GEMESO
Le s Do s s i e r s D’Ét u D e s MÉ s o a M É r i c a i n e s
Les Dossiers du GEMESO n°2
Mai 2012
GROUPE DÉTUDES MÉSOAMÉRICAINES
(GEMESO)
ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES
In tototl in amanteca
Les oiseaux de la plumasserie aztèque
Pascal MONGNE
Pascal MONGNE -
In ToToTl In AmAnTecA
— 2 —
Cette série de « DOSSIERS du GEMESO»
est destinée à faire partager les résultats
de recherches en cours et à permettre l’ac-
cès à des documents non publiés, rapports
et traductions du nahuatl, produits au sein du Grou-
pe d’Études Mésoaméricaines de l’École Pratique
des Hautes Études, Ve Section-Sciences religieuses
(GEMESO-EPHE), ainsi qu’au cours de nahuatl de
l’Institut National des Langues et Cultures Orientales
(INALCO). Les auteurs sont des membres du groupe
GEMESO, tant chercheurs statutaires qu’étudiants
avancés (doctorants ou en diplôme de Master). Les
sujets portent sur les études mésoaméricaines, avec un
accent mis sur les thématiques religieuses, les diffé-
rentes expressions existantes dans les langues de cette
aire culturelle, en particulier le nahuatl classique ou
dans ses variantes contemporaines.
Nous souhaitons que les « DOSSIERS du GEMESO»
soient accessibles à un public scientique ou élargi,
ainsi quà des institutions culturelles déducation su-
périeure ou denseignement linguistique, à des ns
dinformation et de discussion. Ces « DOSSIERS »
donnent par ailleurs la possibilité à la communauté
scientique internationale travaillant dans le champ
des études mésoaméricaines, de lhistoire coloniale,
des études coloniales et post-coloniales, de lart colo-
nial hispanique, de lanthropologie et de la sociologie
latino-américaines davoir accès à ces données en
temps abré. Ces textes ont été approuvés pour leur
diffusion en ligne par le comité scientique et édito-
rial du GEMESO. Les commentaires et discussions
sur ces « DOSSIERS DU GEMESO » seront vivement
appréciés.
***
Les opinions et points de vue exprimés dans les
« DOSSIERS DU GEMESO » sont ceux des auteurs.
Les données et le matériel présentés dans ces docu-
ments nimpliquent pas lexpression dune opinion
rie : « Les Dossiers du GEMESO », n° 2
Titre :
In totol in amanteca
- Les oiseaux de la plumasserie aztèque
Auteur : Pascal Mongne
Tous droits réservés © GEMESO 2012
Illustration de couverture : © Nicolay Staykov
quelconque de la part de lEPHE (Ve section) ou du
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tion de mentionner le GEMESO et lEPHE (Ve sec-
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du copyright, avec le titre et lannée de publication. Ils
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Les « DOSSIERS DU GEMESO »
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Pratique des Hautes Études, Ve section (Sciences
religieuses), 46 rue de Lille, 75007 Paris, France.
Éditrices scientiques : Danle Dehouve et Aline
Hémond.
Comité éditorial : Danièle Babout, Danièle Dehou-
ve, Antoine Franconi, Aline Hémond.
Correcteur : Gilles Firmin
Mise en page : Jean-Marc Gaudin-Joyeux.
