En ville, les oiseaux sont les champions de l`adaptation

En ville, les oiseaux sont les champions de l’adaptation
23 décembre 2015 / Montaine Delmotte (Reporterre)
La ville, néfaste à la biodiversité ? Ce n’est pas le cas pour les oiseaux, dont les populations augmentent,
notamment à Paris. La Ville lumière, malgré des désavantages, est digne d’intérêt pour les volatiles, qui
parviennent à s’y adapter.
Qui n’a jamais râlé en retrouvant une fiente de pigeon sur sa voiture ? C’est que les oiseaux, même s’il n’est pas
simple pour eux de vivre en ville, s’y trouvent de mieux en mieux. « Contrairement à une idée reçue, le nombre
d’espèces capables de se reproduire en milieu urbain a augmenté au cours du XXe siècle, spécialement depuis
1950, et le phénomène continue », indique Frédéric Malher, vice-président du Centre ornithologique d’Île-de-
France (Corif), dans son article « Les oiseaux en ville, une surprise qui s’explique ». Mais la diversité de ces
espèces reste faible.
D’après le Corif, les oiseaux les plus courants à Paris en 2013 sont le pigeon biset, le martinet noir, le moineau
domestique et l’étourneau sansonnet.
Les étourneaux sansonnets font partie des espèces les plus communes à Paris.
On y trouve aussi des espèces plus surprenantes. Tel cet oiseau paré d’un plumage vert jaune, d’une longue
queue et d’un bec crochu, large et arrondi, de couleur rouge rose. Avez-vous deviné qui il est ? C’est la perruche
à collier, qui vit en Afrique centrale (Ouganda) et en Asie du Sud (Inde et Sri Lanka). On présume que les
premiers individus installés à Paris se sont échappés de conteneurs d’avions-cargos à Orly et à Roissy entre les
années 1970 et 1990.
Les perruches à collier, venues de loin, se sont bien acclimatées dans les grandes villes.
󳋡Les espèces qui se plaisent à Paris sont globalement des espèces grégaires d’origine forestière. Côté
alimentation, elles sont omnivores (elles mangent de tout) et opportunistes (elles profitent des restes alimentaires
des autres espèces). Côté habitat, elles sont sédentaires et préfèrent nicher dans des cavités en hauteur. Ces
espèces sont donc capables de s’adapter au milieu urbain et à ses conditions. « On les trouve un peu partout,
surtout dans les bois de Boulogne et de Vincennes », indique David Bismuth, d’Ornithomédia, un portail
d’information sur l’étude et l’observation des oiseaux. Très peu d’espèces ont disparu de Paris. Seules ont
déserté la capitale des espèces migratrices, insectivores et nichant assez bas.
En ville, les oiseaux souffrent de... malbouffe
Les oiseaux choisissent de s’installer dans les villes comme Paris car ils y trouvent de nombreux avantages. La
température, supérieure de 2 à 3 °C à la campagne environnante, en est un : durant l’hiver, ils ont moins froid.
Leur période de reproduction est donc plus longue, explique Frédéric Malher, vice-président du Corif, dans son
article déjà cité.
Un moineau domestique.
« Les oiseaux de Paris, originaires des montagnes ou des falaises, se plaisent sur les toits des nombreux
bâtiments » qui remplacent leur habitat d’origine, indique-t-on, par téléphone, à Natureparif, l’Agence régionale
pour la nature et la biodiversité d’Île-de-France. La nourriture est abondante et disponible sans effort. En
conséquence, il y a « moins de compétition avec les autres oiseaux qu’à la campagne », poursuit-on, à
Natureparif. Les espèces bénéficient aussi de la politique de réduction des pesticides menée par la municipalité.
Pas non plus de chasseurs pour leur tirer dessus, et un peu moins de prédateurs. Ces avantages sont tels que
certaines espèces comme le pigeon biset, le moineau domestique, l’hirondelle des fenêtres et le martinet noir
auraient du mal à survivre en-dehors des villes et en sont dépendantes.
