TENNIS-MAG
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No 104 - Juillet 2016 - Par Tennis Québec
MIEUX-ÊTRE
PAR GUILLAUME THÉROUX
Journaliste sportif à TVA Sports
Troubles
ALIMENTAIRES
TOUT LE MONDE DANS SON [ EUGENIE BOUCHARD ] ENTOURAGE
LAN DERNIER AVAIT REMARQUÉ QU’ELLE AVAIT PERDU DU POIDS
ET S’ÉTAIT UN PEU INQUIÉTÉ. NOUS, CHEZ TENNIS CANADA, QUAND
ON LA VUE À LA FED CUP À MONTRÉAL, ÇA NOUS AVAIT FRAPPÉS.
Les médias ont grossi l’affaire. Les « troubles alimen-
taires » d’Eugenie Bouchard ont nourri la machine
médiatique alors qu’en réalité, aucune conclusion
claire ne peut-être tirée de la situation, outre que la
coqueluche québécoise a vraisemblablement subi les
contrecoups d’un haut niveau de stress. Par contre,
n’allez pas croire que le problème n’existe pas dans
les hautes sphères du tennis…
Eugenie au podium devant une horde de médias
après une victoire au premier tour à Roland-Garros.
Casquette Nike vissée sur sa longue chevelure
blonde. Un non verbal un peu désinvolte qui lui est
si caractéristique. Et quelques mots qu’elle jugeait
probablement innocents.
« Avant les matchs, j’étais nerveuse et j’avais du mal
à manger. Ce n’était pas juste avant les matchs, ça
m’arrivait aussi lors d’autres repas. [] La nourriture
remontait. » Ce fut assez pour faire les manchettes
dans les bulletins et sur les sites sportifs.
Impossible de savoir si Eugenie Bouchard a réellement
été victime de très graves problèmes alimentaires
en 2015. Quelle qu’ait été leur gravité, toutefois, la
Québécoise a su surmonter les obstacles qui se
sont dressés devant elle, explique Valérie Tétreault
au Tennis-mag.
« Quand on repense à ses réponses, on se rend compte
qu’elle n’a pas nécessairement parlé d’anorexie, de
boulimie… souligne la responsable des communica-
tions chez Tennis Canada et analyste pour TVA Sports.
Elle ne mangeait pas assez, elle avait de la difficulté à
ingérer ses calories à un certain moment parce qu’elle
était stressée, elle avait donc moins faim. »
« Tout le monde dans son entourage l’an dernier avait
remarqué qu’elle avait perdu du poids et s’était un
peu inquiété. Nous, chez Tennis Canada, quand on
l’a vue à la Fed Cup à Montréal, ça nous avait frappés.
Je pense que, depuis, elle a fait un bon travail pour
récupérer de la masse musculaire. »
Mais oui, « Genie » a été exposée à une problématique
qui a déjà fait d’autres victimes au sein du tennis
professionnel féminin par le passé, qu’on pense à
Daniela Hantuchová, ouvertement heureuse d’avoir
pu laisser derrière elle le temps où on la surnommait la
« Squelette slovaque », ou encore à Maria Sharapova,
qui a déjà déclaré : « Je voudrais toujours être plus
mince et avoir moins de cellulite. Je pense que cest
le rêve de toute fille. »
« Je pense que la pression de l’image avait beaucoup
d’impact sur elle [Eugenie], énonce Tétreault. Elle n’en
parlait pas beaucoup l’an passé, mais, heureusement
pour elle, elle a été capable de prendre du recul et
d’analyser la situation. »
« Elle est populaire pour ses performances sur le
terrain, mais aussi pour tout ce qui entoure sa car-
rière. Elle a une conscience très importante de son
image et se le fait rappeler constamment. Au final,
son ascension très rapide ne lui a probablement pas
servie. Ça aurait peut-être été mieux pour elle, plus
facile en tout cas, si son ascension s’était produite sur
une plus longue période. »
Tétreault estime par exemple que, si une « Sharapova
avait été une fille complètement moche », elle ne
serait peut-être pas aussi populaire même si elle
a décroché autant de titres importants. Chez les
hommes, Tétreault nest « pas prête à dire que le lien
se fait aussi facilement. »
Pourtant, Alexia De Macar, nutritionniste pour l’équipe
de Tennis Québec et reconnue pour son travail auprès
Trop de pression sur les
épaules des athlètes?
