Petit Botaniste N°42 : Agérate Bleue des

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L e Petit Botan iste®
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
La science au service
de la Nature
llons maintenant examiner de
plus près les propriétés de cette
plante tant utilisée par les
pharmacopées traditionnelles.
A
Les tiges et les feuilles de l’agérate
présentent une activité bactéricide
(notamment sur Staphyloccocus
aureus) et antifongique, d'où son
utilisation dans certaines maladies
de la peau. Ces propriétés sont aussi
mises à profit dans un certain
nombre de pays aux faibles
ressources économiques, la plante
étant utilisée comme pesticides
(contre les insectes et les nématodes
parasites).
L'agérate possède également une
action anti-inflammatoire et des
études ont démontré que, par voie
orale, la plante est anti-douleur et
analgésique.
Bien qu'il soit difficile d'imputer à
un seul élément de la plante ses
propriétés curatives, sa diversité et
sa complémentarité phytochimiques
étant souvent la clé de son activité,
l’agérate bleue est particulièrement
intéressante pour son huile
essentielle et ses flavonoïdes. L'huile
essentielle, « Maire vaihi » en
polynésien, est riche en terpènes,
chromènes (conyzogorum) et
dérivés coumariniques, qui lui
confèrent des propriétés
antibactériennes. Quant aux
flavonoïdes (flavones, kaempférol,
quercétine) , une étude a démontré
qu'ils étaient en grande partie à
l'origine de son activité antiinflammatoire.
L'agérate bleue contient également
des tanins et des stérols.
Terminons par un petit cours
d'éthymologie.
Conyzoides vient de « kónyz », nom
grec de l’Inula helenium car les deux
fleurs se ressemblent.
Aujourd’hui, l'hyperurbanisation et les teintes ternes des constructions
modernes ne laissent que très peu de place à la nature et à sa palette de
couleurs, tantôt stimulantes tantôt apaisantes.
Pourtant, depuis des millénaires, les Amérindiens, les Egyptiens ou les
aborigènes avaient su tirer partie de l’action thérapeutique des couleurs et
aujourd’hui, la chromathérapie, puisque tel est son nom, permet de nous
soigner tout en douceur… Que ce soient des émetteur de radiations
lumineuses, des instituts de beauté aux couleurs décoratives savamment
choisies ou des crèmes cosmétiques dont les teintes sont en harmonie avec leurs
bienfaits, la thérapie par la couleur est partout !
Mais que peuvent bien nous amener ces couleurs ? Que signifient-elles ?
Au sens strict, la chromathérapie se base sur l’énergétique chinoise : chaque
longueur d’onde envoyée permet d’induire au sein de l’organisme une réaction
qui va stimuler ou calmer une énergie, c’est l’action physiologique. Mais
aujourd’hui, la chromathérapie, c’est aussi des couleurs auxquelles nous avons
associé des symboles, des sensations ou des perceptions, c’est alors une action
psychique qui s’exerce sur l’esprit de l’individu.
Le bleu, symbole de paix et de bien-être
Il est étonnant de constater que chaque civilisation, chaque religion, a attribué
au bleu des vertus similaires. Ainsi dans le langage sacré des Egyptiens, le bleu
symbolisait l'immortalité tandis qu'en Grèce, les prêtres de Chronos, maîtres du
temps, étaient vêtus de cette couleur et chez les Romains, le bleu était l'un des
attributs de Jupiter et Junon, dieu et déesse du Ciel. Dans la religion chrétienne,
le bleu occupe une place prépondérante. Les premiers chrétiens l'avaient choisi
pour symboliser Dieu le Père et il prête aujourd'hui sa couleur à la Vierge, très
souvent représentée vêtue de bleu.
Couleur du ciel et de la mer, le bleu est synonyme d'évasion et de tranquillité.
Clair, il est le chemin de la rêverie, quand il s'assombrit, ce qui est conforme à
sa tendance naturelle, il devient celui du rêve.
Symbole positif pour de nombreux peuples, le bleu représente globalement la
loyauté, la sagesse, l'imagination et l'intelligence
Image du temps qui passe, de la pureté, de l'évasion et de la détente, le bleu ne
pouvait mieux illustrer les qualités de l'agérate !
Plus intéressant encore est la
provenance du terme Ageratum, issu
du grec « a geras » qui signifie
« anti-vieillissement », la fleur et la
plante ayant une durée de vie
importante.
