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dire que cette pêche d'un nouveau genre ne vise pas à faire prisonnier, ou encore ne sert pas l'intérêt
du pêcheur. Elle vise à sortir les hommes du monde des profondeur - « Avance en eau profonde » -
pour les arracher à ce lieu inconnu sous-marin qui symbolisait clairement, chez les juifs, le monde
des puissances infernales et du mal. La pêche apostolique consiste à retirer les hommes de l'emprise
du démon et du péché, des ténèbres et de la mort, pour leur redonner la vie perdue, les ranimer d'un
souffle divin nouveau, les vivifier de la grâce qui configure au Seigneur en restituant l'image et la
ressemblance jadis perdues. Comme la pêche miraculeuse des bords du Lac de Galilée, la nouvelle
pêche miraculeuse, qui s'accomplit par l'office de l’Église conduite par le ministère des successeurs
des apôtres, ne peut se réaliser que par la puissance divine, seule capable d'illuminer les âmes en
quête de vérité et de redonner vie aux cœurs cherchant l'amour véritable.
Cette scène champêtre qui manifeste le pouvoir du Sauveur sur la nature et toutes ses
puissances, comme Il le montrera à bien des reprises sur le Lac et ailleurs, montre les prémices
d'une restauration globale de la création, d'un salut qui embrasse toutes les dimensions du monde
perturbé par les séquelles du péché originel. Cette ferme conviction entraîne saint Paul, dans la
lecture de ce jour, vers des élans poétiques chargés de l'espérance d'un salut qui traverse le monde
créé dans toutes ses strates. « Car la création elle aussi sera libérée de l'esclavage de la corruption,
pour accéder à la liberté de la gloire des enfants de Dieu ». Jésus n'est pas seulement le Maître des
âmes humaines qu'Il vient sauver, Il est aussi le Seigneur de la création dont Il est Créateur avec le
Père et l'Esprit. Saint Irénée de Lyon parle de 'récapitulation', en reprenant un terme même de saint
Paul : « Car l'Auteur du monde, c'est en toute vérité le Verbe de Dieu. C'est lui notre Seigneur :
lui-même, dans les derniers temps, s'est fait homme, alors qu'il était déjà dans le monde et qu'au
plan invisible il soutenait toutes les choses créées et se trouvait enfoncé dans la création entière, en
tant que Verbe de Dieu gouvernant et disposant toutes choses. Voilà pourquoi "il est venu" de façon
visible "dans son propre domaine", "s'est fait chair" et a été suspendu au bois, afin de récapituler
toutes choses en lui-même » (Contre les Hérésies, V, 18, 3). Le salut en Jésus Christ est un salut
global qui assure à notre pauvre humanité blessée la vie de l'âme et du corps, et à toute la création
une restauration mystérieuse dont le Christ est la Tête et le Principe. L'enfantement se poursuit
encore, prolongement de l’œuvre du Seigneur par les apôtres, dans la douleur qui accompagne une
nouvelle naissance. « Nous aussi, qui possédons les prémices de l'Esprit, nous gémissons en
nous-mêmes, attendant notre adoption de fils de Dieu, la rédemption de notre corps dans le Christ
Jésus notre Seigneur ».
Chers frères et sœurs, avec les apôtres et plus encore avec Notre-Dame, reconnaissons notre
petitesse et offrons-la au Seigneur dans l'humilité d'un don généreux, pour que sa puissance se
manifeste dans la faiblesse. La vocation des disciples n'est pas seulement affaire du passé. L'appel
du Seigneur s'adresse à chacun de nous, de par notre baptême, afin que, par nous, le monde croie
« qu'il n'est qu'un seul Nom sous les cieux par lequel il puisse être sauvé » (Ac 4, 12). Ainsi-soit-il !