Pascal MONGNE -
In ToToTl In AmAnTecA
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In tototl in amanteca
Les oiseaux de la plumasserie aztèque
Pascal MONGNE
GEMESO
– Les Dossiers dÉtudes Mésoaméricaines —
Les Dossiers du GEMESO n°2
Mai 2012
GROUPE DÉTUDES MÉSOAMÉRICAINES
(GEMESO)
ÉCOLE PRATIQUE DES HAUTES ÉTUDES
Pascal MONGNE -
In ToToTl In AmAnTecA
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Résumé
De tout temps, la plume a joué un rôle essentiel au sein des sociétés du Nouveau monde. L’éven-
tail et la qualité des couleurs de son avifaune, issue notamment des zones tropicales humides, en
sont la principale raison. Parmi les sociétés traditionnelles américaines ayant fait appel à cette richesse
naturelle pour orner hommes, vêtements et parures, le monde aztèque est l’un des mieux connus,
grâce notamment aux chroniques du XVIe siècle (Sahagún en premier plan) et à leurs traductions (Se-
ler, Garibay, Dibble et Anderson), mais également grâce aux études récentes (Denis, Durand-Forest,
Gilonne, Maynez, Sautron-Chompré). La corrélation entre ces sources nous permet de brosser ici cet
essai d’identication et de description des oiseaux utilisés par les fameux
amanteca
(plumassiers) aztè-
ques dont les oeuvres spectaculaires (au sens premier du terme), tant précolombiennes que coloniales,
témoignent aujourd’hui du savoir-faire.
***
Resumen
Desde sus orígenes, el arte plumario ha cumplido un papel importante en el seno de las sociedades
del Nuevo mundo. La variedad y la calidad de los colores de su avifauna, procedente principal-
mente de las zonas tropicales húmedas, es una de las principales razones. Entre las sociedades tradi-
cionales de las Américas que han utilizado esa riqueza natural para adornar a los hombres, sus vestidos
y atavíos, la azteca es una de las más documentadas, gracias, en particular, a las crónicas del siglo XVI
(Sahagún principalmente) y a sus traducciones (Seler, Garibay, Dibble y Anderson), así como gracias
a los estudios recientes (Denis, Durand-Forest, Gilonne, Maynez, Sautron-Chompré). La correlación
entre esas fuentes nos permite bosquejar aquí una tentativa de identicación y descripción de los pája-
ros utilizados por los famosos
amanteca
(plumajeros) aztecas, cuyas obras espectaculares (en el sentido
original) tanto coloniales como precolombinas, son hoy testigos de su maestría.
***
Summary
Feathers have always played an important role within the societies of the New World, mainly be-
cause of the large and colourful variety of birds, especially those from tropical areas. Among the
traditional American societies that used feathers to deck humans, clothes and adornments, are the Az-
tecs. This civilisation is one of the best documented, thanks notably to the sixteenth-century Spanish
chronicles (mainly from Sahagún) translated by Seler, Garibay, Dibble and Anderson and to the recent
studies from Denis, Durand-Forest, Gilonne, Maynez, Sautron-Chompré. The correlation between
these sources allows us to present this essay of identication and description of birds used by the fa-
mous
amanteca
(the Aztec feather smiths), whose spectacular works, both colonial and pre-Columbian
attest, today, of their skilfulness.
***
Historien de lart, Pascal Mongne se consacre à létude des collections américaines de France
et à l’image des Amériques forgée par l’Europe depuis la Découverte. Il est également respon-
sable du cours « Arts des Ariques » à l’Ecole du Louvre de Paris.
Pascal MONGNE -
In ToToTl In AmAnTecA
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IN TOTOTL IN AMANTECA
- LES OISEAUX DE LA PLUMASSERIE
AZTÈQUE -
Pascal MONGNE
Mai 2011
Tous les oiseaux ne volent pas, mais tous, en
revanche, portent des plumes et ce sont les
seuls du règne vivant à en être dotés. Bien
des oiseaux ont été recherchés pour leur
chair et leurs œufs, parfois pour leur chant, et certains
ont été dressés pour leurs qualités de chasseurs, mais
presque tous, en fait, ont été appréciés pour leurs plu-
mes, an d’orner l’homme ou seulement le couvrir.
Toucans, colibris, perroquets et perruches,
cotingas, motmots, trogons, gobe-mouches, jacamar,
orioles, tanagres, pour ne citer que les plus « spec-
taculaires » : des centaines d’espèces, vivant le plus
souvent en forêt tropicale humide, peuplent l’Améri-
que et ont su, probablement bien mieux qu’ailleurs,
répondre aux exigences « esthétiques » et cérémoniel-
les des hommes.