Il n'y a alors qu'un pas à franchir
pour songer que l'agérate pourrait
sans doute encore nous apporter de
bonnes surprises dans le domaine
de l'anti-âge, cher aux
cosmétologues…
Edité par CEP, Groupe Solabia,
29, rue Delizy, 93698 Pantin Cedex
Tél. : (+33) 1 48 10 19 40 - Fax : (+33) 1 48 91 18 77
Responsable de publication : Jean François Molina
Comité de rédaction : Patricia Houy et Carine Lebeau
Crédits photos NC
- Reproduction Interdite -
Inula helenium
Feuille ethnobotanique éditée par le Groupe Solabia – N°42 – Mai/Juin 2003
Edito
Terre des Hommes, Terre de Traditions
S
urnommées « Te henua
Enana » ou La Terre des
Hommes, les Iles
Marquises auraient tout
aussi bien pu s’appeler la
Terre des Hommes de Tradition tant
le mode de vie de ses habitants est
presque exclusivement basé sur des
connaissances ancestrales
transmises de génération en
génération et qui perdurent encore
aujourd’hui.
En effet, restées à l’état sauvage et
relativement éloignées du monde
moderne et de ses innovations, les
Iles Marquises sont avant tout le
refuge de la tradition et de la
pérennisation des rites du Pacifique.
Le modernisme n’a pas encore
réussi à prendre le pas sur ces
paysages vierges, abritant des
montagnes escarpées et une
végétation luxuriante. Mais
attention, respecter ses racines et
faire écran au modernisme pour
conserver un savoir ancestral ne
signifie toutefois pas que les
marquisiens soient un peuple
reclus, hostile à toute évolution.
A près de 4 heures d’avion de Tahiti
ou quelques jours de goélette, les
Iles Marquises se trouvent isolées.
Dénuées de
tourisme par
l'absence de
structures hôtelières,
elles ont en fait très peu de
ressources. Mis à part le citron vert,
considéré comme étant de loin le
meilleur de Polynésie, ou le nono,
dont il est fait aux USA
un jus doté de propriétés
stimulantes et
tonifiantes, les
marquisiens ne disposent
que de très peu de moyens
pour développer une
activité économique. Et pourtant…
Ce ne sont pas les ressources
végétales qui manquent !
Pour toutes ces raisons, nous avons
souhaité poursuivre la mission du
Petit Botaniste® dans ces îles encore
sauvages. Mais pour parfaire cet
objectif, il nous fallait compter sur
l’appui local d’un partenaire afin de
pouvoir, à terme, apporter aux
marquisiens des solutions pour un
développement durable. C'est ce qui
nous a incité, comme vous le savez,
à initier il y a plusieurs mois déjà
une collaboration avec la société
Pacifique Sud qui vient tout juste de
s’implanter aux Marquises.
- Mai/Juin 2003 -
Après le nono, dont nous avons
valorisé les feuilles aux propriétés
régénérantes, le Kau Pe (prononcez
"Kao Pé"), fleur aux
arômes suaves et
envoûtants, c’est au tour
de l’Agérate bleue de
nous livrer ses secrets.
Avant de vous laisser découvrir par
vous-même les vertus de cette
plante, le Petit Botaniste®, dont
vous connaissez tous le goût
pour la recherche de signification,
est allé pour vous consulter le grand
dictionnaire du Langage des Plantes
et des Fleurs. Et bien figurez vous
que l’agérate symbolise la confiance.
Pourquoi ? Peut être en raison de la
couleur bleue de ses fleurs ? Il est
vrai que le bleu est non seulement la
couleur du rêve et de l’évasion mais
aussi le symbole du retour au calme
et à l’apaisement.
Excellent moment
en notre compagnie,
L e Petit Botan iste®
N
ous vous l’avions dit dans
le dernier Petit Botaniste®,
les Iles Marquises recèlent
encore bien des trésors… En
particulier les îles d’Hiva Oa et de
Fatu Iva, sur lesquelles nous vous
proposons de débarquer un
moment…
Des îles du bout
du monde
L'île d'Hiva Oa (carte ci-dessous) est
la capitale administrative des
Marquises.
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
Fatu Iva, quant à elle, est la plus
isolée des Iles Marquises, mais aussi
peut être la plus belle car la plus
sauvage : seules les goélettes la
ravitaillent...
