CONFÉRENCE DU FORUM DES SAVOIRS
“Plus l’être humain sera éclairé, plus il sera libre.”
Voltaire
VICTOR HUGO
Mystique de la liberté et du progrès
CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
Dessin de Gil de 1879 intitulé «Amnistie ! Le vieux briseur de fers»
Paru dans la Petite Lune, N°34, de juillet 1879
Association ALDÉRAN Toulouse
pour la promotion de la Philosophie
MAISON DE LA PHILOSOPHIE
29 rue de la digue, 31300 Toulouse
Tél : 05.61.42.14.40
Site : www.alderan-philo.org conférence N°1000-112
VICTOR HUGO,
MYSTIQUE DE LA LIBERTÉ ET DU PROGRÈS
conférence d’Éric Lowen donnée le 10/05/2014
à la Maison de la philosophie à Toulouse
Dans cette série de conférences consacrées aux grands principes théoriques sur la liberté,
nous ferons un détour par un personnage qui appartient aux grandes figures universelles de
la liberté : Victor HUGO. Aujourd’hui nous percevons Victor Hugo sous l’angle de la littérature,
de la poésie ou du théâtre ; mais en son temps il fût un des plus farouches défenseurs de la
liberté, du progrès, de la république et des droits de l’homme. Retour sur la place et
l’importance de la liberté dans sa philosophie, qu’il éleva au rang d’une mystique.
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VICTOR HUGO
MYSTIQUE DE LA LIBERTÉ ET DU PROGRÈS
PLAN DE LA CONFÉRENCE PAR ÉRIC LOWEN
Le premier besoin de l’homme, son premier droit, son premier devoir, c’est la liberté.
Victor Hugo (1802 - 1885)
Message au Congrès de la paix de Lausanne, en 1869
I LA LENTE NAISSANCE DU «GRAND» VICTOR HUGO
1 - Victor Hugo (1802-1885), un écrivain atypique au destin extraordinaire
2 - Le progressif éveil humaniste et démocratique de Victor Hugo, la rupture avec son milieu
conservateur et royaliste
3 - La rupture lors de la Seconde république en 1849, accentué par le coup d’état du 2 décembre
par Napoléon III
4 - La naissance d’un combattant de l'idée au service de la liberté et du progrès humain
5 - Un engagement complet porté par un souffle épique : intellectuel, artistique et politique
6 - Une évolution et un engagement qui se voient dans ses oeuvres
II LE HÉROS DE LA DÉFENSE DE TOUTES LES LIBERTÉS
1 - Partout où l’homme souffre (il est humaniste avant tout)
2 - Partout où les libertés sont menacées
3 - Partout où l’homme se bat contre l’injustice et l’oppression
III SA CONCEPTION DE L’HISTOIRE
1 - Une vision grandiose et divine du monde, animée par un christianisme hétérodoxe
2 - Une histoire téléologique plus que providentialiste de l’histoire, dont l’homme est acteur
3 - Luttes et révolutions en sont l’instrument, elles rythment le progrès : 1789, 1830, 1848, 1870
4 - Une conception ascensionnelle de l’histoire humaine : l’homme doit grandir (comme l’exprime La
légende des Siècles)
IV LA LIBERTÉ EST LE MOYEN, LE PROGRÈS EST LA FINALITÉ
1 - La liberté, don de dieu à l’homme (L’ange liberté)
2 - La liberté, instrument du salut (La fin de Satan)
3 - La recherche d’une délivrance universelle de l’Humanité (Les misérables)
V CONCLUSION
1 - Hérault universel de la Liberté et du Progrès, qui en fut aussi un héros
2 - Son oeuvre littéraire est inséparable de son combat libertal et progressiste
3 - Ils s’éclairent mutuellement
4 - Ce qui fait de lui un auteur phare de la littérature mondiale
ORA ET LABORA
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Document 1 :
Préface des Misérables
Tant qu'il existera, par le fait des lois et des mœurs, une damnation sociale créant
artificiellement, en pleine civilisation, des enfers, et compliquant d'une fatalité humaine la
destinée qui est divine ; tant que les trois problèmes du siècle, la dégradation de l'homme
par le prolétariat, la déchéance de la femme par la faim, l'atrophie de l'enfant par la nuit,
ne seront pas résolus ; tant que, dans de certaines régions, l'asphyxie sociale sera
possible ; en d'autres termes, et à un point de vue plus étendu encore, tant qu'il y aura
sur la terre ignorance et misère, des livres de la nature de celui-ci pourront ne pas être
inutiles.
