BSI Economics
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La presse économique s'intéresse souvent à des phénomènes de marché1 (vente d'automobiles,
d'avions, commerce international, évolution de la part d'un secteur dans le PIB...). Il y a plusieurs
raisons à cela. Une première, évidente, est que les économistes étudient en majorité ce qui se passe
sur les marchés. Une seconde est également que le marché est plus facilement visible, mesurable. On
y observe des prix, des quantités. De plus, les obligations administratives, comptables et fiscales
impliquent que beaucoup des transactions qui s'y effectuent sont enregistrées quelque part.
Il est intéressant de remarquer que des économistes tels qu'Adam Smith (1723-1790) ont commencé
à s'intéresser au marché à une époque où celui-ci était moins prévalent qu'il ne l'est aujourd'hui. Ce
biais s'est, d'une certaine manière, perpétué. Cependant, il existe une recherche dynamique sur les
mécanismes économiques qui ont lieu en dehors du marché. Ces derniers sont intéressants car ils
interagissent avec le marché, le modifient, sont modifiés par lui et ont également une autonomie
propre. Ils peuvent notamment compenser l'absence de certains marchés. Par exemple, la famille est
une entité qui peut combler l'absence de certaines assurances privées. L'exemple le plus évident est
celui d'époux mettant leurs revenus en commun. Dans ce cas, si l'un des membres perd son emploi,
le fait que l'autre perçoive encore un revenu joue un rôle d'assurance chômage partiel2.
Si l'économie se limitait au seul marché alors l'on pourrait presque affirmer (en exagérant quelque
peu) qu'il n'y avait point d'économie avant la révolution industrielle. Bien sûr, il existait des marchés
mais une grande partie de l'activité économique des hommes était séparée de ceux-ci3. Il n'empêche
1Un marché est un lieu où l'offre et la demande d'une marchandise se rencontrent et donnent lieu à
un échange. Plus particulièrement, nous entendrons par « marchés », ici, ceux où l'échange d'un bien
ou d'un service s'effectue contre une somme d'argent.
2Prenons, par exemple, le cas d'époux ayant initialement le même revenu y et qui décident (quoi qu'il
arrive) de mettre leurs revenus en commun et de partager cette somme en deux parts égales. C'est-
à-dire, le revenu total du ménage et 2*y et chaque époux peut disposer de la moitié de ce revenu,
i.e. chacun a le droit de consommer y. S'il n'y avait pas cet accord entre les deux, la situation initiale
serait identique, chacun pouvant consommer y. Imaginons, pour simplifier, que si un des époux perd
son emploi le revenu est de 0. S'ils n'étaient pas mariés chacun des époux ferait face à un risque de
passer d'un revenu de y à un revenu de 0, soit une variation de y-0 = y. (On suppose qu'un seul des
époux peut perdre son emploi mais qu'initialement il est impossible de savoir lequel perdra son
emploi.) Avec l'accord, si un seul des époux perd son emploi le revenu total du ménage sera de y et
chacun pourra disposer de la moitié de ce revenu soit y/2. Chaque époux pris individuellement fait
désormais face à un risque de passer d'un revenu de y à un revenu de y/2, soit une variation de y-y/2
= y/2. Dans ce cas, on voit que le mariage joue bien un rôle d'assurance. Il est à noter que le marché
de l'assurance chômage est a priori fortement sujet au problème classique de l'aléa moral.
3Il est à noter qu'il existait bien de grands marchés type foires. Cependant, une grande partie des
hommes n'avait aucun lien avec ceux-ci. Pour s'en convaincre, lire par exemple La dynamique du
capitalisme de Fernand Braudel. Pour le citer, « économie de marché et capitalisme – sont, jusqu'au