T. LYSSENKO
De l’Académie des sciences de
l’U.R.S.S.
AGROBIOLOGIE
GENETIQUE, SELECTION ET PRODUCTION DES SEMENCES
Note de l'éditeur
Le texte français d'Agrobiologie de T. Lyssenko a été établi d'après la quatrième édition russe, parue à Moscou, aux Editions
agricoles d'Etat (Selkhozguiz). Le présent volume comprend en outre trois nouveaux articles de Lyssenko :
1. Du nouveau dans la science touchant l'espèce biologique.
2. La vitalité des organismes végétaux et animaux.
3. La transformation de variétés de printemps non hivernantes en variétés d'hiver résistantes au froid.
Edition électronique réalisée par Vincent Gouysse à partir de l’ouvrage publié en 1953 aux Editions en
langues étrangères de Moscou. (L'index alphabétique n’est pas reproduit dans cette édition.)
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Sommaire :
Les bases théoriques de la vernalisation (p. 4)
Introduction (p. 4)
Historique du problème de la vernalisation (p. 6)
Le développement et la croissance d'une plante de semence ne sont pas des phénomènes identiques (p. 15)
Les stades de développement chez les plantes (p. 18)
Importance des différents facteurs dans le complexe des conditions extérieures indispensables aux plantes
pour passer par le stade de la vernalisation (p. 23)
La succession des stades dans le développement des plantes (p. 25)
Les modifications phasiques se produisent chez les plantes aux points végétatifs des tiges (p. 29)
Localisation des modifications phasiques (p. 33)
Brèves conclusions sur le développement phasique d'une plante de semence annuelle (p. 35)
La sélection et la théorie phasique du développement des plantes (p. 38)
Le développement individuel du patrimoine héréditaire des plantes (p. 38)
Du choix des couples parentaux, de la loi de la dominance et de la nature de l'hétérosis dans la durée de la
période végétative (p. 45)
Méthodes pratiques de sélection fondées sur la théorie du développement (p. 56)
Comment organiser la culture des semences (p. 63)
Le croisement intravariétal des plantes autogames (p. 82)
Deux tendances dans la génétique (p. 95)
Les laboratoires kolkhoziens et la science agronomique (p. 116)
Le croisement intravariétal et la « loi » mendélienne de la disjonction (p. 129)
Le mentor, puissant moyen de lection (p. 136)
La théorie de Mitchourine doit être à la base de la culture des semences (p. 142)
De la production des semences de seigle (p. 146)
Principes essentiels dont on doit s'inspirer pour créer une élite chez les céréales (p. 148)
Le créateur de l'agrobiologie soviétique (Pour le 4eanniversaire de la mort de I. Mitchourine) (p. 151)
La théorie mitchourinienne à l'Exposition agricole de l'U.R.S.S. (p. 158)
Comment orienter le développement des organismes végétaux (p. 165)
Nouvelles réalisations dans l'art de diriger la nature des plantes (p. 178)
L'organisme et le milieu (p. 190)
Ce qui différencie le vivant du non vivant dans ses rapports avec le milieu (p. 190)
L'importance du choix de l'objet des études (p. 190)
Les causes de la dégénérescence du plant de pomme de terre dans le Midi (p. 191)
Vérification de la thode des plantations estivales à l'Institut de Génétique et de Sélection et dans les
kolkhoz (p. 194)
Engels et quelques problèmes du darwinisme (p. 199)
Qu'est-ce que la génétique mitchourinienne ? (p. 206)
Timiriazev et les tâches de notre agrobiologie (p. 218)
L'hérédité et sa variabilité (p. 227)
Qu'est-ce que l'hérédi(p. 227)
Qu'est-ce que la variabilité ? Croissance et développement (p. 229)
Le développement individuel de l'organisme (p. 231)
L'organisme et le milieu (p. 233)
Modification orientée de la nature des organismes (p. 236)
Les hybrides végétatifs (p. 240)
Abolition du conservatisme de la nature des organismes (p. 245)
Le processus sexuel (p. 250)
Catégories, groupes et formes d'hérédité (p. 253)
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Sélection naturelle et concurrence intraspécifique (p. 259)
Génétique (p. 275)
Le mendélisme-morganisme (p. 275)
Critique de la théorie chromosomique de l'hérédité (p. 278)
La génétique mitchourinienne (p. 280)
Les tâches de l'Académie Lénine des Sciences agricoles de l'U.R.S.S. (p. 286)
Elever considérablement le rendement du millet (p. 286)
Les plantations estivales et la vernalisation de la pomme de terre (p. 288)