>> (La suite en page 79)
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No 104 - Juillet 2016 - Par Tennis Québec No 104 - Juillet 2016 - Par Tennis Québec
MIEUX-ÊTRE
LA DIFFÉRENCE
entre TROUBLES,
DÉRÈGLEMENTS
et
DIFFICULTÉS alimentaires
Alexia De Macar, nutritionniste du sport et
de la performance reconnue pour son travail
auprès d’athlètes olympiques et paralympiques
ainsi que pour son travail avec Tennis Québec,
tient à éduquer la population quant à la
réelle différence entre un trouble alimentaire
clinique, une alimentation déréglée et de
simples difficultés alimentaires (mais tout de
même fort importantes) que certains athlètes
de haut niveau peuvent rencontrer au cours
de leur carrière.
« Le fait qu’Eugenie Bouchard ait souffert ou
non d’un trouble alimentaire lui appartient. On
ne peut conclure quoi que ce soit à la lumière
de ces révélations », avertit la nutritionniste.
DES DIFFICULS LIÉES À LA PRES-
SION DE LA PERFORMANCE SE
PRODUISENT-ELLES SOUVENT CHEZ
LES JOUEURS PROFESSIONNELS DE
TENNIS?
Les troubles alimentaires cliniques réels, tels
que définis par le DSM-5, soit la bible des
troubles mentaux (anorexie nerveuse, bou-
limie nerveuse, etc.), sont relativement peu
fréquents chez les athlètes de haut niveau. En
revanche, on peut observer plus fréquemment
la présence de comportements alimentaires
déséquilibrés chez certains athlètes survenant
sur une base occasionnelle, comme un athlète
qui réduirait son apport alimentaire de façon
radicale quelques jours avant une compétition
importante pour perdre du poids ou encore
qui sentirait le besoin de s’entraîner davantage
ou de sauter un repas pour se permettre son
dessert préféré.
À QUEL POINT EST-IL DIFFICILE POUR
UN JOUEUR DE TENNIS PROFESSION-
NEL DE SUIVRE UN PROGRAMME
DE NUTRITION? LES PROGRAMMES
SONT-ILS PARTICULIÈREMENT
ASTREIGNANTS?
Un programme de nutrition devrait être
bâti en fonction des habitudes alimentaires
actuelles de l’athlète. Il faut le faire progresser
tranquillement vers des habitudes optimales,
qui peuvent différer pour chacune des phases
de son entraînement. Si on s’éloigne trop
rapidement de ce que l’athlète a l’habitude
de faire, l’adhésion au programme
peut être plus complexe.
QUELS SONT LES RECOURS D’UN
ATHTE POUR RÉGLER UN TROUBLE
ALIMENTAIRE? QUELLES SONT LES
SOLUTIONS?
Les proches dun athlète souffrant de difficultés
alimentaires sont souvent pris au dépourvu.
Confronter l’athlète? Ignorer le problème?
L’âge de l’athlète dictera un peu l’approche à
préconiser, mais, dans tous les cas, il faut agir,
car la personne souffre, même si elle semble
montrer que tout est sous contrôle. La première
chose est de trouver des personnes-ressources
qualifiées pour les aider à se faire soigner. La
nutrition et la psychologie doivent être pri-
vilégiées de concert pour des résultats plus
optimaux. Les problèmes d’alimentation sont
généralement le symptôme dun problème
psychologique plus profond. Pour trouver
des nutritionnistes et psychologues ayant
une expertise avec les athlètes, référerez-vous
aux listes du site Internet de l’Institut national
du sport du Québec (www.insquebec.org).
© François Mori-AP /La Presse Canadienne
Plusieurs observateurs s’étaient inquiété de la perte de poids importante, en 2003, de la joueuse
de tennis Daniela Hantuchová.
LE FAIT QU’EUGENIE BOUCHARD
AIT SOUFFERT OU NON D’UN TROUBLE
ALIMENTAIRE LUI APPARTIENT. ON NE
PEUT CONCLURE QUOI QUE CE SOIT À LA
LUMIÈRE DE CES RÉVÉLATIONS.
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No 104 - Juillet 2016 - Par Tennis Québec
d’athlètes olympiques et paralympiques,
prévient qu’il ne faut pas nécessairement
négliger les problèmes auxquels peuvent
faire face les hommes.
« Les études actuelles montrent que les
athlètes féminines souffriraient davantage
de problèmes alimentaires que les hommes,
concède De Macar. Toutefois, ce nombre
pourrait être sous-estimé. La prévalence
chez les hommes serait plus élevée que ce
que laissent entendre les études faites ces
dernières années. »
Lexpérience personnelle de Tétreault
Tétreault avoue elle-même avoir déjà connu
le même type de problème que Bouchard
pendant sa carrière qui s’est étalée de 2006 à
2010. « Au moment de ma transition des juniors
vers les professionnelles, comme n’importe
quelle fille, j’étais en pleine croissance, ça
allait, je mangeais n’importe quoi. Puis, vient
un temps dans ta vie où la situation change.
