Matière noire, Energie noire AAAA – BGS 18/05/2011 Précisions Matière noire : de l’anglais Dark Matter, matière sombre, matière obscure, masse cachée ou encore masse manquante. Energie noire : de l’anglais Dark Energy, énergie sombre, 2 Hypothèses Hypothèse de la matière noire : – Sert à expliquer des défauts de masse pour rendre compte des phénomènes à l’échelle des galaxies, des amas de galaxies, des superamas de galaxies Hypothèse de l’énergie noire : – Sert à expliquer des phénomènes et des équations cosmologiques (englobant l’ensemble de l’Univers) 2 Hypothèses Comme toutes hypothèses, elles sont à la recherche de validation par des expériences confirmant (ou infirmant) ces théories. Plusieurs expériences sont en cours. Pour l’instant (2011), rien de permet de trancher dans un sens comme dans l’autre. D’autres théories concurrentes existent : – MOND, … La matière sombre Fritz Zwicky et l’amas Coma Sinclair Smith et l’amas Virgo Vera Rubin et la rotation de la galaxie d’Andromède L’amas de galaxies 1E 0657-558 [Bullet cluster – amas de la Balle (de fusil)] Candidats pour la matière sombre Expériences en cours Conclusions Fritz Zwicky Zwicky étudie en 1933 un groupe de 7 galaxies dans l’amas Coma. A partir de la dispersion des vitesses, il tente d’en déduire la masse totale de l’amas. Amas Coma (Abell 1656) Photo NASA Situé dans la constellation de la Chevelure de Bérénice, cet amas de plus de 1000 galaxies est distant de 320 Mal et s’éloigne de nous à une vitesse de 7000 km/s. Ses 10 galaxies les plus brillantes sont de mag 12 à 14 Amas Coma (Abell 1656) NGC 4889 NGC 4921 NGC 4874 NGC 4911 NGC 4911 Masse de l’amas Coma Zwicky déduit des vitesses observées une masse dynamique. De façon surprenante, cette valeur est 400 fois grande que la masse lumineuse. La masse lumineuse est déduite de la quantité de lumière émise par l’amas (en faisant l’hypothèse d’une distribution raisonnable des populations d’étoiles dans les galaxies) Même en intégrant les erreurs de mesure, cette différence est difficilement explicable. En 1934, Zwicky nomme Dark Matter cette matière manquante. Sinclair Smith et l’amas Virgo Photo ESO En 1936, l’astronome Sinclair Smith étudie par la même méthode, la masse de l’amas de galaxies de la Vierge (Amas Virgo à 54 Mal). Il trouve en 1937, une masse dynamique 200 plus grande que la masse lumineuse, trouvée par Edwin Hubble. Amas Virgo Vera Rubin et M31 Dans les années 70, Vera Rubin étudie la vitesse de rotation des galaxies spirales par analyse spectrale Elle trouve que les étoiles en périphérie de M31 vont trop vite si on applique les lois de Newton. Vera Rubin et 200 galaxies Sa La courbe de rotation prévue par les équations de Newton (A) et la courbe observée (B), en fonction de la distance au centre de la galaxie. Elle étudie ensuite avec son équipe environ 200 autres rotations de galaxies spirales. Elle conclut qu’il faudrait un halo galactique de 5 à 10 fois plus de matière pour rendre compte des observations. Catherine Heymans et 2000 galaxies D’autres études viennent confirmer cette anomalie. Catherine Heymans et Megan Gray observent ce même phénomène sur plus de 2000 galaxies. En ajoutant les objets peu lumineux comme naines brunes, blanches, pulsars et trous noirs, elles constatent qu’il reste encore près de 90% de matière non visible. Galaxies spirales en rotation Ainsi toutes les étoiles se trouvent presque au centre de l’extension véritable de la galaxie (cette fois-ci composée de la galaxie visible et du halo de matière sombre), et tournent donc normalement. Cela revient à dire que les étoiles, même celles à la périphérie visible de la galaxie, ne sont pas « assez loin » du centre pour être dans la partie descendante de la courbe de rotation. Observer des objets massifs Pour espérer détecter cette matière