COMPTES RENDUS Dennis Lee describes the goals of Rochdale, an attempt at the free and flexible pursuit of truth outside of the university setting. Here the people who make decisions are those whom the decisions affect and no activity whatsoever is prescribed or proscribed as educational for the person carrying it on (p. 81). What is aimed at is a truly liberal education where one is "liberated" from unreflecting reliance on the assumptions and structures soaked up from family, school, church, and society (p. 84). What seems lacking in his proposal is any sense of the objective basis of truth and value; nor is there much respect for the reflection that went to make up the very things one is to be liberated from. The danger is that we will revert to new unilateral relationships in which teacher and student have merely reversed roles. Howard Adelman, the book's co-editor, has no solution to offer. From the maze of conflicting criticisms and proposals for change, he concludes that perhaps the best we can do is create a community of radical scholars who play the "university game." A community which shares such a scorn and disrespect for the present society that it can embrace the whole bundle of rules and subvert them thereby (p. 172). This suggestion seems more bitter than serious; perhaps because Adelman takes the problems as dead serious. His honesty and candour are shared by most of the contributors to the book. We would do well to follow their lead in analyzing what ails the university. B. HENDLEY University of Waterloo LA FIN DE V UTOPIE. Par HERBERT MARCUSE. Delachaux et Niestle, Neuchatel et Paris. Ed. du Seuil, Paris, 1968. 140 pages. Cet ouvrage circonscrit trois notions fondamentales pour qui veut comprendre la pensee de Herbert Marcuse: celle de rupture, celle de transcendance ou d'un au-dela possible de l'histoire, et celle de jeu comme finality intrinseque de 1'existence. Elle permet egalement d'etablir ce qu'il serait convenu d'appeler une strategie philosophique. L'utopie est 1'esperance fondee sur l'avenement d'une rupture de la continuite historique (p. 7). L'accentuation de cette notion peut elle-meme etre lue comme une coupure dans la pensee de Marcuse: car il insistait auparavant (notamment dans le Marxisme sovietique, Gallimard, coll. Idees no. 35, p. 238) non pas sur la necessite d'une rupture mais sur la necessite de Paboutissement des changements 353 BOOK REVIEWS quantitatifs (hausse des salaires, reduction des heures de travail, prolongation du temps de loisir, etc.) en un changement qualitatif de l'existence exprime au plan politique. Dorenavant, il s'agit de rendre possible le "saut qualitatif." Politiquement, c'est Marcuse qui nous le rappelle, cela ne peut resulter que de Paffleurement du regne de la liberte dans le regne de la contrainte du travail (p. 8) oil Necessite fait loi: en ce sens, c'est Yautogestion, l'autodetermination qui est le but ultime a rechercher. La caracteristique de ce projet politique defini comme saut est l'utopie proprement dite: car ce projet ne peut nous etre donne a nous de la societe industrielle que sous le mode de l'au-dela de l'histoire pr6sente. Cet au-dela ne nous est d'ailleurs accessible dans notre histoire que sous l'aspect de la contradiction ou de la negation determinee non des lois scientifiques (p. 9), mais de ce qui empeche la liberation de l'homme hie et nunc. La society actuelle ne se contredit qu'au regard de cet « extra-historique» formulable dans l'utopie. L'utopie ne se donne done pas a posteriori, a la simple lecture des faits, mais comme un a priori, voire une loi regulatrice de la praxis dans le champ politique de notre societe: du fait qu'elle revet un caractere d'a priori, l'utopie ne peut jamais etre consideree comme un reflet dans la conscience sociale des structures politiques alienantes de notre univers social. Mais Marcuse annonce et denonce tout a la fois la fin de Putopie: il annonce la fin d'une vision du socialisme pour mieux pouvoir nourrir de l'intdrieur la pensee marxiste, sans s'encombrer pour autant du faux probleme de l'orthodoxie; mais il montre par le fait meme comment le projet de ce socialisme redefini est contrarie: 1) il est contrarie d'une part par tous ceux qui ont un interet quelconque a sauvegarder le statu quo; 2) mais il est contrarie plus radicalement encore par le fait que notre type de societe entraine l'homme a ne plus penser que positivement, a l'aide de concepts operatoires, univoques et depolitises, alors que l'utopie se presente justement comme un discours negatif, inoperant, dont les concepts sont equivoques a cause de 1'ambiguite