Oui, j’ai eu certains problèmes. Jai perdu
beaucoup de poids très rapidement, ce qui
n’était pas bon pour mon tennis et inquiétait
mon entourage. Je me sentais prise dans cet
engrenage. J’ai pu bien m’en sortir, mais ça a
quand même duré un bon moment. »
« Des fois, ça ne prend pas grand-chose, un
commentaire par-ci, par-là lancé par quelqu’un
autour de toi, puis ça fait son chemin dans ta
tête et c’est assez pour te perturber et tamener
sur cette voie… » confie-t-elle à Tennis-mag.
C’est vrai pour Tétreault, cest vrai pour monsieur
et madame Tout-le-monde, alors imaginez
pour une supervedette féminine surexposée 24
heures sur 24 à des commentaires d’inconnus
sur le Web et à de l’attention médiatique
Heureusement, encore une fois comme
Bouchard, l’ex-athlète de la WTA est parvenue
à chasser ses démons.
« Quand tu es capable d’en parler, c’est la
première étape. Tu l’admets. Après, il y a les
psychologues autour de nous. Personnellement,
j’avais travaillé avec le nutritionniste qui avait
été mis à ma disposition par Tennis Canada.
Les ressources sont là. »
Retour au début de l’article, page 23
S’en sortir
C’est pendant son arrêt de travail à l’hôpital
où il travaillait en tant qu’infirmier qu’il a
renoué avec le tennis. Son médecin lui avait
conseillé de faire du sport et c’est là que Jean-
Michel Guimond a eu l’idée de retourner à
ses anciennes amours. « J’ai toujours dit que
le tennis m’a amené dans les pires bas-fonds
qu’on puisse imaginer, mais que c’est grâce
au tennis si je m’en suis sorti, déclare-t-il. Il
m’a appris à être fort dans les épreuves. La
discipline que j’ai eue toute ma vie et que
mon père m’a transmise, c’est ce qui m’a
sauvé la vie. »
Désormais, il dirige l’Académie JMG, la bou-
tique Prosport, et organise chaque année le
tournoi de tennis amateur, Le Challenge de
tennis Bistro La Cohue qui offre une bourse
de 11 000 $. Père depuis peu de temps, il s’est
juré de laisser son enfant faire ses propres choix
et de l’appuyer, peu importe ce qui arrivera.
Retour au début de l’article, page 29
Grigor Dimitrov – 37e au classement ATP
et ex-compagnon de Maria Sharapova
« Je ne connais pas tous les détails, mais je
sais que Maria a la tête sur les épaules. Ce
n’est pas facile pour elle de rester à l’écart
aussi longtemps. La seule chose que je puisse
faire, c’est de lui souhaiter la meilleure des
chances. »
Andy Murray – 2e au classement ATP et
tenant de deux titres du Grand Chelem
« Je ne pense pas que ce soit des excuses
valables. Si vous prenez un médicament,
c’est votre responsabilité. Vous devez vous
assurer que la prise du médicament est légale.
Il peut y avoir certains médicaments que les
médecins ne connaissent pas, ce nest pas
pareil. Mais vous devez savoir s’il est sur la
liste des indésirables avant de le prendre. »
Marion Bartoli – Ancienne joueuse,
tenante d’un titre du Grand chelem
« Si j’avais pris un produit pendant dix ans
pour ma santé, tous les jours je vérifierais si
ce produit est banni des listes. Nous savons
que le dopage est quelque chose de pris
au sérieux au tennis. Vous navez pas envie
de mettre en danger toute votre carrière. »
James Blake – Ancien joueur, classé 4
e
en 2006
« Je pense que les [autres joueuses de la
WTA] ne verront pas d’un bon œil son retour
sur le circuit. »
Patrick Mouratoglou – Entraîneur de
Serena Williams
« Je n’ai pas de pitié pour les gens qui ne
respectent pas les règles. C’est une erreur
professionnelle et on doit payer pour nos
erreurs. »
Retour au début de l’article, page 37
SUITE DE LA PAGE 23
TROUBLES ALIMENTAIRES
SUITE DE LA PAGE 29
JEU, MANCHE ET MATCH… DE LA VIE!
SUITE DE LA PAGE 37
CAS MARIA SHARAPOVA : CE QUE SES COLLÈGUES EN PENSENT
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