musulmanes9 à la régulation publique des pratiques musulmanes voire à sa
gestion dite sécuritaire, en renouvelant le droit européen des religions interroge
toutes les religions et tous les Etats. Et alors que l’identité religieuse reste l’une
des données fondamentales européenne10, tout comme pour d’autres confessions
religieuses, la question des dénominations musulmanes reste centrale. L’objet
est complexe, les confusions nombreuses, en présence d’un Islam protéiforme et
polysémique11 non servi par un « appareil d’autorité centralisé » (Frank
Frégosi), en pratique par une autorité religieuse représentative détentrice d’un
magistère d’influence.
Ces rappels doivent être faits pour aborder sereinement le sujet de cet
exposé qui à partir de l’expérience et des contributions de la CEDH démontrera,
que, d’une certaine façon et pour emprunter une expression d’Alain Boyer
concernant la France12, « l’Islam est une chance pour l’Europe et l’Europe une
chance pour l’Europe ». De sorte que riche de l’adhésion de 45 Etats-membres13
à la Convention européenne des droits de l’Homme du 4 novembre 1950, le
Conseil de l’Europe dont l’organe judiciaire est la Cour européenne des droits de
l’Homme poursuit inlassablement sa tâche d’amélioration des procédures de
consolidation et de protection des droits de l’Homme (sous l’égide du Comité
d’experts désigné par son Comité directeur pour les droits de l’Homme14) qui
profite aux musulmans en Europe.
Le contentieux européen des droits de l’Homme est-il le révélateur du
débat sur le degré de compatibilité des conceptions musulmanes avec les droits
de l’homme15 ? Alors que l’axiome selon lequel « la religion vécue apparaît
9 Lire La religion et l’intégration des immigrés, Editions du Conseil de l’Europe, Strasbourg, sept. 1999 dont le
chapitre L’islam dans l’Union Européenne
10 Lire le récent ouvrage de Jean-Paul Willaime, Europe et religion – Les enjeux du XXIème siècle, Fayard, Coll.
Les Dieux dans la cité, Paris, 2004. Voir aussi, Croyances religieuses, morales et éthiques dans le processus de
construction européenne, Commissariat Général du Plan, Institut Européen de Florence, Chaire Jean Monnet
d’Etudes Européennes, La Documentation Française, Paris, juin 2002. Lire Alain Garay, La liberté religieuse en
Europe – restriction et protection, Conscience et Liberté, n°59, 2000, Berne.
11 Ici surgit la question de la confrontation du sens commun face à la taxinomie des faits selon que l’on traite, par
exemple, « des Mahométans, des musulmans, des islamistes », etc., ou « du Coran, des traditions », etc. A
cette taxinomie il faut ajouter la différenciation religieuse révélée, par exemple, par une « enquête sur ces
musulmans qui inquiètent l’islam de France » (Le Monde, 13 décembre 2002). Ici comme ailleurs, tout n’est
n’est pas équivalent et le meilleur côtoie le pire…
12 In L’Islam en France, PUF, Coll. Politiques d’aujourd’hui, Paris, 1998
13 Albanie, Allemagne, Andorre, Arménie, Autriche, Azerbaïdjan, Belgique, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie,
Chypre, Croatie, Danemark, Espagne, Estonie, « l’ex-République yougoslave de Macédoine », Finlande, France,
Géorgie, Grèce, Hongrie, Irlande, Islande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte,
Moldova, Norvège, Pays-Bas, Pologne, Portugal, République tchèque, Roumanie, Royaume-Uni, Russie, Saint-
Martin, Serbie-Monténegro, Slovaquie, Slovénie, Suède, Suisse, Turquie, Ukraine.
14 Ledit Comité a adopté au mois de novembre 2003 un rapport intérimaire intitulé Garantir l’efficacité à long
terme de la Cour européenne des Droits de l’Homme (infra).
15 S’agissant de condition préalable au recours légitime à la légalité démocratique, en 2000, avant de recourir à
une vaste consultation nationale, les autorités françaises ont posé un pré-requis aux interlocuteurs de la
communauté musulmane en France qui a pris la forme de souscription d’un engagement écrit intitulé
« Déclaration d’intention relative aux droits et obligations des fidèles du culte musulman en France
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