Norvège: une chaine symbolique musulmane autour d’une synagogue. C’est une toute jeune musulmane de 17 ans, Hajrad Arshad, qui en aura eu l’initiative. Avec d’autres Norvégiens de confession musulmane, elle a constitué une chaine symbolique de protection autour de la synagogue d’Oslo lors de la cérémonie du shabat de ce samedi 21 février. Plus de 1300 personnes, parmi lesquelles de nombreuses femmes portant hijab ont pris part à cette manifestation qui avait reçu le soutien de la communauté juive locale sous une condition ; que la manifestation réunisse un nombre suffisant de participants. « J’ai dit qu’à moins de 30 personnes , ce ne sera pas bon, cela risque de sembler contre-productif, avait déclaré Ervin Kohn, le président de la communauté juive à Oslo. Mais si vous remplissez la rue Bergstien (où est située la synagogue, NDLR), ça sera très bon ». La rue a été remplie à la grande satisfaction tant des organisateurs musulmans que des responsables religieux juifs qui eurent à officier pour la plus grande cérémonie du shabat jamais organisée dans cette synagogue. Coup de tonnerre dans le ciel nordique. « Nous pensons que, après les attaques terroristes de Copenhague, c’est le moment idéal pour nous, musulmans, de nous éloigner du harcèlement des juifs auquel on assiste actuellement » avait expliqué à la télévision la jeune Hajrad Arshad. Les attentats commis dans la capitale danoise par un jeune Danois de confession musulmane avaient sonné comme un coup de tonnerre pour l’ensemble des pays nordiques. A la différence de la France où le problème des banlieues fabrique de l’exclusion et du rejet et produit du ressentiment chez une frange de la jeunesse d’origine immigrée, le Danemark à l’instar de la Suède et de la Norvège est le modèle même de l’Etat providence où les droits sociaux sont les plus étendus en l’Europe. D’où l’incompréhension et le choc à l’idée que là aussi, dans ce contexte où le vivre ensemble parait le plus régulé, la violence terroriste ait trouvé latitude à se déployer. Après le drame, au sein de la société danoise, des voix multiples se sont aussitôt élevées pour dire qu’il n’était pas question que le Danemark renonce à ce qu’il est, à savoir un pays où l’ouverture et l’échange avec l’autre sont des valeurs cardinales. La liberté d’opinion y est telle qu’au lendemain du double attentat dans lequel deux personnes ont laissé la vie en plus du terroriste, ce dernier eut également droit à des fleurs déposées à l’endroit où il était tombé sous les tirs de la police. Effectivement, comme pour les victimes, ceux qui se reconnaissaient dans le jeune meurtrier de 22 ans sont venus, à visage découvert, fleurir le trottoir sur lequel il avait rendu son dernier souffle. Une telle situation aurait été impensable en France par exemple où plus d’une centaine de poursuites pour apologie du terrorisme ont été engagées contre des gens qui avaient osé applaudir les actes des frères Kouachi et d’Amély Coulibaly. C’est au Danemark également que la communauté juive danoise a très poliment rejeté l’offre qui lui a été faite par le Premier ministre israélien de rejoindre Israël en expliquant que les juifs 1/2 Norvège: une chaine symbolique musulmane autour d’une synagogue. danois étaient d’abord et avant tout des Danois qui n’avaient aucunement l’ intention de quitter leur pays. « L’islam, c’est défendre les autres » Le fait que « des musulmans manifestent ainsi contre l'antisémitisme est unique et cela nous remplit d'espoir » , a déclaré le chef de la communauté juive de Norvège notant : « Vous nous avez envoyé un signal très fort nous disant que nous ne sommes pas seuls » . Par les « Anneaux de la paix », nom de code de l’opération lancée par Hajrad Arshad et ses amis, les musulmans de Norvège ont exprimé leur refus de cette haine meurtrière qui dresse les communautés les unes contre les autres. « L'islam, c'est protéger nos frères et sœurs, quel que soit leur religion. L'islam, c'est dépasser la haine et ne pas sombrer au même niveau que son ennemi. L'islam, c'est défendre les autres », professent les organisateurs de l'opération dans l’appel qu’ils avaient diffusé sur Facebook. Une belle opération qui, comme s’en félicite Atif Jamil, 26 ans, montre « qu’il y a encore de l’espoir pour les sentiments humains, la paix et l’amour, au-delà des différences religieuses . » 2/2