et c'est elle qu'attendent les paysans d'Asie du sud-est, qui leur permettra de bonnes
récoltes. Sur les côtes orientales de l'Inde, de l'Asie du sud-est et jusqu'en mer de Chine, la
mousson d'été se transforme souvent en vents très violents et tourbillonnants, les
typhons (terme chinois), occasionnant des pluies considérables et des inondations
catastrophiques dans les terres basses comme celles du delta du Gange au Pakistan
Oriental, du fleuve Rouge au Nord-Viêtnam et des fleuves de Chine.
8 Ces vents résultent des pressions créées par les différences entre la température de la
mer et celle de la terre. Au dessus des continents, l'air voisin du sol est relativement froid
en hiver et chaud en été. Dans le premier cas, l'excès de densité de cet air tend à créer un
anticyclone froid. C'est ainsi qu'en hiver un puissant anticyclone thermique existe à peu
près en permanence sur le nord-est de l'Asie, d'où résultent sur les côtes méridionales et
orientales de ce continent des vents très froids et très secs soufflant d'entre nord et nord-
est et constituant la mousson d'hiver. En été, c'est au contraire une vaste dépression
thermique qui s'établit sur l'Asie et alors la mousson froide est remplacée par des vents
chauds et humides du sud à sud-ouest soufflant vers cette dépression et constituant la
mousson d'été (Queney 1959 : 290-291).
9 La mousson d'été qui souffle du sud-ouest atteint même l'Asie centrale chinoise en
étendant l'influence de la mer loin dans l'intérieur jusqu'aux régions de l'Oussouri, de
l'Amour, de la Mandchourie, d'une partie du Japon et de la Corée, faisant monter jusqu'au
43° de latitude nord les masses d'air chaud et humide. Si, dans ces régions, les hivers sont,
sous l'influence de la mousson, rigoureux, froids et secs, les étés, par contre, sont
imprégnés d'une moiteur tropicale, à l'arrivée des pluies. « La végétation, latente depuis
des mois, est saisie d'une frénésie de croissance », selon Pfeiffer ([s.d.] : 52). Chine, Corée
et Japon possèdent une végétation très riche et variée où les espèces tempérées se mêlent
aux espèces tropicales.
10 En outre, le fait que l'été tropical, normal dans les régions situées de part et d'autres de
l'équateur jusqu'aux 13°-15°, agisse jusqu'au 40° (Pékin) ou même 43° de latitude nord
(Sapporo), est un phénomène d'une exceptionnelle importance ; sa principale
conséquence est la disparition, dans cette partie de l'Asie, de la barrière de déserts qui,
ailleurs, sépare pays tropicaux et pays tempérés (Delvert 1968 : 563)… Calcutta et Hanoï
sont sous le Tropique à la latitude du Sahara central et reçoivent respectivement 1600
mm et 1700 mm de pluie. Ceci est également la conséquence de la mousson.
11 Toutefois les reliefs, chaînes montagneuses et hauts plateaux, nuancent l'influence des
moussons et leur font obstacle, ce qui donne à chaque région son caractère. Une moitié du
sous-continent indien, toute la Chine du sud reçoivent 1000 mm. L'Asie du sud-est et les
trois îles du Japon, Kiu-shu, Shikoku et Honshu, reçoivent plus de 1400 mm (Delvert 1968 :
559). Dans la péninsule indochinoise, lorsqu'en novembre le Centre-Viêtnam est
submergé par les pluies, le centre Laos, de l'autre coté de la haute Chaîne annamitique,
reste sec (Condominas 1953 : 514).
12 L'Indonésie prise entre l'Australie et le continent asiatique subit différemment les
moussons ; à l'ouest, à Sumatra, Java, Bornéo, Célèbes, les pluies tombent d'octobre-
novembre à avril avec des vents du sud-est alors que de décembre à mars soufflent des
vents du nord-ouest provoquant la sécheresse. À l'est, aux Moluques et en Irian Jaya
(moitié occidentale de la Nouvelle Guinée), la situation est totalement inverse, les pluies
tombent de mai à octobre-décembre venant du nord-est alors que de décembre à avril
souffle un vent sec du sud-est venant d'Australie.
La mousson, pluie des agriculteurs et vent des marins
Revue d’ethnoécologie, 5 | 2014
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