Le roman médiéval et philosophie chrétienne aux 12è et 13è siècles

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林春明(淡江大學法文系副教授)
Le roman médiéval et la philosophie chrétienne aux 12e et 13e siècles
I .Le roman médiéval :
Les conditions d’une genèse :
La littérature française est marquée par sa rupture avec la littérature latine et,la
littérature française est née à la faveur de cette rupture.Seule l ‘Eglise maintient la
pérennité des lettres latines.La littérature sera aussi un facteur important d ‘unification
de la France.
Avant l’apparition du roman,toute la littérature du Moyen Age en langue vulgaire
est destinée au chant.Vers la fin du XIè siécle,deux formes littéraires constituent les
manifestations
essentielles de la littérature :la chanson de geste en langue d ‘oil et la
poésie lyrique des troubadours en langue d’oc.
Le roman apparaît vers le milieu du XIIè siécle.Dès le début,il est connu comme un
genre réflexif et intellectualisé.Les premiers romans français adaptent les oeuvres de
l’Antiquité gréco-latine.L’attachement aux sources antiques marque la nouveauté de
ces romans.Ces romans ont surtout pour thème principal l’amour.Ils peignent la
naissance de l’amour,le trouble du coeur,les confidences,les conflits intérieurs,la
timidité,les audaces,les ruses,les aveux,les trahisons de l’amour.Mais on valorise
surtout l’amour.
L’amour représente l’idéal d’une élite,des grands seigneurs des cours du Moyen
Age.L’amour est symbole de savoir-vivre,d’élégance morale et physique.D’où la
courtoisie.L’amour est courtois. Le public de ces romans est constitué de
chevaliers,de dames et de demoiselles de haute naissance et des clers attachés à la
cour d’un seigneur.Dans l’ensemble,l’idéal de la chevalerie reste un thème majeur des
romans du Moyen Age.
Transposé dans le domaine des reletions amoureuses,le roman médiéval décrit
l’épopée de l’amour selon l’idéal chevaleresque.Le chevalier est au service de la
dame,c’est un engagement prenant le modèle sur le serment de vasselage.Par le
serment,le chevalier voue sa loyauté totale envers son seigneur,il défend l’Eglise.La
chevalerie est à l’apogée de sa grandeur au XIè siècle.L’amour courtois est
conditionné par des exploits des chevaliers.Ces exploits sont exigés par la dame.Le
chevalier doit prouver son mérite.La valeur du héros est d’abord guerrier ;cela est
conforme à l’ordre féodal.Dans cette société féodale fortement hiérarchisée,seul
l’amour est le facteur d’anoblissement capable de faire rejoindre au chevalier le haut
rang de la dame.
II. La philosophie chrétienne :
Mais le Moyen-Âge,outre le triomphe de la monarchie,c’est aussi celui de la
chrétienté.Ainsi,à côté des oeuvres en prose qui chantent la gloire du souverain, se
développe une création qui débouche sur l’action de grâce:〝Un peu de science
éloigne de Dieu,beaucoup en approche.〞Paroles célèbres de Roger Bacon à cette
époque.C’est un perpétuel effort pour lier l ‘une à l’autre la sagesse divine et la
sagesse humaine,pour fonder l’ordre et la hiérarchie des sagesses.
Le spiritualisme grec a contribué au rapprochement de Saint Augustin au
christianisme. Pour Saint Augustin qui a pu prendre connaissance du neo-platonisma
grâce aux traductions de Calcius,la philosophie et la théologie sont liées ;entre la
nature qui est l’objet de la philosophie,et la surnature,l’objet de la théologie, il n’y a
aucune différence.Saint Augustin accorde seulement le primat à la théologie. ;il
soutient la nécessité de la grâce comme élément de purification chez l’homme.Ces
relations entre la philosophie et la religion sont assurées par l’interaction entre la
raison et la foi.L’usage de la foi a dépassé le domaine religieux.Etant une adhésion,la
foi permet une connaissance rationnelle.Bien entendu,la foi a une nature
purifiante.Chose remarquable,Saint Augustin découvre que la foi passera,mais que la
raison subsistera.La raison prolonge donc la foi. D’emblée,raison et foi se
concertent :toujours on croit pour comprendre,et on comprend pour croire.
