IUFM DE BOURGOGNE
Mémoire professionnel de PE2.
Apprendre à
philosopher dès le
cycle II
Laguillaumie Johanne
M. DURAND
Année 2004
N°0261211A
1
SOMMAIRE
Introduction ___________________________________________________ p.2
I) De quelle philosophie parlons-nous ?__________________________ p.3
1) Est-il possible de faire de la philosophie à l’école primaire ? ________ p.3
2) Définition de « philosopher ». ________________________________ p.4
3) Quelles sont les conditions de la réflexion philosophique ? _________ p.6
4) Qu’est-ce que faire de la philosophie avec les enfants ? ___________ p.7
a)
Les courants de la philosophie pour enfant.
___________________ p.7
b)
Les compétences développées et acquisitions.
_________________ p.10
II) Pourquoi faire de la philosophie à l’école ? Objectifs
et intérêts._____________________________________________________ p.12
1) Une pratique en accord avec les instructions officielles___________ p.12
a)
Domaine du développement de la pensée et du langage
.__________ p.12
¾ L’oral au service de la construction de la pensée._______________ p.12
¾ La discussion philosophique au service du développement de
compétences langagières. ______________________________ p.12
b)
Domaine de l’éducation à la citoyenneté
_____________________ p.14
2) Pourquoi philosopher si jeune? _______________________________ p.15
a)
Pour un meilleur développement des compétences liées
à la discussion philosophique.
_____________________________ p.15
b)
Pour que l’enfant se construise et structure sa personnalité
.______ p.15
c)
Pour donner plus de sens aux apprentissages par un autre
rapport aux savoirs
.___________________________________ p.15
3) Progrès des élèves… _______________________________________ p.17
a)
… dans toutes les disciplines
______________________________ p.17
b)
… au sein même l’atelier
_________________________________ p.18
III) Comment mettre en place un atelier de philosophie ? _________ p.20
1) La préparation____________________________________________ p.20
a)
Présenter et expliquer aux parents
_______________________ p.20
b)
Présenter et expliquer aux enfants
________________________ p.20
c)
Choisir un sujet et faire des recherches.
___________________ p.21
2) Trois modalités pour la mise en place d’une pratique de la
philosophie dans sa classe. _____________________________________ p.21
3) Les divers supports ________________________________________ p.22
a)
Le thème, la question
__________________________________ p.22
b)
Support vidéo
________________________________________ p.24
c)
Support écrit
________________________________________ p.24
4) L’organisation de l’atelier. ___________________________________ p.27
5) Rôles de l’enseignant. _______________________________________ p.28
6) Les limites de cette pratique. ________________________________ p.30
Conclusion_______________________________________________________ p.32
Bibliographie_____________________________________________________ p.33
Annexe : Retranscription d’une séance sur « Qu’est ce que penser ? » p.34
2
Introduction
L’idée de faire philosopher des enfants du primaire peut sembler a
priori saugrenue tant le décalage est grand entre les exigences supposées de
la philosophie et les capacités des enfants de l’âge du cycle II. Pourtant c’est
ce que de nombreux chercheurs et pédagogues ont voulu mettre en place
depuis quelques années. Des courants se sont développés et ont donné lieu à
des pratiques qui, bien que variées, convergent toutes vers un objectif
principal : développer chez l’enfant une pensée structurée, critique et
autonome. Il reste qu’à l’heure actuelle beaucoup d’enseignants expriment des
réticences à l’égard de la philosophie elle-même et portent un regard pour le
moins critique sur son apprentissage au sein de l’école primaire. Sa pratique
n’est donc pas encore très présente dans les écoles aujourd’hui.
C’est dans le cadre de ma formation à l’IUFM que j’ai entendu parler de
ces recherches. Après une licence Psychologie et une licence de Sciences de
l’éducation, je ne domine que partiellement en tant que discipline et rien ne
m’amenait, en principe, à envisager une telle pratique. Pourtant, je fus aussi
intéressée qu’intriguée. Beaucoup de questions m’assaillaient, issues de ma
propre réflexion ou de remarques d’interlocuteurs avec qui j’évoquais la
philosophie pour enfants. Il fallait alors que je voie par moi-même de quoi il
s’agissait concrètement. Puis lors de d’un stage effectué en Grande section,
jai pu observer la capacité réflexive déjà développée chez ces enfants de 5
ans ainsi que leur capacité à poser des questions existentielles (Pourquoi
sommes-nous là ?), métaphysiques (Que devient-on quand on meurt ?)… Que
faire de ces questions qui les touchent tant ? Les éviter ? Pourquoi ne pas
profiter de la pertinence des propos de certains enfants pour aborder ces
sujets de manière philosophique et non plus psychologique ou affective ? Ces
questions m’ont orientée vers une interrogation plus précise : la philosophie
dès le cycle II, pourquoi et sous quelle forme ?
Le contenu de mes recherches peut se décliner en plusieurs questions
auxquelles je tente de répondre en explicitant mes propos par l’analyse de ma
propre pratique avec des enfants ce CP/CE1 que j’avais à charge lors d’un
stage en responsabilité :
Amener des enfants de cet âge à philosopher, en quoi cela consiste-t-il ?
Pourquoi pratiquer la philosophie à l’école primaire alors que les instructions
officielles ne l’évoquent pas ? Quels bénéfices en tirent les élèves ?
Et comment mettre en place une telle activité dans sa classe ? Comment
l’enseignant peut-il s’y prendre ?
Je vais donc, à travers ce mémoire, tenter d’expliquer en quoi la
pratique de la philosophie dès le cycle II est justifiée, en quoi elle est
intéressante et en quoi elle implique des exigences particulières.
