les Fascias une approche globale partagée

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l’ostéopathe
n°9 • septembre / octobre 2011
enquête
magazine
reportage
Évaluation des pratiques professionnelles :
l’exemple britannique
les Fascias
une approche
Hafida Izelfanane, ostéopathe DO
globale
Micronutrition et ostéopathie : ce qu’il faut savoir
partagée
interview
« Ouvrir le débat auprès des ostéopathes
sur la fonction des opercules de Forestier »
horizons
l’ostéopathe magazine
Ours
Rédacteurs en chef :
Guillaume Mercier
Reza Redjem-Chibane
Ont contribué à ce numéro
Danis Bois, Thibault Dubois,
Hafida Izelfanane, Yves Laval,
Amitis Messdaghi & Philippe Petit.
Directrice artistique
& maquette : Agnès Bizeul
Site internet : Badara N’Diaye
Publicité : Reza Redjem-Chibane
Photo : Marika Gérone
www.marikagerone.com
édito
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L’ostéopathe magazine
176, rue Saint-Maur
75011 Paris
Tél : 09.50.79.13.17
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Directeur de la publication :
Reza Redjem-Chibane
L’ostéopathe magazine
est édité par RCR Éditions
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Tél : 09.50.79.13.17
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Voiron (38).
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(papier écologique
et encres végétales)
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paritaire : 0412 T 90344
ISSN 2108-2642, dépôt légal
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Copyright
L’ostéopathe magazine
La reproduction même partielle
des articles parus dans
L’ostéopathe magazine est
strictement interdite.
La recherche est à l’honneur dans
ce numéro. En effet, vous y trouverez trois reportages présentant
des travaux scientifiques sur des
sujets très variés. Ces résultats intéressent les ostéopathes à plusieurs
niveaux. À la fois dans leur pratique quotidienne mais également
pour contribuer à renforcer la position de l’ostéopathie comme une
profession à part entière. En effet,
une première revue de littérature
traitera de l’évaluation des pratiques professionnelles. Une démarche indispensable à toute profession et pour laquelle l’expérience
britannique pourra servir d’exemple aux ostéopathes français.
D’autre part, ces reportages permettent d’envisager de nouveaux
axes de développement pour l’ostéopathie et pourquoi pas de nouvelles collaborations scientifiques.
Ainsi des travaux de recherche en
anatomie menés par une ostéopa-
the vous seront dévoilés et, plus
surprenants, ceux d’une paléontologue. À travers la diversité de ces
thématiques nous pouvons prendre conscience de l’étendue du
spectre scientifique susceptible de
concerner l’ostéopathie. Un tour
d’horizon complété par notre enquête sur les fascias qui vous présente deux approches thérapeutiques basées sur la manipulation de
ces tissus.
Enfin, l’agenda de l’ostéopathe
de ce numéro sera chargé et les
thèmes des rencontres proposées
multiples. À noter cependant, un
rendez-vous radio avec une émission co-animée par L’ostéopathe
magazine, le 5 décembre sur idFM
98.0. Tous à vos postes !
Bonne lecture !
Reza Redjem-Chibane
Directeur de la publication
3
sommaire
actualItÉs
L’ostéopathe magazine aborde l’actualité
professionnelle des syndicats, des écoles
et des associations ostéopathiques.
Les rendez-vous à ne pas manquer
(conférences, symposiums, congrès, etc.)
sont répertoriés dans l’agenda avec
le programme des formations à venir.
06 brèves
08
rencontres
Une ostéopathie juridiquement
reconnue, un ostéopathe juridiquement
responsable !
12 la paléontologie, un cadre scientifique
pour l’ostéopathie
16 agenda
18 formation
Alta, par Koji Nishimi.
Peinture sur pâte à papier
4
l’ostéopathe MagazIne • n°9 • septembre / octobre 2011
HOrIzOns
MÉtIer
Certaines prises en charge
(grands malades, personnes
âgées, etc.) nécessitent une
approche particulière du
patient. Toute l’expertise de
spécialistes pour adapter et
personnaliser la prise en charge
ainsi que des reportages pour
présenter les complémentarités
de l’ostéopathie avec d’autres
pratiques.
Pratiques particulières du métier ou
bien utilisation de l’ostéopathie pour
des applications spécifiques, L’ostéopathe
magazine rend compte de ces expériences.