Ainsi Saint Augustin qui domine la philosophie médiéval a travaillé à constituer la
théléologie comme science.Au vaste problème des rapports de la raison et de la foi,il
affirme que certaines vérités relatives à Dieu ne peuvent pas être démontrées par la
seule raison .Il faut mettre en harmonila foi religieuse avec la pensée libre et la
science .L’archevêque Anselme de Canterbury reconnaît aussi la préséance à la foi :
〝Je crois pour comprendre.Le but de la science consiste à confirmer l’homme dans
sa foi religieuse,et lui fournissant des certitudes.Philosopher,c’est chercher à
comprendre les dogmes de l’Eglise et non pour les mettre en doute.Seulement les
dogmes chrétiens ne peuvent pas être démontrés par l’intelligence.On croit parce que
le foi l’exige.’〞Enfin, Saint Augustin a déclaré:〝 l’intelligence est la servante de la
foi.〞
Mais étant néo-platoniste,Saint Augustion suit les sentiers battus de ses
prédecesseurs,il adopte une vision hiérarchique du monde ;dans cette optique,c’est la
notion de l’ordre qui joue un rôle prépondérant.Et Saint Augustin consacre l’un des
dialogues de Cassiciacum à traiter De Ordine.Résumons sa pensée :le monde est un
tout,à l’intérieur de ce tout, règne l’ordre.C’était la doctrine de Timée.Comme rien
n’est en dehors du monde,rien non plus n’est en dehors de l’ordre.(De l’ordre,I).Mais
cet ordre est ontologique et non moral,cela signifie que l’âme est supérieure au
corps.L’ordre du corps obéit à celui de l’âme,car cet ordre est commode à Dieu.Il est
facteur de paix,et règle à suivre dans la conduite morale.Outrepasser l’ordre,c’est
commettre le péché.Le monde spirituel éloigne absolument la chair.Toute
connaissance de Dieu requiert une démarche purificatrice.D’autre part,il existe un
ordre de l’amour,mais toujours l’homme doit aimer l’âme plus que le corps.L’amour
impose la continence.La fidélité en amour est une vertu suprême,elle cautionne la
purté de l’âme.
Nous comprenons maintenant la déchéance de l’amour courtois :il est un mélange
de plaisir et de souffrance.Plaisir du corps et souffrance de l’âme.L’amour de Tristant
et d’Yseul en est un exemple éclatant.Cet élan d’amour est avant tout une
revendication de la liberté sexuelle comme l’a montré Catherine Durvye(Tristan et
Yseul,Ellipses,2ooo).En effet,Yseul montre peu de retenue et de pudeur dans sa
passion pour Tristan.Ce qui est malheureux,car la chair est un péché au XIIè
siècle.N’étant jamais chaste,leur passion transgresse le tabou sexuel qui pousse ces
deux êtres dans les bras l’un de l’autre .L’attrait de la gageure dépasse celui de
l’amour.Toute pulsion du désir bafoue toujours les règles et les valeurs
sociales.Seulement ,sous peine d’être chatié par l’ordre transcendant qui le
gouverne,l’homme n’est pas maître de’ son corps. Malheureusement,l’homme refuse
le monde réel tel qu’il est sans pouvoir lui échappetr.L’homme désire que l’amour
dure tout en sachant qu’il ne dure pas.
Bibliographie :
I. La littérature :
1 .Neuf siècles de littérature française. Librairie Delagrance,I958.
2. Histoire littéraire de la France,tome I. Des origines à 1600. Les Editions
sociales 1971.
3. Moyen Age, Lagarde et Michard,E.Bordas.
4. Romanciers du Moyen Age. Livre de poche,1987.
5. Béroul : Tristan et Yseul. Folio.
6. Catherine Durvye ;étude sur Béroul. E.Ellipses 2000.
7. Michel Zink : Littérature française au Moyen Age. PURF 1992.
8. Mikhail Bakhthine :Esthétique et théorie du broman ;Troisième étude.V. le
roman de la chevalerie. Gallimard 1978.
II. Philosophie médiévale :
1. Histoire de la philosophie,tome 2,sous la direction de François Châtelet ;
Hachette,1972.
2. Jacques Maritai :La philosophie morale :ch.V : Christianisme et
philosophie.Gallimard 1960.
3. André Robinet :La philosophie française.Ch.1er La philosophie
médiévale.Que-sais-je n.170 PUF.
4. Etienne Gilson :La philosophie médiévale. Bibliothéaue historique Paris 1944.
5. E.Gilson :Introduction à l’étude de Saint Augustin.Collection de philosophie
médiévale11.Paris 1944.
6. Mircea Eliade : Histoire des croyances et des Idées religieuses,tome
3.Ch.XXXVII Du bas Moyen Age à la veille de la Réforme.E.Payot 1983
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