La plume, dans le Nouveau Monde, a toujours
joué un rôle essentiel. Sans entrer dans des détails
d’ordre ornithologique qui sortiraient du cadre de no-
tre article, quelques lignes peuvent y être consacrées.
La plume est un appendice tégumentaire qui
recouvre la peau des oiseaux sur tout ou partie de leur
corps, et dont le nombre varie considérablement en
fonction des espèces. Issue du derme de l’animal, la
plume se trouve complètement kératinisée en n de
croissance, sans aucune cellule vivante (comme les
ongles ou la corne). En général les oiseaux renouvel-
lent régulièrement leurs plumes par mue. Cette parti-
cularité doit être signalée, car elle permet de récupérer
les plumes déjà tombées ou le plumage des volatiles
sans les mutiler ni les tuer.
En fonction de leur rôle, et de leur position
sur le corps, les plumes présentent des formes et des
tailles variées : ainsi les plumes de couverture, de pe-
tite dimension, souples, isolent l’animal du froid et de
la pluie ; les rémiges, plumes des ailes, plus longues
et asymétriques, assurent à l’oiseau un rôle primor-
dial dans le vol ; de même les rectrices, plumes de
la queue, symétriques et parfois fort longues et de
ce fait souvent recherchées en plumasserie –, qui font
ofce de gouvernail.
En général, les plumes présentent la même
structure : un axe creux, le rachis, en ordonne l’archi-
tecture et s’insère dans la peau par le calamus. De part
et d’autre du rachis, s’étendent les barbes, qui portent
chacune un grand nombre de barbules munies de cro-
chets sur les côtés (hamulis). Ces crochets reliant les
barbules les unes aux autres donnent à la plume son
intégrité et ses propriétés physiques.
Aussi curieux que cela puisse nous paraître,
fort peu nombreux sont les pigments induits, qui co-
lorent les plumes. Parmi les principaux, nous pouvons
noter les mélanines, rendant les ocres, depuis le noir
le plus pur jusqu’au beige clair, et les caroténoïdes qui
produisent les jaunes ou les rouges. En fait, le specta-
culaire chromatisme dont les oiseaux se trouvent parés
est essentiellement le résultat de processus physiques
lumineux, ou de l’association de ces processus et des
pigments naturels. Ainsi, les très belles teintes du bleu
ou du vert (très rares sous forme de pigment), ou bien
encore les riches effets d’irisation que l’on distingue
sur certains plumages (canards, colibris), sont-ils dus
au ltrage de la lumière solaire par les composants
de la plume et à l’absorption et au renvoi de certaines
longueurs d’ondes lumineuses.
Malheureusement, comme tout élément orga-
nique mort, la plume est particulièrement sensible à
son environnement et aux modications brutales de
ce dernier. Une fois coupée de son support vivant,
et par nature fragile, elle sera particulièrement su-
jette aux agressions externes (température, lumière,
humidité, chocs). Il est donc rare que les œuvres de
plumasserie anciennes parviennent jusqu’à nous sans
dommage (armatures détruites ou désarticulées, plu-
mes abîmées, couleurs passées ou même totalement
effacées).
L’identication des oiseaux utilisés en plu-
masserie aztèque est issu de la corrélation entre les
dénominations en nahuatl et la taxinomie ornithologi-
que moderne. Ce travail malaisé (Dibble et Anderson,
1959 ; Durand-Forest, 1984 ; Garibay, 1969 ; Gilon-
ne, 1997; Maynez, 1991 ; Sautron-Chompré, 2004 ;
Seler, 1892) est essentiellement fondé sur l’œuvre
monumentale du franciscain Bernadino de Sahagún :
Historia General de las Cosas de Nueva España. Son
travail descriptif sur la faune et la ore (Livre XI) ras-
semble 459 entrées consacrées aux animaux, dont en-
viron 200 associées à l’avifaune (noms d’oiseaux ou
noms de parties d’oiseaux). Si la plupart de ces noms
ne sont cités qu’une fois dans l’oeuvre, une dizaine en
revanche apparaissent à de multiples reprises (quet-
zaltototl, tlauhquechol, zacuan), marque de l’intérêt
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