meme des finalite's sociales a redefinir: pensee du paradoxal et du contradictoire, l'utopie est devaluee par avance dans une societe ou c'est le rendement qui importe. L'a priori que cette utopie fait afHeurer a la surface d'une existence sociale qui a perdu sa finalite et qui ne la cherche plus, c'est la fin m£me de l'existence: que la vie devienne enfin a elle-meme sa propre fin. Cette utopie s'enracine dans une anthropologie nouvelle (p. io), theoriquement et existentiellement. Cette anthropologie doit mettre au jour les «besoins humains qualitativement nouveaux,» et la 354 COMPTES RENDUS nouveaute de ces besoins sera assuree par le saut de la quantite a la qualite (la liberation progressive de l'homme dans toutes les spheres d'activite), saut qui empechera la reproduction de la repression au niveau des besoins fondamentaux: car cette anthropologie renouvelee vise a entraver le processus d'introjection de la repression, processus qui consiste essentiellement en la creation defame besoins chez chacun, ce qui a pour consequence immediate une croissance de la demande des produits de consommation et pour consequence mediate la permanence d'un systeme socio-politique mondial oil les nantis ont toutes les prerogatives. L'utopie marcusienne consiste a promouvoir le jeu et les possibility qu'a le travail de devenir un pur jeu, par opposition aux finalites bourgeoises de la consommation croissante. Et si le concept heuristique fondamental—qui apparait ici comme un indepassable, la cloture du rationnel—est celui de JEU, Interpretation de la vie quotidienne doit se faire sur la base d'une esthetique de 1'existence ou PEthique judeo-chretienne apparait comme depassee, i.e. realisee. Pour promouvoir le saut qualitatif, une strategic s'avere indispensable: cette strategic tient radicalement compte de ce qui peut permettre le saut, a savoir la technicisation progressive (p. n ) . Cette strategic doit done faire advenir ce que la technologie ne fait que promettre: la liberation de l'homme. Car «1'automation complete du travail socialement necessaire est incompatible avec le maintien du capitalisme» (p. 12). S'il revient plutot a Peconomiste de contester le fait que la technologie sape par la base le capitalisme en ne rendant plus possible la recherche pure et simple de la plus-value, nous pouvons par ailleurs souligner que le choix opere par Marcuse est categorique sur un point qui, jusqu'ici, etait reste obscur dans sa pensee: Pau-dela de Phistoire repressive correspond a Pau-dela de Pideal technologique et il ne peut etre question d'une « regression romantique en de$a de la technique » (p. 14). Cet au-dela est d'ailleurs le surgissement de la verticalite dans ce monde de l'homme dit «extra-plat» (Bernard Cazes, « Le marxisme sovietique» La MefNo 36, janvier-mars 1969, p. 109). Cette dimension verticale est ce que Marcuse appelle la Transcendance Historique dans VHomme unidimensionnel, et qui est ici definie comme « dimension esthetico-erotique» (p. 15). Mais alors, ne resterait-il qu'a promouvoir 1'exigence imperative du savoir positif? Bien au contraire, puisque le capitalisme s'est acoquine avec le positivisme: la strategic recommandee face a cet absolutisme du pouvoir technologique est la Critique, la pensee negative. Et la fonction du philosophe consistera dorenavant a devoiler scandaleusement la difference qualitative en la circonscrivant de mieux en mieux : 'seule 355 BOOK REVIEWS cette marche prospective peut nous faire eviter le piege du defaitisme, attitude qui, a toutes fins pratiques, ne peut que faire le jeu de rEnfermement denonce dans VHomme unidimensionnel. Le scandale seul semble maintenant pouvoir nous apprendre qu'agir, c'est subvertir. Contentons-nous, en guise de conclusion, de formuler les questions theoriques qui nous paraissent eludees jusqu'ici: 1. Qu'est-ce qui distingue fondamentalement un besoin repressif d'un besoin non repressif? Y aurait-il une Mature Humaine qui les recelerait, Nature brimee par l'actuel systeme socio-politique et qu'il faudrait liberer? L'Eros est-il la toute derniere hypostase de la substance humaine? 2. Comment 1'insertion de l'extra-historique est-elle possible dans un univers ou la concentration et I'Enfermement sont les lois regulatrices ? 3. La pensee negative, celle qui vise le non-donne de l'histoire immediate, ne peut-elle atteindre a l'au-dela de cette histoire qu'au prix d'une regression de la pensee conceptuelle ? UHumanisme Metaphysique, dont Marcuse nous livre une nouvelle version, n'est-il pas I'id6ologie par excellence que ce siecle nous apprend a fletrir? ROBERT NADEAU Paris 356