Le livre posthume de Mohamed El Ayadi, "<i>Les deux visages du Roi</i>", en librairie.
Décédé en octobre 2013 suite à une longue maladie, l'historien et sociologue marocain
Mohamed El Ayadi n'a pas eu suffisamment de temps devant lui pour achever l’ouvrage qu'il a
entamé sur la monarchie marocaine sous l'ère du Roi Hassan II. Sa femme et ses enfants ont
alors pris l'initiative de confier le manuscrit à des spécialistes pour sa révision aux fins d'une
publication. C'est chose faite. Edité à "La Croisée des chemins", le live est disponible à partir de
cette semaine dans les librairies.
Un personnage central, le monarque.
Pour avoir beaucoup publié sur le sujet, feu Mohamed El Ayadi est connu notamment pour sa
réflexion et ses analyses sur l'islam et l'islamisme politique au Maroc, sur les valeurs et les
pratiques religieuses des Marocains. Le présent ouvrage, lui, nous plonge dans le système
politique marocain incarné depuis l'indépendance par un personnage central, le monarque.
C'est un acteur, analyse l'auteur, qui renvoie à un registre séculaire, par sa façon de s'habiller à
l'occidentale et d'exercer le pouvoir selon les normes sécularisées de l'Etat moderne, mais qui
renvoie aussi au registre religieux par sa façon traditionnelle de s'habiller et d'exercer le pouvoir
en tant que commandeur des croyants. Le livre nous renvoie à un style d'exercice du pouvoir
incarné par le Roi Hassan II où la figure du monarque autoritaire se doublant de la figure du
clerc est prégnante. C'est d'ailleurs ce monarque qui a su "réinventer" le makhzen traditionnel,
et a su monopoliser le jeu politique et religieux tant au détriment des partis politiques laïcs qui le
lui contestaient au début de l'indépendance, qu'au détriment des partis islamistes nés quelques
années plus tard. Elément fondamental du pouvoir du monarque, l'aspect religieux, analyse M.
El Ayadi, a été consacré juridiquement et d'une façon moderne par toutes les constitutions qu'a
connues le Maroc.
Tout un chapitre est consacré à l'Islam à l'école.
Elles ont toutes proclamé "le Roi commandeur des croyants pour marquer l'origine divine de
l'autorité royale ." Mais, au-delà de l'aspect politico-religieux
d'exercice du pouvoir sous l'ère de Hassan II et de l'analyse que lui consacre l'auteur, c'est
toute la société marocaine qui a été " islamisée" par
le type d'enseignement imposé par les écoles publiques marocaines à partir de la fin des
années 70 du siècle dernier. D'ailleurs, l'auteur consacre tout un chapitre dans son livre
posthume à "
Islam à l'école
", où il démontre le rôle de l'éducation islamique enseignée dans les écoles publiques et le rôle
des manuels scolaires imposés par le ministère de tutelle. Manuels qui ne font "
que reproduire le discours et les slogans apologétiques de l'islam
", qui ont été d'ailleurs l'objet de toute une étude critique de l'auteur dans l'un de ses écrits aux
années 1980. Et qui ont fait l'objet, rappelons-le, après les attentats terroristes du 16 mai 2003
à Casablanca, d'une refonte globale pour les expurger de cette lecture foncièrement
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