Victor Hugo (1802 - 1885)
Hauteville-House, premier janvier 1862
Document 2 :
Le progrès est le mode de l'homme. La vie générale du genre humain s'appelle le
Progrès; le pas collectif du genre humain s'appelle le Progrès. Le progrès marche; il fait
le grand voyage humain et terrestre vers le céleste et le divin; il a ses haltes il rallie le
troupeau attardé; il a ses stations il médite, en présence de quelque Chanaan
splendide dévoilant tout à coup son horizon; il a ses nuits il dort; et c'est une des
poignantes anxiétés du penseur de voir l'ombre sur l'âme humaine, et de tâter dans les
ténèbres, sans pouvoir le réveiller, le progrès endormi.
Dieu est peut-être mort, disait un jour à celui qui écrit ces lignes Gérard de Nerval,
confondant le progrès avec Dieu, et prenant l'interruption du mouvement pour la mort de
l'Être. Qui désespère a tort. Le progrès se réveille infailliblement, et, en somme, on
pourrait dire qu'il a marché, même endormi, car il a grandi. Quand on le revoit debout, on
le retrouve plus haut. Être toujours paisible, cela ne dépend pas plus du progrès que du
fleuve; n'y élevez point de barrage, n'y jetez pas de rocher; l'obstacle fait écumer l'eau et
bouillonner l'humanité. De des troubles; mais après ces troubles, on reconnaît qu'il y a
du chemin de fait jusqu'à ce que l'ordre, qui n'est autre chose que la paix universelle, soit
établi, jusqu'à ce que l'harmonie et l'unité règnent, le progrès aura pour étapes les
révolutions.
Qu'est ce donc que le Progrès ? Nous venons de le dire. La vie permanente des peuples.
Victor Hugo (1802 - 1885)
Les misérables, tome III, 1862
Document 3 :
Testament à l’Histoire
Nous sommes dans le siècle des accomplissements. La science, ce grand fait
révolutionnaire, dégage successivement toutes les inconnues que la philosophie avait
devinées et que la poésie avait idéalisées. D'une solution on passe à la suivante.
L'homme progresse. Une partie de la marche étant latente et profonde, même quand on
croit qu'il s'arrête, même quand on croit qu'il recule, il progresse. Rétrograder à la surface
n'empêche pas d'avancer souterrainement. Le mouvement superficiel n'est quelquefois
qu'un contre-courant.
Le va-et-vient des locomotives troue et disloque les limites de peuple à peuple, le rail
mêle l'homme à l'homme; la vie en commun de l'humanité commence; les poètes, les
écrivains et les philosophes ont prêché la croisade sublime de la paix; la guerre est
déconsidérée; il y a trente ans, elle n'était qu'affreuse; aujourd'hui elle est bête. Un
panache est un anachronisme; la passementerie fait sourire. Un «guerrier» aujourd'hui
est grotesque comme jadis «un pékin». Le ridicule a retourné sa lorgnette. La bataille
pour la bataille, cela n'est déjà plus admis; le drapeau ne suffit plus; il faut une idée.
Plus de parasitisme, donc plus d'exploitation. Pas plus l'exploitation d'en bas que
l'exploitation d'en haut; car nous ne voulons pas plus le pauvre, vermine, mangeant le
riche, que le riche, polype, mangeant le pauvre.
