la spiritualité cathare - Catharisme d`aujourd`hui

LA SPIRITUALITÉ CATHARE
Q
UAND LA SPIRITUALITÉ VINT
À
L
'
HOMME
Du singe debout au « roseau pensant »
Les archéologues font remonter l'humanité aux premiers hominidés, d'où cette incessante
course au premier homme et, plus encore, au chaînon manquant qui le précèderait.
Le critère majeur est la bipédie, d'abord ponctuelle puis permanente. À ce petit jeu, c'est
Toumaï (- 7 000 000 d'années) qui vient de ravir la place aux australopithèques représentés
entre autres par notre chère Lucy (- 4 000 000 d'années).
Un autre critère d'hominisation, voire d'humanité, est la réalisation et l'usage d'outils. C'est
l'époque des premiers membres de la lignée Homo (- 3 000 000 d'années).
Cette lignée va prospérer et s'étendre territorialement. Sa capacité à améliorer son
outillage s'accompagne d'une découverte majeure, le feu.
En fait c'est la fin de cette période (- 100 000 ans) qui va voir apparaître Homo sapiens et
Homo neandertalensis qui constituent le saut évolutionniste majeur à mon avis. Ce saut est
constitué par l'apparition de deux pratiques, la chasse organisée et l'ensevelissement des
morts.
Tout d'un coup l'homme singe évolué devient capable de pensée abstraite et surtout
de projection temporelle et spatiale, imaginant une vie après la mort : l'au-delà.
La création de la religion
L'obligation de regroupement des structures nucléaires familiales crée un phénomène qui
va influencer l'évolution vers l'humanité.
Quand des groupes nucléaires se rassemblent, le lien du sang n'est plus le seul moteur de
la cohésion. Au contraire, des mâles dominants vont se trouver en compétition de pouvoir au
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Catharisme d'aujourd'hui
sein d'un même groupe. René Girard
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explique comment cette situation va créer un conflit
mimétique dont le risque vital pour l'ensemble du groupe va forcer à mettre en place un
système de régulation basé sur une transcendance par définition non contestable, la divinité.
La mise en place d'interdits permettant de limiter le phénomène mimétique et de rituels
permettant de le canaliser va permettre l'augmentation des regroupements humains qui seront
à la base de la société. Cette organisation autour d'une transcendance non humaine constitue le
début de la religion. Ce phénomène religieux basé sur l'interdit et le rituel évoluera jusqu'à
former un tout comprenant des catégories humaines précises, les servants du dieu (chamanes
puis prêtres), les représentants sociaux désignés par les dieux (chefs de clan puis rois) et le
peuple qui devra obéir à tout ce petit monde par révérence à la volonté des dieux qui fera
bientôt l'objet d'un formalisation par le biais d'un livre rappelant l'histoire, les devoirs et les
droits de tout un chacun, ainsi que les pénitences et récompenses venant sanctionner les
comportements.
La société humaine adoptera immédiatement la même organisation et créera des codes de
lois dont le plus ancien qui nous est connu est le code d'Hammourabi.
L'évolution de la religion
Faute d'avoir pu nouer de contact avec un dieu anthropomorphique qui ne viendra que
beaucoup plus tard, les premiers hommes se mirent à doter leur environnement d'une âme.
L'animisme valorisait ainsi tout ce qui entourait l'homme et pouvait lui causer du bien ou du
mal selon les situations. Il va sans dire que la communication avec les forces de la nature
nécessitait une compétence que s'attribuèrent les chamanes et les marabouts qui en tirèrent des
avantages personnels. Cette position particulière, tout comme celle du roi, distinguait l'homme
élu du reste de la population et pouvait s'avérer problématique quand les dieux devenaient
sourds aux demandes des hommes et aux offrandes qui leur étaient faites. Quand les victimes
émissaires
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traditionnelles et les porteurs du mauvais œil avaient été éliminés sans résoudre la
crise, c'est souvent le roi et le chamane qui servaient d'émissaires au détriment de leur vie
1. René Girard, Des choses cachées depuis la fondation du monde, édition Grasset & Fasquelle 1978. Les
théories de René Girard mettent en avant la façon dont l'homme, pour résoudre les crises mimétiques inhérentes
au regroupement qu'imposait sa survie, a fait le choix d'une forme de légalisme idéalisé qui se retrouve de fait
dans les religions légalistes, les discréditant de fait quant à leur caractère divin.
