Changements climatiques et droits de l`homme

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Projet du 16-11-15
Changements climatiques et droits de l’homme
Rapport élaboré par le Sabin Center for Climate Change Law à l’intention du
Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE)
Résumé analytique
Il est admis de longue date qu’un environnement propre, sain et fonctionnel est essentiel à
l’exercice des droits de l’homme, notamment les droits à la vie, à la santé, à l’alimentation et à
un niveau de vie suffisant. Les changements climatiques anthropiques représentent, pour
l’environnement naturel et les sociétés humaines, la menace la plus importante et la plus
répandue que le monde ait jamais connu. Le dernier rapport d’évaluation du Groupe d’experts
intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) décrit la manière dont les changements
climatiques observés et prévus auront des incidences négatives sur des milliards d’individus et
sur les écosystèmes, les ressources naturelles et les infrastructures physiques dont ils dépendent.
Ces incidences négatives englobent des phénomènes d’apparition soudaine qui menacent
directement les vies et la sécurité des êtres humains, ainsi que des formes plus progressives de
dégradation environnementale qui entraveront l’accès à l’eau potable, à la nourriture et à d’autres
ressources essentielles qui soutiennent la vie humaine.
Les changements climatiques influeront ainsi profondément sur la jouissance des droits de
l’homme par les individus et les communautés dans le monde entier. Il ne s’agit pas uniquement
d’une possibilité future abstraite. Les changements climatiques ont déjà des incidences sur les
températures, les conditions hydrologiques, le fonctionnement des écosystèmes et la productivité
agricole dans de nombreuses régions. Tout donne également à penser que certaines
communautés, notamment celles situées dans les régions de l’Arctique où les glaciers fondent
rapidement et les zones côtières de faible élévation, seront forcées de se déplacer dans un avenir
très proche.
Par ailleurs, les mesures prises pour atténuer les émissions de gaz à effet de serre et s’adapter aux
changements climatiques peuvent elles-mêmes nuire à la jouissance des droits de l’homme, ce
qui complique encore la situation. La communauté internationale s’est engagée à allouer ou
affecter 100 milliards de dollars par an pour financer des projets d’atténuation et d’adaptation
dans les pays en développement. Il est primordial que le monde, dans le cadre de la lutte contre
les changements climatiques, poursuive son objectif en respectant pleinement les droits de
l’homme.
Le présent rapport décrit la façon dont les gouvernements et autres acteurs peuvent lutter contre
les changements climatiques d’une manière compatible avec leurs obligations de respecter, de
protéger, de promouvoir et de mettre en œuvre les droits de l’homme. Un objectif clé est
d’éclairer les décisions prises par la Conférence des Parties à la Convention-cadre des
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Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC) lors de la conférence qui se tiendra
sous peu à Paris. Toutefois, l’analyse et les recommandations présentées dans le présent rapport
ne se limitent pas à l’actuel cycle de négociations internationales sur le climat. Un autre objectif
clé est d’éclairer les décisions et les mesures prises par les nations, les autorités infranationales,
les organisations internationales et les acteurs privés pour lutter, tant dans le contexte de la
CCNUCC qu’en-dehors de celui-ci, contre les changements climatiques dans les années à venir.
La première partie décrit les prévisions et observations les plus récentes concernant la manière
dont les incidences des changements climatiques et les mesures visant à y faire face peuvent
avoir des répercussions sur l’environnement, les individus et les communautés. Les principales
conclusions sont les suivantes :
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Les incidences des changements climatiques sur les ressources en eau douce, les
écosystèmes et les établissements humains sont déjà en train d’entraver l’accès à l’eau
potable, à la nourriture, au logement ainsi qu’à d’autres besoins fondamentaux de l’être
humain; de porter atteinte aux moyens de subsistance; et d’obliger des populations à
abandonner leurs foyers. Même si nous respectons l’objectif que s’est fixé la
communauté internationale de maintenir le réchauffement planétaire en dessous de 2°C,
ces incidences s’étendront considérablement au cours des prochaines décennies.
Ces incidences constituent une atteinte grave à l’exercice de droits fondamentaux tels que
les droits à la vie, à la santé, à l’eau, à l’alimentation, au logement et à un niveau de vie
suffisant.
Les mesures d’atténuation, d’adaptation et de géo-ingénierie peuvent également porter
atteinte à l’exercice des droits de l’homme. Par exemple, il existe des cas de projets dans
les domaines de l’énergie hydroélectrique et des biocarburants ayant donné lieu à des
violations des droits de l’homme. Il existe également un risque élevé de violations des
droits de l’homme découlant de la mise en œuvre de programmes de réinstallation pour
les personnes déplacées ou menacées de déplacement sous l’effet des changements
climatiques, entraînant la nécessité de veiller à ce que ces programmes soient entrepris
avec une participation adéquate et le consentement des personnes qui sont réinstallées.
