étoiles n’a pu survenir pendant la durée
qu’elles passent sur la séquence principale.
À la manière des étoiles T Tauri, ces étoiles
auraient été freinées par interaction avec un
disque dans leur jeunesse, mais, jusqu’ici,
on n’a trouvé aucun candidat précurseur de
ces étoiles qui confirmerait cette hypothèse.
Si la structure magnétique fossile est
stable à l’échelle de la vie humaine, elle doit
en revanche évoluer sur des périodes beau-
coup plus longues. Le Britannique Leon
Mestel, de l’Université du Sussex, prévoit
en effet un basculement de la structure
magnétique conduisant à des orientations
privilégiées (parallélisme ou orthogonalité)
de l’axe magnétique par rapport à l’axe de
rotation, sous l’effet de plusieurs facteurs. Le
transport des lignes de champ par des
mouvements à grande échelle à l’intérieur
de l’étoile aurait tendance à coucher l’axe
magnétique dans le plan équatorial, tandis
qu’une perte de masse confinée par le
champ magnétique devrait plutôt aligner
l’axe de rotation et l’axe magnétique. Enfin,
la distorsion des couches externes de l’étoile
par la structure magnétique pourrait aussi
bien aligner ou rendre perpendiculaire ces
deux axes, à la manière d’une toupie qui
tend à tourner autour de son axe de plus
faible moment d’inertie.
Après de nombreuses observations
infructueuses de ces alignements, John
Landstreet, de l’Université Western Ontario,
et Gauthier Mathys, de l’Observatoire euro-
péen austral (ESO), ont trouvé que, seules les
étoiles magnétiques chimiquement particu-
lières dont la période de rotation est inhabi-
tuellement longue (et qui ont donc dû subir
un freinage plus marqué que les autres), ont
une orientation privilégiée : l’axe magné-
tique est aligné avec l’axe de rotation. Le
basculement de la structure magnétique
semble bien lié au freinage magnétique.
Les champs fossiles ont également des
conséquences importantes sur les méca-
nismes de transport qui opèrent dans les
atmosphères de ces étoiles, notamment en
figeant les mouvements turbulents. La diffu-
sion des atomes (sous l'effet combiné de la
pression du rayonnement, de la gravité et
du champ magnétique) devient alors un
des modes de transport prépondérant. En
1970, George Michaud, de l’Université de
Montréal, a proposé que ce mécanisme
accumulerait (ou raréfierait) certaines
espèces chimiques dans l'atmosphère de
ces étoiles chimiquement particulières.
Comme prévu, on observe que le champ
magnétique altère la diffusion des éléments
chimiques (voir la figure 4); en revanche,
un calcul détaillé indique que la répartition
des éléments prévue en ne tenant compte
que de la diffusion n'est généralement pas
conforme aux observations; il est
alors nécessaire d'inclure l'effet
d'une faible éjection de
matière (sous l'influence de
la pression de radiation)
pour parvenir à un
meilleur accord avec les
données.
Dans les étoiles
chaudes comme les
étoiles O, le vent radiatif
est tellement puissant
qu’il domine la diffusion,
de sorte qu’il efface toute
trace de teneur anormale.
La présence d’un champ
magnétique fossile ancré dans
la structure de telles étoiles modi-
fiera aussi l’environnement de
l’étoile. Le vent de matière suit les
lignes de champ, ce qui peut engendrer
des chocs lorsque les flux de matière en
provenance des deux pôles magnétiques
se rencontrent. Ces chocs chauffent le gaz
environnant à une température supérieure
à dix millions de degrés, ce qui créerait des
éruptions de rayons X. Ce mécanisme a
été proposé pour expliquer l’émission de
rayonnement X des étoiles chaudes.
Du magnétisme
dans les disques
Dans plusieurs autres classes d’objets, des
champs magnétiques expliqueraient cer-
tains phénomènes, mais leur existence n’a
encore jamais pu être avérée. Par exemple,
dans certains disques d’accrétion autour des
étoiles jeunes, les flux de transfert de masse
vers l’étoile déduits des observations sont
bien supérieurs à ceux qui sont prévus par
un modèle de disque visqueux. Un champ
magnétique relativement faible, initialement
présent dans ce disque et figé dans la
matière ionisée, devrait s’étirer à la manière
d’un élastique, en raison du cisaillement dû
à la rotation différentielle du disque (la
période de rotation dans le disque aug-
mente avec la distance à l’étoile suivant les
lois de Kepler); la force de rappel du champ
magnétique finira par freiner la rotation en
certains points du disque et accélérera
l’effondrement vers l’étoile. On invoque
également les champs magnétiques pour
expliquer la forte focalisation des jets de
matière observés le long de l’axe de rota-
tion de ces mêmes étoiles jeunes, et que les
mécanismes purement hydrodynamiques
n’arrivent pas à expliquer (voir Des jets
magnétiques, par J. Ferreira, C. Dougados
et S. Cabrit, dans ce dossier).
Aujourd’hui, les astrophysiciens pren-
nent conscience que même un champ de
très faible intensité (quelques milliteslas, soit
dix fois le champ global du Soleil) suffit à
modifier notablement les mécanismes phy-
siques qui opèrent dans et autour des
étoiles. En même temps, il est légitime de
se demander si de nombreuses étoiles
n’échappent pas à l’observation. En particu-
lier, on constate que la proportion d’étoiles
dont le champ est égal à une valeur don-
née est d’autant plus grande que cette
valeur est faible. Ainsi, il y aurait un nombre
considérable d’étoiles dont l’intensité du
champ magnétique est bien inférieure à la
sensibilité des instruments actuels. Des ins-
truments à la sensibilité accrue, comme le
spectropolarimètre en construction pour le
télescope CFH d’Hawaii ou en projet, pour
le télescope William Herschell des Canaries,
permettront sans doute la découverte de
nouvelles classes d’étoiles magnétiques et,
pourquoi pas, de nouveaux types de
magnétisme stellaire.
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