Association Genevoise des Employés en Assurances
Sociales
newsletter 14
SEPTEMBRE // OCTOBRE 2015
De gauche à droite : Monsieur Pierre-Yves Tapponier,
Monsieur Jean-Philippe Pierroz, Monsieur Max Marendaz et
Monsieur Alain Magnenat
Sommaire
Que s'est-il passé à l'AGEAS? 1-2
Interviews de
Messieurs Pierroz et Magnenat 2-3
Avantages des membres
de l’AGEAS 3
Affections psychosomatiques :
bouleversement dans la
jurisprudence 3-6
Responsables de la publication :
Virginie Isard et Marie-Josée Costa
Mise en page :
Marie-Josée Costa
Impression : www.kis.ch
Tirage : 400 exemplaires
Que s’est-il passé à
l’AGEAS ?
Le 26 mars 2015, le dicastère
MANIFESTATIONS nous a
organisé une conférence sur le
thème « ACCORD PARITAIRE
GENEVOIS DANS LES METIERS
DU BATIMENT ».
Pour cette conférence, l’AGEAS et
ses membres ont été accueillis
dans les locaux de la Fédération
genevoise des métiers du bâtiment
(FMB).
La conférence a été animée par
des personnes de terrain
représentant la FMB, l’assurance-
invalidité, la SUVA et l’assurance-
maladie.
Ainsi, nous avons pu compter sur
la présence de Monsieur Pierre-
Yves Tapponnier, Secrétaire
général adjoint de la FMB,
Monsieur Alain Magnenat,
Conseiller en réadaptation
professionnelle au sein de
l’assurance-invalidité, Monsieur
Max Marendaz, Responsable des
prestations et remplaçant du
Directeur auprès de la SUVA
Genève
et Monsieur Jean-Philippe Pierroz,
Cadre auprès du Groupe Mutuel.
Leur présentation était d’autant
plus intéressante qu’ils participent
activement à l’accord paritaire.
En quelques mots, conscients que
les tiers du bâtiment sont
particulièrement exposés aux
atteintes à la santé, les assureurs
privés, les syndicats, les
représentants patronaux, la SUVA
et l’assurance-invalidité se sont
regroupés afin de déceler
rapidement les situations à risques.
Les représentants des institutions
précitées ont créé une cellule
d’analyse afin d’examiner les
situations d’incapacité de travail
durables et d’intervenir rapidement
afin de favoriser une prise en
charge concertée et pragmatique
permettant d’assurer une
réinsertion professionnelle.
A cette fin, l’accord paritaire permet
de bénéficier d’un budget assuré
par les différentes institutions pour
financer la réinsertion et ce en
réduisant les délais administratifs.
SEPTEMBRE // OCTOBRE 2015
Le but de l’accord est d’agir dans
les meilleurs délais avant que la
situation ne se péjore et ce en
concertation avec les différents
partenaires. Par ailleurs, l’accord
permet d’augmenter les chances de
réinsertion à l’interne des métiers
du bâtiment.
Les intervenants nous ont fait part
de leur satisfaction s’agissant des
résultats obtenus depuis la création
de l’accord il y a 5 ans.
Pour plus de détail, vous trouverez
la présentation de la conférence sur
le site internet de l’AGEAS.
S’agissant des événements
marquants de l’AGEAS, il faut
également mentionner l’assemblée
générale qui a eu lieu le 21 mai
2015.
Ce fut l’occasion pour le comité
d’échanger avec les membres de
l’AGEAS.
Les différents dicastères ont
résumé leurs activités durant cette
dernière année et les projets en
cours.
Lors de l’assemblée générale, le
président de l’AGEAS, Monsieur
Mauro Camozzato a présenté le
nouveau membre du comité, soit
Monsieur Livio Sposato,
responsable représentation pour
Genève de la société ASSIDU,
lequel a rejoint le dicastère
MANIFESTATIONS après le départ
de Monsieur Julien Staehelin.
