Migrations et changement climatique dans l’espace caribéen - mars 2016 - 2 -
Repérer ces « signaux faibles » préfigurant d’éventuels futurs souhaitables fait l’objet de la prospective
du présent5, démarche mise en œuvre dans la première étape des travaux animés par France
Volontaires.
Lors de la première étape de la démarche prospective, les enquêtes sur les parcours des volontaires se
sont concentrées sur 4 territoires (Cameroun, Maroc, Pérou, Philippines). L’un des thèmes choisis pour le
Débat prospectif élargi a été la nouvelle géographie du volontariat jugée en pleine évolution. À la
rencontre des bouleversements mondiaux et des transformations locales, mais aussi avec l’essor des
réseaux et des mobilités, les échelles spatiales et temporelles des solidarités se reconfigurent. Alors que
les notions d’international et de Nord/Sud semblent soumises à révision, s’affirment l’échelon régional,
le Sud/Sud, les villes, ainsi que le niveau local mais aussi les coopérations de territoires à territoires
prises comme exemples d’ouverture notamment par les jeunes. Les échanges par grandes régions sont
apparus comme un enjeu d’avenir pour la paix, l’environnement, le développement économique, le
travail et la formation des jeunes.
Le détour par un espace régional très différent de l’espace méditerranéen a donc semblé une manière
féconde de se confronter, à l’échelle d’une « région » insulaire présentant des situations très
contrastées. Et de le faire à partir de la problématique des migrations et du changement climatique.
Quant à la méthode proprement dite, elle repose sur plusieurs principes: d’un côté, mettre les
enseignements de la prospective à l’épreuve du réel, c’est-à-dire se demander s’ils sont partagés par les
acteurs, en France, dans les territoires étudiés ou dans d’autres régions, et s’ils peuvent effectivement
faire bouger les lignes du volontariat ; d’un autre côté, être à la hauteur des enjeux du moment6,
marqué par des événements d’une gravité extrême (désordre mondial, terrorisme, catastrophes
écologiques) qui se traduisent notamment par les risques que font peser sur la planète certains
dérèglements climatiques et par les redoutables problèmes que posent les migrations de populations
confrontées à des situations inacceptables dans leurs pays d’origine.
En quoi les volontaires peuvent-ils accompagner les transitions nécessaires au plan culturel,
écologique, économique, social ? Comment, à partir de leurs expériences, peuvent-ils produire de la
connaissance et la transmettre largement pour stimuler l’action au travers d’apprentissages collectifs ?
Comment construire progressivement une Université populaire de l’engagement solidaire au monde,
animée par cet acteur collectif intermédiaire qu’est la plate forme France volontaire.
Ce détour s’est opéré en saisissant l’opportunité de deux événements tenus à Paris à l’automne 2015 qui
ont offert des moments de dialogue exceptionnels à propos des migrations liées au changement
climatique dans l’espace caribéen. Ce détour a permis d’enrichir la réflexion sur un enjeu peu présent
jusqu’ici dans la démarche prospective – celui des transitions écologiques en situations de forte
vulnérabilité — et de le faire en examinant des configurations différentes au regard de l’espace et du
temps, mais aussi quant aux liens qu’entretiennent les Etats et les sociétés civiles pour affronter des
défis auxquels ils se trouvent confrontés. Deux événements d’envergure différente ont été choisis pour
aborder la question posée : le premier, le 27 septembre, dans le cadre de la démarche citoyenne
Alternatiba, à Paris ; le deuxième, le 4 décembre 2015, dans l’espace Générations climat de la COP 21.
Entre les deux, les 16 et 17 octobre, un premier village des alternatives a réuni à Kenscoff, en Haïti, près
d’un millier de personnes.
Élargir le dialogue prospectif à des acteurs impliqués dans des espaces géographiques différents, saisir
les opportunités offertes par des événements d’envergure planétaire initiés par les États ou la société
civile, intégrer à mesure les enseignements dans l’Université populaire de l’engagement solidaire au
monde, tels sont les objectifs du détour accompli, et dont nous allons maintenant rendre compte.
5 La prospective du présent est une démarche de connaissance pour l’action qui vise à stimuler l’intelligence collective des acteurs en situation
en articulant savoirs experts, savoirs professionnels et expériences sensibles. Opérant sur des champs de tensions a priori insurmontables, elle
s’efforce, selon un principe d’optimisme méthodologique, de percevoir sur le terrain les initiatives innovantes, « les signaux faibles », qui, dès
lors qu’on peut les monter en généralité, élargissent le champ des possibles et permettent de co-construire des futurs souhaitables.
6 Tel est l’un des axes majeurs retenus par la Plate forme France Volontaires pour la période 2015-2017.