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La souveraineté du peuple remplacée par la souveraineté de l'homme; c'est-à-dire
l'homme souverain de lui-même; la science commençant par élever l'enfant pour en venir
à gouverner le citoyen; plus de superstition payée; toute fonction élective; l'autorité
réduite à l'auteur; la guerre n'ayant plus de raison d'être, la pénalité n'ayant plus de
raison d'être, la politique n'ayant plus de raison d'être; la géométrie sociale pratiquée;
l'institut assemblée unique; le luxe légitimé par la misère anéantie; chacun en pleine
possession de son droit, droit de l'homme sur lui-même, la liberté; droit de l'homme sur la
chose, la propriété; chacun en plein exercice de son devoir, devoir du fort envers le faible,
la fraternité; le plain-pied de l'éducation fondant l'égalité; l'équité entre les hommes
résultant de l'équilibre entre les droits; en un mot, le gouvernement de tous pour tous par
tous , tout cela est dans le suffrage universel, œuf qui finira par être bien couvé.
Qui dit force, dit énergie. La révolution est une volonté. Ceux qui ne voient-en elle qu'un
élément se trompent; elle est une intelligence; elle est un être. Elle est debout, immense,
ailée, armée. Elle a des ordres, qu'elle exécute. Elle n'entend pas qu'on s'arrête, elle
pousse le siècle devant elle; car, nous venons de le dire, les haltes ne sont
qu'apparentes; le fatal travail providentiel ne s'interrompt pas; nulle solution de continuité;
l'enjambée amène l'enjambée; une fois réalisé, l'effet devient cause, et entre en
parturition d'un résultat nouveau qui à son tour engendre, et ceux-là même qui croient
rester immobiles se déplacent et avancent. Pas moyen de se soustraire au progrès, qui
est le jour levant; la conviction du soleil gagne secrètement les hiboux, et les ennuie.
Ceux-là même qui trouvent l'avenir impossible n'ont qu'à se retourner, et le passé leur
semblera plus impossible encore. C'est fini, il faut progresser, il faut apprendre, il faut
s'améliorer, il faut penser, il faut aimer, il faut vivre, tirez-vous de comme vous pourrez,
aucun recul n'est possible, les portes du retour sont fermées, et chassés de nouveau du
paradis imbécile et chimérique de l'inconscience, la vieille Eve, l'antique Erreur qui,
d'usurpation en usurpation était devenue tyrannie, le vieil Adam, l'antique Ignorance qui,
de dégradation en dégradation était devenue Esclavage, talonnés par la Révolution
française, s'en vont vers le travail, vers la fécondité, vers le salubre emploi des forces
terrestres, vers l'activité, vers la responsabilité, vers la liberté, inexorablement envoyés
en avant, marchant, marchant toujours, avec ce grand flamboiement d'épée derrière eux.
Victor Hugo (1802 - 1885)
Testament à l'histoire
Document 4 :
LA PLUME DE SATAN
La plume, seul débris qui restât des deux ailes
De l'archange englouti dans les nuits éternelles,
Était toujours au bord du gouffre ténébreux.
Les morts laissent ainsi quelquefois derrière eux
Quelque chose d'eux-mêmes au seuil de la nuit triste,
Sorte de lueur vague et sombre, qui persiste.
Cette plume avait-elle une âme ? qui le sait ?
Elle avait un aspect étrange ; elle gisait
Et rayonnait ; c'était de la clarté tombée.
Les anges la venaient voir à la dérobée.
Elle leur rappelait le grand Porte-Flambeau
Ils l'admiraient, pensant à cet être si beau
Plus hideux maintenant que l'hydre et le crotale
Ils songeaient à Satan dont la blancheur fatale,
D'abord ravissement, puis terreur du ciel bleu,
Fut monstrueuse au point de s'égaler à Dieu.
Cette plume faisait revivre l'envergure
De l'Ange, colossale et hautaine figure
Elle couvrait d'éclairs splendides le rocher
Parfois les séraphins, effarés d'approcher
De ces bas-fonds où l'âme en dragon se transforme,
Reculaient, aveuglés par sa lumière énorme
Une flamme semblait flotter dans son duvet
On sentait, à la voir frissonner, qu'elle avait
Fait partie autrefois d'une aile révoltée ;
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