sombre, il faut observer des objets massifs Avec une galaxie, la quantité de matière sombre semble être 5 à 10 fois plus importante que la quantité de matière visible (15% visible – 85% invisible). Avec un amas de galaxies, ce rapport passe à près de 10x (<10% visible – >90% invisible) Etudions le cas d’une collision d’amas de galaxies Amas du Boulet (ou de la Balle de fusil) 1E 0657-558 dans la Carène L’étude a débuté en août 2006. Cet amas est le résultat de la collision il y a 150 Ma de deux amas de galaxies. Les étoiles ne collisionnent pas (ou très peu) Le gaz collisionne beaucoup En bordure, la température monte à 70 MK, et au centre, à 100 MK. Le gaz du petit amas est freiné, et est dépassé par sa matière noire peu interactive. Les centres de masse ne correspondent plus aux données visibles. Bullet Cluster - Animation Univ. Harvard En rouge matière visible – en bleu matière noire Amas du Boulet 1E 0657-558 La vitesse de collision des gaz est proche de 4500 km/s (mesures Chandra) Amas du Boulet 1E 0657-558 Contours d'iso-densité placés sur la photographie du télescope Hubble. Confirmation avec d’autres amas en collision Depuis, l’expérience a été renouvelée avec le cas de l’amas MACS J0025.4-1222, situé dans la Baleine. En utilisant l’effet de lentille gravitationnelle, on a représenté en bleu la matière noire et en rose la matière visible. Photo Hubble et mesures Chandra Dates : 5-Nov-2006 et 6-Jun-2007 Candidats pour la matière sombre Dans les observations précédentes, cette matière sombre réagit peu avec la matière visible, composée principalement d’hydrogène et d’hélium (matière baryonique). Les résultats des observations font penser à une matière non-baryonique. Que peuvent donc être ces particules de matière non baryonique ? Matière non baryonique Les neutrinos – Leur masse pourraient être proche de 1,5 à 2 eV (511 keV pour l’électron) – Mauvais candidats car leur part dans la matière noire serait trop faible – Proposition de neutrinos lourds (??) À confirmer Les neutralinos – Particules hypothétiques supersymétriques – Particule peu réactive à détecter par réaction (paradoxe) Matière non baryonique Les mauviettes (WIMP=Weakly interactive massive particles) – – – – Particules peu interactives mais très massives La plus légère de cette famille serait le neutralino Sa masse > 32 GeV/c2 (CERN) La théorie de la supersymétrie attribue un superpartenaire aux particules connues: Le photino pour le photon Le gravitino pour le graviton Le sneutrino pour le neutrino Le sélectron pour l’électron Le zino pour le boson Z0 Le higgsino pour le boson de Higgs Expérience de détection de matière non baryonique Plusieurs expériences en cours – Pour la théorie de supersymétrie AMS, PAMELA (en orbite terrestre) AMANDA, IceCube (sous la glace au Pôle Sud) ANTARES (au fond de la Méditerranée) EDELWEISS, MIMAC, PICASSO (labos sous terre) Et l’énergie noire ? Pour aborder cette seconde partie, nous devons monter d’un cran et regarder l’Univers dans son ensemble. Nous sommes au niveau cosmologique Regardons la géométrie de l’Univers – La gravitation est aujourd'hui décrite par la relativité générale, selon laquelle les masses (ou plus exactement l'énergie et les flots d'énergie) courbent l'espace-temps. – On peut alors se poser la question de la géométrie globale de l'espace-temps. Géométrie globale de l’Espace-Temps C'est une question expérimentale, qui peut être tranchée par des observations astronomiques. En effet, la propagation des rayons lumineux est sensible à la courbure globale de l'espace-temps, et l'observation d'objets lointains permet de la déterminer. On trouve alors que l'espace est plat, c'està-dire que la courbure globale de l'Univers est nulle. Densité de l’Univers De façon théorique, il se trouve que cette courbure est reliée à