L’AFRIQUE FACE AU DEFI DES CHANGEMENTS CLIMATIQUES A
L’HORIZON 2025 : REPONSE ENDOGENE OU EXOGENE ?
Les changements climatiques sont en passe de devenir l’un des principaux défis
mondiaux du 21ème siècle, les communautés scientifique et internationale sont quasi unanimes
à ce propos. Ces dernières mettent désormais l'accent sur l'impérieuse nécessité de lutter
contre ce phénomène tant global que local.
Une autre réalité sans équivoque découle du fait que l’Afrique est, le continent au
monde qui contribue le moins au réchauffement de la planète (4% des émissions moniales
selon le GIEC) et par la même occasion, subit le plus ses effets pervers en raison de son
extrême vulnérabilité et de sa position géographique. La vulnérabilité relative de l’Afrique
s’explique notamment par le faible accès aux ressources, à l’information et à la
technologie et par le manque de stabilité et d’efficacité des institutions. Un tel constat
devrait pourtant suffire à rappeler ce qui peut passer pour une évidence : les mutations
du climat global risquent de poser des défis majeurs qui s’ajouteront aux problématiques
actuelles (santé, éducation, développement agricole et des infrastructures, urbanisation,
migrations, réduction de la pauvreté et règlement des conflits).
Alors que les estimations du PNUD (2013) sont plutôt optimistes, l’Afrique a fait des
progrès notables dans plusieurs domaines (santé, éducation, infrastructures). Partant de ce
scénario de base et d’ici à 2025, l’indice de développement humain agrégé pourrait s’élever à
52 % de 0,402 à 0,612, l’espérance de vie à la naissance passerait de 53,7 ans en 2010 à
69,4 ans en 2050, le PIB par habitant quant à lui de 1 769 dollars en 2010 à 5 730 dollars en
2050, le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté passerait de 371 à 267
millions (RDH, 2013).
Par contre, le GIEC dans son quatrième rapport sur le climat suscite de vives
inquiétudes mais, interpelle à plus de prudence : la température moyenne de la planète est
supérieure d’environ 0,8 °C aux niveaux préindustriels et le continent africain se réchauffe
déjà plus vite que la moyenne mondiale. Comme le souligne la banque mondiale, la
température du globe s’élèvera à 4° C d’ici à la fin du siècle si aucune action concertée n’est
menée.
A noter que l’Afrique a connu plusieurs épisodes de variabilité climatique qui se sont
soldées par des crises alimentaires de grande ampleur, des limitations des ressources en eau.
La fréquence, l’intensité et la durée des événements climatiques extrêmes ont augmenté et ne
cesseront de s’accroître si rien n’est fait. D’ici à 2025, les populations pourront vivre des
sécheresses plus intenses, des inondations et des tempêtes plus fréquentes1. La perturbation
des tendances climatiques saisonnières entraîneront une augmentation du nombre de réfugiés
environnementaux et de conflits incessants.
Ces éventuels effets des mutations climatiques sur les systèmes socio-politiques et
économiques africains vont-ils s’intensifier ou s’amoindrir dans les onze prochaines années ?
Dans quelle mesure les Etats Africains seront- ils capables de contrecarrer ce scénario
catastrophe ou de s'y adapter sans que cela n’entrave leurs efforts et objectifs de
développement ? Quelles solutions doivent-ils envisager pour limiter les émissions de gaz à
effet de serre ou atténuer de toute autre manière les changements climatiques : Est-ce par le
biais des arguments endogènes ou par l’entremise des réponses exogènes ? Questions
auxquelles nous tenterons d'apporter des éléments de réponse.
Changements climatiques : une problématique universelle.
La question des changements climatiques éveille un intérêt grandissant de la part des
décideurs, des spécialistes des questions environnementales et des chercheurs en sciences
sociales et une importante mobilisation sociale. A cet effet, une dizaine de conférences et
sommets internationaux sur le développement durable (Stockholm : 1972 ; Rio de Janeiro :
1992 ; Johannesburg : 2002) et sur le climat mondial (Poznań : 2008 ; Copenhague : 2009 ;
Cancun : 2010 ; Durban : 2011 ; Doha : 2013) a été organisée à cet effet. Ces rencontres ont à
chaque fois connue la participation des représentants du continent Africain malgré leur
position quelque peu subsidiaire dans les décisions finales.
S'il est une constante dans la rhétorique internationale depuis plusieurs
décennies, ce sont les promesses en faveur des pays en développement par exemple la
création d’un fond spécial pour le climat, la réduction des émissions de GES par les pays
industrialisés et le transfert des technologies pour le développement des énergies propres.
Même si, en réalité, toutes ces mesures ont du mal à se concrétiser et les conséquences ne
cesseront de s’amplifier.
1 Selon le rapport Baissons la chaleur, élaboré fin 2012 par le Postdam Institute à la demande de la Banque mondiale
Vulnérabilité de l’Afrique face aux éventuels effets des changements climatiques
L’ampleur et la gravité des impacts des changements climatiques s’observera sur les
modes de subsistance des populations africaines et sur les systèmes politiques et
économiques.
Répercussions sur le développement économique et social
Certes, les coûts d’adaptation aux changements climatiques constitueront un frein
au développement et concurrenceront d’autres sources croissantes de dépenses
publiques (santé, éducation, infrastructure, etc.) (Taithe, 2007). Selon le GIEC, le
coût de l’adaptation aux changements climatiques en Afrique pourrait représenter entre 5 et
10 % du PIB du continent. Lorsque le niveau de pauvreté est élevé et le niveau de
développement bas, la capacité des foyers pauvres à gérer les risques climatiques s’en
trouve limitée.
