Notes pays ÉGYPTE Début 2008, le FMI a décrit l’Égypte comme « une économie dont le taux de croissance est l’un des plus rapides au Moyen-Orient », lorsque la croissance du PIB réel s’est accélérée, passant de 3.2 % en 2001/02 à plus de 7 % en 2006/07. Cette croissance a été portée par les réformes économiques introduites en 2004 par le gouvernement du président Hosni Moubarak qui ont renforcé la participation du secteur privé aux secteurs égyptiens de l’industrie et des services. Elles ont ainsi attiré une quantité massive de flux entrants d’IDE, se traduisant par le développement de secteurs clés comme celui des télécommunications. Enfin, elles ont créé des millions d’emplois. Le secteur du tourisme, dont les liens en amont avec les PME sont solides, a été dopé en 2008, lorsque la compagnie EgyptAir a rejoint Star Alliance. Depuis la révolution de janvier 2011, le secteur s’est néanmoins nettement contracté en raison de l’agitation politique, ce qui a empêché les pauvres de profiter pleinement des gains de la mondialisation. En prenant modèle sur la Chine, l’Égypte a dopé son industrialisation en adoptant la loi nº 83 en 2002 sur les Zones économiques spéciales (Special Economic Zone - SEZ). Un article d’une chercheuse (Emma Scott, « China goes global in Egypt: A Special Economic Zone in Suez », août 2013) indique que, depuis 2005, la Chine a créé un certain nombre de coentreprises avec des Égyptiens, entre autres, les investissements initiaux totalisant 334.47 millions USD. Ces investissements participent aux transferts de connaissances et à l’industrialisation dans un certain nombre de sous-secteurs de la fabrication : fibre de verre, équipements électriques haute et basse tension, textile et équipements pétroliers. Les investissements chinois ont par exemple permis à l’Égypte de se repositionner dans la chaîne de valeur mondiale (CVM) du secteur de l’extraction. Le pays fabrique ainsi des plates-formes de forage pétrolier et les composants associés qui seront utilisés par les compagnies pétrolières internationales opérant sur le territoire égyptien. Vodafone, Orange, Microsoft, Intel et Oracle ont installé en Égypte des activités qui répondent aux besoins de leurs clients internationaux dans le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC). Les activités égyptiennes de ces acteurs couvrent l’ensemble des CVM, du développement de nouveaux produits à la fourniture de solutions techniques à leurs clients internationaux via des centres d’appel de pointe. Par exemple, plus de 80 % du développement des systèmes logiciels de Microsoft au Moyen-Orient est réalisé par des Égyptiens, sur le territoire égyptien ou dans les pays du Golfe, par des équipes dédiées à la création d’interfaces utilisateur en arabe ainsi qu’à l’assistance technique après-vente, selon le rapport 2010 de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement intitulé « Integrating developing countries’ SMEs into global value chains » (« Intégrer les PME des pays en développement aux chaînes de valeur mondiales »). En plus de la langue arabe, l’Égypte offre d’autres avantages au secteur des TIC, notamment la proximité avec l’Europe et le Golfe, une solide infrastructure de fibre optique permettant d’externaliser des services, et un marché extrêmement vaste qui stimule la demande d’amélioration des produits. Selon l’Autorité générale des investissements et des zones franches (General Authority for Free Zones and Investment - GAFI) d’Égypte, le pays a mis en place plus de 100 SEZ. Ces zones offrent aux investisseurs des incitations concurrentielles, notamment des terrains, la fourniture des services publics adéquats, un réseau routier de qualité, des allègements fiscaux et un guichet unique pour communiquer avec les services de l’État. Motivé par l’expérience chinoise, le décret présidentiel nº 35 de 2003 a créé la Zone économique spéciale du Nord-Ouest du Golfe de Suez (North-West Gulf of Suez Special Economic Zone - SEZ). Située à proximité du port de Sokhna, dans la région du canal de Suez, cette zone se compose de nombreux groupes d’industries légères et lourdes, notamment dans l’automobile, la pétrochimie, les produits pharmaceutiques, l’agroalimentaire et le textile. Les informations de la GAFI révèlent que le secteur textile égyptien participe à l’ensemble des activités de sa CVM (de la culture du coton à la production de tissus et de vêtements), créant ainsi environ 30 % des opportunités d’emploi dans la fabrication. Marks & Spencer, Levi Strauss, Calvin Klein, Pierre Cardin et Tommy Hilfiger sont quelques-unes des marques internationales qui produisent en Égypte. Créée en 2006, une zone industrielle sino-égyptienne a fortement profité à l’Égypte grâce à un transfert de technologies de fabrication textile. Les ressources naturelles et la situation géographique avantageuse dont jouit l’Égypte, avec un accès facile aux marchés clés d’Europe, d’Afrique et du Golfe, sont autant d’avantages comparatifs majeurs que le pays offre aux acteurs mondiaux du secteur textile. 