3
I) De quelle philosophie parlons-nous ?
1) Est-il possible de faire de la philosophie à l’école
primaire ?
La philosophie est une discipline difficile et exigeante, on le sait en
observant les problèmes auxquels sont confrontés les élèves de Terminale.
Comment peut-on envisager d’enseigner à des élèves de primaire ce qui pose
tant de difficultés à des élèves de 17 ans ? Les enfants ne sont-ils pas trop
jeunes pour parler de la vie, de l’amour, de la mort ? Ont-ils les capacités
intellectuelles, les connaissances requises, l’expérience suffisante, la maturité
psychique pour aborder ces problèmes ?
Autant de questions et de résistances qui s’expriment autour de nous
lorsque l’on parle de faire philosopher des enfants.
¾ La question de leur âge fait partie des plus récurrentes, ainsi que
celle de leur maturité psychique et intellectuelle. Ainsi, Piaget a défini
plusieurs stades que tous les enfants franchiraient successivement et sans
exception, et il a plus précisément avancé que les enfants ne pouvaient
accéder au raisonnement qu’à partir du stade formel, situé approximativement
au début de l’adolescence. Ceci signifie que selon Piaget, la raison doit venir à
son moment dans l’évolution de l’enfant et qu’on ne peut pas brûler les étapes.
Pourtant, comme Karl Jaspers le fait remarquer, dans Introduction à la
philosophie, les enfants posent très tôt des questions profondément
philosophiques. Ils ont envie de philosopher. Leur aptitude à raisonner se
manifeste dans la portée existentielle, métaphysique,.. de leurs questions. Par
exemple, on peut entendre un enfant demander « Pourquoi existe-t-on ? » ou
bien « Où va-t-on quand on est mort ? », ou encore « Pourquoi doit-on
apprendre ? ». « La philosophie se nourrit de l’étonnement et l’enfant, par
excellence, possède cette faculté » (Les Cahiers Pédagogiques, 2000, n°386).
Mais, ils semblent perdre cette capacité en vieillissant probablement car ils
n’ont pas été éveillés au questionnement.
¾ Ensuite, de nombreuses objections concernent la nature trop
abstraite du sujet pour de si petits enfants. Dans Faire de la philosophie à
l’école élémentaire, Anne Lalanne explique que philosopher c’est abstraire
puisqu’il s’agit de dégager une généralité à partir de notions pour tenter
d’établir une universalité. Comment l’enfant, n’étant encore sensible qu’au
particulier et au quotidien, en serait-il capable ?
L’enfant est plus sensible au concret, il est vrai, mais cela ne signifie
pas qu’il soit totalement incapable d’abstraction. D’ailleurs, on peut constater
que le langage, manipulé très tôt par l’enfant, nécessite une certaine faculté
d’abstraction et de symbolisation. De la même manière, on confronte nos
enfants dès la maternelle aux concepts mathématiques qui sont par essence
4
une abstraction du sensible. Alors pourquoi l’enfant ne serait-il pas capable
d’accéder à l’abstraction des idées ?
Les deux prochaines questions renvoient plus aux résistances liées aux
représentations que beaucoup se font de la philosophie.
¾ Pour eux, on ne peut pas philosopher sans le vocabulaire technique qui
s’y rapporte car la lecture des textes est pratiquement impossible sans sa
maîtrise. En conséquence, pour un enfant, cela serait complètement hors de
propos.
Il faut savoir que ce vocabulaire s’est développé car les philosophes ont un
souci de précision et redoutent les contresens dont la langue de tous les jours
est fortement pourvue. Toutefois, si la pensée philosophique est bien définie
dans un vocabulaire spécifique, elle n’en est pas moins exprimable dans la
langue de tous les jours. Ainsi que le fait Lalanne dans son livre, Faire de la
philosophie à l’école élémentaire, on peut faire référence à Socrate qui n’a
jamais employé ce vocabulaire et qui pourtant est un de nos plus grands
philosophes.
¾ De la même manière, un certain nombre de personnes considèrent
que, sans lecture philosophique, on ne peut pas philosopher. A nouveau, je
dirais qu’indéniablement, on philosophe mieux avec des connaissances
doctrinales mais soulignons qu’avoir appris la philosophie n’est pas philosopher.
La philosophie ne s’apprend pas, on en apprend les doctrines, les courants, les
pensées d’auteurs, alors qu’on peut apprendre à philosopher.
2) Définition de « philosopher ».
Bien souvent, le terme de « philosophie » n’est pas employé comme il le
devrait ou renvoie à des idées fausses. En effet, pour bien des personnes, la
philosophie renvoie essentiellement au « modèle » de la Terminale, à leurs
souvenirs scolaires ; à savoir acquérir une culture d’auteurs philosophes et de
textes, écouter des cours magistraux en prenant des notes, faire des
dissertations.
C’est pour cela qu’il me semble nécessaire de définir de manière précise
ce qu’est la philosophie ou plus exactement ce qu’est « philosopher ».
Tout d’abord, étymologiquement, la philosophie est la recherche de la
sagesse. Anne Lalanne précise qu’il s’agit d’une sagesse propre à l’homme, une
sagesse à rechercher au travers de son rapport à lui-même, au savoir, au
monde, aux autres.
Elle complète ainsi le dictionnaire Hachette qui définit la philosophie
comme un retour du savoir sur lui-même. En effet, elle explique que
philosopher est une activité réflexive qui consiste à faire un retour sur ses
représentations pour prendre conscience de ce que l’on pense, pour savoir
quelle est l’origine de ce savoir et enfin jusqu’où vaut ce savoir comme savoir,
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