l’Islam des pays de langue arabe.
Les méthodes modernes d’ensei-
gnement font quand même des rava-
ges dans les écoles coraniques, par-
ticulièrement dans celles des villes.
Dans une des mosquées de Djakarta,
par exemple, chaque étudiant avait
l’habitude de psalmodier à haute voix,
un passagedifférent,cequi produisait
une terrible cacophonie. Le maître
décida alors d’appliquer la technique
moderned’apprentissage d’une langue
étrangère à l’étude du Coran : chaque
étudiant, muni d’écouteurs et d’un
magnétophone à cassettes, pouvait
enregistrer toutes les
suras
du Coran.
Cette année, de dire le maître, un de
ses élèves aura même des chances de
remporter le championnat de vitesse
de récitation du Coran.
ter et de mobiliser une telle force. En
conséque&e, les confréries obtinrent
non seulement de l’aide des Français,
mais profitèrent largement du com-
merce des arachides.
L’islam fut introduit au Sénégal au
1 le siècle par l’arrivée lente mais pro-
gressive des commerçants, et par des
incursions militaires occasionnelles
des peuples de l’Afrique du Nord.
L’lslamisation prit des siècles, mais fut
sans contredit accélérée par des mar-
chands d’esclaves venus d’Europe au
Les écoles coraniques devinrent
plus ou moins les instruments decette
nouvelle entrepriseagricole.On recru-
lait la main-d’oeuvre facilement mobi-
lisée et obtenue à bon marché dans
les écoles, qui réunissaient pour I’étude
de jeunes garçons robustes. Ces con-
fréries, représentées par les Serignes
dans les villages, se servaient des
écoles non seulement pour convertir
les profanes, mais aussi pour étendre
leurterritoireetdevenirunepuissance
socle-économique.
Toutefois, la participation des con-
fréries et du gouvernement d’avant
I’indépendance.dans ledomaineagri-
cale, a décru ces dernières années,
pour des raisons très diverses : décès
de plusieurs chefs spirituels, diversifi-
cation des récoltes et aussi migration
croissante vers les villes. Des trans-
formations se sont également fait sen-
tir au niveau des écoles coraniaues.
AUX GOUVERNEMENTS D’AGIR
L’apprentissage de la lecture, de
l’écriture et du calcul élémentaire
est probablement I’objectif commun
à tous les systèmes éducationnels
contemporains. Fait intéressant,
pour un grand nombre d’enfants du
Tiers-Monde cet apprentissage se
fait au sein d’une école traditionnelle,
une réalité dont se sont peu préoc-
cupés les planificateurs des pays
concernés.
Les écoles islamiques contem-
porain& constituent un bon exem-
ple d’éducation traditionnelle, qui
continuedecompterungrand nom-
bre d’enfants. Récemment cependant,
ces structures se sont trouvées en
concurrence avec les écoles k=iques
modernes. Les deux systèmes sco-
laires ont donc été conduits à des
ajustements nécessaires.
Nombre de chercheurs admet-
tent que les programmas nationaux
en la matière n’ont obtenu qu’un
succès mitigé ces dernières années
dans nombre de pays et qu’il serait
bénéfique que s’établisse un rap-
prochement plus étroit entre les pro
grammes modernes et les projets
éducatifs au sein des cultures indi-
gènes.
II faut cependant évaluer davan-
tage l’efficacité des écoles tradi-
tionnelles. Si administrateurs et
planificateurs des pays en dévelop
pement s’intéressaient davantage
aux politiques et programmes
éducationnels, ils pourraientvain-
cre l’analphabétisme, là où déjà
l’enseignement traditionnel fait
partie de la vie de si nombreux
enfants.
16e siècle. Pendant les quelque 200
ans que dura le commerce des es-
claves, la structure socio-économique
du pays fut bouleversée. Les princi-
pales conséquences de ce boule-
versement furent la montée de l’Islam
en tant que groupe indigène anti-
cblonialiste ainsi que ladomination de
confréries islamiques importantes, qui
s’étaient développées autour d’un
personnage sacré et de ses descen-
dants.
