Salon du Val d`Oise La valorisation de la femme musulmane ?..

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Salon du Val d'Oise La valorisation de la femme musulmane ?..
“Mettre à l’honneur la femme musulmane” : c'était l'objectif visé par le Salon Musulman du Val
d'Oise dont la troisième édition s'est déroulée ce samedi 12 et dimanche 13 septembre au parc
des expositions de Pontoise. En février, un précédent salon organisé par la même société Isla
Events devait avoir lieu à Pontoise, mais il avait finalement été reporté suite à de fortes
réactions sur les réseaux sociaux, notamment de la part de membres du Front national. En
revanche, la pétition en ligne lancée sur le site Change.org appelant au boycott de l’événement
n'a pas eu d'effets cette fois, même si elle a recueilli plus de 1000 signatures. Alors pourquoi
cet événement a-t-il suscité des remous, alors que l'objectif de mettre à l'honneur la femme
musulmane apparaît tout à fait louable en soi ? Il faut, pour cela, chercher à comprendre quelle
était la nature véritable du discours véhiculé sur cette question...
Le discours prosélyte de certains prédicateurs contestables
Basé sur l'idée de regrouper -de manière peut-être un brin sexiste- des activités pouvant
susciter l'intérêt des femmes, ce “salon au féminin” s'est en effet principalement organisé
autour d'ateliers et animations de cuisine, avec en point d'orgue de la manifestation, les “
cooking shows
” de Choumicha, la star du petit écran marocain, prévus pour rassembler jusqu'à 3000
personnes, ainsi qu'autour de défilé de mode et d'activités liées au shopping, le tout dans une
atmosphère très conviviale. Cependant, à côté de ce volet distrayant, des conférences avaient
également lieu en parallèle. Des conférences où la parole était donnée à des prédicateurs
musulmans dont certains sont connus pour la radicalité ou le caractère tendancieux de leurs
discours.
Rachid Abou Houdeyfa, imam de la mosquée de Brest, a donné ainsi une conférence le 12
septembre sur “La femme, l'éducatrice au grand mérite”. Lui, qui enjoint sur les réseaux sociaux
les femmes musulmanes à porter le voile
“islamique
” sous peine d'encourir les feux de l'Enfer dans l'au-delà, ou de justifier les agressions sexuelles
et les viols qu'elles encourent ici-bas si elles ne le portent pas : “
si la femme sort sans honneur, qu'elle ne s'étonne pas que les hommes abusent de cette
femme-là
”.
Nader Abou Anas était invité, quant à lui, à parler de la “valorisation de la femme en islam”. Ce
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prédicateur qui enseigne le coran et l'arabe au sein de l'association D'CLIC à Bobigny et qui
tient un site communautaire a des positions anti-progressistes qui clament régulièrement la
soumission sans condition de la femme à son mari. Sur une vidéo tournée lors d'un précédent
salon musulman où il était invité, on peut l'entendre faire cette déclaration : “
Le soir, il a un besoin, il a une envie, elle ne veut pas... L'homme, il craque… Qu'elle sache que
les anges la maudissent toute la nuit dans le cas où elle se refuse à son mari sans raison
valable
.” Et soulignant, et répétant fermement que “
la femme, elle ne sort de chez elle qu'avec la permission de son mari.”
Pour sa conférence, il était accompagné de Mehdi Kebir, prédicateur à la mosquée de
Villetaneuse connu pour ses prêches également mysogines.
Une vision de la femme musulmane enfermée dans des stéréotypes
Mais dans les conférences données lors de cette édition du week-end du 12 et 13 septembre,
les propos ont évité soigneusement toute forme de dérapage verbal. Est-ce du fait qu'une
pétition avait été lancée pour interdire la manifestation, et que les médias avaient été
prévenus ? Quoi qu'il en soit, cette fois-ci, Nader Abou Anas a dit pourquoi “elles devaient être
respectées
”,
rappelant ce verset du Coran : “
à toute personne qui agit mal avec sa femme, craignez Allah
”. Il a rappelé également que lorsque le verset du Coran précise que “
l'homme a autorité sur sa femme
”, cela signifie simplement qu'il est de son devoir d'assurer sa sécurité et de sa responsabilité
de devoir l'entretenir. Medhi Kebir a de son côté exhorté le musulman à “
éduquer ses enfants et aider son épouse dans les tâches ménagères
”.
On est bien loin, cependant, de prôner la liberté de la femme et son droit à se prendre en
charge elle-même, en étant pleinement responsable d'elle-même. Le discours semble
parfaitement ignorer l'indépendance acquise par les femmes à notre époque, et continue de les
placer délibérément dans un statut de “mineures” à devoir nécessairement protéger.
Obéissantes et soumises au devoir de protection de leur mari, donc sans libre-arbitre pour
décider de leurs propres actions. Or ce sont ces
“éducatrices
” là, et ce modèle de femme musulmane-là que les prédicateurs ont mis en avant, sous couvert
d'évoquer la “
valorisation de la femme musulmane
”. Et ce, alors que le reste du salon organisait inconsciemment tous leurs centres d'intérêts
autour de la cuisine, des emplettes, et de la maison. Autant dire, essentiellement autour des
tâches qui les guident vers l'ambition exclusive de devenir de bonnes épouses et de bonnes
maîtresses de maison...
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Outre cette image stéréotypée de la femme musulmane jugée moralement décente aux yeux de
la religion, ce type de conférences où des prédicateurs interpellent la société sur des questions
de cette ampleur et de cette nature pose d'autre part question dans la mesure où elles laissent
une brèche ouverte au prosélytisme et au double-discours. Au sein de l'association D'CLIC de
Nader Abou Anas, sur son site communautaire, dans les prêches Rachid Abou Houdeyfa à
Brest, ou de Mehdi Kébir à Villetaneuve, la lecture faite de l'esprit du texte coranique révèle des
interprétations à l'emporte-pièce, et une grille de lecture patriarcale qui s'oppose sciemment à la
promotion de l'égalité hommes/femmes, ou de l'émancipation des femmes.
L’organisateur de ce salon et responsable de Isla events a fait cette réponse, aux questions
posées à propos de l'invitation de ces deux imams : “
n
ous acceptons tout le monde. Je suis un entrepreneur musulman, et je prône un islam tolérant.
Les terroristes, Daesh… ce ne sont pas des musulmans pour moi, que cela soit bien clair”.
Il est du ressort, cependant, des municipalités de veiller à ce que des initiatives d'ordre privé,
dont on sait qu'elles sont, quant à elles, parfaitement dans leur droit d'organiser de telles
manifestations, n'échappent cependant pas au contrôle des organes publics sur la nature et
l'esprit de ce qu'elles véhiculent, et qui doit demeurer en tous points conforme aux principes et à
l'esprit républicains.
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