Des enquêtes approfondies pour
découvrir l’ostéopathie sous des angles
différents. Avec des témoignages et
une synthèse pour mettre en avant les
points clés. Également, des interviews
d’ostéopathes qui nous font partager leur
expérience et leur savoir-faire.
22 interview
42 convergences
hafida izelfanane, ostéopathe Do
micronutrition
et ostéopathie :
ce qu’il faut savoir
28 enquête
les fascias :
une approche globale partagée
38 reportage
46
sommaire du prochain numéro
évaluation des pratiques
professionnelles : l’exemple britanique
5
actualItÉs rencontres
la paléontologie,
un cadre scientifique
pour l’ostéopathie
Le 30 septembre à Paris s’est tenue
une conférence organisée par le
CFPCO (centre de formation
professionnelle continue en
ostéopathie) et animée par
July Bouhallier, paléontologue. Son thème : « le
bassin et l’accouchement dans l’évolution
humaine : existe-t-il
une réelle difficulté à
enfanter chez Homo
sapiens ? » Une approche qui pourrait
remettre en question l’accouchement
classique en position
allongée et facilite la
compréhension des gestes
ostéopathiques.
Un reportage réalisé
par philippe petit*
J
uly Bouhallier est paléo-anthropologue au laboratoire d’ethnobiologie et
d’éco-anthropologie du Muséum national d’Histoire naturelle de Paris. Elle a
soutenu une thèse de doctorat en 2006,
intitulée l’« Évolution de la fonction obstétricale chez les hominoïdés : analyse
morphologique tridimensionnelle de la
cavité pelvienne chez les espèces actuelles et fossiles ». Ses travaux de recherche
12
Alta, par Koji Nishimi.
Peinture sur pâte à papier
portent sur les modifications du bassin
et l’accouchement dans l’évolution humaine. Elle a ainsi analysé 579 bassins
humains actuels et, du fait de leur rareté,
seulement 5 bassins fossiles : une australopithèque, Lucy, 3,5 millions d’années,
deux homo erectus de 2,5 et 1,6 millions
d’années, un bassin de néandertalien de
65 000 ans et un bassin de Cro-magnon de
28 000 ans.
l’ostéopathe MagazIne • n°9 • septembre / octobre 2011
Les détails d’une synergie
adaptative
Aujourd’hui, l’anthropologie explique
les difficultés de l’accouchement humain du fait de la petite taille du bassin
de la parturiente et de la grosse tête des
bébés. Or, « des détails » ont été oubliés
dans la compréhension de l’évolution
de l’accouchement : les postures, les petits mouvements du sacrum, la nutation
actualItÉs
promontoire
aile iliaque
sacrum
articulation sacro-iliaque
incisure
sciatique
concavité
sacrée
ischion
articulation coxo-fémorale
les qUatre types
pelviens DéFinis
par calDwell
et Moloy en 1933
le type gynécoïde représente 50 % des
formes de la population féminine. les
types anthropoïde et androïde, 48 %.
le platypelloïde est rare : 2 %. selon
mes résultats, le type androïde décrivant classiquement le bassin masculin
n’est pas le plus représenté chez les
hommes. la moitié des hommes possèdent le type platypelloïde (selon la
thèse de July Bouhallier, 2006)
angle
sous-pubien
et contre-nutation et la malléabilité du
crâne fœtal. Tous ces « détails » participent à une synergie adaptative que les
travaux de July Bouhallier mettent en
avant dans sa démarche scientifique de
paléontologue et que les ostéopathes
utilisent dans leur pratique quotidienne.
Au cours de cette conférence, deux
grandes questions sur la réalité des
accouchements actuels ont été abordées : pourquoi la femme accouche-telle avec difficulté ? et quelles sont les
adaptations évolutives qui permettront
la pérennité de l’espèce humaine ?
Figure 1 : mesures des trois détroits pelviens
(Papio anubis femelle)
A : vue ventrale et B : vue latérale interne (côté
gauche). 1-1 : détroit supérieur (8 points); 2-2 :
détroit moyen (6 points); 3-3 : détroit inférieur
(8 points).