Ses habitants, très peu nombreux,
sont spécialisés dans la préparation
de l’Umuhei mais aussi dans la
confection de tapas (Le Safran
d'Océanie - Petit Botaniste n°37) et
de sculptures de cocos et bois
précieux.
Malgré leur éloignement, ces deux
îles sont reliées par un point
commun, un "lien végétal" que nous
vous invitons à découvrir.
Atuona
Taaoa
Elle renferme plusieurs centres
archéologiques intéressants et
notamment, le plus grand site
archéologique de Polynésie, situé
dans la vallée de Taaoa. On y trouve
également le plus grand tiki
polynésien, le tiki « Takai’i »,
mesurant 2,40m de haut. Ces sites
ancestraux permettent facilement
d’imaginer la vie des Maoris.
Hiva Oa est également le lieu choisi
par deux célèbres personnages,
Jacques Brel et Paul Gauguin, pour
passer les dernières années de leur
vie. Ils reposent tous deux dans la
ville d'Atuona.
"Veux-tu que je te dise,
gémir n’est pas de mise…
Aux îles Marquises"
Les Marquises - J. Brel
L’Agérate bleue,
Une plante de confiance…
Et ce d'autant plus que les
marquisiens, fidèles observateurs de
la nature , ont su tirer partie des
attributs un peu spéciaux de cette
plante…
' agérate bleue (Ageratum
conyzoides), ou Pùtara
(prononcez "poutara") en langage
traditionnel marquisien, a en effet
plus d'un tour dans ses feuilles !
Les marquisiennes les utilisent ainsi
pour leur toilette matinale afin de
nettoyer leur visage, la présence de
ces "cils végétaux" étant
probablement liée dans leur esprit à
une activité purifiante. Traitement
un rien agressif penserez-vous?
Détrompez-vous, comme toujours
Dame Nature a tout prévu ! Lors du
passage de la plante sur le visage,
elle laisse s’écouler une sève aux
propriétés anti-inflammatoires,
propre à calmer toute irritation et à
apaiser les peaux les plus fragile.
Les marquisiens ont donc compris
depuis longtemps que l'on pouvait
faire confiance en l'agérate, et ce
n'est sans doute pas un hasard si
cette plante symbolise la confiance
dans le langage des fleurs…
L
On retrouve en effet en abondance
sur ces deux îles une petite plante
herbacée à la tige hérissée de poils,
aux feuilles rêches au toucher. Mais
la multitude de fleurs bleu violacé
semblables à des pompons font vite
oublier ce premier contact peu
engageant !
Fabrication de tapa
Sculpture de cocos
- Mai/Juin 2003 -
Une herbe aromatique,
composant de l'Umuhei
L'agérate était aussi utilisée
traditionnellement pour « laver » les
marquisiens dans leurs parties les
plus intimes et sous les aisselles,
sans doute en raison de ses
propriétés anti-bactériennes. Mais
c'est également pour son parfum
que le pùtara était utilisé en soins
corporels. Ses propriétés
aromatiques sont d'ailleurs aussi
mises à profit dans la préparation
de l’Umuhei (Le Kau Pe des
Marquises - Petit Botaniste n°41),
bouquet végétal porté par les
femmes marquisiennes pour éveiller
la sensualité des hommes.
L'Agérate bleue
à travers le monde
Hiva Oa et Fatu Iva en images…
Baies de Hanavave - Fatu Hiva
L e Petit Botan iste®
Tiki « Takai’i »
Dans une autre partie de l’océan
Pacifique, beaucoup plus au sud,
sur les îles d’Hawaï, l’agérate est
aussi très prisée. La phytothérapie
locale utilise les différentes parties
de la plante pour de multiples
applications : désinfecter les plaies,
combattre les douleurs intestinales
(décoctions), traiter les
conjonctivites et les ophtalmies (suc
des feuilles). La plante est même
considérée comme dépurative et
analgésique par voie orale.
On en compose également des bains
que l’on fait prendre aux patients
atteints de meurtrissures,
notamment après une chute. Les
feuilles pulvérisées mélangées à
l’huile chaude sont appliquées sur
la peau pour favoriser la
cicatrisation tandis que la décoction
de racine constitue une excellente
tisane fébrifuge et antidysentérique.
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
L’Agérate bleue, magie et superstitions…
Comme souvent pour les plantes ayant des vertus
médicinales, une atmosphère de mystères et de magie
environne l'agérate.