Outre sa large expérience dans les
assurances, Monsieur Livio
Sposato est breveté en assurances
sociales et en prévoyance
professionnelle.
Par ailleurs, cet article ne serait pas
complet si nous ne parlions pas de
nos élèves et de nos formations.
Ainsi, les répétitoires pour les
examens 2015 ont eu lieu cet été et
les cours de brevet et de
sensibilisation ont recommencé fin
août 2015.
Voilà pour le survol des
événements de ces derniers mois.
L’AGEAS a d’ores et déjà prévu
une conférence qui portera sur la
fraude en matière d’assurance-
invalidité, laquelle aura lieu le 4
novembre 2015 au Domaine de
Penthes à 18h30.
Reste à vous présenter le contenu
de la présente newsletter.
Ainsi, vous trouverez en premier
lieu les interviews de Messieurs
Jean-Philippe Pierroz et Alain
Magnenat, conférenciers du 26
mars 2015
Suite aux différents échanges avec
nos membres, nous nous sommes
rendus compte que certains ne
profitaient pas des avantages d’être
membres de l’AGEAS, de sorte
qu’il nous a semblé important de
vous les rappeler.
Enfin, suite au changement de
jurisprudence provoqué par l’arrêt
du Tribunal fédéral du 3 juin 2015,
l’AGEAS ne pouvait manquer de
vous informer du contenu et des
suites de cet arrêt.
Excellente lecture !
Marie-Josée Costa
Interview de Monsieur
Jean-Philippe Pierroz
- Votre parcours professionnel ?
Après une maturité type C au
collège de Saint-Maurice en 1979,
Monsieur Pierroz a enseigné à
l’école de ski de Verbier durant 4
saisons 1981-1985. Puis il a suivi
des études de droit à l’Université de
Genève.
Il a par la suite travaillé à la
Vaudoise Assurance, d’abord à
Genève puis au siège à Lausanne
de 1990 à mars 2005.
Depuis lors, il a rejoint le Groupe
Mutuel Assurances GMA SA.
- Quels sont les éléments les
plus intéressants de votre travail
dans le cadre de l’accord
paritaire ?
Le fait de pouvoir concrètement
discuter de mesures qui
permettront à un assuré de se
réinsérer dans le monde du travail,
ou en tout cas de lui donner les
moyens pour y arriver. Cela est
rendu possible par la table ronde
tous les partenaires se
retrouvent pour discuter des
dossiers, et surtout par le fait que
les participants peuvent prendre
des décisions sans devoir en
référer à leur hiérarchie respective.
- Votre vertu préférée ?
La sincérité.
- Votre devise ?
De chaque expérience de la vie,
heureuse ou malheureuse, il y a un
point positif à en retirer.
Jean-Philippe Pierroz
Interview de Monsieur
Alain Magnenat
- Votre parcours professionnel ?
Après plusieurs emplois «alimen-
taires», notamment dans la vente,
en parallèle de mes études
universitaires, j’ai débuté en 2004 à
l’Office AI comme gestionnaire de
dossier. J’ai évolué ensuite comme
Conseiller en adaptation
professionnelles en 2007 à la veille
de l’entrée en vigueur de la 5ème
révision de la loi sur l’assurance-
invalidité.
- Quels sont les éléments les
plus intéressants de votre travail
dans le cadre de l’accord
paritaire ?
Les échanges dans le cadre des
travaux de la cellule d’analyse sont
toujours francs et ouverts. Les
connaissances de chacun sur les
tiers, les entreprises, les
assurances et l’environnement
socio-professionnel rendent les
discussions particulièrement
intéressantes et pointues. Ce haut
niveau permet d’avoir des
informations précises pour
progresser vers notre
préoccupation constante : la
réinsertion de la personne assurée
et la continuité de leur revenu.
- Votre vertu préférée ?