Produire plus de semences de luzerne (p. 290)
A propos des rasettes (p. 290)
Les plantes à latex (p. 290)
Des semences hybrides (p. 291)
Du travail de sélection des céréales (p. 291)
Problèmes d'ordre économique de l'agriculture (p. 295)
Développer la science agrobiologique (p. 295)
Pourquoi la science bourgeoise s'insurge contre les travaux des savants soviétiques (p. 297)
Sur la situation dans la science biologique (p. 300)
1. La science biologique, base de l'agronomie (p. 300)
2. L'histoire de la biologie, arène de luttes idéologiques (p. 300)
3. Deux mondes, deux idéologies dans la biologie (p. 301)
4. Scolastique du mendélisme-morganisme (p. 304)
5. L'idée de l'inconnaissable dans la doctrine de la « substance héréditaire » (p. 307)
6. Stérilité du morganisme-mendélisme (p. 308)
7. La doctrine de Mitchourine, fondement de toute biologie scientifique (p. 310)
8. La doctrine mitchourinienne doit être enseignée aux cadres de jeunes biologistes soviétiques (p. 315)
9. Pour une biologie scientifique créatrice (p. 315)
Discours de clôture de la discussion (p. 317)
Les semis d'essai d'écrans forestiers par la méthode des nids (p. 324)
Du nouveau dans la science touchant l'espèce biologique (p. 333)
La vitalité des organismes végétaux et animaux (p. 340)
Transformation de variétés de printemps non hivernantes en variétés d'hiver résistant au froid (p. 344)
Bibliographie (p. 349)
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LES BASES THEORIQUES DE LA VERNALISATION
INTRODUCTION
La théorie phasique du développement est une théorie applicable à l'ensemble de la biologie ; à ce titre, elle
intéresse toutes les branches de la science agrobiologique et trouve une large application dans l'agriculture
socialiste. L'abréviation, chez les céréales, de la période végétative dans les champs pour neutraliser l'action des
vents brûlants ; la vernalisation de la pomme de terre et l'emploi des yeux de tubercules vernalisés pour
économiser le matériel de plantation et augmenter la récolte ; la découverte de la résistance inégale des plantes
au froid à leurs différents stades de développement, et les mesures qui en découlent pour prévenir la destruction
des céréales d'hiver par le froid ; l'obtention de nouvelles variétés d'hiver par lection des populations en semant
des graines incomplètement vernalisées ; la découverte des causes de la dégénérescence de la pomme de terre
dans le Midi et la plantation estivale de la pomme de terre pour remédier à la dégénérescence du plant dans les
régions sèches de la steppe ; l'établissement des bases théoriques d'un choix conscient des couples à croiser pour
la création de nouvelles variétés de plantes cultivées ; la découverte et l'énoncé des lois de la disjonction selon la
durée de la période végétative, comme base théorique de prodés nouveaux de triage dans le processus de la
sélection ; une façon toute nouvelle d'envisager les problèmes de la culture des semences : autant de résultats (et
nous sommes loin de les avoir tous énumérés) auxquels est arrivée la théorie phasique du développement, et que
l'agriculture socialiste a appliqués ou est en train d'appliquer. L'obtention, grâce à la théorie phasique du
développement et dans le délai prévu de deux ans et demi, d'une variété de blé de printemps pour la région
d'Odessa, constitue à nos yeux une victoire des plus brillantes à l'actif de cette théorie. Il n'empêche que tout
récemment encore, de nombreux savants contestaient la justesse des principes théoriques qui ont inspiré ce
travail. (A la séance de l'Office central de la Culture des Semences, 16 janvier 1934.) Théorie d'un intérêt
biologique général, la théorie phasique du développement a soumis ses conclusions, et par conquent elle s'est
soumise elle-même, à la vérification la plus rigoureuse de la pratique ; et partout, elle est sortie vainqueur. Cela,
malgré l'accélération du rythme des travaux (procédés nouveaux de culture des plantes, de multiplication des
semences, etc.), qui est un aspect de l'œuvre entreprise sur la base de la théorie phasique du développement.
L'application de cette théorie biologique générale au cœur même de notre activité pratique fait une fois de plus
justice du mensonge bourgeois selon lequel il existerait deux sortes de vérités : l'une théorique, l'autre pratique.
