Alain de Libera

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Université Charles de Prague, Faculté des lettres
Centre français de recherche en sciences sociales
ATELIER FRANCO-TCHÈQUE EN HISTOIRE
ČESKO-FRANCOUZSKÝ SEMINÁŘ HISTORICKÝCH VĚD
jeudi 7 mai 2015 au CEFRES, Štěpánská 35, Prague 1, 5e étage
(plus d’informations sur l’Atelier sur http://seminaire.ff.cuni.cz/index.html)
Alain de Libera
9 h 10
Archéologie philosophique et déconstruction
Cours
L’archéologie philosophique, héritée de la description kantienne d’une philosophische
Archäologie comme « histoire philosophique de la philosophie », a été programmatiquement
définie par Michel Foucault comme l’« histoire de ce qui rend nécessaire une certaine forme de
pensée ». J’en ai repris la visée et l’impulsion dans un travail d’archéologie du sujet, visant à
répondre à une question précise : comment et pourquoi le « sujet » est-il devenu, sous le nom
de « je », sujet d’action ? La présentation de ce travail, axé sur la « longue durée » et
l’hypothèse du « long Moyen Âge », sera l’occasion de caractériser la méthode et les concepts
majeurs de l’archéologie philosophique, dont celui de « complexes questions-réponses »,
substitué, sur les pas de R.G. Collingwood, à la notion standard de « problème », puis de
mettre en place et d’analyser un de ses thèmes centraux : le « chiasme du sujet et de l’objet »,
en le situant philosophiquement par rapport à la « déconstruction » (Abbau) ou « destruction »
(Zerstörung) heideggériennes de la « subjectivité ». J’examinerai, de ce point de vue,
l’évolution de Martin Heidegger lui-même, l’ambiguïté de la notion d’« histoire de l’Etre »
(Geschichte des Seins /Seyns) qui, à partir des années 1930, vient compléter ou remplacer celle
de « déconstruction », et proposerai quelques éléments de réflexion archéologique sur l’origine,
la nature et la portée philosophiques et politiques de cette évolution.
10 h 50
Le sujet de l’action. Anthropologie philosophique et christologie
Séminaire
En prolongement du cours, le séminaire sera consacré à un aspect généralement occulté dans
l’« histoire de la subjectivité » : l’interaction entre anthropologie philosophique et formulation
du dogme christologique. L’axe général du travail sera de comprendre comment et pourquoi
philosophes et théologiens ont distingué deux aspects irréductibles de la liberté : la liberté de
faire ce que l’on veut et celle de vouloir ce que l’on veut. À partir d’exemples empruntés à la
littérature patristique grecque, à Augustin et à quelques auteurs du Moyen Âge, on illustrera le
travail de l’archéologue en philosophie, en présentant quelques réseaux et schèmes théoriques
(les « structures ») qui déterminent l’apparition et le développement (la « genèse ») des
questionnaires aboutissant à des prises de « positions » théoriques actives sur la « longue
durée » (de l’Antiquité à la philosophie « moderne »), en philosophie et en théologie de
l’action. On évoquera notamment : les définitions théologiques du sujet et de l’objet de l’action
qui ont fait époque (Némésius d’Émèse, Jean Damascène), et leur base conceptuelle,
notamment la différence entre « sujet » et « hypostase », négligée par Heidegger ; le carré
logique du vouloir chez Anselme de Cantorbéry, avec la distinction entre vouloir (velle), ne pas
vouloir (non velle) et « nouloir » (nolle, « vouloir que ne pas »), encore considérée
aujourd’hui ; le problème de l’unicité ou de la dualité de volonté chez le Christ, à partir de
l’interprétation monothélite de la « prière d’agonie » (Matthieu, 26, 39) par Sergius de
Constantinople ; le rôle de ces divers éléments dans les discussions médiévales (Duns Scot) et
modernes (Hobbes, Locke, Leibniz) sur la volonté et le libre-arbitre.
Alain de Libera est depuis 2012 professeur au Collège de France où il occupe la chaire
d’Histoire de la philosophie médiévale. Il a été directeur d’études à l’École pratique des hautes
études où il enseignait l’Histoire des théologies chrétiennes dans l’Occident médiéval et
professeur ordinaire d’Histoire de la philosophie médiévale à l’université de Genève.
Spécialiste éminent de la théologie chrétienne et de la philosophie médiévale, il est l’auteur de
nombreux travaux consacrés à Albert le Grand et à maître Eckhart. Son ouvrage de synthèse La
philosophie médiévale (1e éd. PUF, 1993) est toujours réédité et a été traduit en de nombreuses
langues, dont le slovaque (Bratislava, Archa, 1994) et le tchèque (Prague, Oikoymenh, 2001).
Ses derniers travaux constituent une histoire de la subjectivité.
Choix de publications récentes
• Archéologie du sujet.
I. Naissance du sujet, Paris, J. Vrin (Bibliothèque d’histoire de la philosophie), 2009
II. La Quête de l’identité, Paris, J. Vrin (Bibliothèque d’histoire de la philosophie), 2008
III. L’Acte de Penser, Paris, J. Vrin (Bibliothèque d’histoire de la philosophie), 2014.
• Métaphysique et noétique. Albert le Grand, Paris, J. Vrin (Problèmes et controverses),
2005.
• Commentaire du ‘De unitate intellectus contra averroistas’ de Thomas d’Aquin, Paris,
J. Vrin (Études et Commentaires), 2004.
• Raison et foi. Archéologie d’une crise d’Albert le Grand à Jean-Paul II, Paris, Éditions du
Seuil (L’ordre philosophique), 2003. Traduction japonaise, 2013.
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