Source : analyse morphologique et fonctionnelle du
pelvis des primates catarhiniens : conséquences pour
l’obstétrique, 2006, July Bouhallier
Le bassin de la femme
qui accouche est en pression
Les différences rencontrées entre l’accouchement chez les femmes et les
femelles d’autres espèces, comme les
singes par exemple, sont liées au redressement du tronc. La bipédie permanente a pour conséquences des fémurs
devenus droits, des genoux adductés et
une modification de la forme du bassin,
devenu robuste et court :
- la partie inférieure de l’ilion s’est raccourcie,
- la distance entre l’articulation coxofémorale et l’articulation sacro-iliaque
est devenue plus courte que chez les
autres primates,
- la partie postérieure de la cavité pelvienne s’est développée (située en
avant du sacrum et arrière d’une ligne
reliant les cavités cotyloïdes).
À la suite de ces modifications évolutives,
la cavité pelvienne, lieu par où passe le
fœtus, s’est modifiée dans sa forme et son
orientation au niveau des trois détroits
du bassin : avancée du sacrum (promontoire) et réduction de la distance entre les
articulations coxo-fémorales. D’autres
modifications dues à l’érection du corps
ont induit une diminution de hauteur du
bassin humain (chez l’homme et chez la
femme). La cavité pelvienne est donc « en
pression » sous l’effet du poids du tronc.
Figure : Les quatre types pelviens
définis par Caldwell et Moloy en 1933
De haut en bas : anthropoïde, gynécoïde,
androïde, platypelloïde.
L’expulsion du bébé,
un parcours du combattant
La cavité pelvienne contient des viscères mais est également un lieu de passage, une sortie. Sa forme, son diamètre conditionnent l’expulsion du bébé :
un bassin devenu plus robuste et plus
court induit donc une expulsion du
fœtus plus complexe. L’engagement
de la tête du bébé dans le détroit supérieur de la femme qui accouche se fait en
13
actualItÉs rencontres
Figure 3 : forces pondérales s’exerçant sur
les parois de la cavité pelvienne
A–B : Papio en quadrupédie terrestre ; A : vue
antérieure ; B : vue latérale. P : 55 % du poids
total du corps [30].
C–D : Hylobates en brachiation (déplacement de
certains singes en se balançant d’une branche à
l’autre à l’aide des bras). C : vue antérieure; D :
vue latérale ; P : poids total du corps, moins la
force pour se suspendre; p : poids du membre
postérieur.
E–F : Homo en bipédie. E : vue antérieure ;
F : vue latérale. P : poids total du corps. En
pointillés : segment interarticulaire subissant des
forces de compression (bipédie, quadrupédie),
et de tension (suspension).
oblique, accompagné d’une flexion de la
tête sur la poitrine et d’une rotation de la
tête du bébé pour présenter la distance
occipito-frontale en adéquation avec le
détroit moyen. Les pressions exercées
alors deviennent importantes, environ
60 kg sur la tête du bébé.
Pour favoriser les conditions de l’accouchement chez l’humain, des solutions
adaptatives se sont mises en place :
- Un ralentissement de la croissance cérébrale du fœtus in utéro en particulier.
- Le crâne du fœtus humain représente
20 % de son volume cérébral final,
alors que chez le chimpanzé, il en représente 40 %.
- Le développement de larges fontanelles permet un ajustement du crâne du
bébé au diamètre du bassin de sa maman lorsque cela est nécessaire.
Il arrive parfois qu’il y ait un chevauchement des os du crâne pendant l’accouchement (asynclitisme). Les gestes
ostéopathiques peuvent alors restaurer
un repositionnement des os du crâne
(os membraneux situés en périphérie
du crâne). Concernant la morphologie
pelvienne, il n’y a pas, dans la population humaine, de bassin type. Il existe
une grande diversité de formes, plus
importante chez les Européens du fait
des brassages de populations, alors qu’il
y a peu de diversité de bassins parmi les
bushman d’Afrique du Sud.
Figure 7 : crânes des fœtus à terme dans
les détroits supérieurs (A), moyens (B) et
inférieurs (C) des grands singes (Pan) et des
humains (Homo)
En gris : détroits supérieurs, moyens et inférieurs
(conformation moyenne par superposition
Procuste). Traits pleins : dimensions crâniennes
(Occipito-Frontal, Occipito-Pariétal).
En pointillés : SOB, Sous-Occipital-Bregmatique
(présentation occipitale) chez Homo. La réduction
de la longueur du crâne implique une forte flexion
de la tête en avant.
OCC signifie occipital.
