par les praticiens. L’importance du rôle tenu par l’alcool peut être
évidente ou –plus souvent– cachée derrière des motifs de consul-
tations banals (tableau1) et les mésusages d’alcool en dehors de la
dépendance sont plus fréquents que les médecins ne le pensent.
En médecine générale,c’est principalement à l’occasion d’un
problème de comorbidités somatiques,psychiques ou sociales
que l’existence d’un mésusage de l’alcool est envisagée.
Quand repérer ?
Les médecins généralistes sont en première ligne pour le repé-
rage des conduites d’alcoolisation en dehors de la dépendance.
Ils ont un rôle dans la réduction des risques et dans la préven-
tion des complications induites par le mésusage et des passa-
ges d’une catégorie de mésusage à une autre,et notamment de
l’évolution vers la dépendance.
Il faut savoir amener les questions sans être moralisateur ni se
placer en confrontation avec le patient:
–par l’entretien clinique: quelques questions simples sur le
mode de vie;
–lors de l’examen physique: au moment de la palpation abdo-
minale et de l’aire hépatique.
De manière systématique :
– lors d’un premier contact;
– lors d’une demande de certificat médical d’aptitude;
– périodiquement auprès de patients régulièrement surveillés.
De manière opportuniste,en cas :
– de situations somatiques: hypertension artérielle,asthénie,
prise de poids, troubles digestifs,diabète,troubles du sommeil;
–de situations psycho-comportementales: anxiété,dépression,
agressivité,troubles du sommeil,troubles sexuels;
–de situations environnementales: problèmes conjugaux, dif-
ficultés familiales,lorsqu’un membre de la famille pose une
question au sujet d’un mésusage d’alcool de la part d’une autre
personne,difficultés au travail;
–d’association à une autre conduite addictive : tabac,cannabis…
–de survenue d’accidents et de traumatismes, en particulier
s’ils ont un caractère répétitif;
–de résultats biologiques perturbés : augmentation de la γGT,
du VGM, des triglycérides.
Dans les situations où toute consommation d’alcool représente
un danger :
– femme enceinte ;
– conducteurs de véhicules, de machines ;
– prescription de médicaments psycho-actifs.
Comment repérer ?
Le repérage est toujours plus facile lorsqu’il est réalisé de façon
systématique.
Par des questions simples pour évaluer la consommation décla-
rée d’alcool (CDA).
«Vous est-il arrivé de boire de l’alcool ces derniers mois?»
Non=non-usage ou déni d’un alcoolo-dépendant.
Oui=poursuite du questionnaire.
«Combien de verres par occasion?»
«Combien d’occasions par mois,semaine ou jour?»
Les questionnaires standardisés ont surtout un intérêt pour
préciser le type de mésusage : AUDIT (explore les 12 derniers
mois),CAGE (explore la vie entière) et FACE.
Les marqueurs biologiques (CDT,VGM et γGT) n’ont pas
d’intérêt pour le repérage précoce.
LA REVUE DU PRATICIEN - MÉDECINE GÉNÉRALE. TOME 18. N°650/651 DU 26 AVRIL 2004 557
Dépistage des mésusages de l’alcool
– Huas D,Allemand H,Loiseau D,
Pessione F,Rueff B.Prévalence du risque
et des maladies liées à l’alcool
dans la clientèle adulte du généraliste:
presque 1 patient sur 5.Rev Prat Med Gen
1993 ;203 :39-44.
Il s’agit de la première étude nationale,
sur 7 régions dont Bordeaux. L’objectif
était de préciser la prévalence du risque
et des maladies liées à l’alcool dans la
clientèle des généralistes.
À l’époque,les buveurs qui
consommaient trop d’alcool étaient
différenciés en :
– consommateurs à risque (usage
à risque) :plus de 28 verres par semaine
pour les hommes et plus de 14 verres
par semaine pour les femmes;
– consommateurs excessifs
(usage nocif ou abusif) :
consommateurs à risque présentant
une alcoolopathie (dommages
somatiques ou sociaux liés à l’alcool),
mais sans alcoolo-dépendance ;
– les alcoolo-dépendants :perte de la
liberté de s’abstenir de consommer.
Les résultats suivant ont été observés:
– consommateurs à risque :hommes
(6,7%) et femmes (4,8 %) ;
– consommateurs excessifs
(à problèmes) : hommes (5,9 %)
et femmes (2,7 %) ;
– alcoolo-dépendants :hommes (12,8 %)
et femmes (2,2 %).
Au total :hommes (25,4 %) et femmes
(9,7 %). La consommation déclarée
d’alcool (CDA) est positive pour 20,3 %
des hommes et 9 % des femmes.
– Huas D,Darne B,Lombrail P,Leblanc B,
Rueff B.Malades alcooliques et
consultations en médecine générale :
prévalence et détection.Rev Prat Med
Gen 1990 ;81 :45-9.Cette étude,limitée
géographiquement,et ne concernant
que les hommes,avait mis en évidence
que 18 % des hommes avaient une CDA
supérieure à 28 verres par semaine.
– Trugeon A.Observatoire régional
de la santé et DRASS de Picardie.
Patients,alcool et tabac en médecine
générale :enquête régionale de
morbidité ;1991.Cette étude,également
limitée géographiquement,a observé
que 18,3 % des hommes avaient une
CDA > 28 verres/semaine,et 6,6 % des
femmes avaient une CDA >
14 verres/semaine.
– DREES.Les risques d’alcoolisation
excessive chez les patients ayant recours
aux soins un jour donné.Études et
résultats 2002 ;192 :1-12. 18 % des
patients consultant en médecine de
ville un jour donné ont un problème
avec l’alcool (3/4 d’hommes pour 1/4
de femmes).
Deux hommes âgés de 35 à 64 ans
sur 5 étaient concernés par ce
problème en médecine générale.
–Une étude de l’ORS de Champagne-
Ardenne (Enquête alcool en médecine
libérale – 2000)a montré que 16 %
de la clientèle des médecins généralistes
avaient un mésusage d’alcool
(6% étaientalcoolo-dépendants).
ESTIMATION DES MODES DE CONSOMMATIONS
AU TRAVERS DE DIFFÉRENTES ÉTUDES :
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