2. cf René Girard, op. cit.
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terrestre.
Au fil du temps, le désir d'un rapport plus humain avec les dieux amena l'homme à
personnaliser ces derniers. Les premières religions dont nous avons connaissances ont été
nommées indo-européennes sur des critères linguistiques. De l'Irlande jusqu'au Bengale et
d'Oslo jusqu'à Bombay l'extrême dispersion de ces religions leur fit adopter des choix
différents au point qu'elles ne se reconnaissent pas entre-elles et sont même parfois étonnées
de se trouver des similitudes. L'éclatement progressif de ce groupe initial permit l'émergence
des religions qui sont à l'origine de celles que nous observons aujourd'hui. Scandinave,
védique, latine ou iranienne (aryenne), ces religions évoluèrent alors pour leur propre compte.
Cependant on ne peut s'empêcher de noter des similitudes. Ainsi leur premier dieu tira son
origine du soleil, Sol pour les latins, Hêlios pour les grecs, Sûrya pour les indiens, etc., tous
dérivés de Sawel le dieu solaire indo-européen. Il fut rapidement supplanté par le dieu de la
lumière (Apollon, Belenos, Balder, Mitra, Mithra, etc.).
Au final c'est tout un panthéon polythéiste qui se mit en place et qui souvent constituait la
version divine de la société humaine.
L'avènement du monothéisme, à l'exception notoire de l'épisode du culte d'Athon dont il
reste à démontrer la volonté monothéiste, se situe aux environs du sixième millénaire avant
notre ère. Même si sa mythologie en fait débuter le culte au douzième siècle, les travaux des
archéologues modernes comme Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman
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montrent qu'il fut
en fait mis en place lors de la captivité à Babylone et que l'épisode égyptien y compris
Moïse ainsi que l'invasion de la terre de Canaan furent vraisemblablement des inventions
destinées à porter l'espoir d'un retour sans mécontenter le geôlier assyrien.
Peu avant notre ère le polythéisme romain connu une sorte de tentation monothéiste par la
fusion du Sol Indiges latin avec le Mithra indien, l'Apollon gréco-romain et avec le Baal
Shamin sémitique pour donner Sol Invictus (le soleil invincible). Ce dernier sera d'ailleurs
opposé à Jésus au tout début du christianisme.
La spiritualité
Si la religion est un phénomène collectif dont les fonctions initiales nous paraissent
3. Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, La Bible dévoilée, édition originale par Simon & Schuster, Inc.
2001, traduction française aux éditions Bayard 2002.
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Catharisme d'aujourd'hui
désormais claires, la capacité d'abstraction et de réflexion des hommes en amènera certains à
s'interroger sur ce monde, sur ce qu'il pourrait bien y avoir au-delà et sur la place particulière
de l'homme dans tout cela.
Cette réflexion intime se fera parfois en cohérence avec le schéma religieux dominant et
parfois en dehors, voire en opposition, de sa doctrine.
Cela permet de mieux comprendre que la spiritualité puisse s'opposer parfois aux dieux
officiels au sein d'un même regroupement religieux, comme le furent et le sont certainement
le culte d'Athon, le soufisme et le catharisme ou qu'elle puisse faire naître une religion sans
dieu comme l'est le bouddhisme.
Le christianisme cathare
Le christianisme cathare est un christianisme conforme à l'enseignement du Christ et à la
logique exprimée dans les évangiles quant à la non appartenance du Bien à ce monde.