124 Perspectives économiques en Afrique - Édition thématique © BAfD, OCDE, PNUD 2014 www.africaneconomicoutlook.org/fr/pays Le secteur aérien présente les meilleures opportunités pour permettre à l’Égypte d’accroître sa participation aux CVM régionales et mondiales. Selon le ministère de l’Aviation, l’Égypte a acquis la licence exclusive d’un système de communication et de navigation par satellite qui devrait couvrir l’ensemble de l’Afrique. Selon l’Organisation de l’aviation civile internationale, tous les systèmes de navigation aérienne du monde vont devoir migrer vers un nouveau système de communication, de navigation, de surveillance et de gestion du trafic aérien par satellite, ce qui améliorera grandement la sûreté des transports aériens. Pour tirer parti de cet atout unique, l’État a approché la Banque africaine de développement afin qu’elle l’aide à réunir les gouvernements africains et les acteurs du secteur privé pour qu’ils investissent dans un projet de satellites géostationnaires nommé NAVISAT, lequel réalisera les investissements requis. Le projet proposera également des services Internet à haut débit payants aux acteurs du secteur privé sur tout le continent. En outre, compte tenu de ses capacités dans le secteur de l’aviation, l’Égypte étudie la possibilité de devenir le formateur de référence pour les compagnies aériennes publiques et privées de toute l’Afrique. Même si l’Égypte possède plusieurs avantages comparatifs dont elle peut tirer parti pour étendre sa participation aux CVM actuelles et s’ouvrir à de nouvelles opportunités, le pays doit résoudre un certain nombre de problèmes. L’amélioration de la gouvernance est essentielle si l’Égypte veut créer un climat favorable au développement du secteur privé. Une telle amélioration permettrait au pays de tirer davantage parti de ses solides infrastructures, de ses coûts de production compétitifs, de sa proximité avec les marchés régionaux et mondiaux, et d’accords commerciaux bilatéraux favorables pour que les CVM créent davantage d’activités. Accroître la participation du secteur privé à l’industrie textile, contrôlée par l’État et handicapée par le vieillissement des machines dans les usines d’égrenage, règlerait le problème des technologies obsolètes et placerait l’Égypte dans une position plus favorable pour concurrencer les producteurs asiatiques de prêt-à-porter. En outre, formaliser le secteur des PME, caractérisé par une faible valeur ajoutée, améliorerait les possibilités d’intégration de ces entreprises aux CVM par le biais d’accords de jumelage avec les acteurs mondiaux, dans les SEZ et dans d’autres régions d’Égypte. La stratégie de développement industriel mise en place en 2006 par le ministère du Commerce et de l’Industrie vise à renforcer l’intégration de l’Égypte à l’économie mondiale en développant de nouveaux créneaux dans les secteurs des moyennes à hautes technologies. En s’appuyant sur ces efforts, le ministère des Technologies de l’information et de la communication (MCIT) a lancé une stratégie TIC (2013-17) ayant pour objectif d’approfondir la collaboration entre les secteurs public et privé. Cette stratégie appelle à un renforcement de la législation et des infrastructures technologiques, afin que l’Égypte devienne le centre des TIC pour toute l’Afrique du Nord. L’État espère ainsi créer un environnement propice à davantage d’investissements étrangers, lesquels créeront de nouveaux emplois pour les Égyptiens. La stratégie mandate le MCIT pour créer un fonds de 20 millions EGP destiné à financer des incitations poussant les PME à saisir des opportunités au niveau des activités amont des CVM dans les domaines des applications mobiles et open source. L’État espère que les initiatives énoncées dans sa stratégie TIC généreront plus de 100 000 emplois en 2014. Bien que la crise politique actuelle ait un impact négatif sur le tourisme, le nouveau plan stratégique du ministère de l’Aviation civile a pour objectif d’accroître la capacité des aéroports égyptiens, de 30 millions de passagers actuellement à 40 millions à l’horizon 2025. Cela devrait créer des millions d’emplois compte tenu des liens étroits qui existent entre ce secteur, celui du tourisme, et les voyages d’affaires et d’agrément associés. En plus d’étendre le périmètre d’EgyptAir sur les réseaux aériens mondiaux, le ministère cherche à profiter de la situation géographique avantageuse de l’Égypte pour tisser davantage de liens avec l’économie aérienne mondiale. Dans ce domaine, une initiative importante a été dévoilée à l’occasion de l’Airport Cities World Conference and Exhibition qui s’est tenue en mars 2013 en Afrique du Sud : un projet de développement d’une cité aéroportuaire sur le site de l’aéroport international du Caire, doté d’un budget de 20 millions USD. Dans une perspective de création d’emplois, cette infrastructure de 480 000 m² comprendra des installations axées sur les loisirs, des hôtels cinq étoiles et un parc d’attractions Disneyland, et permettra à l’Égypte de s’ancrer plus profondément dans les CVM des secteurs de l’aviation et du tourisme. Cependant, l’Égypte doit commencer par résoudre les problèmes politiques et d’insécurité qu’elle connaît actuellement afin d’attirer les IDE dont le pays a besoin de toute urgence pour parvenir à participer plus pleinement à l’économie mondiale. © BAfD, OCDE, PNUD 2014 Perspectives économiques en Afrique - Édition thématique 125