Discours de Monsieur Gérard Collomb Sénateur-Maire de Lyon A l’occasion des 20 ans de la Grande Mosquée de Lyon 146, Boulevard Pinel – Lyon 8e Mardi 30 septembre 2014 ** * 1 Monsieur le Recteur de la Grande Mosquée de Lyon, Cher Kamel Kabtane, Monsieur le Préfet de la Région Rhône-Alpes, Préfet du Rhône, Monsieur le Chef de Mission Adjoint près l’Ambassade d’Indonésie, Mesdames et Messieurs les Parlementaires, Madame la Représentante du Président du Conseil Régional Rhône-Alpes, Madame la Présidente du Conseil Général du Rhône, Mesdames et Messieurs les représentants du Corps consulaire de Lyon, Monsieur le Gouverneur Militaire de Lyon, Mesdames et Messieurs les Elus, Mesdames et Messieurs les représentants des Autorités judiciaires, Monsieur le Cardinal, Archevêque de Lyon, Primat des Gaules, Monsieur le Grand Rabbin de Lyon, Messieurs les représentants des Autorités religieuses, Mesdames et Messieurs les représentants des Universités, Mesdames et Messieurs les représentants des associations, Cher Michel Noir, Mesdames et Messieurs, C’est pour moi une joie profonde que nous soyons rassemblés ce matin pour célébrer le 20e anniversaire de la Grande Mosquée de Lyon. Pour beaucoup d’entre nous, cet espace est devenu au fil des ans un lieu d’amitié, où nous nous retrouvons à intervalles réguliers pour célébrer les grands moments de la vie de nos concitoyens de confession musulmane. 2 Je suis de ceux qui pensent qu’il y a dans chaque homme un besoin d’absolu, une volonté de transcendance. Et comment ne sentir ici la force de ce besoin ? Oui, la spiritualité est une composante essentielle de notre vie humaine et il est pour nous fondamental d’en respecter les différentes expressions. Cette exigence, je l’ai toujours eue à l’esprit en tant qu’homme mais aussi en tant que responsable politique. C’est pour cela que depuis que je suis Maire de Lyon, j’ai toujours tenu à porter la même attention, la même considération à toutes les religions présentes dans notre Cité. Car telle est bien là la force et l’extraordinaire modernité de la laïcité. Elle est la liberté que la République garantit à tous les cultes. Elle est cet égal respect qu’elle leur accorde. C’est au nom de cette laïcité que les autorités de notre ville avaient soutenu le projet de construction de cette Grande Mosquée, pour permettre enfin aux Musulmans de notre agglomération de vivre dignement leur foi. Cela, tous les témoignages que nous venons d’entendre en témoignent. Soutenue par l’ensemble du Conseil municipal, toutes sensibilités politiques confondues, cette Grande Mosquée a incarné une véritable victoire collective : la victoire d’une démocratie mature ; la victoire d’une République sûre d’elle-même et de sa capacité à faire vivre ensemble des femmes et des hommes à la fois semblables et singuliers, égaux et différents. Victoire, aussi, on l’a vu dans le film qui nous a été présenté, de cet esprit d’ouverture propre à l’identité lyonnaise et qui promeut le dialogue, la concorde et la solidarité, aux antipodes des clivages partisans et des querelles de chapelles. 3 La construction de cette Grande Mosquée a été un moment fort de l’histoire notre ville. Ce 20e anniversaire doit être l’occasion de rappeler notre fidélité à notre histoire commune, faite de brassage des hommes et des cultures ; l’occasion de réaffirmer notre attachement indéfectible à ce modèle de civilisation où la diversité est une richesse. Cette Mosquée a 20 ans, mais la présence de la culture islamique à Lyon, en France et en Europe est bien plus ancienne. L’Europe chrétienne et le monde islamique se sont mutuellement nourris au cours de plusieurs siècles de relations faits d’emprunts et d’hybridations réciproques. Nos sciences et nos arts en portent aujourd’hui encore la marque. Tout comme l’illustre la mémoire, plus récente, des deux siècles passés, avec ses moments de gloire et d’unité républicaine, mais aussi ses heures sombres, quand la colonisation française s’imposait par la violence et les humiliations. Ce que nous sommes aujourd’hui résulte de ce passé, qui a fait de la civilisation islamique une composante de notre culture commune et de l’Islam la seconde religion de France. Monsieur le Recteur, Cher Kamel Kabtane, Je sais combien cette dimension historique et culturelle est importante pour vous, comme elle l’était pour les premiers présidents de l’Association Culturelle Lyonnaise Islamo-Française, le Docteur Lahnech et le Capitaine Kheliff, pour qui j’ai une