4PAUL SABATIER février 2012
Dossier
La planétologie
La planétologie : la quête
des origines
Les sondes envoyées à la rencontre des planètes du système
solaire bouleversent notre vision de l’histoire de la Terre et de
l’origine de la vie.
Depuis l’antiquité, philosophes et scienti-
ques ont scruté le ciel, directement ou
indirectement, animés par la question
de notre place dans l’univers. L’invention de la
lunette astronomique et la découverte des lunes
de Jupiter par Galilée en 1610 annonçaient une
ère nouvelle, la combinaison d’observations
et d’études théoriques permettait de repousser
les limites de nos connaissances. Cependant,
malgré des télescopes de plus en plus puissants,
les planètes et leurs satellites sont longtemps
restés des objets mystérieux et lointains.
Cette situation a brusquement évolué dans la
seconde moitié du XXe siècle, avec le développe-
ment de sondes capables de voyager à travers
l’espace interplanétaire, pour scruter de près nos
voisins célestes. Le début des années soixante a
vu les premiers survols de Vénus et depuis cette
date une centaine de missions spatiales ont été
envoyées vers les principaux corps du système
solaire, de Mercure à Neptune.
Un essor sans précédent
Au cours des dix dernières années, l’exploration
du système solaire a connu un essor sans précé-
dent, avec des orbiteurs et atterrisseurs de plus
en plus perfectionnés envoyés vers Mars, Vénus
et Saturne, sans oublier notre propre Lune.
Cette période, intense et riche en données
scientifi ques, a permis de réaliser d’immenses
progrès dans notre perception de l’origine et de
l’évolution du système solaire et des objets qui
le constituent. Depuis une vision nouvelle de
l’histoire de l’eau à la surface de Mars, jusqu’à la
découverte de paysages étrangement familiers
sur Titan, lune glacée de Saturne dont la surface
est façonnée par des pluies de méthane.
Des équipes techniques et scientifi ques de
l’Observatoire Midi-Pyrénées ont participé acti-
vement à un très grand nombre de ces aventures
à dimension internationale en se trouvant en
première ligne, que ce soit dans la conception,
Contacts
u
Michael Toplis, directeur de recherche
CNRS et Pierre-Louis Blelly, directeur de
recherche CNRS, à l’Institut de recherche en
astrophysique et planétologie (IRAP, unité
mixte UPS/CNRS)
Photo prise par la sonde Galileo de la surface de
Europa, lune de Jupiter. Sous la surface glacée se
trouve un océan d’eau liquide.
© Galileo propject, JPL, NASA, retravaillée par Ted
Stryk
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février 2012 PAUL SABATIER
La planétologie
Les formations associées :
Les recherches en planétologie couvrent un large panel de compétences allant de la conception
et la réalisation de l’instrumentation spatiale, au déploiement et l’entretien de réseaux de
sismomètres, en passant par la réalisation d’expériences de laboratoire et le développement de
modèles et de simulations numériques dans les domaines aussi divers que la thermodynamique,
les interactions rayonnement-matière, la physique des plasmas et la dynamique des fl uides
d’intérêt géophysique en général. Sur Toulouse, un grand nombre de formations permettent
d’accéder à ces compétences, en particulier les Masters de recherche en Sciences de la Terre et en
astrophysique (M2R STPS et M2R ASEP), le Master Pro Techniques spatiales et instrumentation,
ainsi que la formation assurée par le département « mesures physiques » de l’IUT.
Les formations associées :
dans la construction d’instruments embarqués,
ou bien dans l’exploitation scientifi que des don-
nées acquises par les instruments. Ces nombreux
succès ont été le fruit de collaborations effi caces,
non seulement entre équipes techniques et
scientifi ques, mais également entre chercheurs
de disciplines différentes.
En effet, la planétologie est une science pluridis-
ciplinaire par excellence depuis ses débuts, quand
astronomes, mathématiciens et physiciens per-
çaient les mystères des mouvements des astres
dans le ciel. Ce caractère pluridisciplinaire s’est
renfor avec l’ère spatiale et la nécessité de
développer une ingénierie de pointe capable de
répondre aux contraintes de la mesure toujours
plus précise dans les environnements extrêmes.
Par ailleurs, les questionnements scientifi ques
posés par cette exploration planétaire ont sus-
cité un dialogue croissant entre planétologues,
géophysiciens et géologues.