La justice
SEPTEMBRE // OCTOBRE 2015
- Votre devise ?
Cela dépend des jours et de mon
humeur mais au travail c’est : « La
réadaptation plutôt que la rente ».
Alain Magnenat
Avantages des membres de
l’AGEAS
Le comité de l’AGEAS s’efforce
d’améliorer d’année en année les
avantages de ses membres.
Ainsi, en premier lieu, les membres
bénéficient de réductions impor-
tantes s’agissant des prix des
cours.
En tant que membres, vous pouvez
créer un profil sur le site de
l’AGEAS, ce qui vous permet de
rejoindre le réseau de nos
membres ainsi que de consulter les
supports de cours actualisés.
L’association LPP renseignements
est présente dans les locaux de
l’AGEAS le premier mercredi de
chaque mois de 17h30 à 19h30
pour fournir gratuitement des
renseignements en matière de
prévoyance professionnelle. Vous
trouverez les détails sur le site
internet www.lpprenseignements.ch
.
En votre qualité de membre, vous
êtes conviés à des conférences
concernant des thèmes d’actualité
en matière d’assurances sociales.
Vous recevez également nos
newsletters.
Enfin, votre qualité de membre
vous permet de créer gratuitement
un profil sur le site www.nouvjur.ch.
Il s’agit d’un site de jurisprudence
alimenté par un avocat spécialisé
dans le domaine des assurances.
Une fois inscrit, vous recevez
régulièrement une newsletter qui
résume les nouveaux arrêts
d’intérêt en matière d’assurances.
Par ailleurs, ledit site permet
également d’effectuer des
recherches de jurisprudence.
Alors, n’hésitez plus à profiter de
vos avantages.
Marie-Josée Costa
Affections
psychosomatiques :
bouleversement dans la
jurisprudence
Après plus de 10 ans de
jurisprudence constante, le Tribunal
fédéral a modifié sa position
s’agissant du trouble somatoforme
douloureux et les affections
psychosomatiques afin de prendre
en compte les développements et
les expériences recueillies durant
ces nombreuses années sur le plan
médical, en particulier la récente
expertise du Professeur
Henningsen de mai 2014.
Ce bouleversement ne s’est pas fait
un en jour, plusieurs étapes ont été
nécessaires pour arriver à cette
prise de conscience.
Sans vouloir être exhaustif, le
présent article vise humblement à
vous présenter les principales
étapes de ce revirement de
jurisprudence ainsi que les
conséquences que l’arrêt du 3 juin
2015 entraîne s’agissant de
l’examen par les assurances et les
tribunaux du caractère invalidant
des affections psychosomatiques.
De l’apparition des premiers
critères dans les années 2000
Dans le début des années 2000,
les demandes de prestations en
raison de troubles somatoformes
douloureux ou de troubles
psychosomatiques comparables
ont connu une nette augmentation.
Les tribunaux ont dès lors été
amenés à examiner les
répercussions de ces troubles du
point de vue des assurances
sociales, en particulier de
l’assurance-invalidité.
En quoi consiste un trouble
somatoforme ?
Selon la Classification statistique
internationale des maladies et des
problèmes de santé connexes, plus
connue sous l’appellation CIM-10 :
« La caractéristique essentielle des
troubles somatoformes est
l’apparition de symptômes
physiques associés à une quête
médicale insistante, persistant en
dépit de bilans négatifs répétés et
de déclarations faites par les
médecins selon lesquelles les
symptômes n'ont aucune base
organique. S'il existe un trouble
physique authentique, ce dernier ne
permet de rendre compte ni de la
nature ou de la gravité des
symptômes, ni de la détresse ou
des préoccupations du sujet ».
La simple lecture de la définition
des troubles somatoformes permet
de constater la complexité de ces
maladies.