Au lge siècle, un grand nombre
d’ententes furent conclues entre les
confréries et I’administration coloniale
française, concernant la production
massive d’arachides, destinées à I’ex-
portation. La culture de l’arachide
nécessitait une main-d’œuvre nom-
breuse, facilement mobilisable et re-
lativement peu qualifiée. Seules les
confréries étaient en mesure de recru-
6
Les Serignes n’ont plus la toute puis-
sance d’antan. L’école du Serigne
Abdoulaye, par exemple, a sombré
dans la misi?re, car de moins en moins
d’enfants acceptent encore la méthode
d’étude traditionnelle. De nouvelles
écoles et de nouveaux enseignants
remplacent les anciens.
Le Serigne Abdoulaye lui-même en-
voie ses enfants dans une école isla-
mique moderne. Pour les parents et les
professeurs, ce geste-là donne à réflé
chir; il n’afallu qu’unegénération pour
que beaucoup de Musulmans remet-
tent en question les méthodes péda-
gogiques et l’ordre social du passé
afin de pouvoir renforcer, à l’avenir,
leurs principes fondamentaux.
Le rôle joué par le Yemen a été,
après celui de l’Arabie-Saoudite, le
plus important pour rétablissement de
l’Islam. Plus qu’aucun autre pays mu-
sulman, le Yemen est resté attaché à
ses traditions, ayant été coupé du
monde occidental pendant près d’un
millier d’années. Jusqu’à la révolution
de 1972, le seul système scolaire
existant était le système traditionnel
des écoles coraniques. Elles étaient
fréquentées par des garçons de l’âge
de quatre ans jusqu’à celui de dix à
douze ans, ou dès que ceux-ci de-
vaient retourner chez eux pourse livrer
aux travaux de la terre. L’apprentissage
machinal, la récitation ainsi que les
rudiments de la lecture, de l’écriture et
du calcul étaient la règle. Seuls quelques
adolescents particulièrement doués
poursuivaient leurs études dans les
madrasahs
des grandes villes, pour
devenir des spécialistes du Coran ou
des enseignants.
Dans un pays où le taux d’anal-
phabétismeestélevé, on s’adressait la
plupart du temps aux religieux pour le
règlement de questions juridiques.
Néanmoins, depuis la révolution, un
effort énorme a été fourni pour inciter
un plus grand nombre d’enfants à
s’inscrire dans les écoles publiques.
Cette mesure a eu deux conséquences
connexes sur le système des écoles
traditionnelles islamiques : d’une part
de plus en plus de jeunes, optant pour
la fréquentation des écoles publiques,
ont abandonné les études prépara-
toires à l’enseignement du Coran ; et
d’autre part, devant la diminution du
nombre des enseignants coraniques
et l’augmentation de la population
d’âge scolaire, les autorités religieuses
ont dû faire appel à des enseignants
égyptiens, et ceux-ci ont été formés
dans des écoles Ia’iques modernes.
De nos jours, la plupart des écoles
traditionnelles ont un corps ensei-
gnant plus jeune et plus qualifié et
comptent de plus en plus d’élèves du
niveau secondaire. Ainsi, le système
scolaire s’est adapté aux besoins
actuels,etoffreunealternativevalable,
au point de vue culturel et religieux,
aux familles désirant ne point rompra
complètement avec les traditions.
Quelles seront les conséquences de
la montée des mouvements d’lslamisa-
tien. on ne sait trop, mais il n’en
demeure pas moins que des millions
d’enfants fréquentent ces écoles et y
reçoivent toute ou une partie de leur
éducation officielle. L’école islamique
est une des institutions les plus cul-
turellement enracinées - et les moins
comprises-qui influentsurlaviedes
populations rurales pauvres du Tiers-
Monde.Oncommenceseulementàse
rendre compte du rôle qu’elle joue
dans le processus de développement
du Tiers-Monde.* n
*Wagner, D.A., Indigenous education and
literacy in the Third World, in D.A.
Wagner
(éd.)
Child Development and International
Development San
Francisco: Jossey-Bass;
et Islamic education: Tradilional pedagogy
and contemporary change,
in T Husen and
TN. Postlethwaite (éd.)
International
Encyclopedia of Education: Research and
Studies. New
York: Pergamon Press, 1983.