyacinthe
6
PROT : site ayant un statut légal de protection excluant toute forme d’exploitation forestière, minière et énergétique.
CONS : site ayant un statut légal et géré à des fins de conservation et de protection des habitats.
SIE : milieu naturel comportant un potentiel pour la conservation des ressources biologiques, mais dont la vocation première de conservation des
habitats n’est pas confirmée par un statut légal.
ADAPTÉ DE BOISSEAU, 1998
45
FIGURE 15 LOCALISATION DES SITES D’INTÉRÊT ÉCOLOGIQUE ET DES SITES DE CONSERVATION DU BASSIN VERSANT DE LA
RIVIÈRE YAMASKA
GROISON, 2000
46
Références :
BOISSEAU, G. 1998. Projet d’inventaire et de cartographie des aires protégées et des milieux naturels d’intérêt du
Québec méridional. UQCN et WWF.
Centre de données sur le patrimoine naturel du Québec (CDPNQ), 2005. Occurrences floristiques d’espèces
menacées ou vulnérables du bassin versant de la rivière Yamaska, Version PDF
Commission de coopération environnementale de l’Amérique du Nord (CCE). Trio .Hiver 2000-2001. Les espèces
envahissantes :
une
menace
qui
s’accroît
rapidement.
Salicaire
pourpre
[En
ligne]
http://www.cec.org/trio/stories/index.cfm?ed=2&ID=9&varlan=francais. Visité le 10 juillet 2006
Environnement Canada. Centre Saint-Laurent. Infos Saint-Laurent /Ressources biologiques, La Châtaigne d’eau [En
ligne] http://www.qc.ec.gc.ca/csl/inf/inf003_002_f.html
Environnement Canada. Centre Saint-Laurent. Infos Saint-Laurent /Ressources biologiques, Le Myriophylle à épi [En
ligne] http://www.qc.ec.gc.ca/csl/inf/inf037_f.html
Environnement Canada. Centre Saint-Laurent. Infos Saint-Laurent /Ressources biologiques, Phragmite commun [En
ligne] http://www.qc.ec.gc.ca/csl/inf/inf013_f.html
GéoMont, 2005, Portrait des pertes de superficies forestières en Montérégie entre 1999 et 2004. [En ligne]
http://www.geomont.qc.ca/news.htm. Consulté le 5 mars 2007
GROISON, V., 2000. Profil du bassin versant de la rivière Yamaska, Conseil de gestion du bassin versant de la rivière
Yamaska
Initiative Aux arbres citoyens !, Rapport d’évaluation : Plan d’Action de la stratégie québécoise sur les aires protégées
(SQAP) du gouvernement du Québec, 2006 [En ligne] : http://www.auxarbrescitoyens.com/IMG/pdf/wwf_54_web.pdf
Ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation (MAPAQ), 2004. Atlas de l’utilisation du sol, Données de
2002. Communications personnelles
Ministère des Ressources naturelles et de la Faune (MNRF), 2003. Cartographie numérique des niveaux supérieurs
du système hiérarchique de cartographie écologique du ministère des Ressources naturelles du Québec et Banque de
données descriptives des districts écologiques. Cd-rom. MRNF, Forêt Québec, Direction des inventaires forestiers.
Ordre des ingénieurs forestiers. 1996. Manuel de foresterie. Les Presses de l’Université Laval, Sainte-Foy.
47
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