Comme relevé par la définition, l’un
des points essentiels des troubles
somatoformes est l’absence
d’étiologie claire, ce qui explique la
difficulté des malades à faire
reconnaître leurs souffrances par
des tiers et d’autant plus par des
assureurs ou des tribunaux.
Dans ce contexte, compte tenu de
l’augmentation des cas, le Tribunal
fédéral est intervenu afin de fixer
des critères juridiques qui
permettraient de statuer sur le
caractère invalidant de ces
troubles.
Le but était de définir des critères
qui assureraient une application
uniforme et surtout l’égalité de
traitement entre les assurés.
Compte tenu des difficultés en
matière de preuve à établir
l’existence de douleurs, de par
l’essence même des troubles
somatoformes, le Tribunal fédéral a
débuté son raisonnement en
considérant que les simples
plaintes subjectives de l'assuré ne
suffisaient pas pour justifier une
invalidité. Dans le cadre de
l'examen du droit aux prestations
de l'assurance sociale, l'allégation
des douleurs devait être confirmée
par des observations médicales
concluantes, à défaut de quoi une
appréciation de ce droit aux
prestations ne pouvait être assurée
de manière conforme à l'égalité de
traitement des assurés
1
.
Il est en résulté que le fait de poser
le diagnostic de trouble somato-
forme, et ce même lors d’une
expertise, était certes cessaire
mais insuffisant pour admettre une
limitation de la capacité de travail
2
.
1
ATF 130 V 352 consid. 2.2.2.
2
ATF 130 V 353 consid. 2.2.3.
SEPTEMBRE // OCTOBRE 2015
En d’autres termes, même si le
corps médical établit l’existence
d’un trouble somatoforme, maladie
reconnue par la CIM-10, cela reste
insuffisant puisque le Tribunal
fédéral exige de l’assuré qu’il
présente des éléments objectifs.
Or, comme indiqué précédemment,
le trouble somatoforme conduit à
des symptômes qui n’ont
précisément aucune base
étiologique claire, d’où les
difficultés rencontrées par les
assurés pour faire valoir leurs droits
aux prestations.
A cela s’ajoute que le Tribunal
fédéral a établi la présomption du
caractère surmontable des troubles
psychosomatiques, considérant
que ces troubles n’étaient en
principe pas graves.
A ce stade, il sied de constater que
bien que le Tribunal fédéral ait
souhaité définir des critères afin de
garantir l’égalité de traitement, son
raisonnement a pour conséquence
de distinguer sans raison les
affections psychosomatiques,
reconnues par les classifications
internationales, des autres
maladies.
En effet, le Tribunal fédéral a
retenu que les troubles
somatoformes n'entraînaient pas,
en règle générale, une limitation de
longue durée de la capacité de
travail pouvant conduire à une
invalidité au sens de l'article 4 al. 1
LAI. Une exception à ce principe
était admise dans les seuls cas où,
selon l'estimation du médecin, les
troubles somatoformes douloureux
se manifestaient avec une telle
sévérité que, d'un point de vue
objectif, la mise en valeur de sa
capacité de travail ne pouvait,
pratiquement, - sous réserve des
cas de simulation ou d'exagération
- plus raisonnablement être exigée
de l'assuré, ou qu'elle serait même
insupportable pour la société
3
.
3
ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 sv.
consid. 2b et les références; ATF 130 V
Une fois cette présomption posée,
le Tribunal fédéral a déterminé des
critères juridiques qui selon lui
permettraient de retenir que le
trouble somatoforme était
exceptionnellement grave et
impliquait dès lors une incapacité
de travail et une invalidité.
C’est ainsi que le droit s’est
immiscé dans la médecine et que
les juristes ont pris la place des
médecins pour fixer la capacité de
travail !
En effet, bien que les médecins
aient posé le diagnostic de trouble
somatoforme conformément aux
règles de l’art et fixé l’incapacité de
travail en découlant, cette dernière
n’était reconnue par les assureurs
et les tribunaux que si les critères
développés ci-dessous étaient
remplis.