Le crâne du nouveau-né humain s’engage en
oblique dans le détroit supérieur, puis effectue
une rotation pour entrer sagittalement dans le
détroit inférieur.
Source : analyse morphologique et fonctionnelle du
pelvis des primates catarhiniens : conséquences pour
l’obstétrique, 2006, July Bouhallier.
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l’ostéopathe MagazIne • n°9 • septembre / octobre 2011
La conformation
de la cavité pelvienne
conditionne l’expulsion
du fœtus
Les singes, accessoirement bipèdes,
sont quadrupèdes la plupart du temps
(utilisation de leur bras dans les déplacements). Ainsi, les femelles chimpanzés
possèdent un bassin allongé avec une
distance entre l’articulation coxo-fémorale et sacro-iliaque plus grande. Cette
conformation de la cavité pelvienne
favorise une expulsion en ligne droite,
comparativement plus rapide. En revanche, les fœtus de babouins, de macaques
et de gibbons doivent présenter leur face
pour sortir du bassin maternel. Ainsi,
les femelles de ces espèces rencontrent
donc parfois des difficultés d’expulsion.
D’autres espèces encore, notamment
chez les saïmiris ou singes écureuils,
montrent une mortalité plus importante.
L’accouchement des grands singes rencontre moins de difficultés.
Pour July Bouhallier, « les différences
entre les cavités pelviennes des humains actuels et fossiles et des singes
catarhiniens sont en grande partie des
différences de paroi sacrée ». En effet, la paroi du sacrum chez la femme
actuelle est beaucoup plus courbe que
chez les hominidés fossiles comme les
australopithèques. Par ailleurs, la verticalisation du sacrum et le positionnement antérieur du détroit inférieur des
hominidés fossiles conduisent à un alignement des trois détroits les uns sous
les autres chez les humains actuels.
Vers un accouchement
en posture verticale
En 1668, Mauriceau, médecin du roi de
France et premier accoucheur de la Maternité de Paris sous Louis XIV, impose
l’accouchement sur le dos pour des raisons purement pratiques. Or, l’étude des
pratiques d’accouchement par le passé,
et actuellement dans des populations
moins médicalisées, décrit des postures
verticales. La position couchée sur le dos
a pour conséquence la perte des petits
mouvements du sacrum et du bassin
actualItÉs
(nutation et contre-nutation). Les postures verticales reviennent dans certaines
cliniques aujourd’hui. Modernité ou retour aux sources ?
En tant qu’ostéopathes, les convergences
existantes entre nos soins et ces connaissances paléontologiques doivent nous interpeller. En quoi les gestes ostéopathiques
sont-ils compatibles avec la dynamique du
bassin acquise au cours de l’évolution ?
Dans l’attente de preuves scientifiques de
son efficacité thérapeutique, l’ostéopathie
doit intégrer ces concepts paléontologiques dans sa réflexion.
* Philippe Petit, ostéopathe et journaliste, est
le réalisateur de l’émission de radio diffusée
sur idFM 98.0 : À l’écoute de l’Évolution : du
Big Bang à l’origine des espèces.Vous pouvez
réécouter toutes ses émissions sur www.
micro-osteo.fr.Il est aussi l’auteur d’un ouvrage
rapprochant ostéopathie et paléontologie
aux éditions Lanore : Notre corps n’est que
mémoire – l’Évolution, un savoir-faire pour se
soigner.
les 22 points repères De la cavité pelvienne
Quelle méthode d’étude choisir ? la cavité pelvienne est une « forme » complexe. nous
voulions la représenter par ses trois détroits obstétricaux. la morphométrie géométrique
a été utilisée pour reproduire et analyser la forme de la cavité pelvienne par un ensemble
de points caractéristiques qui la définissent. ces points repères sont à la fois homologues
et reproductibles. quelles que soient la forme et la taille des cavités pelviennes. Vingt-deux
points ont été choisis pour caractériser cette dernière : 8 points représentent le détroit supérieur, 4 points le détroit moyen, 10 points le détroit inférieur [Figure 4]. les coordonnées
des 22 points de chaque cavité ont été saisies et digitalisées en trois dimensions.
Figure : méthodologie
Cavité pelvienne en vue antérieure
et en 3D.
Elle est définie par 22 points
repères définissant les 3 détroits
obstétricaux
- Détroit supérieur en bleu
- Détroit moyen en jaune
- Détroit inférieur en orange
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