
Nous verrons que cette conscience morale n’est peut-être pas si pure 
que nous pourrions le penser, car si celle-ci ne se réfère à aucun 
fondement explicite, cette conscience morale n’est pas sans origine, 
même inconsciente (il nous faudra distinguer, le fondement, de l’origine). 
Nietzsche sur ce point nous ouvrira des perspectives critiques 
intéressantes. 
  Cependant le problème des fondements est essentiel et c’est 
même le problème philosophique par excellence : pouvons-nous justifier 
ce que nous faisons ou ce que nous disons ?  La philosophie ne se 
contente pas de décrire les comportements moraux, elle veut les justifier. 
La philosophie morale cherche à répondre, sous la seule autorité de la 
raison, à la question des fins et de la destination de l’homme, pour 
éclairer ses choix pratiques. En cela elle se distingue radicalement de la 
religion, car elle ne dit pas ce qui doit être fait, mais comment ce qui est, 
doit être connu, et donc, ce qui peut être changé. C’est pour cette raison, 
que la philosophie morale peut-être appelée philosophie pratique. 
  A cette question des fondements ou des fins, la philosophie a 
depuis Platon répondu en définissant préalablement le Bien. Car l’on ne 
peut pas connaître les fins que doit se proposer l’action humaine, si l’on 
ne détermine pas la fin ultime de toute action : le Bien. De la 
connaissance du Bien, découlera le fondement d’une recherche de la vie 
bonne et heureuse. Pour le moins il faut tâcher de rendre l’homme, 
meilleur. Voilà la destination pratique de la philosophie, si explicite dans 
la « République », et qui conduit non seulement à une destination morale 
de l’homme, mais aussi à sa destination politique. La connaissance du 
Bien, d’où découle la connaissance de la justice, est évidemment l’affaire 
de la Cité.   Le problème moral est aussi un problème politique. 
 
  Dans la « République », le passage le plus parlant de cette 
interaction morale et politique, c’est celui du Livre 7, appelé « allégorie 
de la caverne ». Nous comprenons que cette ascension hors de la 
caverne, au fond de laquelle, il n’y a que des prisonniers attachés par le 
cou, qui ne voient que des ombres et des échos, c’est-à-dire que des 
simulacres, des chimères, des illusions, représente la sortie hors de ce 
monde aveuglé par nos pulsions sensibles et  irrationnelles. Cependant 
cet homme qui a  enfin converti son esprit (conversion intellectuelle) par 
la contemplation de l’intelligible, c’est-à-dire par la connaissance des 
essences, et donc apte à la science, au savoir, ne doit pas rester à ce 
niveau élevé de la spéculation. Il doit opérer une descente vers ce 
monde sensible, pour y instruire et diriger ses semblables, s’y comporter 
moralement, en donnant l’exemple d’un homme juste, sachant ce qu’est 
le Bien et la Justice. C’est pourquoi, selon Platon la philosophie doit non