En Côte d’Ivoire, la fleur aurait des propriétés magiques contre les
morsures de serpent.
Dans l’est du Nigeria, la forte odeur aromatique de la plante
permettrait de calmer les esprits des sorcières et de combattre la magie
noire.
Au Congo, la sève de feuilles appliquée sur les mains des joueurs de
cartes leur porterait bonheur. Et lors d’un procès, la croyance veut que
si l'on applique la sève sur un accusé, qu’on le pique avec une aiguille
et qu’il ne ressente aucune douleur, cela signifie qu’il est innocent.
De nombreuses autres
pharmacopées utilisent les vertus
d'Ageratum conyzoïdes, plante très
répandue dans l’est de l’Afrique du
Sud et dans certaines régions de
l’Asie et de l’Amérique du Sud.
En Guyane par exemple, les Créoles
utilisent la richesse en mucilages
des feuilles pour confectionner de
petites boulettes à mâcher, le jus
obtenu calmant les maux de gorges.
Une décoction de feuilles bien
concentrée apaise les rages de dents
et les parties aériennes, préparées en
tisane, sont fortement diurétiques et
antidiarrhéiques.
Au Guatemala, les parties aériennes
de la « mejorana » sont utilisées
pour soigner les boutons (en bain) et
la coqueluche. Elles sont également
conseillées dans le traitement des
conjonctivites, des blessures et des
pneumonies.
- Mai/Juin 2003 -
En Afrique du Sud, ce sont les
maladies mentales et infectieuses,
les maux de têtes, la dyspnée
(difficulté respiratoire), la fièvre et
les douleurs intestinales (entéralqie)
qui sont soignés avec l’agérate. On
lui prête également des propriétés
analgésiques.
A Madagascar, son nom signifie
« parfum des puiseuses d’eau » car
elle embaume de son arôme tous les
chemins près des villages. Les
feuilles et les tiges sont employées
en fomentation (application d’un
topique chaud) contre certaines
éruptions cutanées et notamment la
lèpre. Les feuilles agissent contre la
cirrhose. La décoction des parties
aériennes soigne la toux, celle des
racines est fébrifuge (combat la
fièvre) et anti-dysentérique. Utilisée
en lotion froide, elle aide à soigner
l’ophtalmie.
L e Petit Botan iste®
N
ous vous l’avions dit dans
le dernier Petit Botaniste®,
les Iles Marquises recèlent
encore bien des trésors… En
particulier les îles d’Hiva Oa et de
Fatu Iva, sur lesquelles nous vous
proposons de débarquer un
moment…
Des îles du bout
du monde
L'île d'Hiva Oa (carte ci-dessous) est
la capitale administrative des
Marquises.
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
Fatu Iva, quant à elle, est la plus
isolée des Iles Marquises, mais aussi
peut être la plus belle car la plus
sauvage : seules les goélettes la
ravitaillent...
Ses habitants, très peu nombreux,
sont spécialisés dans la préparation
de l’Umuhei mais aussi dans la
confection de tapas (Le Safran
d'Océanie - Petit Botaniste n°37) et
de sculptures de cocos et bois
précieux.
Malgré leur éloignement, ces deux
îles sont reliées par un point
commun, un "lien végétal" que nous
vous invitons à découvrir.
Atuona
Taaoa
Elle renferme plusieurs centres
archéologiques intéressants et
notamment, le plus grand site
archéologique de Polynésie, situé
dans la vallée de Taaoa. On y trouve
également le plus grand tiki
polynésien, le tiki « Takai’i »,
mesurant 2,40m de haut. Ces sites
ancestraux permettent facilement
d’imaginer la vie des Maoris.
Hiva Oa est également le lieu choisi
par deux célèbres personnages,
Jacques Brel et Paul Gauguin, pour
passer les dernières années de leur
vie. Ils reposent tous deux dans la
ville d'Atuona.
"Veux-tu que je te dise,
gémir n’est pas de mise…
Aux îles Marquises"
Les Marquises - J. Brel
L’Agérate bleue,
Une plante de confiance…
Et ce d'autant plus que les
marquisiens, fidèles observateurs de
la nature , ont su tirer partie des
attributs un peu spéciaux de cette
plante…
' agérate bleue (Ageratum
conyzoides), ou Pùtara
(prononcez "poutara") en langage
traditionnel marquisien, a en effet
plus d'un tour dans ses feuilles !