« La solution des contradictions théoriques n'est possible que dans la pratique, grâce à l'énergie pratique de
l'homme... C'est pourquoi leur solution n'est pas un problème de connaissance pure, mais un problème de la vie
réelle... L'hypothèse selon laquelle il existerait une base pour la vie et une autre pour la science, est fausse a
priori » (K. Marx/F. Engels : Gesamtausgabe, Erste Abteilung, Band 3, Berlin 1932, S. 121 u. S. 123.), écrivait
Marx. La théorie phasique du développement triomphe dans la pratique et par la pratique. Elle part du fait que
tout dans la plante, chaque propriété, chaque caractère, etc., est le résultat du développement du patrimoine
héréditaire dans les conditions concrètes du milieu extérieur. Quant au patrimoine héréditaire, il résulte de toute
l'histoire phylogénique antérieure. Un corollaire de cette histoire biologique, qui est l'œuvre de la sélection des
adaptations à des conditions d'existence bien définies, c'est que l'organisme végétal, à partir du zygote et pendant
toute la durée de sa vie individuelle, exige pour son développement des conditions déterminées. Ces exigences
sont l'autre aspect des adaptations qui se sont produites dans le processus historique.
Mais l'histoire phylogénique du monde organique ne s'est pas déroulée en ligne droite. C'est pourquoi la biologie
de l'organisme végétal individuel n'est pas toujours identique à elle-même dans ses adaptations, donc dans ses
exigences. Elle présente de brusques modifications qui lui sont particulres, ses stades, qui durent un certain
temps. Ces stades sont les phases biologiques les plus générales dans le développement individuel des plantes.
Concentrés aux points végétatifs des tiges de la plante, les processus phasiques qui, dans leur spécificité, sont le
développement même du patrimoine héréditaire, constituent les processus les plus intimes de la vie de la plante.
Découvrir la biophysique et la biochimie des processus phasiques, c'est donc découvrir la biophysique et la
biochimie des processus les plus intimes de la vie de la cellule végétale. Cette tâche difficile entre toutes sera
résolue un jour. Mais il faut, pour y arriver, suivre une voie ardue. Et ils se représentent cette tâche de façon
beaucoup trop simpliste, les chercheurs qui trouvant ou, le plus souvent, s'efforçant de trouver des modifications
dans la réaction chimique de la plante à tel ou tel stade de son développement, s'imaginent avoir déjà découvert
l'« essence» même de la vernalisation, du photostade, etc. Les indicateurs chimiques des stades ne sont que des
indicateurs parmi beaucoup d'autres, et bien qu'incontestablement très importants, ils sont encore loin d'être l' «
essence dernière de la vie ».
La légèreté avec laquelle les « découvreurs » de l'essence biochimique des processus phasiques abordent ce
problème, s'explique par le fait qu'ils considèrent la « vernalisation » comme une « stimulation », comme une
méthode qui « introduirait » dans le processus normal du développement quelque chose d'hétérogène, de
complémentaire, qu'il serait facile d'isoler, d'extraire chimiquement.
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Or, la vernalisation et les autres phases de développement sont des processus nécessaires, normaux, qui se
déroulent de façon analogue et similaire, dans des conditions artificiellement provoquées (vernalisation de
graines germées avant d'ensemencement), aussi bien que dans les champs. Car on peut obtenir, avec n'importe
quelle variété d'hiver, le déroulement du cycle complet (de la semence à la semence), tout le processus de
développement d'une plante de printemps, aussi bien en vernalisant les semences qu'en leur assurant dans les
champs des conditions adéquates (choix d'une région et d'une date d'ensemencement convenables).
Nous sommes pour l'étude des indicateurs chimiques, physiques, morphologiques et autres du développement
phasique. L'Institut de Génétique et de Sélection a déjà enregistré certains succès à cet égard (réactions colorées
différentes aux sections des points végétatifs (Travaux de M. Bassarskaïa, spécialiste de l'Institut de Génétique et
de Sélection à Odessa.) vernalisés ou non ; différenciation du point de croissance considéré comme indicateur
morphologique de la vernalisation, etc.). Mais nous nous élevons contre ceux qui voudraient ramener tout le
développement phasique à ces indicateurs.