Dans son approche, le Tribunal
fédéral a considéré qu’il fallait dès
lors examiner au cas par cas la
présence des critères juridiques,
étant rappelé que c’est à la
personne assurée de prouver, au
niveau de la vraisemblance
prépondérante, l’existence d’une
atteinte à la santé qui entraîne une
invalidité (art. 8 CC).
A défaut, la personne assurée se
verrait privée de prestations.
Lesdits critères jurisprudentiels sont
les suivants :
Le Tribunal fédéral a donné la
priorité à ce qu’il a appelé le critère
de « la comorbidité psychiatrique
grave », lequel suffisait à retenir
que le trouble somatoforme était
invalidant
4
.
Ainsi, outre le diagnostic de trouble
somatoforme, l’assuré devait
également présenter une maladie
psychique grave.
352 consid. 2.2.3 et les arrêts cités; cf.
aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine.
4
VSI 2000 p. 155 consid. 2c; ATF 130 V
353 consid. 2.2.3 in fine.
Il sera toutefois précisé que les
troubles psychiques tels que les
troubles dépressifs moyens
n’étaient pas retenus comme une
« comorbidité psychiatrique
grave ».
En effet, lesdits troubles dépressifs
étaient considérés comme réaction-
nels aux douleurs et dès lors
dépendants de ces dernières, de
sorte que bien que dûment
diagnostiqués ces troubles
dépressifs n’étaient pas pris en
compte.
La réalisation du critère
« comorbidité psychiatrique » était
dès lors rarement admise.
En effet, concrètement, le critère de
« comorbidité psychiatrique » était
reconnu quand elle aurait suffi à
elle seule à justifier une incapacité
de travail.
A défaut de comorbidité
psychiatrique grave, le cas de
l’assuré devait remplir de manière
cumulative les critères suivants
5
:
- Affections corporelles chroni-
ques ou processus maladif
s’étendant sur plusieurs années
sans rémission durable ;
- Perte d'intégration sociale dans
toutes les manifestations de la
vie ;
- Etat psychique cristallisé, sans
évolution possible au plan
thérapeutique, marquant
simultanément l'échec et la
libération du processus de
résolution du conflit psychique
(profit primaire tiré de la
maladie) ;
5
VSI 2000 p. 155 consid. 2c; ATF 130 V
353 consid. 2.2.3 in fine.
SEPTEMBRE // OCTOBRE 2015
- Echec de traitements
ambulatoires ou stationnaires
conformes aux règles de l'art et
de mesures de réhabilitation,
cela en dépit de la motivation et
des efforts de la personne
assurée pour surmonter les
effets des troubles
somatoformes douloureux.
A priori, ces critères peuvent
sembler réalistes. Toutefois, la
pratique a démontré à quel point ils
aboutissaient à des situations
injustes vu l’absence de corrélation
avec le vécu des malades et la
réalité médicale.
Par exemple, en pratique, le critère
de perte d’intégration dans toutes
les manifestations de la vie
impliquait que si l’assuré avait de la
famille qui lui rendait visite ou qui
prenait soin de lui, ce critère n’était
pas rempli !
Les critères ainsi fixés par le
Tribunal fédéral ont été repris par
l’assurance-invalidité, qui les a
même intégrés dans sa circulaire
sur l’invalidité et l’impotence
6
.
Avec les années, l’abîme entre ces
critères et la réalité médicale s’est
confirmée.
Tant les médecins que les juristes
ont critiqué cette jurisprudence,
laquelle a toutefois persisté
pendant plus d’une décennie.
Du rapport d’expertise du
Professeur Henningsen de mai
2014
7
Courant 2013, INDEMNIS
8
,
Avocats des victimes d’accidents et
d’assurés privés et sociaux, a
demandé au Professeur Peter
Henningsen, éminent spécialiste et
directeur de la Clinique pour la
médecine psychosomatique et la
psychothérapie, de réaliser une
expertise visant à « fournir des
6
Ch. 1017.
