cas image
Une protéine clé pour la transmission
d’un virus de plante à la pointe des stylets
de l’insecte vecteur
M. Blanc
1
M. Uzest
1
T. Candresse
2
M. Drucker
1
A. Fereres
3
D. Gargani
1
E. Garzo
3
E. Hébrard
4
1
UMR BGPI, Inra-Cirad-AgroM,
TA A54/K,
Campus international de Baillarguet,
34398 Montpellier Cedex 05
2
Inra, UMR Génomique,
Villenave d’Ornon
3
CSIC, CCMA, Madrid, Espagne
4
IRD, Montpellier
Du fait de l’immobilité de leurs hôtes, l’immense majorité des virus de plante
utilisent des vecteurs spécifiques pour passer d’un hôte à un autre. Ces « véhi-
cules de transport » sont principalement des arthropodes et en grande majorité
des pucerons, qui sont des insectes de type piqueur-suceur [1]. Pour les interac-
tions virus-vecteur, la stratégie la plus communément utilisée par les virus de
plante est la transmission dite non circulante, où les particules virales prélevées
lors d’un repas dans les cellules infectées seront retenues au niveau de sites
d’attachement dans les pièces buccales antérieures de l’insecte sans effectuer de
passage à l’intérieur de son organisme. Ces particules virales seront ensuite
relarguées de ces sites d’attachement lors de piqûres sur de nouvelles cellules
hôtes et induiront ainsi l’infection dans de nouvelles plantes [2]. Si les méca-
nismes moléculaires de la transmission non circulante sont bien documentés en
ce qui concerne le partenaire viral, les sites d’attachement correspondants dans
les stylets du vecteur demeurent la principale « boîte noire » pour laquelle
aucune donnée n’est disponible. Malgré l’importance de ce mode de transmis-
sion, l’existence même d’un récepteur spécifique n’a jamais été prouvée pour
aucun virus. Dans une étude très récemment publiée [3], nous avons localisé
précisément le récepteur du Caulifower mosaic virus (CaMV) et déterminé sa
nature chimique.
Le Caulifower mosaic virus (CaMV) est un virus de plante
dont la transmission non circulante par un puceron vecteur
est très bien caractérisée. P2 est la protéine virale qui établit
le lien entre le virion et les sites d’attachement chez le
puceron. Cette protéine peut être produite et purifiée en
système hétérologue [4], et nous possédons un mutant
ponctuel de P2 (P2Rev5), déficient pour la transmission par
vecteur [5], un outil particulièrement intéressant pour la
recherche de molécules réceptrices chez l’insecte. Les sty-
lets du puceron sont des organes peu caractérisés qui ne
contiennent pas de cellules et sont composés principale-
ment de chitine. Ils se présentent comme quatre longues
aiguilles : deux stylets mandibulaires externes entourant
deux stylets maxillaires internes. Ces derniers possèdent
une architecture complexe sur leur face interne qui présente
des invaginations et excavations complémentaires assurant
une coaptation sur toute la longueur et ménageant l’exis-
tence des deux canaux, alimentaire et salivaire. Ces canaux
sont séparés sur près de 99 % de la longueur totale des
stylets et se rejoignent à l’extrémité distale pour former un
court canal commun.
Des structures sphériques, présentant les caractéristiques
spécifiques de particules du CaMV, n’ont été observées par
Figure 1. Caractérisation du récepteur du Cauliflower mosaic virus (CaMV) dans les stylets de l’insecte vecteur. A) Observation par
microscopie électronique de pseudo-particules virales (flèches) à l’extrémité distale des stylets maxillaires du puceron vecteur
Brevicorynae brassicae, au niveau du canal commun, magnifié en B), dans une zone anatomique particulière montrant une densification
de la surface de la cuticule des stylets, magnifié en C). D) Observation par microscopie à épifluorescence de stylets disséqués incubés
avec la protéine virale P2-GFP. P2-GFP fluoresce en vert exclusivement dans le canal commun à l’extrémité distale des stylets maxillaires,
dont la chitine auto-fluorescente en jaune-orangé. Les canaux salivaire et alimentaire sont facilement reconnaissables et apparaissent
plus foncés. E) Les tests d’interaction avec un mutant ponctuel de P2 (P2Rev5GFP) déficient pour la transmission, F) ou les stylets d’un
puceron non-vecteur montrent un défaut d’accrochage de la protéine au niveau des stylets. G) P2GFP ne s’attache plus sur des stylets
pré-incubés avec la protéinase K, H) ou avec la chitinase. Cela montre que le récepteur du CaMV est une protéine cuticulaire. ma : stylets
mandibulaires ; mx : stylets maxillaires ; de : dendrites. Barre en A, B, C = 100 nm ; barre en D, E, F, G, H = 5 lm.
Virologie 2008, 12 (1) : 70-2
doi: 10.1684/vir.2008.0150
Virologie, Vol. 12, n° 1, janvier-février 2008
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