Conférence de presse: MRSA dans les maisons de repos et de soins, Institut Scientifique de la Santé Publique (ISP), vendredi 27/5/2005 Qu’est-ce MRSA ? Le Staphylococcus aureus Résistant à la Méthicilline (SARM ou MRSA) est un pathogène important en médecine humaine et une cause très importante d’infections acquises à l’hôpital (infections nosocomiales). Des épidémies à SARM sont fréquentes. MRSA est parfois appelé « la » bactérie hospitalière. Le SARM est sélectionné sous l’influence d’une consommation abondante d’antibiotiques mais en dehors de son profil de résistance, il se comporte comme les souches de Staphylococcus aureus sensibles. Le Staphylococcus aureus, et donc aussi le SARM, est principalement responsable d’infections de plaies, mais aussi d’autres infections (des voies respiratoires, sanguines, urinaires et autres). La transmission du SARM, comme du Staphylococcus aureus sensible à la Méthicilline (MSSA) se fait surtout par le biais des mains du personnel de santé ayant soigné des patients colonisés ou infectés par ce germe. Un tiers des personnes en bonne santé est porteur de MSSA au niveau des narines. Également pour le SARM, les narines mais aussi la gorge et le périnée constituent un milieu idéal. MRSA dans les hôpitaux Depuis la fin des années 80 on a constaté dans les hôpitaux une augmentation continue de l’incidence des infections à MRSA. Le sommet fut atteint en Belgique en 1993. A partir de 1994 – depuis la publication des recommandations pour la prévention des infections à MRSA – une diminution importante de l’incidence a été observée dans les hôpitaux participants au programme national de surveillance. Cependant, cette tendance à la baisse s’est inversée depuis 1999 (figure 1). En 20032004, 103 hôpitaux participants enregistraient en moyenne 3,8 nouveaux cas de MRSA par 1000 admissions (intervalle de confiance à 95% 3,4 à 4,3), soit environ 6400 à 8000 nouveaux cas de MRSA par an dans les hôpitaux belges. Figure 1. Evolution de la moyenne des taux d’incidence dans les hôpitaux belges, surveillance nationale de MRSA dans les hôpitaux belges, ISP/ULB/GDEPIH, 1994-2004, www.nsih.be 4.5 4.2 3.9 Moyenne des incidences (/1000 admissions) 4 3.5 3.6 3.3 3.3 3.3 2.9 2.9 2.8 3 2.6 2.5 2.5 3.8 3.6 2.6 2.4 2.3 2.1 2.2 2 2 1.5 1 0.5 0 Périodes de surveillance 2.7 Le taux de résistance (pourcentage de MRSA sur le total de S. aureus) a connu une évolution similaire (figure 2). En 2003-2004 le taux de résistance MRSA était en moyenne de 31,2% (intervalle de confiance à 95% 29,6% à 32,7%). Figure 2: Evolution du taux de résistance (MRSA/SA%) dans les hôpitaux belges, surveillance nationale de MRSA dans les hôpitaux belges, ISP/ULB/GDEPIH, 1994-2004, www.nsih.be 35 32.1 31.9 Moyenne des résistances (%) 29.6 27.6 30 25.9 23.9 24.1 25 20 21.5 19.9 20.6 21 20.6 18.6 19 18.1 16.5 14.9 15.7 19 16.7 15 10 5 0 Périodes de surveillance Nombreux sont ceux qui attribuent cette augmentation à une baisse de vigilance et une moins bonne adhésion aux recommandations contraignantes pour la lutte contre le MRSA (qui sont basés sur une limitation de l’utilisation des antibiotiques, une hygiène des mains optimale et des mesures additionnelles pour les patients MRSA). L’introduction de nouveaux clones de MRSA ayant d’autres caractéristiques épidémiques peut sans doute aussi contribuer à cette hausse. Depuis peu on retrouve également en dehors de l’hôpital un nombre croissant de personnes porteuses de SARM. Il est important de faire la distinction entre une colonisation et une infection à SARM: on parle d’une infection à SARM quand le patient présente distinctement des signes cliniques d’une infection et que la présence de SARM a été démontrée dans le foyer d’infection. Dans le cas d’une colonisation, un SARM a été identifié en absence de signes cliniques suggérant une infection. L’augmentation de « l’importation » de cas de MRSA , surtout en provenance des maisons de repos, est également un facteur qui complique la lutte contre les MRSA dans plusieurs hôpitaux. Figure 3. Evolution du pourcentage de MRSA acquis à l’hôpital, surveillance nationale de MRSA dans les hôpitaux belges, ISP/ULB/GDEPIH, 1994-2004, www.nsih.be n-MRSA/MRSA global (%) 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 Période de surveillance MRSA nosocom ial (échant. clin) Comparé à d’autre pays européens, le taux de résistance de MRSA dans les hôpitaux belges se situe dans la même ordre de grandeur que celui en France ou aux Royaume Uni (figure 4), mais bien plus élevé que par exemple aux Pays-Bas, où depuis longtemps des mesures sévères sont en vigueur (comme par exemple l’isolation de patients venant de pays à haute prévalence) et où l’utilisation des antibiotiques est beaucoup moins importante qu’en Belgique. Figure 4. Taux de résistance MRSA dans les hôpitaux européens, surveillance européenne de la résistance aux antibiotiques (EARSS), http://www.earss.rivm.nl/ Différentes situations favorisent la présence de SARM chez un patient : une intervention chirurgicale, une maladie chronique, la présence de plaies d’escarres ou un traitement récent avec un antibiotique à large spectre (par exemple les quinolones). Des souches épidémiques de SARM se dispersent largement par le biais de patients ou de résidents colonisés ou infectés. Les infections ainsi causées sont à l’origine d’une morbidité et mortalité importante et entraînent un surcoût financier important. Souvent, celles-ci ne peuvent être traitées avec des antibiotiques facilement administrables et nécessitent des produits coûteux le plus souvent réservés à un usage intraveineux. Ceci implique une