la densité totale de matière et d'énergie. La platitude de l'espace-temps permet de chiffrer avec une bonne précision la densité de masse-énergie de l'Univers : elle correspond à 5,7 atomes d'hydrogène par m3. La densité qui rend l'espace plat est appelée densité critique, et l'Univers a donc une densité égale à la densité critique, aux erreurs de mesure près. Densité observée de l’Univers Or, si l'on comptabilise ce que l'on voit effectivement dans l'Univers, on obtient une densité bien inférieure, environ 1 % de la densité critique : la densité de l'Univers est plus grande que celle que l'on observe. Il nous manque 99% de la densité masseénergie de notre Univers. Que manque-t-il en masse ? Que manque-t-il en énergie ? La théorie du Big-Bang Nucléosynthèse primordiale (H, D, He3, He4, Li7) Phase d’expansion et de refroidissement Rayonnement de fond cosmologique (2,7K) Quantité de noyaux légers produits dépend – Durée de survie du neutron libre (886 s) – Nombre de familles de neutrinos (3) – Nombre de photons par nucléons dans l’Univers Comparaison avec l’évaluation du nombre de noyaux légers dans l’Univers – Fournit 1,64 milliard de photons par nucléon Densité de photons dans l’Univers Or, la densité de photons dans l'Univers est extrêmement bien mesurée. La plupart de ces photons appartiennent au rayonnement de fond cosmologique que nous allons décrire plus loin, dont les mesures indiquent une densité de photons de 410 photons/cm3. Densité de nucléons dans l’Univers On dispose donc de la densité de photons ainsi que du nombre de nucléons par photon... En mettant les deux dernières valeurs ensemble, on peut en déduire la densité de nucléons dans l'Univers ! On trouve que la densité de nucléons vaut environ 4.4 % de la densité critique. – Rappelons que la densité de l'Univers est égale à la densité critique... Il s'ensuit que 95.6 % de la densité de l'Univers est constituée d'autre chose que de nucléons (ou matière baryonique)... Accélération de l’expansion de l’Univers Les études récentes (2006) montrent, via l’analyse des Supernovae de type Ia, que l’expansion de l’Univers va en s’accélérant. Ces études renseignent le modèle cosmologique Lambda-CDM (λ Cold Dark Matter) qui propose la présence d’une énergie répulsive sur l’expansion de l’Univers – Énergie dotée d'une pression négative, qui la fait se comporter comme une force gravitationnelle répulsive, comptant pour 73% de la densité en masse-énergie de l’Univers => énergie sombre Matière et Energie sombres/noires En résumé : – L'Univers est plat, la densité totale est égale à la densité critique – L’Univers est en expansion accélérée – La densité est dominée par une nouvelle composante, parfois appelée énergie noire, qui constitue 73 % de la densité critique. – Les baryons contribuent pour 4.4 % de la densité critique – La matière (matière noire plus matière visible) contribue pour 27 % à cette densité critique (ce chiffre contient donc les 4.4 % de baryons) Nature de l’énergie sombre En 2011, plusieurs hypothèses – C’est une généralisation à l’Univers tout entier de l’énergie du vide décrite localement. C’est une propriété fondamentale de notre univers. – C’est une énergie induite par la présence de particules inconnues. – Cette énergie sombre pourrait avoir créé l’inflation cosmique juste après le Big-Bang. – Le Big Crunch devient hautement improbable. – Nouveau scénario du Big Rip (univers vide infini) Bibliographie Articles de Richard TAILLET : http://www.futurahttp://www.futura-sciences.com/fr/doc/t/astronomiesciences.com/fr/doc/t/astronomie-1/d/les1/d/les-secretssecrets-dede-lala-matierematiere-noire_542/c3/221/p1/ Site de Richard TAILLET (in2p3): http://lapth.in2p3.fr/~taillet/dossier_matiere_noire/matiere_noire.php Site Wikipedia http://fr.wikipedia.org/wiki/Mati%C3%A8re_noire