Les marquisiennes les utilisent ainsi
pour leur toilette matinale afin de
nettoyer leur visage, la présence de
ces "cils végétaux" étant
probablement liée dans leur esprit à
une activité purifiante. Traitement
un rien agressif penserez-vous?
Détrompez-vous, comme toujours
Dame Nature a tout prévu ! Lors du
passage de la plante sur le visage,
elle laisse s’écouler une sève aux
propriétés anti-inflammatoires,
propre à calmer toute irritation et à
apaiser les peaux les plus fragile.
Les marquisiens ont donc compris
depuis longtemps que l'on pouvait
faire confiance en l'agérate, et ce
n'est sans doute pas un hasard si
cette plante symbolise la confiance
dans le langage des fleurs…
L
On retrouve en effet en abondance
sur ces deux îles une petite plante
herbacée à la tige hérissée de poils,
aux feuilles rêches au toucher. Mais
la multitude de fleurs bleu violacé
semblables à des pompons font vite
oublier ce premier contact peu
engageant !
Fabrication de tapa
Sculpture de cocos
- Mai/Juin 2003 -
Une herbe aromatique,
composant de l'Umuhei
L'agérate était aussi utilisée
traditionnellement pour « laver » les
marquisiens dans leurs parties les
plus intimes et sous les aisselles,
sans doute en raison de ses
propriétés anti-bactériennes. Mais
c'est également pour son parfum
que le pùtara était utilisé en soins
corporels. Ses propriétés
aromatiques sont d'ailleurs aussi
mises à profit dans la préparation
de l’Umuhei (Le Kau Pe des
Marquises - Petit Botaniste n°41),
bouquet végétal porté par les
femmes marquisiennes pour éveiller
la sensualité des hommes.
L'Agérate bleue
à travers le monde
Hiva Oa et Fatu Iva en images…
Baies de Hanavave - Fatu Hiva
L e Petit Botan iste®
Tiki « Takai’i »
Dans une autre partie de l’océan
Pacifique, beaucoup plus au sud,
sur les îles d’Hawaï, l’agérate est
aussi très prisée. La phytothérapie
locale utilise les différentes parties
de la plante pour de multiples
applications : désinfecter les plaies,
combattre les douleurs intestinales
(décoctions), traiter les
conjonctivites et les ophtalmies (suc
des feuilles). La plante est même
considérée comme dépurative et
analgésique par voie orale.
On en compose également des bains
que l’on fait prendre aux patients
atteints de meurtrissures,
notamment après une chute. Les
feuilles pulvérisées mélangées à
l’huile chaude sont appliquées sur
la peau pour favoriser la
cicatrisation tandis que la décoction
de racine constitue une excellente
tisane fébrifuge et antidysentérique.
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
L’Agérate bleue, magie et superstitions…
Comme souvent pour les plantes ayant des vertus
médicinales, une atmosphère de mystères et de magie
environne l'agérate.
En Côte d’Ivoire, la fleur aurait des propriétés magiques contre les
morsures de serpent.
Dans l’est du Nigeria, la forte odeur aromatique de la plante
permettrait de calmer les esprits des sorcières et de combattre la magie
noire.
Au Congo, la sève de feuilles appliquée sur les mains des joueurs de
cartes leur porterait bonheur. Et lors d’un procès, la croyance veut que
si l'on applique la sève sur un accusé, qu’on le pique avec une aiguille
et qu’il ne ressente aucune douleur, cela signifie qu’il est innocent.
De nombreuses autres
pharmacopées utilisent les vertus
d'Ageratum conyzoïdes, plante très
répandue dans l’est de l’Afrique du
Sud et dans certaines régions de
l’Asie et de l’Amérique du Sud.
En Guyane par exemple, les Créoles
utilisent la richesse en mucilages
des feuilles pour confectionner de
petites boulettes à mâcher, le jus
obtenu calmant les maux de gorges.
Une décoction de feuilles bien
concentrée apaise les rages de dents
et les parties aériennes, préparées en
tisane, sont fortement diurétiques et
antidiarrhéiques.
Au Guatemala, les parties aériennes
de la « mejorana » sont utilisées
pour soigner les boutons (en bain) et
la coqueluche. Elles sont également
conseillées dans le traitement des
conjonctivites, des blessures et des
pneumonies.
