Une approche du système d`information de territoire

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prescription et le plan de soins informatisé et adopte
le logiciel CROSSWAY en remplacement de l’application
MEDIS qui ne gérait que le recueil réglementaire (PMSI :
programme de médicalisation des systèmes d’information) et la bureautique.
Dans l’attente du DMP, il décide en 2008 d’automatiser la diffusion de courriers (avis d’hospitalisation,
passage aux urgences, courriers de sortie…) de l’hôpital vers les boîtes aux lettres sécurisées des praticiens de ville. Pour ce faire, il recourt à la messagerie
sécurisée de TSA, car elle est « opérationnelle, simple
et gratuite pour les médecins de ville », avec l’utilisation de la solution ANTARES d’ENOVACOM.
La transmission via messagerie sécurisée TSA apporte
une simplification par rapport aux problématiques
lourdes à gérer dans le DMP : il n’est pas nécessaire
de disposer d’un identifiant de santé national ou régional, et la gestion des habilitations et du consentement
est facilitée du fait de communications point à point
et non vers un entrepôt de données.
Après les phases de mise au point technique et d’expérimentation avec quelques services pilotes, la généralisation de ces envois à l’intérieur de l’établissement
est en cours (extension à d’autres services de soins,
mais aussi pour l’envoi des comptes rendus d’examens
externes par exemple). Le dispositif sera naturellement amené à être revu avec la montée en charge du
DMP ou la mise en place d’un portail extranet. Toutefois, il aura permis de mettre en lumière les difficultés auxquelles de telles démarches peuvent se heurter,
notamment celle de décider qui est habilité à déclencher la transmission électronique.
Si tous les acteurs s’accordent à dire qu’une validation
médicale est nécessaire avant cet envoi, le passage
d’une validation manuscrite à une validation électronique n’est pas une opération si simple qu’il peut y
paraître. Dans un circuit papier par exemple, la secré-
Hôpital, patient, système d’information
Saint-Paul-lès-Dax
4%
Saint-Julien-en-Born
4%
Saint-Jean-de-Luz
4%
Pardies
4%
OloronSainte-Marie
4%
Villeneuve-de-Marsan
4%
Tartas
Bayonne
4%
4%
Biarritz
8%
Bizanos
4%
Capbreton
4%
Coarraze
4%
Dax
4%
Morlaas
4%
Gelos
4%
Montfort-enChalosse
4%
Mont-de-Marsan
27 %
Hendaye
4%
Lembeye
4%
Graphique 1 – [titre ?] Répartition des professionnels de santé libéraux
par commune
taire médicale édite les documents et les soumet au
médecin. Celui-ci peut les signer s’ils sont corrects ou
au contraire les annoter ou dicter directement les corrections à la secrétaire. Dans un circuit électronique,
le médecin dispose d’un tableau de bord listant les
documents en attente de validation. Il peut les visualiser un à un tout comme il le faisait avec la pile de
courriers papier et valider ceux qui sont corrects d’un
simple clic. Pour ceux qui sont erronés, selon l’ampleur
des corrections et la maîtrise du traitement de texte
par le médecin, la démarche peut être plus compliquée qu’avec le circuit papier (appel de la secrétaire
qui doit quitter son poste, impression du document
erroné pour y porter des annotations…). Des solutions
au cas par cas sont à rechercher en tenant compte du
rôle clef de la secrétaire médicale dans l’élaboration
des courriers en lui permettant de participer à la dynamique d’échange tout en veillant à garantir la qualité
des informations transmises.
„
Une approche du système d’information de territoire
JOSEPH BERTHIAU, responsable du département conseil et techniques avancées,
Syndicat interhospitalier de Bretagne, Rennes (35)
D
epuis la création des agences régionales de l’hospitalisation, l’activité de soins est en constante
réorganisation, via les schémas régionaux d’organisation sanitaire et les contrats d’objectifs et de moyens.
La loi HPST (Hôpital, patients, santé et territoires)
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apporte un cadre juridique à cette mutation, dont
l’organisation en territoires de santé et en communautés hospitalières de territoires constitue l’une des
principales orientations.
