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aC t i v i t é e t e x p é r i e n C e d e S a C t e u r S e n S i t u a t i o n : l e S a p p o r t S d e l’a n t h r o p o l o g i e C o g n i t i v e
– la cognition (ou l’action) est une construction de significations, partagées
par une communauté. La cognition est socialement et culturellement située :
agir c’est construire des significations dans un contexte culturel et en relation
avec d’autres individus.
Selon ce cadrage théorique, agir consiste avant tout à attribuer du sens aux
situations vécues de façon à se les rendre familières et intelligibles. La for-
mulation condensée d’ « anthropologie cognitive située » (Theureau, 2004)
permet de rassembler à la fois l’orientation anthropologique et son inscription
dans le cadre théorique de l’« action située » (ou « cognition située »). Dans sa
vision de l’« anthropologie cognitive située », Theureau insiste sur le présup-
posé d’autonomie de l’acteur au sens de Varela (1989), autrement dit sur l’idée
d’un couplage asymétrique entre l’acteur et l’environnement. Cette asymétrie
marque le fait que l’individu possède une phénoménologie propre : c’est lui
qui détermine, par son activité, les éléments de l’environnement avec lesquels
il interagit et qui construit à chaque instant sa propre situation. Du point de vue
du sujet agissant, la situation n’occupe pas une position d’extériorité objective
à laquelle il se confronte : la situation correspond en fait à l’interprétation per-
manente qu’il fait de ce qu’il vit, à chaque instant de son activité.
Options méthodologiques
Étudier le sens de leur activité pour les acteurs s’accompagne de contraintes
méthodologiques. L’une des plus fortes consiste à intégrer le point de vue de
l’acteur pour décrire correctement son activité. L’idée n’est pas pour autant
de retourner à une introspection naïve, mais d’armer au plan méthodologique
l’accès à ce point de vue.
À cette fin, des chercheurs en grande partie regroupés autour de Marc Durand
(2001), se sont tournés vers l’appareillage théorique et méthodologique du
programme de recherche du cours d’action développé par Theureau (2004).
Pour appréhender l’activité comme construction de significations, Theureau a
proposé plusieurs objets théoriques et options méthodologiques, notamment
le « cours d’action ». Il permet de rendre compte de la manière dont évoluent
les préoccupations, perceptions, connaissances, émotions, interprétations,
d’un acteur au cours d’une séquence d’activité. Il est reconstruit sur la base de
l’articulation de données comportementales et de verbalisations. Les données
de verbalisation sont recueillies grâce à des entretiens dits d’autoconfronta-
tion. Lors de ces entretiens, l’acteur est confronté à des traces de son activité
passée (bien souvent des enregistrements audiovisuels) et est invité à racon-
ter, décrire, commenter ce qu’il a perçu, pensé, ressenti, fait. Ces données
d’observation des comportements de l’acteur en situation, et de verbalisation,
permettent au chercheur, moyennant des précautions méthodologiques, de re-
construire l’activité vécue en s’appuyant sur le point de vue de l’acteur et en
respectant la dynamique temporelle propre à son activité.