Pluridisciplinarité
Peut-être plus qu’ailleurs, la planétologie à Tou-
louse s’inscrit totalement dans cette démarche,
caractérisée à la fois par des liens étroits entre
science et instrumentation, et par la constitution
d’équipes scientifi ques transdisciplinaires, héri-
tage de la création visionnaire, en 1995, du pôle
de planétologie à l’Observatoire Midi-Pyrénées.
Le rapprochement de spécialistes de différents
laboratoires a été une initiative déterminante
dans la création du groupe Géophysique pla-
nétaire et plasmas spatiaux (GPPS) au sein du
nouvel Institut de recherche en astrophysique et
planétologie (IRAP), créé en janvier 2011.
Le groupe GPPS est riche d’une centaine de cher-
cheurs, ingénieurs, doctorants et post-docs et
il bénéfi cie de liens forts avec le CNES. Comme
ce dossier l’illustre bien, les membres du groupe
s’intéressent à l’ensemble des enveloppes pla-
nétaires, des plus internes (noyau/manteau),
aux plus externes (magnétosphère/ionosphère),
cherchant à comprendre les processus physiques
et chimiques à l’œuvre.
La constitution du groupe GPPS ouvre la voie
à une vision intégrée des corps planétaires, qui
permettra de reconstruire leur histoire géolo-
gique, mettant ainsi en avant la grande variété
des spécifi cités de chaque objet, et contribuant
dès lors à une meilleure compréhension de l’his-
toire du système solaire dans son ensemble.
Missions
Cette décennie, riche d’une récolte excep-
tionnelle de résultats pour les équipes tou-
lousaines, par exemple la mission Cassini/
Huygens autour de Saturne ; Cluster qui
étudie l’interaction du vent solaire avec la
magnétosphère terrestre, ou les missions améri-
caines et européennes vers Mars (Mars Odyssey,
Mars Exploration Rovers, Mars Express), devrait
faire place à un avenir tout aussi prometteur.
En effet, de nombreux projets d’envergure sont
engagés pour les années à venir, dans lesquels
notre contribution instrumentale est impor-
tante : la mission Mars Science Laboratory de la
NASA lancée en décembre 2011, la mission MA-
VEN qui va partir vers Mars en 2013, la mission
BepiColombo de l’agence spatiale européenne
(ESA) qui va partir vers Mercure en 2017 ou la
mission Solar Orbiter de l’ESA prévue pour un
lancement vers le soleil en 2017.
Les principaux corps du
système solaire : les planètes,
la Lune, les astéroïdes et les
comètes.
© NASA
Le groupe participe également à la préparation
d’autres missions ambitieuses, en particulier
vers les lunes de Jupiter (mission JUICE de l’ESA)
et l’envoi du premier sismomètre vers Mars (mis-
sion InSight de la NASA).
Diffi cile de prévoir de quoi sera fait l’avenir,
car; aujourd’hui encore, la découverte de nom-
breuses planètes autour d’autres étoiles et
l’éternelle question de l’origine de la vie font
que la planétologie se diversifi e, tissant des liens
nouveaux avec d’autres disciplines, de l’astro-
physique à la biologie. Le brassage d’idées et de
cultures scientifi ques est plus que jamais néces-
saire pour explorer le contexte de notre planète
et la vie qui y est apparue.
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Dossier
La planétologie
Intérieurs planétaires
L’écoute du bruit sismique a dévoilé la structure interne de notre planète.
Une méthode que l’on commence à appliquer aux autres planètes…
L’échographie est bien connue dans le
domaine médical. Les sismologues
utilisent la même technique pour imager les
entrailles de la Terre. En effet, les tremblements
de Terre sont la source d’ondes élastiques qui
se propagent partout à l’intérieur de la planète,
se réfl échissent sur les interfaces et voyagent à
des vitesses qui dépendent de la température
et des propriétés physiques du milieu traversé.
En écoutant un grand nombre de séismes en
différents points du globe on parvient à identifi er
les structures internes de la Terre.
Résolution spectaculaire
Les recherches en sismologie connaissent ac-
tuellement un développement rapide avec en
particulier l’utilisation de réseaux sismologiques
denses. Ces outils permettent d’utiliser le bruit
de fond micro-sismique pour réaliser des images
d’une résolution spectaculaire. Par exemple,
l’expérience PYROPE (PYRenean Observational
Portable Experiment) déploie depuis la n de
2010 un réseau dense de stations sur le sud-
ouest de la France. Ce projet franco-espagnol
regroupant plus de 25 chercheurs (géologues
et géophysiciens) de sept instituts différents
vise l’étude multidisciplinaire d’une chaîne de
montagne complète, les Pyrénées, une première
mondiale. Le développement de ces techniques
devient un atout essentiel pour ausculter les
planètes où l’absence de tectonique risque de
priver les sismologues de séisme.