La partie II résume les obligations des gouvernements et des acteurs privés de faire face à ces
incidences. La présente section commence par examiner la manière dont les organismes des
Nations Unies et les gouvernements ont pris conscience de la relation entre les changements
climatiques et les droits de l’homme. Elle fournit ensuite un examen plus détaillé de certaines
obligations spécifiques dans ce contexte. Il s’agit notamment des obligations ci-après :
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Obligations procédurales pour tous les gouvernements de veiller à ce que le public
concerné : i) soit adéquatement informé des incidences des changements climatiques et
des mesures prises pour atténuer les effets des changements climatiques et s’y adapter;
ii) participe de manière appropriée aux décisions publiques concernant les changements
climatiques; et iii) ait accès à des recours administratifs, judiciaires ou autres lorsque des
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droits sont violés du fait des changements climatiques et des mesures prises pour y faire
face.
Obligations de fond pour tous les gouvernements de : i) protéger les droits de l’homme
contre les dommages liés aux changements climatiques; ii) prendre des mesures à l’égard
des facteurs déterminants des changements climatiques en réglementant les émissions de
gaz à effet de serre sur leur territoire; iii) coopérer à l’échelle internationale pour protéger
les droits de l’homme contre les dommages liés aux changements climatiques; iv) lutter
contre les incidences transfrontières des changements climatiques; et v) protéger les
droits de l’homme dans l’ensemble des activités d’atténuation et d’adaptation.
Les États ont également des obligations spécifiques concernant certains groupes,
notamment les femmes, les enfants et les peuples autochtones. En particulier, les États
doivent obtenir le consentement préalable, libre et éclairé des peuples autochtones avant
de prendre toute mesure qui pourrait porter atteinte aux terres et ressources traditionnelles
de ces peuples.
Les acteurs privés ont également l’obligation de lutter contre les incidences des
changements climatiques sur les droits de l’homme, et devraient se référer aux Principes
directeurs relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme des Nations Unies pour
s’assurer qu’ils respectent pleinement les droits de l’homme dans toutes les activités
entreprises.
La partie III examine la mise en œuvre de ces obligations, en accordant une attention particulière
aux activités entreprises par les gouvernements, que ce soit dans le contexte de la CCNUCC ou
en-dehors de celui-ci. Elle rend compte de plusieurs évolutions récentes dans ce domaine :
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Certains États commencent à reconnaître les liens entre les droits de l’homme et les
changements climatiques dans des rapports transmis au secrétariat de la CCNUCC, mais
ce n’est pas le cas pour la majorité des nations développées.
Il existe un important « écart d’émissions » entre les engagements en matière
d’atténuation énoncés dans les contributions prévues déterminées au niveau national et
les réductions d’émissions nécessaires pour maintenir le réchauffement climatique à 2°C
ou en-dessous.
Il existe également un important « déficit de financement en matière d’adaptation »,
compte tenu de ce qui sera nécessaire pour s’adapter aux changements climatiques et des
ressources financières, technologies et capacités disponibles.
Enfin, il existe un important « déficit de financement » entre l’assistance financière et
technique qui a été fournie ou promise aux pays en développement et les ressources qui
seront nécessaires pour s’assurer que les changements climatiques n’entravent pas
l’exercice des droits de l’homme dans ces pays. Cela reste vrai même si nous atteignons
l’objectif des 2C.
La plupart des mécanismes internationaux de financement de l’action climatique sont
assortis de mesures de sauvegarde destinées à protéger les droits de l’homme, mais des
améliorations peuvent être apportées, en particulier concernant la surveillance et
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l’évaluation de ces programmes ainsi que l’ensemble des violations des droits de
l’homme.
La partie IV propose des recommandations concernant la manière dont les gouvernements et
d’autres acteurs peuvent mieux intégrer les questions relatives aux droits de l’homme dans leurs
activités d’atténuation et d’adaptation. Les recommandations clés formulées à l’intention des
Parties à la CCNUCC sont les suivantes :
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Les Parties devraient s’engager à atteindre des objectifs d’atténuation plus ambitieux
pour veiller à ce que la hausse de la température moyenne de la planète s’établisse à 2°C
ou en-dessous.
La Conférence des Parties devrait reconnaître le lien entre les changements
climatiques et les droits de l’homme dans l’accord de Paris.
Les mesures de sauvegarde prévues dans les différents mécanismes de financement
de l’action climatique devraient être uniformisées et révisées pour assurer le plein
respect des droits de l’homme.
Les Parties devraient renforcer l’assistance financière et technique fournie aux pays en
développement qui sont les plus vulnérables aux effets des changements climatiques, afin
de protéger les droits de l’homme dans ces domaines.
Les Parties devraient continuer d’examiner la question des pertes et préjudices d’une
manière transparente afin de répondre aux préoccupations de tous les pays concernés.
Le rapport contient également d’autres recommandations à l’intention des gouvernements
concernant les mesures que ceux-ci peuvent adopter unilatéralement pour protéger les droits de
l’homme dans le contexte des changements climatiques, ainsi que des recommandations à
l’intention des autorités locales et des acteurs privés.
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