hospitalisation avec toutes les complications qui en découlent. Le Service Public Fédéral (SPF) Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et environnement a pris différentes mesures additionnelles pour contrôler le problème de MRSA. Des exemples sont les campagnes pour la promotion de la bonne utilisation des antibiotiques organisées par la Commission Belge de Coordination de la Politique Antibiotique (BAPCOC) et la première campagne nationale pour la promotion de l’hygiène des mains dans les hôpitaux belges, organisée par la plate-forme fédérale pour l’hygiène hospitalière (http://www.health.fgov.be/antibiotics). Afin de mieux connaître le problème de MRSA dans les maisons de repos, le Service Public Fédéral (SPF) Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et environnement a également décidé d’effectuer, à la demande de la plate-forme fédérale pour l’hygiène hospitalière, une enquête de prévalence nationale de MRSA dans les maisons de repos et de soins (voir ci-dessous). D’autre part, le GDEPIH (Groupe de Dépistage, d’Étude et de Prévention des Infections dans les Hôpitaux) a pris l’initiative de développer des recommandations pour la prévention de MRSA dans les maisons de repos et des soins. Le texte de consensus qui a été élaboré ensuite est le résultat des efforts d’un groupe de travail pluridisciplinaire composé de représentants du secteur des maisons de repos et du secteur hospitalier. Il sera présenté le samedi 28/5/2005 aux francophones et le samedi 4/6/2005 aux néerlandophones. Problématique de MRSA dans les maisons de repos A la demande du Service Public Fédéral (SPF) Santé Publique, Sécurité de la Chaîne Alimentaire et environnement et de la plate-forme fédérale pour l’hygiène hospitalière, l’ISP effectué actuellement en collaboration avec le laboratoire de référence de MRSA (ULB Erasme) une enquête de prévalence nationale de MRSA dans les maisons de repos et de soins (MRS). Dans cette étude, le portage de MRSA est vérifié dans un échantillon représentatif de 60 MRS, sélectionné de manière aléatoire de la totalité des MRS en Belgique (n=985). En ce moment, 2701 résidents dans 55 MRS ont été examinés. Les résultats préliminaires de cette enquête confirment l’augmentation importante de la fréquence de MRSA dans les MRS. Le taux de prévalence nationale du portage de MRSA dans les maisons de repos et de soins est actuellement estimé à 18,9% (intervalle de confiance à 95% : 16,3% à 21,5%). En d’autres mots, près de 1 résident MRS sur 5 est porteur de MRSA (au niveau du nez, de la gorge ou de sites cliniques). Ce chiffre est 3 à 4 fois plus élevé que le chiffre trouvé en 1997 et en 2000 par la KULeuven et l’ISP dans une vingtaine de maisons en flandres, où le taux de prévalence était de environ 5%. Le taux de résistance (pourcentage MRSA sur le total de S. aureus) est également bien plus élevé maintenant (36,9%; intervalle de confiance à 95%: 32,4%-41,4%) qu’en 2000 (19,4%). Dans cette dernière étude (ISP & KULeuven, 2000) les facteurs de risque du portage de MRSA ont également été étudiés et correspondaient à ce qui a été publié dans la littérature internationale. Le portage de MRSA dans les maisons de repos est favorisé par 3 méchanismes : 1. L’utilisation des antibiotiques dans les maisons de repos, notamment les antibiotiques auxquels le MRSA est résistant (ex. quinolones) 2. Importation en provenance des hôpitaux 3. Contamination croisée dans les maisons de repos, surtout par les mains Enfin les résidents des mêmes maisons de repos ont été suivis pendant une période de trois années (ISP & KULeuven, 2000-2003) et il a été constaté que les résidents porteurs de MRSA avait un risque plus élevé d’être hospitalisé pour une infection respiratoire. En outre, la mortalité était plus élevé parmi les porteurs MRSA, et surtout parmi les résidents déments. D’autres études ont également montré que les porteurs de MRSA ont un risque plus élevé d’une infection à MRSA que les non-porteurs. Gestion de MRSA dans les maisons de repos Dans l’intérêt du patient, une politique visant l’arrêt de la dispersion du SARM doit être menée. Les hôpitaux doivent consentir des efforts importants dans ce sens, mais également en dehors de l’hôpital, p.ex. dans les maisons de repos et de soins des mesures doivent être prises afin de limiter la transmission de SARM. Une politique du MRSA repose sur différents principes: 1. tendre vers une utilisation très restrictive des antibiotiques afin d’éviter une sélection de résistance; 2. respecter universellement les précautions générales d’hygiène pour éviter la transmission de microorganismes (surtout l’hygiène des mains); 3. prendre en charge de façon appropriée les patients porteurs ou infectés avec du MRSA 4. dépister activement des porteurs de MRSA dans certaines situations; Les recommandations sont spécifiquement destinées au secteur des maisons de repos et de soins et visent à les aider à appliquer les principes de prévention dans un secteur qui est aussi un lieu de vie pour les résidents. L’implémentation des mesures de prévention de MRSA signifie bien entendu un surcoût pour la maison de repos (p.ex. alcool des mains, masques, gants, surblouses, etc.). Il faut considérer également le besoin de certaines mesures structurelles dans les MRS. Dans ce cadre on peut mentionner par exemple à un(e) infirmiè(e)r(e) spécialisé(e) dans la prévention des infections qui assistera le médecin coordinateur dans l’implémentation d’une politique de MRSA cohérente et/ou à une augmentation du nombre de chambres individuelles dans les maisons de repos afin de mieux contrôler la dispersion du MRSA.