Conférence idées pour le développement : « La transition écologique : comment l’initier (enfin) ? »
jeudi 19 juin 2014 à l’AFD
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Lorsque les gouvernements élaborent de bonnes politiques, ils stimulent les nouvelles technologies. En
matière de technologies d’atténuation, à mesure que les pays élaboraient une réglementation sur les
nouvelles technologies, des innovations ont vu le jour. Nous avons assisté à une révolution notamment
en ce qui concerne le prix du photovoltaïque qui a énormément baissé. En 1980, pour produire 1 watt
en photovoltaïque, on devait dépenser 24 dollars, contre 2 dollars aujourd’hui. Dans la plupart des
pays, il est devenu moins coûteux d’installer des solutions photovoltaïques ou éoliennes que des
solutions conventionnelles basées sur les énergies fossiles. Sans parler des avantages en termes de
réduction de la pollution et d’impacts sur la santé. Il n’y a donc aucune raison que cette révolution ne
continue pas à s’opérer.
Pourtant, aujourd’hui, tous les signaux pointent la mauvaise direction. Chaque année, les pays du
monde entier dépensent 500 milliards de dollars pour encourager leurs populations à utiliser trop
d’énergies fossiles en les subventionnant. Ils payent les gens pour qu’ils consomment trop. Le FMI
vient de mener une étude : au regard des réels subsides annuels, on totalise environ 2 000 milliards de
dollars pour encourager la consommation d’énergies fossiles, alors qu’on ne dépense que 100 milliards
pour encourager les populations à privilégier les énergies renouvelables. L’effet est bien sûr contre-
productif.
2. Révolutionner l’organisation des villes.
Chaque jour, les populations urbaines augmentent de 200 000 personnes. Cette évolution
démographique est sans précédent. 65 % de la croissance mondiale provient des principales
métropoles du monde qui sont responsables d’environ 70 % des émissions de gaz à effet de serre.
10 % du PIB de la plupart des villes sont perdus en raison de congestion. 5 % du PIB est perdu en
raison des impacts sur la santé. À l’horizon 2050, l’avenir s’annonce préoccupant : les zones urbaines
auront triplé.
En Chine, à l’horizon 2025, on comptera 220 métropoles de plus d’1 million de personnes – on en
compte aujourd’hui 35 en Europe. La question est donc de savoir comment cette croissance des
métropoles sera gérée. En Chine, un individu émet en moyenne 7,2 tonnes de carbone par an. La ville
de Beijing, très inefficace, émet des quantités de carbone plus importantes que la moyenne (10tCO
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).
À New York, les émissions moyennes sont de 5,9 tonnes. Les émissions de carbone new-yorkaises
sont donc inférieures à la moyenne chinoise. Ce qu’il faut comprendre, c’est que même dans un pays
extrêmement inefficace sur le plan énergétique comme les États-Unis (17.3tCO
2
), New York parvient
à n’émettre que 5,9 tonnes de CO
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par tête du fait de sa conception intelligente. Il s’agit en effet d’une
ville compacte dotée de bons transports publics, et pourvue de codes du bâtiment intéressants. Une
révolution urbaine est possible, il faut saisir cette opportunité.
3. Repenser la chaîne d’approvisionnement.
Depuis 15 ans, chaque minute de chaque jour qui passe, nous perdons, en termes de superficies de
forêt, l’équivalent de 50 terrains de football. L’agriculture tue les forêts, par exemple à travers les
déboisements effectués en Asie de l’Est pour exploiter l’huile de palme. Et comme la moitié des
produits de nos supermarchés en contiennent, ce sont nos comportements, notamment alimentaires,
qui engendrent ces déboisements massifs en Indonésie. Pour inverser cette tendance, des entreprises
comme Unilever, Nestlé ou Procter & Gamble se sont engagées à n’acheter de l’huile de palme que de
plantations n’impliquant pas de déboisements. Certains négociants d’envergure comme Wilmar se sont
engagés dans le même sens. Ces engagements sont rendus possibles parce qu’aujourd’hui, nous savons
qui est responsable de la disparition des forêts. Grâce à Google et à de nombreuses agences
internationales, y compris l’Agence spatiale française, nous avons mis au point un outil qui montre le
déboisement en temps réel, partout dans le monde. Il est ainsi possible d’identifier chaque entreprise
qui enfreint les règles en matière de déboisement et de production d’huile de palme. Le Big Data nous
donne la capacité d’évoluer vers une chaîne d’approvisionnement plus verte.