Nous sommes avant tout pour l'étude de la biologie du développement ; pour l'étude, dans le développement, de
ce qui constitue la spécificité des rapports biologiques. S'il est absurde de dire que tant qu'on n'a pas étudié la
physico-chimie du bernard-l'ermite et de l'actinie, on n'a pas étudié l'essence de leurs rapports, il est non moins
absurde de croire qu'étudier la biologie des processus phasiques, ce n'est pas en étudier l'essence. A la différence
des théoriciens de la « mécanique du développement », qui ont rompu avec le darwinisme et opèrent selon le
principe : « On essaie de tel ou tel facteur, et puis on voit », sans tenir compte du rôle de l'adaptation dans le
développement (mécanicistes), ou en spéculant sur cette adaptation qui serait due, selon eux, à l'action d'un
principe immatériel (vitalistes), nous restons, quant à nous, sur les positions du darwinisme en étudiant les étapes
biologiques du développement, étapes caractérisées avant tout par de brusques modifications dans les exigences
adaptatives à l'égard de conditions d'existence déterminées. Nous n'oublions point ces paroles de K. Timiriazev :
« Les organismes actuels doivent être compris en s'appuyant sur l'histoire » (К. А. ТИМИРЯЗЕВ :
ИСМОРUЧЕСКUU…, 1939, т. VII, стр. 36-37.), car « l'organe, c'est-à-dire la forme d'adaptation, est le
résultat d'un facteur historique : la lection ». (K. Timiriazev : Note à la p. 57 du livre de G. Klebs,
Willkürtiche Entwickelungsänderungen bei Pflanzen, traduction, notes et préface de K. Timiriazev, 1905.)
A la suite de I. Mitchourine, nous développons plus avant cette idée darwiniste, et non contents de donner une
définition morphologique de la relation qui existe entre la phylogénèse et l'ontogenèse, nous établissons leur
relation biologique. Car le déroulement du processus phylogénique, la création de formes organiques par la
sélection des adaptations, ne peuvent manquer de retentir avant tout sur la biologie du développement individuel
du patrimoine héréditaire en déterminant les exigences de ce dernier vis-à-vis des conditions d'existence de son
développement. Et c'est uniquement selon la manière dont ces exigences sont satisfaites tout au long du
développement individuel, parallèlement à l'action de différents facteurs nullement indispensables à ce
développement, que se déroulent concrètement le passage du patrimoine héréditaire par ses différents stades et,
sur la base de ces derniers, l'évolution des organes et des caractères.
Quand on étudie la biologie du développement individuel, il faut y voir l'individualisation, la concrétisation du
développement du patrimoine héréditaire constitué dans le temps, et qui détermine le caractère variétal,
spécifique, etc., de l'évolution de l'individu végétal. Nous nous élevons par contre le préformationnisme de la
génétique moderne, selon lequel les caractères préexisteraient dans le patrimoine héréditaire tels quels,
indépendamment des stades biologiques du développement, aussi bien que contre l'épigénèse mécaniciste de la «
mécanique du développement », qui ne peut concevoir que le patrimoine héréditaire soit un principe gérique
dans l'individuel. Le patrimoine héréditaire détermine le canevas général, le caractère général du développement
individuel de la plante lorsqu'elle accomplit son cycle.
Il n'existe pas dans l'organisme de caractères donnés concrètement ; mais sa forme n'y subit pas non plus de
modifications arbitraires. Le caractère plante d'hiver ou de printemps, la résistance au froid, la densité plus ou
moins forte du tallage, le caractère barbu, la coloration, etc. ne sont pas donnés dans le patrimoine héréditaire,
mais résultent de son développement dans les conditions déterminées de milieu extérieur qui participent à la
formation des caractères concrets de l'organisme. D'autre part, les conditions extérieures ne sont pas libres
d'orienter le développement dans un sens quelconque, de le faire rétrograder, d'abolir les exigences du patrimoine
héréditaire à l'égard de telles ou telles conditions de développement à une phase déterminée. Le développement
individuel de l'organisme végétal se déroule sur la base des exigences biologiques des différents stades de
développement du patrimoine héréditaire. Les stades de développement constituent des phases biologiques
générales dans le développement individuel du patrimoine héréditaire, et à ce titre ils sont à la base du
développement de chaque caractère de la plante. Le caractère plante d'hiver ou de printemps, la résistance au gel,
à la sécheresse, aux parasites, la durée de la période de végétation, le tallage, etc. ne peuvent être étudiés en
dehors des stades généraux du développement, car tous ces caractères se formeront diversement si tels ou tels
stades se sont déroulés différemment (par suite de la diversité des conditions extérieures), et ils seront
dissemblables aux différents stades.
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