- Mai/Juin 2003 -
En Afrique du Sud, ce sont les
maladies mentales et infectieuses,
les maux de têtes, la dyspnée
(difficulté respiratoire), la fièvre et
les douleurs intestinales (entéralqie)
qui sont soignés avec l’agérate. On
lui prête également des propriétés
analgésiques.
A Madagascar, son nom signifie
« parfum des puiseuses d’eau » car
elle embaume de son arôme tous les
chemins près des villages. Les
feuilles et les tiges sont employées
en fomentation (application d’un
topique chaud) contre certaines
éruptions cutanées et notamment la
lèpre. Les feuilles agissent contre la
cirrhose. La décoction des parties
aériennes soigne la toux, celle des
racines est fébrifuge (combat la
fièvre) et anti-dysentérique. Utilisée
en lotion froide, elle aide à soigner
l’ophtalmie.
L e Petit Botan iste®
L’A g érate bleue des Mar q u is e s
La science au service
de la Nature
llons maintenant examiner de
plus près les propriétés de cette
plante tant utilisée par les
pharmacopées traditionnelles.
A
Les tiges et les feuilles de l’agérate
présentent une activité bactéricide
(notamment sur Staphyloccocus
aureus) et antifongique, d'où son
utilisation dans certaines maladies
de la peau. Ces propriétés sont aussi
mises à profit dans un certain
nombre de pays aux faibles
ressources économiques, la plante
étant utilisée comme pesticides
(contre les insectes et les nématodes
parasites).
L'agérate possède également une
action anti-inflammatoire et des
études ont démontré que, par voie
orale, la plante est anti-douleur et
analgésique.
Bien qu'il soit difficile d'imputer à
un seul élément de la plante ses
propriétés curatives, sa diversité et
sa complémentarité phytochimiques
étant souvent la clé de son activité,
l’agérate bleue est particulièrement
intéressante pour son huile
essentielle et ses flavonoïdes. L'huile
essentielle, « Maire vaihi » en
polynésien, est riche en terpènes,
chromènes (conyzogorum) et
dérivés coumariniques, qui lui
confèrent des propriétés
antibactériennes. Quant aux
flavonoïdes (flavones, kaempférol,
quercétine) , une étude a démontré
qu'ils étaient en grande partie à
l'origine de son activité antiinflammatoire.
L'agérate bleue contient également
des tanins et des stérols.
Terminons par un petit cours
d'éthymologie.
Conyzoides vient de « kónyz », nom
grec de l’Inula helenium car les deux
fleurs se ressemblent.
Aujourd’hui, l'hyperurbanisation et les teintes ternes des constructions
modernes ne laissent que très peu de place à la nature et à sa palette de
couleurs, tantôt stimulantes tantôt apaisantes.
Pourtant, depuis des millénaires, les Amérindiens, les Egyptiens ou les
aborigènes avaient su tirer partie de l’action thérapeutique des couleurs et
aujourd’hui, la chromathérapie, puisque tel est son nom, permet de nous
soigner tout en douceur… Que ce soient des émetteur de radiations
lumineuses, des instituts de beauté aux couleurs décoratives savamment
choisies ou des crèmes cosmétiques dont les teintes sont en harmonie avec leurs
bienfaits, la thérapie par la couleur est partout !
Mais que peuvent bien nous amener ces couleurs ? Que signifient-elles ?
Au sens strict, la chromathérapie se base sur l’énergétique chinoise : chaque
longueur d’onde envoyée permet d’induire au sein de l’organisme une réaction
qui va stimuler ou calmer une énergie, c’est l’action physiologique. Mais
aujourd’hui, la chromathérapie, c’est aussi des couleurs auxquelles nous avons
associé des symboles, des sensations ou des perceptions, c’est alors une action
psychique qui s’exerce sur l’esprit de l’individu.
Le bleu, symbole de paix et de bien-être
Il est étonnant de constater que chaque civilisation, chaque religion, a attribué
au bleu des vertus similaires. Ainsi dans le langage sacré des Egyptiens, le bleu
symbolisait l'immortalité tandis qu'en Grèce, les prêtres de Chronos, maîtres du
temps, étaient vêtus de cette couleur et chez les Romains, le bleu était l'un des
attributs de Jupiter et Junon, dieu et déesse du Ciel. Dans la religion chrétienne,
le bleu occupe une place prépondérante. Les premiers chrétiens l'avaient choisi
pour symboliser Dieu le Père et il prête aujourd'hui sa couleur à la Vierge, très
souvent représentée vêtue de bleu.