Des grains de fer de taille
différente
Ces techniques permettent de sonder des
zones beaucoup plus profondes de la Terre. Par
exemple, le noyau de fer, enfoui sous 2 880 km
de manteau rocheux. La partie externe de ce
noyau est liquide, mais la partie interne, qu’on
appelle la graine est cristallisée. Cette graine de
1 220 km de rayon passait pour un des objets les
plus tranquilles de la Terre, mais la sensibilité des
réseaux sismiques et l’analyse des signaux ont
révélé une structure asymétrique, avec un côté
(situé sous l’Indonésie) dans lequel les ondes sis-
miques se propagent plus rapidement que dans
le côté opposé (situé sous le Pérou). Des calculs
montrent que cette variation peut s’expliquer
par des tailles de grains de fer différentes entre
les deux hémisphères, mais restait à expliquer
pourquoi. En 2010, les chercheurs de l’IRAP
ont montré que sous certaines conditions, la
graine peut être gravitationnellement instable,
donnant lieu à un mouvement de translation
continu. Ce déplacement implique la cristallisa-
tion sur une face et la fusion sur la face opposée,
l’asymétrie de taille des grains de fer étant sim-
plement au fait que ces derniers grossissent
au cours de leur transit à travers la graine.
La graine, une véritable fonderie à plus de
5 000 km sous nos pieds !
Raphaël F. Garcia, maître de conférences
et Marie Calvet, physicienne-adjointe à
l’Institut d’astrophysique et de planétologie
(IRAP, unité mixte UPS/CNRS)
Regarder à l’intérieur des autres
planètes
Les autres planètes ont-elles aussi une graine ?
Ont-elles même un noyau et de quelle taille ?
Parfois, l’analyse ne des orbites des sondes spa-
tiales permet d’obtenir quelques informations,
mais cette source de données a ses limites. Pour
la Lune, l’existence d’un noyau est une question
qui vient tout juste d’être résolue, grâce à une
étude récente conduite par les sismologues de
l’IRAP en collaboration avec l’IPGP de Paris. Ces
travaux ont permis de détecter, dans les don-
nées sismologiques des missions Apollo vieilles
de 40 ans, des ondes réfl échies sur le noyau
de la Lune et de quantifi er le rayon du noyau
de 380 km. Cet éclairage sur la structure interne
de la Lune permet de mieux cerner les conditions
de l’impact géant qui a formé le système Terre-
Lune et la composition de notre planète et de son
satellite. Dans le cas de Mars, les données orbi-
tales indiquent que la Planète Rouge possède un
noyau, mais on ne connaît ni sa densité ni sa
taille avec précision. Pour répondre à ces ques-
tions les équipes scientifi ques et techniques de
l’IRAP et de l’OMP sont impliquées dans le projet
de mission NASA « InSight » visant à déployer
un capteur sismologique à la surface de Mars.
Ce capteur permettra d’avoir une première
estimation de la sismicité et de la structure
interne de Mars. Et pourquoi pas, de visualiser
pour la première fois son noyau…
Contacts
raphael.gar[email protected]
& marie.calvet@irap.omp.eu
u
5 000 km sous nos pieds !
u
u
Schéma représentant le modèle de croissance de
la graine. La graine est dans un régime dynamique
instable et une hétérogénéité de température entre
les 2 hémisphères induit un décalage du centre
de masse. La cristallisation à la surface du côté
dense et froid et la fusion de l’autre côté tendent
à amplifier l’hétérogénéité de densité initiale. Il en
résulte un mouvement de translation permanent de
la graine avec des grains jeunes et petits d’un côté
et des grains vieux et gros de l’autre.
Vue d’artiste de l’atterrisseur du projet de
mission NASA « InSight » (responsables à
l’IRAP : R.F. Garcia et B. Dubois,
© JPL/NASA)
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février 2012 PAUL SABATIER
La planétologie
Les volcans de Mars sont-ils toujours actifs ?
Grâce à l’exploration spatiale, l’étude de la morphologie, de la minéralogie et de la composition des
roches martiennes permet de reconstruire l’histoire géologique de la Planète Rouge.
