l’expression d’une pensée parvenue à sa maturité. La frontière du pensable et de l’impensable se
déplace et la tendance laïcisante, rationalisante, réaliste gagne du terrain .
Géographiquement, la terre est divisée en une « demeure de l’Islam » et un espace étranger peu
connu.De la même manière, le temps va se diviser entre un temps mythique (origine des choses, du
monde,…) et un temps cyclique et liturgique (rituels, fêtes,…). L’Hégire (622 après J.C.) fait la
différence entre un temps obscur, se prêtant aux évocations mythologiques et un temps
événementiel .
Le sujet humain se doit de cheminer dans la voie de la perfection, condition sine qua non du Salut
individuel pour ressembler à Dieu.Le lien est fort entre le Beau, le Bien, le Vrai. C’ est tout-à-fait
caractéristique du langage musulman et c’est à la base l’inimitabilité du langage coranique.
Autre caractéristique, la citation et notamment la citation par excellence qui fournit l’argument
d’autorité(A59).
b) Les tensions éducatives dans la pensée classique.
Ces tensions s’expriment par des couples de concepts opposés tels que : raison/Loi religieuse ;
raison/Révélation ; connaissance rationnelle/ connaissance traditionnelle ; sens ésotérique, science
obvie ; innovation/pratique consacrée ; sacral/profane,... En fait, la pensée arabe se trouve de plus
en plus enfermée dans ce postulat : la Vérité ultime, éternelle et totale est incluse dans le Coran qui
a été une Parole, puis un texte.
L’accès à la vérité est donc conditionné par des techniques de décryptage d’un texte dont les clés
sont multiples(A60).Comment sortir de ces oppositions ?
Une conscience indivise (un effort de la raison confortée par la foi) ? Il reste que cet effort a
perpétué la vision mythique au détriment d’une vision positive de l’homme et de l’histoire. La
contemplation du merveilleux, des essences immobiles (Dieu, l’âme, la Raison, la Justice, le Vrai,
…) l’a toujours emporté sur l’observation personnelle, l’expérimentation,… (A 62).
c) Écoles et thèmes.
En gros,une communauté orthodoxe, fidèle à l’Islam vrai face à des « sectes égarées ».Comment
définir la valeur comparée de la raison et de la Révélation comme sources et garants de la
connaissance vraie ? (CA63).Comment partager entre une visée traditionaliste et une visée
rationaliste ?
Mais quand le Coran parle de raison, de quoi s’agit-il ?
La notion de ‘aql dans le Coran. Elle recouvre en fait, trois concepts différents : intellect, raison
théorique ou constituante, raison pratique ou constituée. C’est un appel à un exercice simultané de
toutes les puissances de l’esprit. Mais il y a deux puissances inséparables:le cœur et l’esprit donnent
lieu à la saisie intuitive d’une certitude de foi , d’une part, à l’intellection d’une vérité démontrée
par la raison discursive.
A nouveau Platon et Aristote. Pour le premier : « connaître les noms, c’est connaître les
choses ».Dans la Genèse : « Dieu apprit à Adam tous les noms ».. Il y a une relation stable,
nécessaire entre les choses et leur nom.
Pour Aristote, l’homme appréhende d’abord les objets, et leur donne ensuite des noms arbitraires :
le sens est une relation arbitraire.
De là découlent 3 attitudes différentes : traditionaliste, rationaliste, mystique.
1. L’attitude traditionaliste.
Priorité de la Tradition sur la raison.La Tradition est l’ensemble des énoncés et pratiques par
lesquels le Prophète et les pieux Anciens (les Compagnons pour les Sunnités, les Imâns pour
les Chî’ites) ont explicité le donné révélé coranique. Cette définition est très englobante et
réunit à peu près tout sauf les Falâsifa et avec quelques correctifs, les Mu’tazilites.
On peut distinguer un traditionalisme strict (littéralistes partisans du sens obvie du texte
sacré, hostiles à toute discipline où la raison interviendrait en faculté souveraine constituante
de sens) et celui des théologies dogmatiques et fondamentalistes des sunnites et des chî’ites.
Mais ces deux tendances ont un fond commun. Elles font appel à l’homme raisonnable : la
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