Il s'appuie de façon non équivoque sur les textes évangéliques et pauliniens qu'il lit aussi à
l'aide de la philosophie grecque, notamment Platon et Aristote. Il valide également, parfois
même en négatif, les concepts anthropologiques relatifs à la violence mimétique et à la
religiosité légaliste
4
. Le catharisme en prenant le contrepied de cette approche signe à la fois
sa non appartenance à ce système, donc à ce monde et donne à sa spiritualité un caractère
beaucoup plus proche de l'idée que l'on est en droit de se faire de la divinité.
Le christianisme cathare est aussi un christianisme authentique dans la mesure où il met en
parallèle une doctrine spirituelle et une vie évangélique qui va appliquer au quotidien la
totalité des préceptes doctrinaux dans leur forme la plus complète. De ce point de vue le
catharisme peut être rapproché de la philosophie grecque qui prônait la formation par
l'expérience et par le partage d'une vie humble aux côtés du maître.
C'est une démarche chrétienne caractérisée par une libre adhésion — sans effort ni
souffrance —, guidée par un éveil personnel qui va évoluer en s'appuyant sur une purification
spirituelle associée à une formation intellectuelle et à une mise en application des préceptes de
plus en plus approfondie. En opposition totale avec l'approche judéo-chrétienne et notamment
l'idée d'une foi automatiquement liée à un crédo imposé sans réelle formation intellectuelle
4. cf note 1.
4
élargie, voire à une foi dissociée de la connaissance (foi du charbonnier).
L
A
PHILOSOPHIE DU CATHARISME
La philosophie et la théologie cathares — même si terme peut sembler impropre s'agissant
d'une spiritualité où Dieu est inconnaissable — font appel à des concepts extrêmement forts
car ils ont fait l'objet d'études poussées jusqu'à leurs limites argumentaires, logiques et
rationnelles. Ces concepts sont nécessaires à la juste compréhension d'une spiritualité qui a
toujours voulu que ses adeptes avancent les yeux grand ouverts afin que leur foi soit une
volonté consciente et non un engagement aveugle.
Pour autant tous n'ont pas la formation générale ou plus simplement l'appétence pour de
tels sujets. Il est donc nécessaire et utile de les expliquer correctement et complètement tout
en proposant également des synthèses plus abordables qui ne pourront pas être considérés
comme une occultation des connaissances puisque ces dernières sont aussi disponibles.
L'être en soi et les principes
Comme Socrate dans Phédon
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de Platon ou comme Aristote dans Métaphysique
2
, il
convient de réfléchir sainement et sagement à ce que l'on pense quand on veut exprimer le
plus haut niveau de manifestation d'un élément. Il s'agit donc à la fois de ce qui est premier, et
de ce qui ne peut connaître quoi que ce soit d'antérieur ou de supérieur à lui. Ne dit-on pas
:
« Au principe de toutes choses... »
?
Qu'on l'appelle être en soi et pour soi ou principe, l'élément ainsi désigné est considéré par
Platon, qui donne la parole à Socrate, comme ce qui est naturellement composé
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et qui ne peut
être décomposé — sous entendu en parties dont la réunion produirait le composé désigné —
1. Phédon, Platon. Cet ouvrage montre Socrate, au seuil de sa propre mort, discutant de la nature et de la destinée
de l'âme avec ses amis et disciples.
2. Métaphysique, Aristote. Cet ouvrage rassemble des textes d'origines diverses mais ayant une convergence
thématique. Nous nous sommes particulièrement intéressés aux parties traitant de l'étude de l'Être ainsi qu'à
celles traitant des principes et des causes.
3. Phédon, op. cit., Chapitre : Les objets des sens et les objets de la pensée. Ne pas confondre, naturellement
composé, c'est-à-dire réalisé directement de ce qui a été composé, c'est-à-dire qui peut donc être décomposé.
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