David Baratoux, maître de conférences
UPS et Patrick Pinet, directeur de recherche
CNRS, chercheurs à l’Institut d’astrophysique
et de planétologie (IRAP, unité mixte UPS/
CNRS)
Contacts
david.baratoux@irap.omp.eu
u
Sur des corps planétaires de la taille de la
Terre, Mars ou la Lune, des grands mouve-
ments internes donnent lieu à la fusion des
roches en profondeur. Ces liquides magmatiques
peuvent à leur tour atteindre la surface, formant
des coulées de laves et des volcans.
À l’Observatoire Midi Pyrénées, où géologues,
géophysiciens, géochimistes et planétologues
impliqués dans les missions spatiales se ren-
contrent, les dix dernières années ont vu une
véritable révolution, tant par la quantité que par
la qualité des données disponibles. La planète
Mars a été au coeur de ces activités, à travers de
nombreuses participations à des missions euro-
péennes et américaines.
Les données d’imagerie HRSC (High-Resolution-
Stereo-Camera) à bord la sonde Mars Express de
l’ESA ont largement bouleversé notre vision de
l’histoire volcanique martienne. Parmi les décou-
vertes, des chercheurs toulousains ont contribué
à la mise en évidence d’une grande province vol-
canique (Central Elysium Planitia, analogue à la
« Snake River Plain » aux Etats-Unis) où le volca-
nisme a été très actif sur les derniers 200 millions
d’années, voire beaucoup plus récemment par
endroits. À l’échelle de l’histoire du système so-
laire de tels âges sont extrêmement récents, ce
qui laisse ouverte la possibilité que le volcanisme
martien ne soit pas totalement éteint
Points chauds
Les données orbitales offrent aussi la possibilité
de mettre en évidence la présence de certains
minéraux qui cristallisent dans les laves, grâce à
l’imagerie hyperspectrale (ou spectro-imagerie)
dans le domaine visible et proche infrarouge.
Cependant, la détection de l’ensemble des miné-
raux est un problème complexe et un défi pour
la communauté internationale, car la signature
spectroscopique de certains minéraux peut
masquer celle d’autres tout aussi importants.
En mettant au point une méthode d’inversion
numérique validée en laboratoire, la présence ré-
gionale du minéral olivine dans les laves situées
dans la partie centrale d’un large édifi ce volca-
nique ancien, dénommé Syrtis Major, a pu ainsi
être établie à partir des données de l’instrument
OMEGA à bord de Mars Express. La présence
d’olivine est caractéristique de liquides basal-
tiques issus d’un large degré de fusion partielle
du manteau, et évoque sur Terre des contextes
de points chauds tels que l’Islande ou Hawaii.
Mars se refroidit moins vite
Concernant la chimie de ces mêmes roches
volcaniques, plusieurs chercheurs toulousains
sont impliqués dans l’analyse des données du
Gamma Ray Spectrometer à bord de la sonde
Mars Odyssey de la NASA, avec l’objectif de
produire et d’analyser des cartes de l’abondance
de plusieurs éléments chimiques sur une grande
partie de la surface de Mars. Parmi ces éléments,
le fer, la silice et le thorium sont particulièrement
sensibles aux conditions de formation des mag-
mas. À partir des ces trois éléments, et pour 12
provinces volcaniques d’âges différents, il a été
possible de retracer l’évolution de la tempéra-
ture du manteau martien sur 3 milliards d’an-
nées. Il apparaît alors que Mars se refroidit bien
moins vite que la Terre, une différence notable
probablement liée à la tectonique des plaques
sur Terre. Ce travail offre un cadre solide pour
comprendre les évolutions minéralogiques révé-
lées par la spectro-imagerie orbitale ainsi que
la persistance d’une activité volcanique jusqu’à
nos jours évoquée ci-dessus.
Les globes martiens illustrent la position de 12 grandes provinces volcaniques, 6 d’entre elles sont jeunes
(en rouge), et 6 autres ont un âge supérieur à 3.6 milliards d’années. C’est à partir des ces provinces et de
concentrations en fer, silice et thorium des roches volcaniques que le refroidissement de l’intérieur de la
planète rouge au cours du temps a pu être mis en évidence.
8PAUL SABATIER février 2012
Dossier
La planétologie
De l’eau sur
d’autres planètes ?
L’observation de la minéralogie des
surfaces planétaires, associée à des
expérimentations de laboratoire et
à la modélisation thermocinétique, peut
apporter de précieux renseignements sur
la présence d’eau à des époques lointaines.
Ces travaux sont possibles dans le cas
de Mars mais plus diffi cile dans le cas de
Venus, deux planètes proches ayant connu
des atmosphères plus ou moins agressives.