Mais paradoxalement, la vie en ville n’est pas toujours facile pour ces petites boules de plumes. Premier piège :
la malbouffe. Que faites-vous si vous avez devant vous un plat préparé ou les ingrédients pour cuisiner ? Vous
préférez la facilité. Chez les oiseaux, c’est la même chose. Ils choisissent les restes de nourriture et les aliments
distribués par les humains, plutôt que les insectes, graines et autres becquées qu’ils doivent chercher dans la
nature. Mais les aliments des humains ne sont pas les meilleurs pour les volatiles : « Cette alimentation
inadaptée provoque une baisse de l’espérance de vie et des taches blanches sur le plumage des corneilles »,
constate-t-on au Corif. Elle empêche même les jeunes oiseaux de s’envoler.
Prédateurs redoutables
Les espaces verts, qui abritent les oiseaux, sont peu nombreux et éloignés les uns des autres. Le nombre
d’animaux y augmente et entraîne une surpopulation. Le niveau sonore lié à la circulation les oblige à s’adapter.
« Les oiseaux urbains, pour compenser les problèmes de bruit de la ville, chantent plus tôt, plus fort ou plus
aigu, et de manière plus variée », observe Frédéric Malher. L’éclairage public, la pollution chimique et les ondes
électromagnétiques les gênent aussi.
Les chats de compagnie des humains se révèlent enfin des prédateurs redoutables pour les volatiles urbains,
comme le montre une enquête de la Ligue de protection des oiseaux (LPO).
Le chat est un prédateur féroce pour les oiseaux des villes.
Malgré tous les inconvénients de la ville pour les oiseaux, leur présence est importante. Elle participe à « un
écosystème », indique-t-on à la LPO. « Elle crée de la biodiversité et un équilibre écologique », précise David
Bismuth, d’Ornithomédia. En effet, les oiseaux limitent la prolifération des insectes, leur met préféré. Cette
biodiversité urbaine est « importante pour la santé des citadins », estime Frédéric Malher, dans son article. Avec
un aspect à ne pas négliger, pour M. Bismuth : « Le plaisir des yeux, bien sûr ! »
Les villes prennent conscience de la problématique des oiseaux, notamment la ville de Paris. « La capitale a mis
en place un plan biodiversité et essaye de gérer les problèmes qu’ils peuvent », observe Natureparif. « Paris met
en œuvre des politiques de duction des pesticides », signale Frédéric Malher. La Ville lumière « limite aussi la
pollution lumineuse en éclairant moins la nuit. En plus, cela permet des économies ! » explique Denis Couvet,
professeur au Muséum national d’histoire naturelle. Il y a de l’idée, mais tout n’est pas parfait. « Paris fait
élaguer les arbres » qui sont le refuge des oiseaux et « l’herbe y est trop souvent coupée », explique la LPO.
Il existe pourtant des solutions simples à quelques-uns de ces problèmes. « Tondre l’herbe deux à trois fois par
an suffit. Dans les copropriétés, les propriétaires peuvent se mettre d’accord pour laisser pousser le gazon dans
le parc ou la parcelle de végétation appartenant aux immeubles », poursuit la LPO.
Comment les aider ?
Paris a également posé des nichoirs pour les faucons pèlerins, une espèce qui s’était raréfiée dans les années
1950 à cause des pesticides. Avec succès : un couple de faucons sidant dans le XVe arrondissement a donné
naissance à trois petits en 2013, une première depuis 1947 !
« On pourrait enherber les toitures et mettre d’autres nichoirs pour d’autres espèces d’oiseaux », continue la
LPO. Mais aussi, renforcer le ramassage des déchets, aménager des espaces verts et des friches y compris en
centre-ville...
Les villes ne sont pas seules à pouvoir agir. Vous aussi, vous pouvez aider les oiseaux ! L’hiver, n’hésitez pas à
nourrir les passereaux avec des graines et d’autres aliments spécialisés. Cette nourriture, riche en calories, leur
convient bien pendant les périodes de gel, car ils consomment énormément d’énergie. Mais gare au pain, qui leur
fait gonfler le ventre et provoque des troubles digestifs. N’oubliez surtout pas de mettre de l’eau à leur
disposition car les points d’eau les plus proches sont souvent à un ou plusieurs kilomètres de là. Pensez aussi à la
changer le plus souvent possible.
L’hiver, il est conseillé de donner des graines aux oiseaux.
L’hygiène a aussi son importance : il faut gulièrement nettoyer les mangeoires et leurs alentours pour retirer
fientes, restes alimentaires et éviter la transmission de maladies. Installez aussi des nichoirs.
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