Il y a cent ans, le physicien
autrichien Victor Franz
Hess découvrait l’existence
d’un rayonnement ionisant
d’origine extraterrestre, les
« rayons cosmiques ». Leur
nature est aujourd’hui bien
connue. Lorsque certaines
étoiles en fin de vie explosent
et deviennent des supernovæ,
leur matière est éjectée à
une vitesse supersonique et
génère des ondes de choc
qui accélèrent les particules.
Certains noyaux atomiques
acquérant ainsi une très forte
énergie cinétique arrivent
jusqu’à la Terre.
Mais les rayons cosmiques de
basse énergie(4) ne sont pas
détectés au voisinage de notre
planète, car le vent solaire les
empêche de pénétrer dans
l’héliosphère. On ne sait donc
pas grand-chose de leur com-
position chimique et de leur
flux en dehors du système so-
laire, mais tout indique qu’ils
jouent un rôle important dans
la galaxie. Ainsi, en ionisant
et en chauffant les nuages in-
terstellaires les plus denses,
ils régulent sans doute la
formation des étoiles.
Les auteurs de l’article ont
commencé par étudier de fa-
çonthéoriquel’émissionXque
devraient générer des rayons
cosmiques de basse énergie
dans le milieu interstellaire.
Puis ils ont recherché la trace
de cette émission théorique
dans des données en rayons
XaccumuléesparleXMM-
Newton depuis son lancement
en 1999. En analysant les
propriétésdel’émissionXdu
fer interstellaire enregistrée
par le satellite, ils ont alors
trouvé les signatures d’une
forte population d’ions rapides
au voisinage de l’amas des
Arches, à environ cent an-
nées-lumière du centre de la
Voie lactée. Les étoiles de cet
amas se déplacent de concert
à la vitesse d’environ 700 000
km/h. Les rayons cosmiques
sont vraisemblablement
produits dans la collision
à grande vitesse de l’amas
d’étoiles avec un nuage de gaz
se trouvant sur leur chemin
(Fig. 1). Dans cette région par-
ticulière, la densité d’énergie
des ions accélérés est environ
mille fois supérieure à celle
des rayons cosmiques au voi-
sinage du système solaire.
Il s’agit de la première décou-
verte d’une source majeure de
rayonscosmiques(5)debasse
énergie en dehors du système
solaire. Cela montre que les
ondes de choc des super-
novae ne sont pas les seuls
objets à pouvoir accélérer en
masse des noyaux atomiques
dans la galaxie. Ces résultats
devraient permettre d’iden-
tifier de nouvelles sources
d’ions dans le milieu inters-
tellaire et peut-être de mieux
comprendre les effets de ces
particules énergétiques sur la
formation des étoiles.
GrâceàXMM-Newton(1),lesatelliteeuropéend’astronomieenrayonsX,deschercheursduCNRS
(dont le Centre de Spectrométrie Nucléaire et de Spectrométrie de Masse, Université Paris-Sud/
CNRS) et du CEA(3) ont découvert une nouvelle source de rayons cosmiques. Au voisinage de
l’extraordinaire amas des Arches, près du centre de la Voie lactée, ces particules sont accélérées
dans l’onde de choc générée par le déplacement à une vitesse d’environ 700 000 km/h de dizaines
demilliersdejeunesétoiles.CesrayonscosmiquesproduisentalorsuneémissionXcaractéris-
tique en interagissant avec les atomes du gaz ambiant. Leur origine diffère de celle des rayons
cosmiques découverts il y a tout juste cent ans par Victor Hess, qui sont issus des explosions de
supernovæ. Ces résultats sont publiés dans la revue Astronomy & Astrophysics.
Cent ans apres, la découverte
d’un nouveau type de rayons
cosmiques
Figure 1.Larégiondel’amasdesArchesvueenrayonsX
(contours) et dans le proche infrarouge (image de fond). La carte
infrarouge est obtenue à partir des observations du télescope Hu-
bbleàlalongueurd’ondede1,875µm(donnéestiréesdeDonget
al. 2011, Monthly Notices of the Royal Astronomical Society, 417,
114). Les contours indiquent l’intensité de la raie du fer neutre
observéeparXMM-Newtonautourdel’amasd’étoiles(situé
aucentredel’image).L’émissionXestproduitepardesrayons
cosmiques accélérés dans l’onde de choc formée dans le milieu
interstellaire par le mouvement supersonique de l’amas. Celui-ci
se déplace de la droite vers la gauche de l’image à environ 700
000 km/h. Crédit image : Vincent TATISCHEFF.
Notes :
(1) XMM-Newton est un satellite de l’ESA
auquel le CNES, le CEA et le CNRS ont
fortement contribué.
(2) Laboratoires impliqués : Centre de
Spectrométrie Nucléaire et de Spec-
trométrie de Masse (CNRS/Université
Paris-Sud), Laboratoire d’Annecy le
Vieux de Physique des Particules (CNRS/
Université de Savoie), Laboratoire As-
trophysique, Interactions, Multi-échelles
(CEA/CNRS/Université Paris-Diderot).
(3) Institut de recherches sur les lois
fondamentales de l’Univers (Irfu), Ser-
vice d’astrophysique.
(4) Ceux dont l’énergie cinétique est
inférieure à un demi-milliard d’élec-
tronvolts.
(5) Les rayons cosmiques découverts
sont hadroniques, c’est à dire constitués
en grande majorité de noyaux d’atomes.
Les rayons cosmiques hadroniques
représentent près de 99% des particules
galactiques détectées au voisinage
terrestre. Les électrons et positrons, qui
constituent la composante leptonique du
rayonnement cosmique, sont bien moins
nombreux.
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