Dans le cas de Mars, les indices de la pré-
sence d’eau sont nombreux. La spectros-
copie et imagerie orbitale ont permis de
défi nir trois grands ensembles géomorpholo-
giques qui semblent, sur la base de leur minéra-
logie, associés à des conditions de surface bien
distinctes. Sur les terrains de l’époque la plus
ancienne (le Noachien) il existait effectivement
un environnement humide de type terrestre. Puis
les uides de surface se sont enrichis en soufre
(l’époque Hesperienne). Depuis à peu près
3 milliards d’années, les sols se sont asséchés,
refroidis et oxydés (l’époque Amazonienne). Les
progrès de l’exploration au sol, avec des rovers
de plus en plus mobiles et de mieux en mieux
équipés, ont permis d’obtenir des informations
bien plus précises sur la composition chimique
et minéralogique des sites d’atterrissage. Grâce
aux données obtenues sur les roches très riches
en sulfate, analysées à Meridiani Planum par le
rover Opportunity de la NASA, les chercheurs
de l’Observatoire Midi-Pyrénées ont abordé la
question de l’altération Hesperienne sous un
angle de géochimie plus globale. Sur la base
de modélisations numériques des interactions
uide-roche, il a été démontré que la formation
de ces roches a nécessité une très forte acidité,
mais très peu d’eau et des temps d’altération
extrêmement courts à l’échelle géologique.
Eau en abondance
L’attention de la communauté scientifi que
se focalise maintenant sur les périodes plus
anciennes de Mars, quand l’eau se trouvait en
abondance. Ces conditions clémentes ont pu
permettre l’émergence d’organismes vivants,
une hypothèse qui a guidé le choix du site d’étude
et l’équipement du robot Curiosity de la NASA
(dont l’arrivée sur Mars est prévue en août 2012)
sur lequel est embarqué, parmi d’autres instru-
ments, la sonde laser ChemCam développée à
l’IRAP et le CNES à Toulouse en partenariat avec
le LANL aux USA. Les microanalyses chimiques
par spectroscopie laser réalisées par ChemCam
à des distances allant jusqu’à 7 m du rover vont
permettre l’étude de la minéralogie à la surface
de Mars à l’échelle infra millimétrique. En rai-
son de la courte durée de l’analyse (quelques
secondes) et sa capacité à mesurer loin du rover
ChemCam sera également un éclaireur pour
les autres instruments équipant Curiosity. Les
minéraux argileux seront des cibles privilégiées
d’étude, car ils sont sans doute propices à un
début de colonisation de la vie, notamment en
préservant des conditions favorables avant que
l’arrivée de soufre ait généré des acides bien plus
forts qu’H2CO3.
Volcanisme intense
Le cas de Venus s’avère plus diffi cile à étudier.
L’atmosphère dense riche en gaz carbonique, les
nuages d’altitude et les conditions thermiques
au sol (470 °C) rendent son observation depuis
l’espace très diffi cile, tout autant que son explo-
ration au sol la durée de vie des instruments
n’excède pas 3 heures. On sait néanmoins que sa
surface est modelée par un volcanisme intense
et qu’il existe une chimie du soufre atmosphé-
rique complexe. Les rares observations faites au
sol par les missions russes Venera suggèrent des
phénomènes d’altération. La question de l’exis-
tence de minéraux hydratés en surface renvoie
au contrôle du cycle de l’eau mais l’atmosphère
sèche de Vénus soulève des questions chimiques
élémentaires. Ces questions sont abordées à
l’IRAP à l’aide d’une chambre expérimentale re-
produisant les conditions de la surface de Vénus.
Cette enceinte permet aujourd’hui de reproduire
l’interaction basalte-atmosphère, et à terme
de permettre l’analyse in situ des roches alté-
rées par spectrométrie laser LIBS et Raman,
instruments proposés par l’IRAP à l’embar-
quement dans une possible future mission
spatiale NASA (SAGE).
Olivier Gasnault, chargé de recherche
CNRS et Gilles Berger, directeur de
recherche CNRS, à l’Institut de recherche en
astrophysique et planétologie de Toulouse
(IRAP, unité mixte UPS/CNRS)
Infos en
www.msl-chemcam.fr
a
Contacts
gilles.berger@irap.omp.eu &
u
Représentation du Rover Curiosity (mission MSL) en action sur Mars, avec un tir laser de
ChemCam en premier plan. ©NASA/JPL-Caltech
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