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ment pas de facteurs susceptibles d’être
individuellement contrôlés.
En ce qui concerne les comportements, le
secteur médical et la société doivent faire
des efforts considérables pour lutter contre
la discrimination. Il existe habituellement
un cadre légal, auquel nous ne recourons
pas suffisamment à mon avis. Nous devons
également, en tant que médecins, veiller au
renforcement de la responsabilisation («em-
powerment») afin de défendre les droits des
patients. Enfin, les patients devraient pou-
voir être réintégrés plus facilement dans le
circuit professionnel, un aspect qui néces-
site aussi une approche spécifique.
Pourquoi un prix?
Dr Manji: Notre objectif est de soutenir
l’éducation sur les troubles psychiatriques
graves et de faire comprendre qu’il s’agit
effectivement de maladies du cerveau, tout
aussi réelles que le diabète, le cancer ou les
maladies auto-immunes. Un des problèmes
des maladies telles que la schizophrénie et
les troubles bipolaires tient au fait qu’elles
sont à la fois associées à des souffrances
majeures pour la personne concernée et
sa famille et stigmatisées par la société,
ce qui entrave l’accès aux soins et se tra-
duit par une limitation du budget disponible
pour la recherche scientifique. Nous devons
donc favoriser une prise de conscience
de la population à cet égard. Des rapports
indiquent que les maladies mentales entraî-
neront un coût social plus élevé, à l’échelle
mondiale, que le cancer, le diabète et les
maladies pulmonaires réunis. Toutes ces
maladies sont naturellement importantes,
mais les troubles psychiatriques graves ne
sont pas rares chez des personnes jeunes,
qui devront vivre tout au long de leur exis-
tence avec leur pathologie. Grâce à ce prix,
nous voulions, avec d’autres intervenants,
braquer les projecteurs sur des personnes
qui s’impliquent de manière héroïque pour
éliminer les stigmates et souligner ainsi que
nous avons besoin d’aide pour lutter contre
ces «vraies» maladies.
Le prix est remis à…
Pr Sabbe: Le nombre de nominations
reçues pour le prix montre à quel point le
stigmate reste un problème majeur en psy-
chiatrie. Les patients souffrent à la fois de
leur maladie et, parfois davantage encore,
du stigmate associé. Nous avons vu des
projets magnifiques dans le monde entier,
à l’échelle locale, nationale ou internatio-
nale. Dans l’ensemble, cela n’a vraiment
pas été difficile d’aller au-delà des diffé-
rences culturelles. La stigmatisation est un
problème mondial. Nous avons finalement
choisi un projet indonésien, mis en œuvre
à l’initiative de Bagus Utomo, un membre
de la famille d’un patient, qui a eu un re-
tentissement majeur dans ce pays.
Bagus Utomo: En 1995, nous avons dû
faire face, ma famille et moi, à la schi-
zophrénie de mon frère. A l’époque, nous
n’avons pu trouver que très peu d’infor-
mations sur cette maladie et un grand
nombre de nos questions sont restées
sans réponse. Dans un pays aussi étendu
et peuplé que l’Indonésie, il existe très peu
de psychiatres assurant le traitement de
la schizophrénie. Après plusieurs années
de traitements infructueux, cela a été
pour moi une véritable révélation lorsque
j’ai pu trouver davantage d’informations
en ligne sur la maladie. Cela m’a incité à
créer un groupe Facebook afin de lancer
ce projet. Nous avons ainsi pu entrer en
contact rapidement avec plusieurs milliers
de personnes à la recherche de renseigne-
ments complémentaires. Nous avons aussi
pu mettre sur pied une organisation à but
non lucratif, la KPSI (Komunitas Peduli
Skizofrenia Indonesia), un point de contact
central pour tous les intéressés et un
centre d’information sur le traitement de la
maladie en Indonésie. Cela nous a permis
d’améliorer les connaissances relatives
au traitement de la schizophrénie et aux
conséquences négatives de la stigmatisa-
tion. De plus, des patients ont désormais
accès à des groupes de soutien, des ate-
liers sur la santé psychique et des activités
thérapeutiques telles que la peinture, le
sport et la vidéo. Je suis très reconnaissant
au jury qui m’a décerné le prix. Le montant
sera notamment utilisé pour l’élaboration
d’un site web et le développement de nos
activités.
©Janssen-Cilag NV/SA – PHBE/PSY/1012/0088 – vu/er
Erik Present, Antwerpseweg 15-17, 2340 Beerse
Pourquoi la remise du prix
a-t-elle été organisée au
Psychiatrisch Centrum
Dr. Guislain?
Br. Stockman: «Le PC Dr. Guislain
est un lieu historique. C’est en
1815, dans les caves du Château
de Gérard le Diable (Gerard
de Duivelsteen) à Gand, que
furent littéralement brisés les
fers de patients psychiatriques,
qui y étaient emprisonnés et
enchaînés, par les Frères et les
Sœurs de la Charité, un ordre
fondé par le chanoine Triest. Cet
acte fut dicté par de nouveaux
principes révolutionnaires sur
les maladies psychiatriques,
alors appliqués en France et
en Angleterre. Auparavant, les
patients n’étaient pas considérés
comme des malades, mais
comme des possédés, qui
devaient être écartés de la
société. Les soins furent d’abord
assurés par des religieux à
Gand, qui comprirent rapidement
la nécessité d’une assistance
médicale professionnelle, ce
qui aboutit à la fondation de
l’actuel PC Dr. Guislain, nommé
d’après le premier médecin ayant
pris en charge les soins aux
patients. Il s’agissait à l’époque
de l’institution modèle en Europe
occidentale pour le traitement des
maladies mentales. L’objectif du
Museum Dr. Guislain, fondé en
1986, consistait, entre autres, à
contribuer à la déstigmatisation
des maladies psychiatriques grâce
à l’organisation d’expositions sur
ce thème. Le choix du lieu où le
prix a été décerné n’est donc pas
le fruit du hasard.»