Couleur du ciel et de la mer, le bleu est synonyme d'évasion et de tranquillité.
Clair, il est le chemin de la rêverie, quand il s'assombrit, ce qui est conforme à
sa tendance naturelle, il devient celui du rêve.
Symbole positif pour de nombreux peuples, le bleu représente globalement la
loyauté, la sagesse, l'imagination et l'intelligence
Image du temps qui passe, de la pureté, de l'évasion et de la détente, le bleu ne
pouvait mieux illustrer les qualités de l'agérate !
Plus intéressant encore est la
provenance du terme Ageratum, issu
du grec « a geras » qui signifie
« anti-vieillissement », la fleur et la
plante ayant une durée de vie
importante.
Il n'y a alors qu'un pas à franchir
pour songer que l'agérate pourrait
sans doute encore nous apporter de
bonnes surprises dans le domaine
de l'anti-âge, cher aux
cosmétologues…
Edité par CEP, Groupe Solabia,
29, rue Delizy, 93698 Pantin Cedex
Tél. : (+33) 1 48 10 19 40 - Fax : (+33) 1 48 91 18 77
Responsable de publication : Jean François Molina
Comité de rédaction : Patricia Houy et Carine Lebeau
Crédits photos NC
- Reproduction Interdite -
Inula helenium
Feuille ethnobotanique éditée par le Groupe Solabia – N°42 – Mai/Juin 2003
Edito
Terre des Hommes, Terre de Traditions
S
urnommées « Te henua
Enana » ou La Terre des
Hommes, les Iles
Marquises auraient tout
aussi bien pu s’appeler la
Terre des Hommes de Tradition tant
le mode de vie de ses habitants est
presque exclusivement basé sur des
connaissances ancestrales
transmises de génération en
génération et qui perdurent encore
aujourd’hui.
En effet, restées à l’état sauvage et
relativement éloignées du monde
moderne et de ses innovations, les
Iles Marquises sont avant tout le
refuge de la tradition et de la
pérennisation des rites du Pacifique.
Le modernisme n’a pas encore
réussi à prendre le pas sur ces
paysages vierges, abritant des
montagnes escarpées et une
végétation luxuriante. Mais
attention, respecter ses racines et
faire écran au modernisme pour
conserver un savoir ancestral ne
signifie toutefois pas que les
marquisiens soient un peuple
reclus, hostile à toute évolution.
A près de 4 heures d’avion de Tahiti
ou quelques jours de goélette, les
Iles Marquises se trouvent isolées.
Dénuées de
tourisme par
l'absence de
structures hôtelières,
elles ont en fait très peu de
ressources. Mis à part le citron vert,
considéré comme étant de loin le
meilleur de Polynésie, ou le nono,
dont il est fait aux USA
un jus doté de propriétés
stimulantes et
tonifiantes, les
marquisiens ne disposent
que de très peu de moyens
pour développer une
activité économique. Et pourtant…
Ce ne sont pas les ressources
végétales qui manquent !
Pour toutes ces raisons, nous avons
souhaité poursuivre la mission du
Petit Botaniste® dans ces îles encore
sauvages. Mais pour parfaire cet
objectif, il nous fallait compter sur
l’appui local d’un partenaire afin de
pouvoir, à terme, apporter aux
marquisiens des solutions pour un
développement durable. C'est ce qui
nous a incité, comme vous le savez,
à initier il y a plusieurs mois déjà
une collaboration avec la société
Pacifique Sud qui vient tout juste de
s’implanter aux Marquises.
- Mai/Juin 2003 -
Après le nono, dont nous avons
valorisé les feuilles aux propriétés
régénérantes, le Kau Pe (prononcez
"Kao Pé"), fleur aux
arômes suaves et
envoûtants, c’est au tour
de l’Agérate bleue de
nous livrer ses secrets.
Avant de vous laisser découvrir par
vous-même les vertus de cette
plante, le Petit Botaniste®, dont
vous connaissez tous le goût
pour la recherche de signification,
est allé pour vous consulter le grand
dictionnaire du Langage des Plantes
et des Fleurs. Et bien figurez vous
que l’agérate symbolise la confiance.
Pourquoi ? Peut être en raison de la
couleur bleue de ses fleurs ? Il est
vrai que le bleu est non seulement la
couleur du rêve et de l’évasion mais
aussi le symbole du retour au calme
et à l’apaisement.
Excellent moment
en notre compagnie,
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