531 Anthropologie du développement Plan d`aménagement du site

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Anthropologie du développement
Plan d’anagement du site approuvé en phase 2
La troisième phase est initiée début 2009. Selon une décision en date de juillet
2008, le site est renom« Festivals de y Thiên ». Le projet doit être acheen
2013. Le site sera ouvert toute l’année. Le projet concerne alors 163 hectares de
terres et huit cents foyers de quatre villages : Đền Thõng, Sơn Đình, Đồng Lính et
Ấp Đồn. Le niveau d’indemnisation est beaucoup plus élevé que lors des phases
précédentes : 31,6 millions de VND par sào. Le coût total du projet est évalué à
22 milliards de VND [soit environ 1 million d’euro].
Depuis le lancement de la phase 1, des tensions sont apparues sur la zone
d’aménagement : plaintes collectives, altercations, absences lors des réunions
d’information, refus de valider les documents liés au projet, entraves au fonctionnement
du parking. Voici la photo prise par nos collègues à 13 heures le 24 septembre.
L’affaire a éclaté au moment où la SARL An Phước est venu niveler le terrain : trente-
cinq habitants du village de Đền Thõng, munis de houes et de couteaux, sont
intervenus. Finalement, la société a quitter les lieux.
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Tensions avec la population villageoise
Rapporteur (2)
Ma collègue vient de vous donner des éléments descriptifs sur le contexte et les
étapes d’évolution du projet developpement touristique. Je vais aborder la nature
et les causes des tensions.
Les tensions identifiées sont liées :
- au manque d’informations livrées à la population, absence de prise en compte
des intérêts des familles ;
- des incertitudes de la population pour assurer sa subsistance, accaparement
des moyens de production des familles paysannes ;
- un dialogue difficile entre autorités et population : mise en cause des autorités
locales par la population sur le montant d’indemnisation foncière ;
- uneappropriation des bénéfices par des gens écartés de l’expropriation.
Différents groupes stratégiques sont identifiés :
- les habitants dont les terres agricoles sont réquisitionnées et/ou qui sont
expropriés de leur maison et qui vont donc être obligés de se déplacer ;
- les bonzes et gardiens des temples ;
- les gros commerçants ;
- les petits commerçants qui maintiennent une activité agricole ;
- les gestionnaires du projet et du site classé patrimoine national ;
- les protestataires.
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Anthropologie du développement
Passons à présent à la question de la circulation de l’information et de la perception
par les acteurs locaux de la pertinence de l’information transmise lors des différentes
phases. En phase 1 et 2, l’information a été diffusée dans le cadre de réunions de
village, d’échanges entre les habitants, de bulletins d’informations diffusés par haut-
parleurs. La phase 3 marque une sensibilisation plus forte de la population grâce à
des réunions organisées au sein du village, de rencontres avec les élus présidées par
un responsable du district, de la pose d’affiches d’information, d’une publication dans
la revue « Justice » en septembre 2009.
Sur la base des données recueillies, nous avons identifié certaines attentes de
la population : amélioration des modes de diffusion de l’information au sein de
la communauté villageoise ; un droit de parole et de négociation plus large ; une
priorià l’emploi ; l’octroi de parcelles de terres agricoles et pour l’élevage lors de
la réinstallation ; une indemnisation appropriée. Infine, les familles ne voient pas de
contreparties viables au projet.
Nos conclusions portent sur les normes et la transgression des normes ; le discours
sur la démocratie à la base et le projet imposé. Cette transgression des normes a lieu
à tous les échelons administratifs. Exemple : la lutte contre la pauvreté. Les habitants
sont amenés à abandonner leurs activités agricoles sans autre perspective d’emploi,
les procédures d’indemnisation sont mises en doute. Cela nous amène à penser que
lesglements de l’État sur la mise en œuvre du projet ont ététournés.
Rapporteur (1)
Au regard de l’ensemble des données récoltées, du temps de préparation de
la restitution et du temps de présentation imposé, nous n’avons pu donner ici que
quelques éléments d’analyses.
Benoît Massuyeau, AFD
Je suis très impressionpar votre travail. Pourriez-vous nous livrer des exemples,
à partir des études de cas que vous avez analysées, de transgression des normes
théoriques en normes pratiques ?
François Roubaud
Je renouvelle les licitations ! Cet enthousiasme vaut aussi pour les autres groupes.
Je voudrais souligner l’importance des concepts utilisés, et notamment les notions
d’ « attributs » et de « groupes stratégiques ». Cela a été également développé dans
le cadre des doctoriales ; l’initiative « Doctoriales » - « Journées de Tam Đảo » se place
bien dans une logique de capitalisation et de synergie1.
Concernant les acteurs stratégiques, je suis surpris que vous n’ayez pas cité les
autorités locales. Il y a les autorités du projet, la population du village et les autorités
locales de la commune, du district, de la province. Par ailleurs, le village est en
situation de précarité. En tant qu’économiste, quantitativement nous dirions qu’il
s’opère une aggravation de la pauvreté. La question est de savoir s’il s’agit d’un effet
à court terme, d’un problème d’ajustement aujourd’hui il y a une reconversion à
1 Nous renvoyons le lecteur au site web www.tamdaoconf.com pour de plus amples informations
sur les doctoriales. [ajout des éditeurs]
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mettre en place –, à moyen terme demain, les investisseurs permettront aux familles
d’être employées dans le projet – ou bien s’il s’agit d’une déstructuration sur le long
terme provoquant, par exemple, des migrationsfinitives.
