Amplificateurs et Lasers à semi-conducteurs Lu2.1 RETARDS OPTIQUES VARIABLES A 1,55 µM PAR MODIFICATION DE LA VITESSE DE GROUPE DANS UN AMPLIFICATEUR OPTIQUE A BASE DE BATONNETS QUANTIQUES INAS/INP A. Martinez1, G. Aubin1, F. Lelarge2, R. Brenot2, J. Landreau2 and A. Ramdane1 1 CNRS Laboratory for Photonics and Nanostructures, Route de Nozay, 91460 Marcoussis 2 Alcatel-Thales III-V Lab, Route de Nozay, 91460 Marcoussis [email protected] RESUME Nous démontrons pour la première fois des retards optiques variables à température ambiante à 1.55 µm grâce à un amplificateur optique à semi-conducteur à base de batônnets quantiques InAs/InP. La vitesse de groupe d’une onde optique modulée en intensité par un signal hyperfréquence est contrôlée électriquement. La modification du courant du composant a permis d’augmenter la vitesse de groupe et de réaliser des retards optiques relatifs maximum de 136 ps à 250 MHz et de 55 ps à 2 GHz. Cette variation d’indice de groupe est attribuée à l’efficacité du mélange 4 ondes et à l’oscillation cohérente de population. MOTS-CLEFS : ralentissement de la lumière, boîtes quantiques, amplificateur optique à semiconducteur, mélange 4 ondes. 1. INTRODUCTION La possibilité de contrôler la vitesse de groupe de la lumière trouve de nombreuses applications telles que les mémoires optiques pour les télécommunications, ou le contrôle optique de signaux hyperfréquences pour les antennes à phase variable pour la défense [1]. Les techniques de ralentissement de la lumière reposent sur la modification de la dispersion du guide optique et/ou de la dispersion du matériau [1]. Le contrôle de la dispersion du matériau par le changement du spectre de gain ou d’absorption dans les matériaux à semiconducteurs s’avère très attractif pour la réalisation de retards optiques variables à température ambiante avec une bande passante de plusieurs GHz. L’utilisation du mélange 4 ondes (Four Wave Mixing, FWM) et de l’oscillation cohérente de population (Cohérent Population Oscillation, CPO) ont récemment permis de réaliser des retards variables de 160 ps avec une bande passante de 1 GHz dans des amplificateurs optiques (Semiconductor Optical Amplifiers, SOAs) à base de puits quantiques (Quantum Wells, QW) à 1,3 µm [1]. Grâce au confinement tridimensionnel de porteurs de charges, les matériaux à base de boîtes quantiques (BQs) présentent une densité d’états correspondant à une distribution de Dirac qui leur confère des propriétés uniques par rapport aux QWs. C’est ainsi que la réduction de la vitesse de groupe de 10 % avec une bande passante de 13 GHz a été récemment démontrée dans un SOA à base de BQs InAs/GaAs à 1,3 µm grâce à la CPO [2]. Plus récemment, une variation de phase de 25° a été démontrée à 1 GHz grâce à un amplificateur à base de BQs à 1.52 µm [3]. Le système de matériau à base de batônnets quantiques InAs/InP ou QDashes, présente des propriétés très intéressantes comme un fort gain modal et une efficacité de mélange 4 ondes exaltée, permettant notamment la génération d’impulsions subpicoseconde grâce à des lasers autopulsants [4]. Nous rapportons ici pour la première fois la génération de retards optiques variables à température ambiante grâce à un SOA à base de QDashes fonctionnant à 1,55 µm. 2. PROPRIETES LINEAIRES ET NON LINEAIRES DU SOA A BASE DE QDASHES La structure est obtenue par croissance par épitaxie par jets moléculaires sur substrat InP (100). La couche active comporte 6 plans de QDashes optimisée présentant un gain modal de ~ 45 24 JNOG, Lannion 2008 Amplificateurs et Lasers à semi-conducteurs Lu2.1 cm-1. Des guides d’ondes monomodes enterrés sont fabriqués à partir de cette structure. Ces guides sont désalignés de 7° par rapport à l’axe [110] et les facettes des SOA sont traitées anti-reflets pour diminuer les réflexions à moins de 10-4. Le composant testé mesure 2 mm et le pic d’émission spontanée amplifié se situe à 1550 nm. La figure 1 représente le gain fibre-à-fibre du SOA (pour une onde polarisée TE) en fonction de la puissance couplée dans la fibre en sortie du SOA. Un gain linéaire maximal fibre-à-fibre de 16 dB est obtenu pour un courant de 240 mA. Fig.1. Gain fibre à fibre à 1,55 µm en function de la puissance de sortie couplée dans la fibre optique pour différents courant de polarisation. Fig.2. Efficacité de conversion du conjugué et du signal issus du mélange 4 ondes en fonction du désaccord spectral pompe-sonde à 240 mA. L’insert montre un spectre typique mesuré à l’OSA. Nous avons ensuite mesuré l’efficacité du mélange 4 ondes. Une diode laser à cavité externe accordable est utilisée comme sonde. Deux contrôleurs de polarisation permettent d’ajuster indépendamment la polarisation de la pompe et de la sonde selon TE pour maximiser l’interaction non linéaire. Un coupleur directionnel 50/50 permet d’injecter la pompe et la sonde dans le SOA, tandis que le second port d’entrée permet de mesurer les puissances injectées. L’efficacité de conversion du mélange 4 ondes est déterminée par