pensée émue aujourd’hui. Je veux saisir l’occasion de cette célébration pour vous dire combien nous sommes sensibles à la démarche que dans leur sillage, vous avez poursuivie. Au nom de tous les Lyonnais, je veux vous exprimer ma gratitude pour le travail que vous effectuez afin que cette Mosquée soit un espace d’ouverture et de dialogue ; un lieu de connaissance de l’Islam, pour les Musulmans comme pour 4 l’ensemble de nos concitoyens, quelles que soient leurs croyances et leurs convictions. Cela est à mon sens fondamental et fait de cette Grande Mosquée de Lyon un modèle en France ; un modèle de l’Islam de France. Je pense à la formation, unique dans notre pays, dispensée conjointement par l’Institut Français de Civilisation Musulmane, l’Université de Lyon 3 et l’Université Catholique de Lyon et dont la première promotion de diplômés a été saluée l’an dernier par le Ministre de l’Intérieur. Je pense à votre projet de donner un lieu, à côté de la Mosquée, à cet Institut Français de Civilisation Musulmane. Ce projet, que nous soutenons et que nous inscrirons au plan de mandat, doit permettre une approche laïque et ouverte à tous des cultures d’Islam. Je pense aussi à vos initiatives, constantes, en faveur du dialogue interreligieux et dont témoigne cette célébration des 20 ans de la Grande Mosquée. Avec notamment ce soir ce concert de Musiques sacrées à l’Auditorium, dont vous avez souhaité qu’il représente la pluralité des expressions religieuses. Cette démarche que vous cultivez et que cultivent à vos côtés d’autres responsables religieux lyonnais font de notre ville un exemple. Chacun perçoit la valeur d’un tel état d’esprit dans la période que nous traversons. Averroès le disait déjà il y a plus de huit cent ans, « L'ignorance mène à la peur, la peur mène à la haine, la haine conduit à la violence ». Toute l’histoire de l’humanité est là pour en témoigner. Et l’actualité nous en donne hélas des exemples quotidiens. Nous sommes tous effarés par cette percée des fanatismes qui sèment aujourd’hui terreur et désolation dans le monde. Face à cette idéologie de haine, il est essentiel de réaffirmer notre unité ; essentiel de redire que pouvoirs politiques et religieux, main dans la main, nous combattrons ensemble l’intolérance, l’obscurantisme, l’extrémisme ; 5 Essentiel de dire que l’islamisme est aux antipodes de l’Islam et de ses valeurs de fraternité, de partage, de dépassement de soi, de ses idéaux d’altruisme et de paix. Vous l’avez rappelé, Cher Kamel Kabtane, dès le mois d’août, en dénonçant la barbarie de ceux qui osent se revendiquer de l’Islam pour commettre les actes les plus odieux. Et l’ensemble des responsables musulmans de France l’ont ensuite rappelé à vos côtés le 15 septembre dernier. Ces déclarations sont fondamentales pour lutter contre l’ignorance, les amalgames et la théorie délétère du choc des civilisations que tentent de répandre les extrémistes de tous bords. Elles sont fondamentales aussi pour combattre le dénuement intellectuel, culturel et affectif de ces jeunes en mal de repères qui se perdent dans le fanatisme. Face à ce phénomène notre réponse doit être claire et forte. Claire et forte sur le plan des valeurs et sur ce plan votre rôle, le rôle des responsables religieux à nos côtés est primordial. Claire et forte aussi sur le plan des actions et de la prévention. Je pense à la responsabilité qui est la nôtre, collectivement, de permettre aux jeunes issus de nos banlieues de se construire un avenir. L’urgence est là et j’en ai pour ma part une conscience aigue. C’est pour cela qu’à Lyon, nous continuons d’œuvrer sans relâche à la construction d’une ville toujours plus équilibrée, en mettant fin aux cassures spatiales et sociales, en combattant la ghettoïsation, en facilitant l’accès au logement, à l’emploi mais aussi au savoir et à la culture dans tous les quartiers de notre agglomération. Par nos réalisations, par la réussite de notre ville, notre devoir commun est de faire la preuve que nous pouvons construire une société où chacun a sa place, où la jeunesse a un avenir et où la démocratie, la liberté, le respect, le dialogue sont porteurs de progrès pour tous. 6 C’est ce message de confiance que nous exprimons ensemble aujourd’hui en célébrant comme nous le faisons les 20 ans de la Grande Mosquée de Lyon. Merci, Cher Kamel Kabtane. Merci à vous tous qui, aujourd’hui, par votre présence, témoignez de votre volonté de promouvoir à nos côtés cette confiance en l’avenir. 7