Public
Votre restitution a pardes thodes de recherche sur le terrain, de la façon dont
les données ont été recueillies et les groupes stratégiques déterminés. Mais vous
n’avez pas précisé si ces méthodes étaient appropriées à un tel type de terrain.
Avez-vous rencontré des difficultés sur place ? Comment ces données ont-elles été
traitées ? Quels sont les commentaires des jeunes chercheurs de votre atelier sur le
terrain de recherche ?
Public
Je pense qu’il est difficile d’obtenir un soutien unanime de la part de la population
pour tout projet de développement.
À propos de la transgression des normes, je ne vois pas bien l’idée. Les questions
foncières sont soumises aux lois que les autorités locales sont à même d’observer.
Le barème des tarifs d’indemnisation, par exemple, n’est pas déterminé au niveau
local mais provincial. Son application ne peut être modifiée. Les normes de
communication sont respectées au regard des modes de diffusion de l’information
que vous avez cités.
Vous annoncez que 20 % de la population est Sán Dìu : y a-t-il un lien entre
contestation et ethnicité ? Il est important de considérer l’ensemble des points de vue
lors de conflit. Quelle est la position des investisseurs et des autorités locales ?
[Olivier Tessier]
Les autorités locales sont absentes des « groupes stratégiques » car ceux-ci sont
définis non pas par rapport à leurs attributs mais par leur fonction dans le jeu social
étudié. Les autorités villageoises en tant que telles ne sont pas un groupe stratégique,
elles sont entre « le marteau et l’enclume » et penchent plutôt du côté des paysans.
Elles sont davantage présentes dans le groupe des paysans, notamment ceux qui ne
veulent pas vendre leur terre. Les autorités communales sont également des autorités
du projet ; le président du Comité populaire a un discours très normé en affirmant que
le projet sera un formidable développement pour la région.
D’un point de vue économique, effectivement on ne peut pas se projeter dans
l’avenir. On peut à ce stade simplement constater que les paysans ne sont absolument
pas associés à l’exploitation et à la mise en valeur du site. D’autre part, dans la mesure
ils vont être expropriés et vont être obligés de quitter leur village, on peut parler de
déstructuration sociale. Tout un tissu humain et d’habitat va disparaître.
Sur la question relative aux normes. Effectivement, l’idéal serait que les acteurs
respectent les normes théoriques mais la réalité sociale est bien différente. On ne
peut pas postuler que puisqu’un cadre est fixé alors il sera respecté. Il est important
de questionner ce lien de causalité, de vérifier qu’il est une réalité. Il s’agit d’un
travail scientifique qui consiste à porter un regard critique sur la plus ou moins
grande adéquation entre le cadre théorique et les réalités de terrain, c’est-à-dire sur la
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Anthropologie du développement
capacité d’aménagement de ce cadre et de transgression des normes dont dispose
et use chaque groupe d’acteurs.
[Christian Culas]
Je voudrais vous remercier pour l’intérêt que vous portez à notre exposé.
Je réponds un peu de manière synthétique aux deux questions qui se recoupent
sur les exemples de transgression. L’une des conclusions de notre synthèse était
sur la démocratie à la base qui est au Viet Nam le discours affiché. Il faut que les
décisions soient prises à la base et qu’elles remontent vers les décideurs. Ce projet
montre le contraire de ce qui est annoncé par la norme. Prenons le paiement des
indemnités. Les normes officielles de paiements existent mais ce qui est verne
correspond pas à ces normes. Il est vrai qu’au Viet Nam, le cadre théorique légal
pour les confiscations de terres est très précis. Ici il ne semble guère être respecté.
Certaines personnes ont du signer des contrats d’expropriation de terre il y avait
juste leur nom et la somme l’argent, parfois une surface de terre, mais jamais le type
de terre. S’agit il de terres agricoles ou d’habitat ? L’ambiguïté est fâcheuse sachant
le prix varie de 1 à 25 peut être.
Rapporteur 1
Je voudrais ajouter un point de clarification au sujet des méthodes. Les groupes
stratégiques ont été définis à partir des enquêtes participatives. Sur la base des
données recueillies, nous avons procédé à un classement, à l’aide d’un cadre
conceptuel préalablement établi.
[Christian Culas]
Pour l’approche ethnique. Les Sán Dìu sont en effectif d’importance mineure dans
cette région. Je ne pense pas qu’il y ait une différenciation ethnique. Tout le monde
pense à sa terre, qu’il soit Sán Dìu ou Kinh.
Mireille Razafindrakoto, IRD-DIAL
Vous avez pardes méthodologies et des séances de travail en soirée afin de
mieux cerner les réalités de terrain. Pourriez-vous nous éclairer ? Christian a évoqué
des questions sur lesquelles vous n’avez pas obtenu de réponses. Il serait intéressant
de savoir quels types de questions sont restés sansponse.
[Olivier Tessier]
Notre volonté était de faire évoluer notre objet de recherche au fil du temps en
intégrant les informations et documents récoltés pendant la journée. On a adop
une démarche dynamique parce que defacto notre objet de recherche se dévoilait
au fur et à mesure des enquêtes. D’autre part, au vu de la nature de notre objet de
recherche, il nous fallait absolument éviter de tomber dans un rapport journalistique
ou événementiel avec le terrain. Après quelques discussions, nous avons pu identifier
des groupes stratégiques dont la nature et les contours ont été remaniés au fil
des journées.
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