Les systèmes d’information hospitaliers doivent évo-
Dossier
Dossier
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Hôpital, patient, système d’information
luer pour permettre et faciliter la mise en place de
ces nouvelles organisations mutualisées. Deux axes au
moins sont à considérer dans ces évolutions : la continuité des soins au patient à l’intérieur du territoire de
santé, et la mutualisation de plateaux ou ressources
techniques : laboratoire, imagerie, pharmacie…
Continuité des soins au patient
Il s’agit de mettre en place un système d’information
qui suive le patient dans son parcours médical ou trajectoire de soins, à l’intérieur du territoire de santé ou
d’une communauté hospitalière. L’exemple suivant et
Schéma 1 - Continuité des soins au patient tout au long de son parcours
Lettre d'hospitalisation
Compte rendu d'hospitalisation
Médecine, chirurgie,
obstétrique
Médecin
traitant
Résultats d'examens
Prescription de soins
Ordonnance de sortie
Compte rendu
d'hospitalisation
Compte rendu
d'hospitalisation
Résultats d'examens
Ordonnance de sortie
Synthèse infirmière
Prescription de soins
Synthèse infirmière
Soins infirmiers
à domicile
Soins de suite
et de réadaptation
Schéma 2 - Mutualisation du système d’information médico-techniques ( ?)
Service médico-technique mutualisé
Demandes et prescriptions
Résultats
Facturation
Consultation dossier patient
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le schéma 1 illustrent cette trajectoire :
• le patient est adressé à l’hôpital par son médecin
traitant qui adresse à l’établissement son courrier de
demande d’hospitalisation ;
• il est ensuite pris en charge dans une unité MCO
(médecine, chirurgie, obstétrique) de l’hôpital général. À la fin du séjour, il peut être orienté vers un établissement de convalescence SSR (soins de suite et de
réadaptation). L’établissement MCO transmet alors à
l’établissement SSR et au médecin traitant les documents médicaux nécessaires à la continuité de sa prise
en charge ;
• en fin de séjour SSR, le patient rentre à son domicile et le relais est transmis au médecin traitant pour
la partie médicale et à une unité de soins infirmiers à
domicile (Siad). Ces professionnels reçoivent les documents qui permettront sa prise en charge.
Le système d’information de territoire a pour objet la
communication de ces données médicales pour une
qualité optimale des soins, dans des conditions garantissant la confidentialité des échanges et sous réserve
du consentement des patients.
Mutualisation des plateaux techniques
Deux modes de mutualisation peuvent être envisagés
pour les plateaux techniques :
• prestations d’un des établissements au bénéfice des
autres, si la réglementation le permet ;
• externalisation dans une structure tierce (groupement de coopération sanitaire par exemple), préexistante ou créée spécifiquement (Schéma 2).
Quel que soit ce mode de mutualisation, les flux d’informations à destination, en provenance ou à l’intérieur du système médico-technique sont modifiés :
• les demandes, prescriptions, résultats d’examens ou
de dispensation proviennent de, ou sont à ventiler
vers plusieurs entités ;
• l’accès aux dossiers médicaux des patients en lecture, voire en mise à jour, doit être possible depuis
une structure prestataire désormais extérieure ;
• l’empreinte administrative et comptable du système
d’information médico-technique est différente pour
fournir les éléments justificatifs d’activité (tickets
d’unités d’œuvre) en vue de la facturation des prestations. Certains plateaux techniques peuvent avoir
à gérer des patients en propre, consultants externes
clients du laboratoire ou de la pharmacie (rétrocessions), d’où la nécessité d’une gestion des patients et
de la relation avec l’assurance maladie.
Certains systèmes médico-techniques, spécifiquement
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hospitaliers, doivent donc être adaptés pour intégrer
ces contraintes introduites par l’externalisation de la
prestation.
Démarche
La mise en place d’un système d’information de territoire ou de communauté suppose que les structures
participantes aient préalablement informatisé leur
dossier médical. Elle requiert une volonté politique
forte, partagée par tous les acteurs, responsables opérationnels, directions des structures, tutelles, avec en
particulier un accord sur la prise en charge financière
de l’outil commun, en investissement et en fonctionnement. Les aspects de responsabilités transversales
doivent être clarifiés, en particulier dans les domaines
de l’identito-vigilance, de la gestion du référentiel
commun (dont les habilitations), de la responsabilité de l’information médicale « de territoire », de la
gestion d’une infrastructure technique commune et
des responsabilités médico-légales et administratives.
La qualité de la démarche de préparation sera déterminante pour le succès du projet. La phase initiale sera
faite de contacts entre les acteurs de l’ensemble du
« territoire » concerné (structures de santé et médecine de ville, le cas échéant) pour une bonne appropriation et une détermination aussi précise que possible du périmètre de la mutualisation et des modes de
coopération à mettre en place. La justesse de l’identification des cas d’usage donc des flux d’information
« métier » entre les structures est essentielle. Une cartographie de ces flux et de l’optimisation des processus de soins doit étayer ces travaux.
Approche de solution
Il apparaît aujourd’hui illusoire d’envisager la fusion
pure et simple des systèmes informatiques hospitaliers et des logiciels actuels de cabinets dans une
seule base de données des patients du territoire : les
entités juridiques, donc les activités et les ressources,
restent administrativement séparées, des différences
importantes subsistent entre le financement de l’activité libérale et celui du service public. L’offre logicielle n’existe pas.