le rapport de la puissance du signal FWM en sortie du SOA divisée par la puissance de sonde couplée en entrée du SOA (connaissant les pertes de couplage), i.e. KFWM = Pout FWM/ Pin sonde. On définit également pour le signal conjugué cFWM:KcFWM = Pout cFWM/ Pin sonde. Les puissances optiques sont mesurées grâce à un analyseur de spectre optique (OSA) de résolution 10 pm, sachant que Pin pompe = - 8.5 dBm, Pin sonde = - 18.5 dBm et que le courant vaut 240 mA. Les deux efficacités de conversion diminuent avec le désaccord spectral en raison de la condition d’accord de phase du mélange 4 ondes. Les pentes sont de l’ordre de ~ -13 dB/decade, traduisant une décroissance réduite par rapport aux SOA à base de QWs où cette valeur vaut typiquement – 20 dB/dec.KcFWM et KFWM sont comparables aux valeurs publiées par un autre groupe alors que dans notre cas, les puissances injectées sont plus faibles d’environ 8 dB [5]. Ces résultats mettent en valeur les effets non linéaires exaltés de la structure optimisée à base de QDashes. 3. RETARDS OPTIQUES CONTROLABLES ELECTRIQUEMENT Les retards optiques sont mesurés par deux méthodes. La première repose sur l’analyse des traces temporelles à l’oscilloscope. Un laser monofréquence modulé en intensité, grâce à un modulateur externe en LiNbO3, correspond à la pompe et les deux bandes latérales de modulation jouent le rôle de sondes. Le signal en sortie du SOA est amplifié par un EDFA et un atténuateur fixe permet d’éviter la saturation d’une photodiode rapide, pouvant créer un retard optique indésirable. Un filtre passe bande élimine la distortion potentielle aux fréquences étudiées (fm =250 MHz, 1 et 2 GHz). La puissance optique moyenne est de – 17 dBm, inférieure à la puissance de saturation en entrée du SOA. 25 JNOG, Lannion 2008 Amplificateurs et Lasers à semi-conducteurs Lu2.1 Fig.3. Traces temporelles mesurées à l’oscilloscope d’un signal sinusoïdal à 2 GHz quand le courant varie de 190 à 240 mA. Fig.4. Variation de la phase mesurée en fonction de la fréquence avec un analyseur de réseau pour une variation de courant de 200 à 230 mA. Pour une fréquence fm = 2 GHz, quand le courant augmente de 190 mA à 240 mA, le signal sinusoïdal se déplace à gauche de la trace temporelle initiale: un retard optique négatif est obtenu, donc une augmentation de la vitesse de groupe est mise en évidence (Fig.3). Ce comportement est cohérent avec les travaux rapportés dans les SOAs à base de QWs. Ce phénomène s’explique par l’oscillation cohérente de population entre la pompe à f0 et chaque bande latérale de modulation, ainsi que le mélange 4 ondes, qui créent un réseau de porteurs oscillant à la fréquence de modulation fm. Ce dernier induit un réseau d’indice de réfraction et un réseau de gain modifiant la relation de dispersion des bandes latérales de modulation. Les retards relatifs maximaux valent ~ 136 ps et ~ 55 ps respectivement à 250 MHz et 2 GHz. Ces mesures sont confirmées par la méthode dite de « phase shift experiment » consistant à comparer à l’aide d’un analyseur de réseau la phase d’un signal radiofréquence en entrée (modulant la porteuse optique) avec la phase du même signal après passage dans le SOA (Fig. 4). L’intervalle de fréquence étudié couvre la bande de 300 kHz à 3 GHz. La puissance optique moyenne est identique à celle utilisée dans la première méthode (~ – 17 dBm). Lorsque le courant du SOA varie de 200 à 230 mA, le déphasage relatif mesuré vaut ~ 45° à 2 GHz, ce qui donne un retard relatif 't ~ 62 ps sachant que 't = ('I/360)(1/fm). Un retard de ~ 144 ps est également déduit à 250 MHz. Ces valeurs sont en accord avec celles déterminées par la première méthode. Les retards mesurés étant comparables à ceux obtenus avec les SOA à base de QWs, les SOA à base de QDashes présentent un comportement analogue aux matériaux à base de QWs. CONCLUSION Nous rapportons pour la première fois des expériences de contrôle de la vitesse de groupe dans un amplificateur optique à base de batônnets quantiques InAs/InP fonctionnant à 1,55 µm. Des retards optiques relatifs de ~ 136 ps et ~ 55 ps ont été obtenus respectivement à 250 MHz et 2 GHz. Ces mesures indiquent un comportement analogue à celui observé dans les SOAs à base de QWs. Ces retards s’expliquent par des effets non linéaires tels que le mélange 4 ondes et l’oscillation cohérente de population. RÉFÉRENCES [1] C. J. Chang-Hasnain and S.L. Chuang, J. Lightw. Technol. 24, 4642 (2006) [2] H. Su and S.L. Chuang, Appl. Phys. Lett., 88, 061102 (2006) [3] A. Matsudaira, D. Lee, P. Kondratko, D. Nielsen, S. L. Chuang, N. J. Kim, J. M. Oh, S. H. Pyun, W. G. Jeong, and J. W. Jang, Opt. Lett. 32, No. 19, 2894 (2007) [4] C. Gosset, K. Merghem, A. Martinez, G. Moreau, G. Patriarche, G. Aubin, and A. Ramdane, J. Landreau and F. Lelarge, Appl. Phys. Lett., 88, 241105, 2006 [5] A. Bilenca, R. Alizon, V. Mikhelashvili, G. Eisenstein, R. Schwertberger, D. Gold, J.P. Reithmaier and A. Forchel, IEE Electron. Lett., Vol. 38 No. 22, 1350 (2004) 26 JNOG, Lannion 2008