Férir

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Férir
1-Origine du mot
« Ferir » vient du latin classique « ferio, ferire » qui a les mêmes sens qu’en ancien français,
c’est-à-dire principalement frapper, mais aussi tomber amoureux, atteindre… C’est un mot utilisé
couramment.
2-Les principaux sens en français médiéval
Ferir, ferrir, firir, frir -> verbe
-Frapper, ferir un coup : « De mon espiel te ferrai el costé. » (Raimbert, Ogier, 8832)
-Enfoncer : « les ansignes des clos ke ont feru ou mur. » (1286, Cart. gr. eglise de Metz)
-Ferir un tournoi (soutenir un tournoi) : « Vous priant s’il est vostre plaisir, de férir un tournoy en tel
lieu. » (Les coutumes des chevaliers de la table ronde)
- Se, jeter, se précipiter avec ardeur : « Le feu se ferit en la dite maison, qui fui consommee. » (J.
Molinet, Chron.)
- Aborder : « Et s’en vinrent férir ou havene de l’Escluse. » (Froiss, Chron.)
- Aboutir, toucher, atteindre : « Les terres qui fierent ou chemin dessus dit. » (Ib.)
- Tomber : « Vers soi par tel hair l’estreit Que en terre le fist ferir.» (Florimont, 353)
- Convenir : « De sa sagesce, ne de sa prouece, ne des autres bonnes vertuz qui de tel homme
fierent. » (Arch. ,1292)
- Action de frapper, coup, bataille (infinitif pris. Subst.) : « Et vient cele part au ferir des esperons »
(Arthur, Richel.)
- Qui frappe : « Ferant »
- Rapidement (ferant battant ou batant ferrant) : « Si en fut adverti le duc qui , ferant battant,
envoia devers luy trois, quatre messages.( Chastellain, Chron.)
- Frappé (Fig.) : « estoient ferus d’une crainte de pis » (Pasq., Rech.)
- Touché d’amour : « De celle-là pour qui j’estois feru. » (Cl.March., Templ. de Cup.)
- Doué : « De la beauté dont elle estoit férue » (Deschamps, Poésie)
Il fiert : il convient
Se ferir : se lancer, se jeter
« Ferir » est donc employer dans des registres littéraires variés, que ce soit en chanson de geste ou
en poésie.
3- La famille morphologique du mot ou paradigme morphologique.
« Feru »- Participe passé de ferir, qui signifie en ancien français « enfoncer », ou qui renvoie au
sentiment d’amour en ancien français ou même en français moderne (veilli) dans l’expression « je
suis feru d’amour pour… »
« Ferrant battant » - adjectif, « ferant » signifiant « qui frappe » , et l’expression « ferrant battant »
pour dire rapidement.
la ferue ; nf : la blessure, le coup
ferru adj. : blessé
4-La famille sémantique du mot ou paradigme sémantique.
« ferir » au sens « battre » entre en concurrence avec « fraper » qui s’écrit avec un ou deux « p »
selon les textes. En latin « icio, icere,ici, ictus » est le verbe frapper synonyme de ferir (sous sa forme
latine : ferio, ferire)
5-Sens du mot dans le texte étudié.
Quar ſe la mort éust mort tel,
En enſer en alast errant,
Ne sus morel, ne sus ferrant. (Vers 2113, La vie Sainte Elysabel, Rutebeuf)
Ici ferir est sous la forme adjectivale, et signifie « frappant ». C’est la mort qui frappe.
6-Evolution de sens du mot jusqu’au français moderne.
Ferir a perdu son usage avant le XVIIe siècle, ou le mot semble laissé au souvenir de l’ancien français,
selon le dictionnaire il est déjà considéré comme « Vieux mot qui n’est plus en usage qu’en cette
phrase sans coup férir, pour dire sans avoir tiré l’épée, sans rien faire. ».
Fin du XVIIIe siècle, le Dictionnaire critique de Jean-François Féraud met en évidence l’usage qui
semble perdurer de l’adjectif « feru » qui signifie « être blessé » ou « amoureux », selon le contexte.
Le verbe, l’adjectif, est toutefois considéré comme « vieux ».
Au XIXe siècle, l’expression « sans coup férir » est définit comme familière par le dictionnaire de
langue française d’Emile Littré.
Désormais, grâce aux différents auteurs qui ont osés utiliser, mettre à jour ce vieux mot, l’usage, bien
que rare, de « férir » n’est pas pour autant perdu.
Ainsi il garde son sens premier, celui de « frapper » (l’utilisation est presque essentiellement
littéraire) = « L'idée que Schleiter pouvait férir Joseph et l'atteindre aux points sensibles
m'indisposait assez vite » Duhamel, Terre promise, 1934.
L’expression « sans coup férir » existe toujours, a gardé le même sens et n’est plus considéré comme
familière.
Sous la forme du participe passé « feru », on l’emploie lorqu’on se prend d’un grand intêret pour
quelqu’un ou quelque chose ; «Enfin il le voulait pour gendre, parce que, depuis longtemps, il s'était
féru de cette idée, qui ne faisait que s'accroître » Flaubert, L’éducation sentimentale, 1869.
Bibliographie
Dictionnaires de l’Académie française (1er, 4è, 5è, 6è, 8è éditions)
Émile Littré: Dictionnaire de la langue française (1877)
Jean-François Féraud: Dictionnaire critique de la langue française (1788)
Félix Gaffiot : Dictionnaire latin-français
Webographie
http://www.cnrtl.fr/ (centre national des ressources textuelles et lexicales)
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