L’approche « interopérabilité » constitue donc une
première étape, probablement durable, avant l’émergence de ces systèmes qui fusionneront les systèmes
d’information hospitaliers, les logiciels de cabinet et
le dossier médical du patient (DMP). Le socle minimal
de cette interopérabilité est constitué par :
• un référentiel partagé du territoire pour l’identifi-
Hôpital, patient, système d’information
cation des patients et des professionnels de santé.
Pour les patients, il est basé sur une charte commune
d’identification des patients (cellule d’identito-vigilance) et un identifiant commun des patients (l’identifiant national de santé, INS), éventuellement complété par un service de rapprochement des identités ;
pour les professionnels, il sera constitué d’un annuaire
partagé des professionnels et des structures exerçant
dans le territoire ;
• une infrastructure d’échanges ou de partage composée d’une messagerie sécurisée (par exemple : la
messagerie régionale sécurisée quand elle existe),
le moment venu du DMP (usages à préciser) et d’un
réseau sécurisé de télécommunications.
En fonction des usages professionnels, ce socle minimal pourra s’enrichir de services complémentaires
qui contribueront à une meilleure prise en charge du
patient, par exemple :
• un portail commun de territoire, fédérateur des
accès au système d’information du territoire, y compris pour la médecine de ville. Ce portail peut garantir
l’authentification des acteurs, grâce à la carte de professionnel de santé (CPS) et à l’annuaire. Il peut également donner une vision commune de la trajectoire
(historique), voire du dossier du patient. Il peut être
vital de savoir, lors de son admission aux urgences,
que le patient possède un dossier médical à la clinique voisine ;
• un service de documents médicaux partagés permettant un travail médical collaboratif ;
• un intranet collaboratif pour le partage des protocoles ou de la documentation ;
• etc.
Évolution des systèmes d’information
hospitaliers
Pour accompagner et « supporter » cette nouvelle
organisation des soins, les systèmes d’information
hospitaliers devront évoluer selon les axes suivants :
• s’ouvrir sur les acteurs externes et la sécurisation :
aptitude à l’échange du logiciel de dossier médical,
possibilité d’accès au dossier par des prestataires
médico-techniques externes, signature électronique
des documents échangés ou partagés, réseau sécurisé de territoire… ;
• prendre en compte les référentiels communs : identification des patients (INS), annuaire des professionnels, format des documents échangés, nomenclatures… ;
• privilégier les standards : identités patients (IHE
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Dossier
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Hôpital, patient, système d’information
- Integrating the Healthcare Enterprise), identification des professionnels (recommandations du Groupement pour la modernisation du SIH [GMSIH] sur
les annuaires d’établissements de santé, le répertoire
partagé des professionnels de santé [RPPS]), échange
et partage de documents (cadre d’interopérabilité de
l’Agence des systèmes d’information partagés de santé
[Asip]) ;
• adapter les systèmes d’information des plateaux
techniques (multi-entités « clientes », demandes,
prescriptions, résultats provenant de ou à ventiler vers
plusieurs entités, gestion économique et financière,
plan comptable, calcul d’unités d’œuvre spécifiques,
gestion « administrative » des patients).
Accompagnement du projet de système
d’information de territoire
En raison du caractère supra hospitalier de ces projets, leur gouvernance pourra être sensible. C’est pourquoi le recours à une assistance à maîtrise d’ouvrage
paraît indispensable pour cadrer le projet, cartographier le nouveau système d’information, conduire ou
coordonner les études sur la sécurité et les réseaux,
TH 721 - MAI-JUIN 2010
organiser le projet de mise en place et accompagner
la conduite du changement lors du déploiement. En
l’état de l’art, la solution fera généralement appel à
plusieurs composants logiciels qu’il convient d’intégrer, sous la direction d’une maîtrise d’œuvre. L’exploitation de cette plateforme d’interopérabilité ainsi
constituée pourra être infogérée par un prestataire ou
par un des établissements, sous réserve d’une définition claire des ressources et responsabilités associées.
La qualité de cet accompagnement du projet en sera
un des facteurs clés de succès.
ÂIl convient de préciser que l’approche développée
ici résulte de réflexions qui attendent d’être concrétisées par des réalisations effectives. Elle est cependant confortée par l’expérience des plateformes régionales de santé dont elle partage certains outils. Au
regard d’un projet médical commun, elle peut sembler modeste dans son niveau d’intégration. Mais elle
tente de répondre avec réalisme aux besoins d’accompagnement et d’évaluation des premières expériences
de coopération médicale de territoire.
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