7
Le rapport d’expertise du Professeur
Henningsen traduit en langue
française est disponible sur le site :
www.indemnis.ch
8
Bureaux à Aarau, Bâle, Delémont et
Genève.
réponses aux questions relevant du
rapport entre les troubles
somatoformes et les troubles
apparentés d’une part et
l’incapacité de travail et l’invalidité
d’autre part ».
A titre préalable, il sera précisé que
le rapport d’expertise de mai 2014
se base sur les critères
jurisprudentiels, sur la littérature
spécialisée et sur les expériences
recueillies par la médecine.
Le Professeur Henningsen a dès
lors examiné en détail les critères
établis par la jurisprudence fédérale
et confronté leur pertinence sur le
plan médical.
L’expertise du Professeur
Henningsen, avec sa traduction
française, est consultable sur le site
internet d’Indemnis
9
.
Le présent article se limitera à
relever les éléments essentiels.
S’agissant du critère de la
comorbidité psychiatrique, élément
crucial du raisonnement du Tribunal
fédéral, le Professeur Henningsen
relève que l’incapacité de travail
doit être appréciée par le médecin
sur la base du diagnostic : si cette
estimation est basée sur les
principes reconnus pour une
expertise médicale, il ny a aucune
raison que le tribunal remette en
cause cette appréciation
10
.
Après une analyse détaillée et
motivée, le Professeur Henningsen
met notamment en évidence qu’«en
vue d’apprécier la capaci de
travail, traiter les symptômes de
troubles physiques avec une
étiologie organique évidente
différemment des troubles ne
présentant pas de telle composante
évidente est injustifié»
11
.
Le Professeur Henningsen met
également à ant l’autre base des
critères applicables en matière de
trouble somatoforme douloureux,
soit la prétendue « présomption »
que ces troubles sont moins graves
9
www.indemnis.ch
10
Rapport d’expertise, ch. 9.1.2.
11
Rapport d’expertise, ch. 3.1.2.3.
et peuvent être surmontés avec un
effort de volonté
12
.
Il souligne ainsi que :
« La constatation que des troubles
somatoformes et des troubles
apparentés sont en moyenne moins
graves ou peuvent être surmontés
plus facilement que des troubles
dépressifs ou d’origine organique
n’est pas fondée d’un point de vue
empirique. En conclusion, cette
constatation correspond à un
préjugé obsolète qui existe en
partie dans la littérature
psychiatrique plus ancienne et chez
les psychiatres et autres médecins
cliniciens qui ne sont pas
spécialement familiers avec ce
groupe de troubles sur les plans
scientifiques et cliniques »
13
.
En effet, le Professeur Henningsen
explique que « la "présomption"
qu’il existe une différence
fondamentale entre les troubles
somatoformes et d’autres troubles
psychiques en ce qui concerne leur
degré de gravité et leur capacité à
être surmontés par un effort
raisonnablement exigible ne se
justifie pas d’un point de vue
empirique »
14
.
Le Professeur Henningsen précise
également que :
« L’utilisation d’indicateurs de degré
de gravité prédéfinis comme liste
de « critères » codifiés et fixes à
traiter n’est pas appropriée.
L’évaluation de la comorbidité
d’une dépression comme indicateur
de degré de gravité primaire et
subordonnée ne se justifie ni
empiriquement ni logiquement.
L’admission d’un indicateur
impossible à identifier et peu fiable
tel que « le profit primaire tiré de la
maladie » est insensé »
15
.
12
Rapport d’expertise, ch. 3.2.3.
13
Rapport d’expertise, ch. 3.2.3.
14
Rapport d’expertise, chapitre « IV.
Conclusions et prévisions », p. 27.
15
Rapport d’expertise, chapitre « IV.
Conclusions et prévisions », p. 27.
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