miology/endemic.html). Pour les 18 pays qui participent
au groupe international de travail scientifique sur la TBE,
le nombre de cas annuels notifiés montre que les pays les
plus atteints (hors ex URSS) sont, outre les trois pays
baltes, la République tchèque, la Hongrie, la Slovénie et
dans une plus faible mesure l’Allemagne, la Pologne
et l’Autriche (http ://www.tbe-info.com/epidemiology/
index.html).
La distribution de l’encéphalite à tiques est caractérisée
par sa discontinuité, avec une juxtaposition de zones in-
demnes et de zones endémiques, ou foyers. Pendant très
longtemps, les raisons de cette discontinuité sont restées
énigmatiques. S’appuyant sur des travaux récents, mettant
en évidence une voie nouvelle de transmission par les
tiques, certains auteurs ont proposé une hypothèse pour
expliquer la discontinuité de la répartition et, par extrapo-
lation, ont fait des prévisions de redistribution de la mala-
die, dans la perspective de modifications climatiques.
La transmission par co-repas
chez les tiques
En matière de transmission des germes pathogènes par les
vecteurs, la règle est la nécessité d’une phase sanguine du
germe chez l’hôte vertébré, phase pendant laquelle le vec-
teur prélève les germes. Chez les tiques, des travaux expé-
rimentaux ont montré que la phase sanguine n’était pas
essentielle : en se nourrissant sur des animaux présentant
une forte virémie avec le virus de l’encéphalite à tiques,
un pourcentage de moins de 10 % de tiques s’infectent,
tandis qu’en se gorgeant sur des animaux avec une viré-
mie faible, voire nulle, le pourcentage atteint 68 % [3].
Des travaux complémentaires ont démontré que la trans-
mission du virus pouvait se faire directement de tiques à
tiques, si celles-ci se gorgeaient au voisinage immédiat les
unes des autres, d’où le terme de transmission par co-
repas (cofeeding des auteurs anglo-saxons) [4].
À partir de ces résultats expérimentaux, une approche éco-
épidémiologique nouvelle, s’est dégagée.
Simultanéité des larves et des nymphes
sur les hôtes
Pour que la circulation du virus soit assurée par co-repas,
tiques saines et tiques infectées doivent se gorger simulta-
nément au voisinage les unes des autres. Les tiques saines
sont représentées par la population des larves, qui venant
d’éclore n’ont pas encore eu l’occasion de s’infecter (la
transmission transovarienne est très faible) ; les tiques in-
fectées se trouvent parmi les nymphes, qui ayant déjà fait
un repas ont pu s’infecter.
On peut ainsi s’attendre à ce que là où existe la simulta-
néité larves/nymphes sur les hôtes, la zone soit endémi-
que, là où larves et nymphes se gorgent à des périodes
différentes, la zone soit indemne, enfin là où le chevauche-
ment des larves et nymphes sur les hôtes est faible, comme
l’Alsace, qui est aux marges de la distribution de la mala-
die [5-7], la prévalence soit faible. L’analyse comparée
d’études de dynamique des tiques, faites dans ces trois
types de zones a confirmé cette déduction [8]. Restait à
expliquer les causes de la simultanéité larves-nymphes,
forte, faible ou nulle.
Par le recours à des images satellitales, avec comme para-
mètre discriminant la température au sol (paramètre déter-
minant pour le cycle des tiques), les auteurs ont vérifié que
la simultanéité se produisait dans les zones où les tempé-
ratures chutaient brutalement au début de l’automne ; à
l’inverse, larves et nymphes sont décalées là où les tempé-
ratures descendent lentement [9]. L’explication serait que
la chute brutale des températures suspendrait l’activité des
larves, laquelle reprendrait tôt au printemps, en même
temps que celle des nymphes. Lorsque la descente des
températures est progressive, les larves se gorgent avant
l’hiver et ne sont donc pas en synchronie avec les nym-
phes au printemps.
Modification de la distribution
de l’encéphalite à tiques
Si la synchronie larves/nymphes sur les hôtes est liée de
manière aussi forte au profil des températures, il faut s’at-
tendre à une modification de la distribution de l’encépha-
lite à tiques en rapport avec les modifications climatiques
qui sont annoncées. Certains auteurs ont fait l’extrapola-
tion et abouti à des cartes de la nouvelle distribution pro-
bable en fonction de ces changements de température [10].
Ainsi, que ce soit sous l’angle de l’émergence ou de la
redistribution, les affections transmises par les tiques sont
semble-t-il appelées à retenir l’attention en médecine hu-
maine, dans les années qui viennent.
Références
1. Pérez-Eid C. Émergence des maladies transmises par les tiques en
zone tempérée. Ann Biol Clin 2004 ; 62 : 149-54.
2. Randolph S. Faune, climat et politique. Causes possibles aux récents
accroissements des zoonoses à tiques. In : Changements climatiques,
maladies infectieuses et allergiques.Ann Inst Pasteur - Actualités
2003 ; 16 : 109-20.
3. Labuda M, Nuttall PA, Kozuch O, et al. Non-viremic transmission of
tick-borne encephalitis virus : a mechanism for arbovirus survival in
nature. Experientia 1993 ; 49 : 802-5.
revue générale
Ann Biol Clin, vol. 62, n° 3, mai-juin 2004254
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