Les changements climatiques constituent un frein au développement économique
des pays Africains en ce sens qu’ils s’attaquent directement aux principaux secteurs d’activité.
Surtout pour les États fragilisés par les crises socio-politiques et aux économies défaillantes,
ce phénomène risque d’être un frein au développement et de faire obstacle aux objectifs
de réduction de la pauvreté.
Ici encore, un constat flagrant se dégage ; la variabilité climatique influence
négativement sur la quasi-totalité des systèmes économiques africains. Cela se traduit par la
réduction du PIB, orchestrée par une baisse notable de la production agricole, mais
également dans les coûts additionnels d’adaptation associés à cette variabilité.
Répercussions sur les ressources en eau : limitations de l’accès à l’eau potable.
L’approvisionnement en eau est au cœur des perspectives de développement du continent
africain. Tant sa qualité que sa quantité sont des éléments cruciaux au bien-être social,
économique et environnemental2. A l’heure actuelle, en Afrique, les ressources en eau
subissent déjà de fortes pressions, dues notamment à la croissance démographique et à la
dégradation des bassins versants causée notamment par le changement dans l’utilisation
2 POMERLEAU J., (2009), « Changements climatiques et sécurité en Afrique », Université de Sherbrooke, Québec,
Canada. 99 p.
des terres et l’envasement des bassins hydrographiques. Les changements climatiques
risquent aggraver cette situation dans les prochaines années.
Selon les prévisions du GIEC, vers l’an 2025, vingt-cinq pays africains seront sujets à
des pénuries d’eau et au stress hydrique, problématique qui risque d’être particulièrement
aiguë en Afrique du Nord. En ce qui concerne l’accès à l’eau potable, la hausse des
températures et l’avancée des déserts dans la zone du Sahel et en Afrique australe
aggraveront très probablement les pénuries.
Répercussions sur l’agriculture, l’alimentation.
De fait, l’agriculture est, le moteur de la plupart des économies africaines. Une
agriculture pluviale qui, elle-même est fortement dépendante du climat. Ainsi, l’intensité et
l’ampleur des changements climatiques compromettent sérieusement l’évolution des
systèmes agricoles africains et la sécurité alimentaire des habitants. Cette menace provient
notamment de la diminution rapide des surfaces de terres arables, de la durée des saisons de
culture et du rendement par hectare.
Le GIEC prévoit également que les rendements agricoles pourraient diminuer de 50
% d’ici 2025 dans certains pays d’Afrique. Une baisse des rendements qui correspondra à un
manque à gagner de l’ordre de 2 à 7% du PIB ; Ces impacts ne pourront que compromettre
davantage la sécurité alimentaire et accentuer la malnutrition infantile, fléau actuellement
responsable de plus de deux millions de décès annuels en Afrique subsaharienne (Bekele,
1998).
En outre, les changements climatiques vont s’ajouter aux fortes pressions déjà
existantes sur la production agricole en Afrique telles que la croissance démographique, la
perte de la fertilité des sols et la destruction des cultures par les criquets pèlerins.
Impact sur la santé des populations.
Dans son quatrième rapport, le GIEC souligne que les expositions liées aux
changements climatiques affecteront probablement la santé de millions de personnes
notamment par le biais de l’aggravation de la malnutrition avec des implications sur la
croissance et le développement des enfants; par l’augmentation du nombre de décès,
de maladies et d’accidents dus aux canicules, inondations, tempêtes, incendies et
sécheresses; par des maladies diarrhéiques chroniques plus fréquentes; par
l’augmentation des affections cardio-vasculaires dues aux concentrations plus élevées
d’ozone au ras du sol; et par la modification de la répartition spatiale de certains
vecteurs de maladies infectieuses
La baisse de la disponibilité en eau douce due au changement climatique constitue
probablement la plus grande menace pour la santé et suscite de vives inquiétudes quant à
l’augmentation de l’incidence des maladies diarrhéiques et autres maladies hydriques comme
le choléra, l’amibiase, la lambliase et la cryptosporidiose, ainsi que d’autres maladies
infectieuses.
Trois enjeux politiques et économiques majeurs liés aux nécessitent une attention
particulière sur le continent : les préjudices que peuvent engendrer les changements
climatiques sur des systèmes économiques fragiles, le risque de déclenchement d’une
série de migrations environnementales à grande échelle, et l’éventuel déclin de certains Etats
du fait de leur incapacité à gérer des catastrophes d’une telle ampleur faute de ressources.
Conclusion : Des solutions internationales inadéquates et peu tangibles, des réponses
endogènes à peine entamées d’où la nécessité d’une réponse mixte.
Au cours des dix dernières années, de nombreuses initiatives ont été mises sur
pied tant à l’échelle du continent africain qu’à l’échelle mondiale afin de réduire la
vulnérabilité des populations et institutions africaines aux changements climatiques mais
les résultats à ce jour restent mitigés.
Les réponses internationales inadéquates et peu certaines.
Les acteurs impliqués dans la lutte aux changements climatiques essayent de réduire la
vulnérabilité de l’Afrique par l’adoption et la mise en œuvre de programmes d’adaptation,
qui visent à améliorer les capacités des populations à s’adapter aux changements
climatiques de façon à minimiser les impacts sur leurs modes de vie.
A cela, s’ajoute une coopération de la part des organismes onusiens (PNUE, PNUD)
visant à appuyer les décideurs à différents niveaux, non seulement pour améliorer leurs
connaissances et leurs compétences relatives à l'adaptation au changement climatique
et aux politiques d'atténuation. Les agences d’aide au développement (AFD, GTZ, DFID)
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